D'Andrea Mariotto sur le site de la Nuova Bussola Quotidiana :
Hadjadj, un prix qui rappelle la mission du christianisme
3-11-2021
Fabrice Hadjadj a reçu le prix international de la culture catholique. Dans la conférence qu'il a donnée pour l'occasion, le philosophe français a expliqué que la Révélation chrétienne "n'est pas au même niveau que les cultures", car "elle est ce qui permet à toute culture de grandir". Mais aujourd'hui, nous assistons à un nouveau paradigme délétère, technocratique, et le christianisme a une nouvelle "mission de salut".
"En devenant chrétien, je deviens le contemporain de Moïse, Paul, Augustin, Thomas d'Aquin, Dante, Manzoni, mais aussi de Sophocle, Aristote, Virgile qui préparent l'Évangile. Je sais que, fondamentalement, les questions que Shakespeare ou Goldoni posent sont toujours valables pour moi". Même les écrits de Marx et de Nietzsche "n'auront de postérité que dans l'Église, parce que les catholiques s'intéresseront encore à leurs écrits, quand les adeptes de l'algorithme, de l'animalisme ou du fondamentalisme les auront abandonnés depuis longtemps". C'est l'un des passages de la conclusion de la conférence que le philosophe français Fabrice Hadjadj a donnée vendredi 29 octobre à Bassano del Grappa pour recevoir le 39e Prix international de la culture catholique. Une conférence dans laquelle, outre la culture, le lauréat a abordé un autre thème qui lui est cher, celui du transhumanisme et de la relation entre l'homme et la technologie.
Quant à la culture, a-t-il expliqué, il est nécessaire d'avoir une approche d'agriculteur, étant donné que "le mot renvoie avant tout à une relation avec la terre". Il faut de la patience et de la conscience : "L'homme n'est pas celui qui initie ni celui qui contrôle entièrement l'œuvre. L'œuvre procède d'un don initial, celui de la graine". Ainsi, l'homme de culture, quel qu'il soit, "reconnaît toujours le don initial de la matière et de l'inspiration et sait que sa propre main est à la merci de l'arthrite". Dans ce contexte, la Révélation chrétienne occupe une place particulière. "Le catholicisme n'est pas une culture rivale, car il ne se place pas sur le même plan que les cultures. Si l'on peut comparer les cultures à des espèces végétales, la Révélation chrétienne n'est pas une espèce plus vivante et plus belle, qui devrait remplacer les autres, comme une herbe merveilleuse plus virulente qu'une mauvaise herbe. C'est plutôt le soleil, la pluie et les cisailles du jardinier. C'est ce qui permet à chaque culture de grandir, de se purifier, de donner des fleurs plus belles et des fruits plus savoureux."
"Maintenant, je crains que nous ne soyons plus au temps de la culture", a-t-il poursuivi. " Le modèle n'est plus celui de l'agriculture, du don et des jours de faste. C'est celui de l'ordinateur, du contrôle total, et, bien sûr, comme ce contrôle produit un excès de tension, d'une perte totale de contrôle." Il n'y a plus la patience qu'exige la culture, la patience de l'homme qui plante un arbre en sachant qu'il ne sera probablement pas le seul à profiter de ses fruits, ou la patience de l'artisan qui participe à la construction d'une cathédrale en sachant qu'il ne sera pas le seul à voir l'œuvre terminée, mais ses petits-enfants. "Si le dispositif techno-émotionnel nous entraîne si facilement dans l'instantanéité et le présentisme, c'est que nous sommes sans espoir. Contrairement à l'ancien qui croyait à la transmission, contrairement au moderne qui croyait au progrès, le postmoderne ne croit plus au futur..... Il ne plante pas d'arbres. Il passe des commandes par "livraison express".