Du Frère René Stockman (Docteur en Soins de Santé) sur le site de l'Association des médecins belges Saint-Luc (texte en néerlandais traduit par nos soins) :
Pétition Euthanasie dans la démence: un loup en peau de mouton
Apparemment, nous sommes entrés dans un nouvel épisode du "débat sur l'euthanasie". Juste avant les élections, le Dr Distelmans lance une pétition dans laquelle il demande que la loi sur l'euthanasie soit modifiée et élargie pour les personnes atteintes de démence et d'autres formes de handicap irréversible et qui auraient manifesté antérieurement leur volonté dans ce sens.
Frère René Stockman,
Supérieur général des Frères de la Charité
Avec son plaidoyer, il touche naturellement une corde sensible et quand on lit le texte, on est porté à la fois vers la compassion et l'indignation. Qui n'est pas touché par la souffrance des personnes atteintes de démence, qui perdent lentement mais sûrement le contrôle de leur propre vie pour se retrouver dans une existence totalement en dehors de la réalité? Et en raison du sentiment d'impuissance que cela provoque chez les membres de la famille proche? Personne ne peut nier que la démence est une souffrance grave et, d’après le texte, d’ici 2035, 50% de personnes atteintes de démence s'y ajouteraient en plus à l’avenir. Il est donc grand temps d'agir. Et quelle action est proposée? La réponse donnée dans la pétition est double mais en même temps ambiguë: d'un côté, il faut fournir des installations plus nombreuses et de meilleure qualité pour délivrer des soins adéquats aux personnes atteintes de démence, mais d'autre part, une réglementation légale doit être prévue pour les soulager de cette souffrance par une injection. Cela ne signifie-t-il pas que cette dernière solution est beaucoup plus confortable et moins chère? Lorsque les personnes atteintes de démence précoce et les membres de leur famille lisent ceci, il est presque impossible qu'ils ne se sentent pas coupables s'ils ne pensaient pas à l'euthanasie afin de supprimer le fardeau qu'entraîne leur maladie pour la communauté. L'euthanasie est érigée ici en sommet de la philanthropie et ce, d'un double point de vue: la personne en question ne veut pas être un fardeau pour la communauté et la communauté soulage la personne atteinte de démence de souffrances sévères. Existe-t-il une meilleure alternative disponible? La personne concernée ne veut pas être un fardeau pour la communauté et la communauté soulage la personne atteinte de démence de souffrances graves.
Comme souvent, c'est dans la queue qu'est le venin. Les statistiques estiment que 83% de la population, constituant une écrasante majorité selon l'auteur, est favorable à une modification de la loi. Ce sont les résultats préliminaires d'un "test électoral" réalisé dans les médias. Quelle est la valeur scientifique de cette enquête et avec quelles informations de base a priori les personnes ont-elles effectué ce test? Pendant des années, certains groupes ont eu recours à la tactique qui consiste à influencer la vision des gens en suscitant compassion et indignation. Les arguments ne marchent presque pas aujourd'hui, mais les émotions, oui. Une fois qu'un consensus émotionnel est réalisé, il n’ya plus guère de place pour écouter les arguments. Et cela se manifeste avec force ici. En indiquant ces chiffres, un sentiment de culpabilité supplémentaire est ajouté pour ceux qui pensent différemment. À quel degré faut-il être antisocial pour faire partie des 17% qui ne soutiennent pas encore le droit d’étendre la législation sur l’euthanasie? Non seulement antisocial mais aussi très impitoyable. Refuser l'euthanasie est décrit ici comme la volonté de maintenir consciemment et volontairement des situations dégradantes. Personne ne peut accepter ça. Avec les vidéos supplémentaires liées à la pétition, l’émotion devient totale. On doit retenir sa main pour ne pas signer la pétition immédiatement. On peut parler de marketing réussi.