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Politique - Page 480

  • L’Eglise met en joue la Ville de Bruxelles

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    Petites manœuvres et grande confusion autour de la mise en œuvre du « cours de rien » destiné à concurrencer les cours de religion et de morale dans le réseau officiel de l’enseignement francophone de Belgique. Faut-il rappeler que ce réseau scolarise moins de la moitié des jeunes wallons et bruxellois…

    C’est dans « La Libre Belgique » :

    « Le pouvoir organisateur des écoles de la Ville de Bruxelles et son échevine Faouzia Hariche (PS) n’en ont pas fini avec l’EPA (l’encadrement pédagogique alternatif), organisé pour les enfants n’ayant pas fait le choix d’un cours de religion ou de morale.

    A la suite d’un article paru dans "La Libre" le 12 septembre dernier révélant que la Ville de Bruxelles avait demandé à ses écoles de ne pas organiser de cours de religion ou de morale avant le premier octobre, les évêques de Belgique ont déposé un courrier à la ministre de l’Education Joëlle Milquet (CDH) via Claude Gillard, président de l’instance pour le cours de religion catholique.

    Une mission d’inspection mise sur pied

    Pour rappel, la Ville a demandé aux enseignants des cours philosophiques de ne pas débuter leurs cours tant que les parents n’avaient pas effectué le choix pour leurs enfants entre un cours de religion ou de morale et un cours d’EPA - ce qu’ils devaient faire pour le 15 septembre. Elle pouvait faire autrement. D’autres écoles ont fait débuter les cours dès la rentrée en fonction du choix des années précédentes ou du choix préalablement indiqué à l’inscription.

    L’Eglise s’est inquiétée d’une telle pratique auprès de la ministre de l’Education Joëlle Milquet (CDH). Qui a aussitôt réagi. "Une mission d’inspection a bien été entamée par l’administration à la suite de ce courrier, confirme-t-on au cabinet. Elle a commencé il y a moins d’une semaine. Nous attendons les résultats."

    Pour l’Eglise, il s’agit de savoir si la Ville a bien respecté le droit des élèves comme des enseignants. "Quoi qu’il en soit, explique Tommy Scholtès, porte-parole des évêques de Belgique, une telle pratique est dans les faits inacceptable."

    Ce nouvel épisode ravive en tout cas les questions qui entourent la mise en place de cet EPA. Pratiquement - qu’y sera-t-il réellement enseigné, comment les écoles pourront-elles l’inclure dans leur programme, qui pourra l’enseigner ? Et philosophiquement - quelle est sa nécessité alors qu’existait déjà le cours de morale, cependant jugé "non neutre" par la cour constitutionnelle ? Il révèle aussi que ce nouveau "cours de rien", comme il fut surnommé, oppose toujours vigoureusement les profs de religion et de morale aux partisans d’une neutralité dure aux premiers rangs desquels se trouve le PS. 

    Ref : L’Eglise met en joue la Ville de Bruxelles

    JPSC

  • Un ambassadeur d'Arabie Saoudite à la tête du Conseil des Droits de l'Homme des Nations Unies

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    Lu sur MetroNews

    Faisal binHassan Trad, l’ambassadeur de l’Arabie Saoudite à Genève,  s’apprête à prendre la tête du panel du Conseil

    Entre janvier et mai 2015, l’Arabie Saoudite a exécuté 79 personnes. Quasiment autant que sur l’ensemble de l’année 2014. Cela n’a pas empêché l’ONU de promouvoir ce lundi la monarchie au sein du Conseil des droits de l'homme.

    Faisal bin Hassan Trad, l’ambassadeur de l’Arabie Saoudite à Genève, s’apprête en effet à prendre la tête du panel du Conseil. Un poste pour lequel il était en concurrence avec ses homologues représentant la Grèce, l'Algérie, le Chili et la Lituanie. Nommé par ses pairs, Faisal Trad obtient un rôle loin d’être seulement honorifique : "En tant que chef d'un groupe de cinq diplomates puissants, le rôle influent donnera à Mr Trad le pouvoir de sélectionner les candidats du monde entier pour plusieurs missions d'experts", rapporte le quotidien britannique The Independent.

    "Des innocents emprisonnés"

    Selon l’ONG UN Watch, la promotion de Faisal Trad était dans les tiroirs depuis le mois de juin. Le délai avant son officialisation s’expliquerait par son caractère polémique, assure l’UN Watch : "L’Arabie Saoudite détient les plus mauvais records du monde en matière de liberté religieuse, de droits des femmes, et continue à emprisonner des innocents comme le blogueur Raif Badawi."

    La femme de ce dernier n’a d’ailleurs pas manqué de réagir à la promotion de la monarchie. Depuis le Canada où elle s’est réfugiée, la jeune femme a estimé via Facebook que Riyad a désormais "le feu vert pour flageller à nouveau son mari". La sentence infligée à son mari - 50 coups de fouets hebdomadaires - a en effet été suspendue depuis plusieurs mois, grâce à la pression de la communauté internationale.

    "Décapité, puis son corps attaché à une croix"

    Une communauté internationale néanmoins discrète depuis la nomination de Faisal Trad. Ce lundi, seule la presse anglo-saxonne s'en fait l'écho. Sollicité par metronews, le Quai d'Orsay n'a pas donné suite. Interrogé vendredi à propos d’un récent rapport de l’ONU sur la peine de mort, Faisal Trad est quant à lui resté droit dans ses bottes. "Il nous semble impératif de préserver les droits des victimes au moment où des voix s’élèvent pour abroger la peine de mort au prétexte de prendre en compte les droits des coupables." En clair : les exécutions ont encore de beaux jours devant elle dans la monarchie sunnite.

    Pour preuve, celle à venir de Ali Mohammed al-Nimr. Un jeune homme de 20 ans, accusé d’appartenance à une organisation terroriste, et qui vient d’épuiser ses voies de recours devant la justice. Sa peine pourrait être appliquée ce jeudi : être "décapité, puis son corps attaché à une croix et laissé jusqu'à pourrissement".

  • Visite du pape à Cuba: les dissidents à l’écart?

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    Lu sur le site de « Famille chrétienne »( extrait)  :

    […] Les dissidents semblent (…) pour l’heure, à l’écart. En tout cas dans la communication officielle, parfaitement maîtrisée, du régime castriste. Pour autant, si une rencontre « devant les caméras » semble exclue, il n’est pas sûr que les dissidents soient tenus à l’écart, en tout cas certainement pas du fait du Saint-Siège. La jolie et calme nonciature du quartier Miramar, sur les hauteurs de La Havane, non loin de laquelle marchent chaque dimanche les Dames Blanches pour demander la libération des prisonniers politiques, peut accueillir des dîners aux nombreux couverts ou de simples rencontres informelles.

    Et l’Église a proposé au moins à deux reprises – samedi à la nonciature et dimanche après la messe – à différents dissidents de venir saluer le pape François, tandis que la police cubaine arrêtait bon nombre d’entre eux. Un opposant au régime a également pu s’approcher de la papamobile et parler au pape, jusqu’à être ceinturé par le « service d’ordre » cubain. Ce qui est sûr, c’est que l’Église ne semble pas vouloir médiatiser une rencontre avec des groupes de dissidents. Car elle sait que le moindre écart, la moindre action perçue comme provocation par l’État totalitaire cubain pourrait anéantir des années d’un patient travail mené par l’Église cubaine pour obtenir de pouvoir exercer librement son ministère. Et, de fait, dans les circonstances actuelles, l’Église cubaine mise davantage sur la révolution de l’Évangile dans les cœurs que sur la chute du régime.

    La stratégie du pape semble être celle de l’Église cubaine

    En fait, cette première étape du voyage du pape à Cuba (la 2e commence à Holguin, la 3e aura lieu à Santiago et au sanctuaire del Cobre) semble révéler le fait que la stratégie du pape est à peu de chose près celle de l’Église institutionnelle cubaine. Celle-ci « dialogue » avec l’État cubain, grappillant mois après mois de petits espaces de liberté, tout en montrant ostensiblement qu’elle « n’a rien contre » la dissidence et en critiquant sourdement le régime.

    Ainsi le pape a-t-il discrètement salué, à son arrivée à l’aéroport de La Havane, « toutes ces personnes que, pour divers motifs, je ne pourrai pas rencontrer ». De même a-t-il consacré toute l’homélie de sa messe dite place de la Révolution au sens chrétien du service, dénonçant « la tentation du ‘‘service’’ qui ‘‘se’’ sert des autres »« Le service n’est jamais idéologique, a-t-il également souligné, puisqu’il ne sert pas des idées, mais des personnes. » Dans un univers où délateurs, petits chefs et hauts dirigeants se rejoignent dans une même oppression au prétexte de servir le parti et l’idéologie, ces paroles ont dû faire mouche.

    L’imprévu sera-t-il au rendez-vous ?

    Reste que si le pape ne fait aucun geste public, ou n’a aucune parole plus ferme sur le régime castriste, cela pourrait jeter le trouble chez la part non négligeable de la population cubaine qui n’a qu’un seul désir : en finir avec la lignée castriste et la dictature du parti unique. Et conforter l’idée, répandue chez les dissidents cubains restés sur l’île, que l’Église catholique est en fait « vendue » au régime.

    À cet égard, une lueur d’espoir réside dans l’observation de la méthode souvent adoptée par le pape jésuite : mettre en confiance, d’abord, par une attitude cordiale et des paroles de sincère bienveillance. Puis frapper les esprits par un geste fort, explicite, visible, plus difficile à critiquer qu’un discours, au moment où personne ne l’attend plus. Le pape François choisira-t-il Holguin, ville où réside le successeur d’Oswaldo Paya (meneur chrétien de la dissidence mort dans des conditions très suspectes en 2012) à la tête du Mouvement chrétien de libération, pour poser ce geste ?

    Jean-Marie Dumont »

    Tout l'article, ici  Cuba : le pape n’a pas dit son dernier mot

    JPSC

  • Le pape François rend un hommage chaleureux à Fidel Castro

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    De Jean-Marie Guénois  dans le « Figaro » de ce jour :

    « À peine le pape François a-t-il posé, samedi soir (22 heures européenne) le pied sur l'île de Cuba qu'il a tenu à rendre hommage à Fidel Castro. A Raul, le frère qui l'accueillait en tant que président, il a demandé - dès les premiers mots de son discours - de «transmettre mes sentiments de spécial considération et de respect à votre frère Fidel». Comme Jean-Paul II le fit en 1998 et Benoît XVI en 2012, le pape argentin devrait rencontrer, à titre privé, ce dimanche, cette figure historique de l'aventure Cubaine, aujourd'hui âgée de 89 ans.

    En attendant, la première journée du dixième voyage de François hors d'Italie, dimanche, est dense. Avant de rencontrer les jeunes cubains, en fin d'après- midi (il sera 1h30 du matin heure de Paris quand le pape ira se coucher) François priera les vêpres dans la magnifique cathédrale baroque de la vieille ville de Cuba, construite par des Jésuites en 1748 et adressera aux prêtres, religieux et religieuses, une méditation attendue, en particulier sur la liberté de religion.

    Dans son discours d'arrivée, samedi soir, François a certes noté les «liens de coopérations et d'amitié» aujourd'hui entretenus entre l'Eglise et le gouvernement qu'il rencontre ce dimanche après-midi au Palais de la Révolution mais il a demandé un «renouvellement» de cette coopération «pour accompagner et encourager le peuple cubain» dans «ses préoccupations» mais avec «la liberté, les moyens, les espaces nécessaires pour que l'annonce du Royaume [donc l'annonce de l'Evangile , ndlr.] puisse atteindre les périphéries existentielles de la société.»

    Une façon pour François de demander davantage de liberté religieuse - même si l'étau marxiste se desserre sur ce plan au fil des années - et de pointer la misère humaine qui gangrène cette île avec une explosion de la prostitution qui permet à beaucoup de… familles de survivre. Le salaire moyen oscille entre 15 et 20 euros, l'accès à la viande et aux meilleurs fruits de mer, est réservé au tourisme, dont l'industrie et les revenus sont dans les seules mains du régime même si la libéralisation toute relative et récente de l'économie, permet une amère subsistance du petit peuple.

    François, jusqu'à mardi où il quittera Cuba pour se rendre aux Etats-Unis, aura donc l'occasion de revenir sur cette question sociale, l'un de ses chevaux de bataille, en particulier à Holguin et à Santiago au sud est de l'île où il ira mardi pour prier devant la célèbre «Vierge du cuivre», sainte patronne du pays. Citant José Marti dans son discours d'arrivée - poète et journaliste cubain (1853-1895) chantre de lutte de libération de l'île contre les Espagnols, mort au combat - François a insisté sur «la vocation naturelle» de Cuba qu'il voit comme une «clé» géographique et géopolitique dans la région et surtout comme un «point de rencontre où tous les peuples se retrouvent dans l'amitié».

    «Le monde est assoiffé de paix»

    Avant de célébrer, ce dimanche matin sur la grande place de la Révolution «José Marti» au cœur de La Havane, une immense messe en plein air, le pape a donc pu, en conclusion de son mot d'arrivée, se féliciter «d'un événement qui nous remplit d'Espérance: le processus de normalisation des relations entre deux peuples, après des années d'éloignement». En l'occurrence, Cuba et les Etats-Unis, une réconciliation où il a joué un rôle dans la toute dernière phase.

    «C'est un signe!» a lancé le pape. «Il montre que la culture de la rencontre, du dialogue» marqueur de son propre pontificat «prévaut sur le ‘système de dynastie mort pour toujours'», il citait à nouveau ici le révolutionnaire Marti.

    De ce rapprochement entre les deux ennemis d'hier, le pape François veut donc faire, lors de ce voyage qui va le conduire aussi aux Etats-Unis «un exemple de réconciliation pour le monde entier» encourageant tous les responsables à travailler selon cette méthode qui a un haut «potentiel» assure-t-il, «pour la paix et le bien être des peuples».

    Car «le monde est assoiffé de paix» a lancé François, légèrement amaigri mais bien reposé, comme un cri du cœur. C'était dans l'avion, devant les journalistes, lors du trajet entre Rome et La Havane. Il leur a fait part d'une forte «émotion»: il a raconté qu'en quittant le Saint-Siège, samedi matin, il a pu saluer la famille de «réfugiés Syriens» qui vient d'être accueillie dans un appartement du Vatican. «On voyait leur visage de douleur» a confié le pape. «Il faut donc construire des petits ponts de paix, les uns après les autres» pour réussir à «construire le grand pont de la paix» contre «la guerre» qui sème «la mort» et provoque cette «vague migratoire».

    Improvisant pour finir François a repris le thème de la Troisième Guerre mondiale: «Le monde nécessite une réconciliation dans cette troisième guerre mondiale que nous vivons pas étape». 

    Ref. Le pape François rend un hommage chaleureux à Fidel Castro

    Le président actuel de Cuba, Raul Castro, n'a pas manqué de renvoyer l'ascenseur au pape François en évoquant l’importance de la contribution du Saint-Père aux objectifs des deux grandes rencontres internationales à venir : l’Assemblée des Nations Unies sur le développement durable post-2015, la semaine prochaine, et la conférence de Paris sur le changement climatique, en fin d’année.

    JPSC

  • Migrants : le pape François fait preuve d’un réalisme inattendu

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    42f52940f2005cf4c8b1182df33b45689d9343b3.jpgLa menace terroriste que les vagues migratoires actuelles font peser sur l’Europe ne fait aucun doute selon le Saint-Père qui a reconnu le danger potentiel d’une infiltration par des terroristes de l’EI. Lu sur le site « aleteia » : 

     « Je dois reconnaître que, de nos jours, les conditions de sécurité aux frontières ne sont plus les mêmes qu’autrefois. La vérité c’est qu’à moins de 400 kilomètres des côtes siciliennes sévit un groupe terroriste incroyablement cruel. Donc, les risques d’une infiltration existent. » Taxé un peu rapidement d’angélisme, le pape François a fait preuve d’un réalisme inattendu au cours d’une interview exclusive accordée à la radio portugaise Renascença : « Personne n’a dit que Rome serait à l’abri de cette menace ».

    Néanmoins, le Saint-Père a tenu à réaffirmer la primauté de l’accueil spontané sur la méfiance même légitime : « Si un réfugié arrive, malgré toutes les précautions de sécurité à prendre, nous devons lui souhaiter la bienvenue, parce qu’il s’agit d’un commandement biblique ». Mais, se référant à la « très grande crise du travail » sévissant en Europe, le pape François met en garde contre tout « simplisme » dans la façon de traiter les migrants et demandeurs d’asile.

    Appel aux communautés catholiques

    François a ensuite renouvelé son appel aux institutions catholiques à prendre en charge des familles de réfugiés : « Chaque paroisse, chaque institut religieux et chaque monastère, devrait prendre dans une famille. Une famille, pas une personne seule. Une famille donne plus de garanties de sécurité et de confinement, pour éviter les infiltrations d’un autre genre ».

    Précisant sa pensée, François a poursuivi : « Quand je dis que la paroisse doit accueillir une famille, je ne veux pas dire qu’ils doivent aller vivre dans la maison du prêtre au presbytère, mais que chaque communauté paroissiale doit trouver un endroit, un coin pouvait être transformé en petit appartement ou bien, si nécessaire, elle peut louer un petit appartement pour cette famille. [Les migrants] doivent être munis d’un toit, accueillis et intégrés dans la communauté… Il y a des couvents qui sont presque vides ! ».

    Avec le Catholic Herald

    Ref. Le pape François met en garde contre les terroristes infiltrés parmi les réfugiés

    JPSC

     

  • Face aux migrants, quelle doit être l’attitude des chrétiens ? Dialogue entre Mgr Rey et Rémi Brague

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    monseigneur-rey-eveque-de-frejus-toulon-et-remi-brague_article.jpgLa crise des migrants que connaît l’Europe renvoie les chrétiens aux racines bibliques de leur foi et à la construction même de l’Occident. Pour sortir du débat actuel par le haut, la foi et l’annonce leur seront d’une précieuse aide. Regards croisés de Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, et du philosophe Rémi Brague. Un article de Samuel Pruvot dans « Famille chrétienne » :

    Mgr Dominique Rey : Quand on voit ces barques fragiles ballottées par les vagues de la Méditerranée, comment ne pas penser aux origines du peuple de Dieu ? L’histoire du salut est façonnée par l’exil. Adam et Ève ont été chassés de l’Éden. Abraham quitta Ur pour se rendre à Canaan sur une route semée d’arrêts, d’embûches et d’épreuves. Le destin d’Israël est marqué par l’exil de tout un peuple à Babylone et en Égypte. Dans la douleur, les Juifs entretiennent le souvenir heureux de Jérusalem : « Au bord des fleuves de Babylone, nous étions assis et nous pleurions, en nous souvenant de Sion » (ps 137). C’est la Terre promise qui met en marche le peuple d’Israël.

    À nous chrétiens, il rappelle qu’à l’image de Jésus-Christ qui prêchait la Bonne Nouvelle de ville en ville, nous cheminons sur terre vers le Ciel. Notre vie nomade est un pèlerinage terrestre qui s’achèvera pour retrouver le Créateur. En marchant, nous nous déracinons pour mieux nous enraciner en Dieu. Nous marchons avec Dieu, vers Dieu. C’est à tout cela que font écho les cohortes de réfugiés qui quittent le Proche-Orient pour gagner l’Europe.

    Rémi Brague : La Bible rappelle effectivement au peuple installé sur sa terre qu’il fut lui aussi nomade. En conséquence, il devra comprendre ce qu’éprouve un étranger coupé de son sol et forcé à vivre dans un milieu nouveau. C’est pourquoi le souvenir de la captivité en Égypte est sans cesse ravivé.

    Ceci dit, la Bible éclaire notre expérience actuelle, mais c’est indirectement. Ne faisons pas comme les fondamentalistes musulmans ou protestants du « Bible Belt » américain. On ne peut pas appliquer tels quels aux Français les préceptes de la Bible. Nous ne sommes pas le peuple élu. Nous ne sommes rien de plus qu’une « nation du monde », dont certains membres sont baptisés, et de la sorte greffés sur Israël, qui est et reste le seul peuple élu. Parmi les baptisés, un certain nombre prend au sérieux les conséquences de son baptême. Cette nation s’est formée en une entité politique sous l’autorité d’un État qui prend en charge tous les citoyens, chrétiens ou non.

    La naissance de l’Occident chrétien n’est-elle pas le fruit de vagues successives de migrants qui ont trouvé une nouvelle identité via l’Église ?

    Rémi Brague : À partir du IIIe siècle, l’Empire romain a laissé entrer, d’abord avec l’accord des autorités, puis malgré elles, des populations venues de l’Est, de ce qu’on appelait alors la Germanie. C’est ce qu’on appelle, d’un terme péjoratif, les « invasions barbares ». Les historiens ont actuellement tendance à réviser à la baisse les estimations sur le nombre de ces nouveaux venus. Il n’y a jamais eu de submersion.

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  • Moyen-Orient : le salut viendra-t-il de la Russie ?

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    223046vladimir.jpgPour le site « aleteia », Olivier Hanne, islamologue, professeur aux Écoles militaires de Saint-Cyr Coëtquidan, décrypte en exclusivité pour Aleteia la ligne géopolitique de Vladimir Poutine :

    « Dans l’imbroglio qui a permis, en 2013-2014, l’essor de l’État islamique, la Russie de Vladimir Poutine est l’un des rares pays à avoir toujours maintenu sa ligne géopolitique, qui se résume à deux principes : Bachar el-Assad représente le gouvernement légitime de Syrie ; la seule réponse au terrorisme est la force. En Syrie, les Russes avaient averti dès 2011 les Occidentaux de ne pas armer les « rebelles modérés ». Refroidis par le précédent libyen, qui s’est terminé de façon catastrophique pour la sécurité de l’Afrique, les Russes ont empêché en 2013 à l’Onu la France et les États-Unis d’obtenir l’autorisation de bombarder le régime syrien.

    La collaboration active entre Moscou et Damas remonte à la Guerre froide, lorsque Hafez el-Assad, père du Président actuel, s’était rangé aux côtés des Soviétiques contre Israël et les États-Unis. Ces liens étroits, particulièrement dans le domaine militaire et économique, n’ont jamais été démentis. Au contraire, les Syriens ont même ouvert à la flotte russe le port de Tartous. Plus récemment, la Russie a équipé la Syrie en batteries anti-aériennes, en chars et en missiles sol-air, qui empêchent tout déploiement aérien de la coalition contre le régime. La présence des forces spéciales russes en Irak et en Syrie est un fait avéré depuis plusieurs mois. Dès les années 1960-1970, des conseillers militaires russes intervenaient auprès de l’armée syrienne, et notamment avec les supplétifs bédouins, si bien que dans de nombreux villages du désert syrien des femmes russes ont épousé des locaux.

    Comment expliquer l’engagement accru de la Russie en faveur d’Assad ? La lutte russe contre le terrorisme se justifie par les nombreux attentats survenus dans la Fédération depuis les deux guerres en Tchétchénie (1994-1996 et 1999-2000). De petits émirats djihadistes se sont constitués dans la région du Caucase et menaceraient le pays. Ces organisations seraient fédérées dans un émirat du Caucase, responsable des attentats du métro et de l’aéroport Domodedovo de Moscou. Plusieurs centaines de Caucasiens se battent depuis 2013 comme djihadistes de Daesh. En  septembre 2014, une vidéo tournée depuis la base aérienne de Taqba, en Syrie, appelait à la « libération du Caucase et la promotion du djihad ». Les images mettaient en évidence la prise de matériels russes livrés à Bachar. On ne peut s’empêcher de penser que Vladimir Poutine marche sur les traces du tsar Alexandre II, qui vint en aide aux chrétiens bulgares opprimés par l’Empire ottoman en déclenchant la guerre contre la Sublime Porte (1877-1878). Le rêve d’une Russie protectrice des chrétiens en terre d’islam n’est peut-être pas mort…

    Enfin, Moscou, qui ne croit pas à une action aérienne sans appui terrestre, continue de soutenir une seule solution : le retour en grâce de Bachar el-Assad pour faire face au djihadisme. Pour cela, la Russie a longtemps préféré l’envoi sur place de troupes sans uniforme, mi-mercenaires mi-volontaires. Au printemps, après un temps d’hésitation face aux brutalités de Bachar el-Assad (on parlait même d’un départ des diplomates russes de Syrie), Vladimir Poutine s’est fermement relancé dans le soutien au régime syrien, dont les défaites accumulées depuis avril 2015 sont devenues inquiétantes pour la survie des minorités et celle du régime. Si la forces terrestres russes deviennent significatives (au moins 10 000 hommes), la guerre contre Daesh peut se retourner. »

    Ref. Analyse. La Russie au secours de Bachar el-Assad

    JPSC

  • A propos de la crise des migrants, libres propos d’un catholique

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    A propos de la crise des migrants, libres propos d’un catholique (15 mn).https://youtu.be/pFeidwLj32Q

     

    Par Arnaud Dumouch, 8 septembre 2015. La double position de l’Eglise développée dans le Catéchisme de l’Eglise Catholique au n° 2241 1° La partie éthique qui concerne la voix de l’Eglise et que reprend, comme il le doit à sa fonction, le pape François et Mgr Harpigny : « 2241 Les nations mieux pourvues sont tenues d’accueillir autant que faire se peut l’étranger en quête de la sécurité et des ressources vitales qu’il ne peut trouver dans son pays d’origine. Les pouvoirs publics veilleront au respect du droit naturel qui place l’hôte sous la protection de ceux qui le reçoivent. » 2° La partie politique qui concerne l’autorité de César, donc du pouvoir profane : « 2241 Les autorités politiques peuvent en vue du bien commun dont ils ont la charge subordonner l’exercice du droit d’immigration à diverses conditions juridiques, notamment au respect des devoirs des migrants à l’égard du pays d’adoption. L’immigré est tenu de respecter avec reconnaissance le patrimoine matériel et spirituel de son pays d’accueil, d’obéir à ses lois et de contribuer à ses charges. » L’Europe, malade de l’hyper-mémoire des crimes d’il y a 80 ans semble incapable, malgré les nombreux signes de 2015 (attentats), d’appliquer ce deuxième aspect. Si les hommes politiques ne se reprennent pas, c’est la construction européenne dans sa totalité que les peuples balayeront par leur vote. Légitimement effrayés par le danger sur leur identité et leur paix chèrement acquise, ils partiront avec violence dans le sens inverse des idéaux de 1968. « Le peuple qui ne se souvient pas de TOUTE son histoire, se condamne à la revivre ». Pour connaître toute l’histoire, il faudrait écouter en audio le livre de Flavius Josèphe « La guerre des Juifs et des Romains » : http://eschatologie.free.fr/livres_audio.html

     

     

  • Record de conversions au christianisme de musulmans arrivant en Europe

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    Ces conversions en masse sont-elles sincères ou sont-elles une manière pour les immigrés d'augmenter leurs chances d'obtenir l'asile ? se demande le site « aleteia » :

    FCgK04nO24oRHZiEzi2mwUG9ZzA.jpg « Opportunisme ou intégration ? En plus des vagues historiques de réfugiés qui arrivent en Europe en provenance du Moyen-Orient et d’Afrique, le Vieux Continent connaît aujourd’hui une autre vague, moins médiatisée, mais qui interpelle : celle des conversions au christianisme.

    L’agence de presse internationale Associated Press (AP) s’est rendue à Berlin dans une église évangélique où « des centaines de demandeurs d’asile iraniens et afghans » font partie des fidèles de la paroisse.

    « Certes, on ne peut ignorer que cette décision améliore leurs chances d’obtenir l’asile : ils peuvent ainsi prétendre qu’ils seraient confrontés à la persécution religieuse en cas de retour dans leur pays d’origine », observe l’agence, soulignant que l’Allemagne traite les réfugiés en fonction de la gravité de la situation qui les a contraints à quitter leur patrie  : ceux qui fuient la guerre civile en Syrie, par exemple, ont davantage de chances d’obtenir l’asile.

    « La situation est plus compliquée pour les demandeurs d’asile en provenance d’Iran ou d’Afghanistan, car les conditions de vie dans ces pays sont plus stables qu’en Syrie », déclare l’AP. Au cours des dernières années, environ 40% à 50% des demandeurs issus de ces régions ont été autorisés à rester dans le pays, avec un permis de séjour temporaire pour la plupart.

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  • Une Française dans l'enfer du Goulag

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    Une française dans l'enfer du goulag
    Francine Mores

    Résumé:
    Mars 1928, Geneviève Koffmann, une adolescente de mère française et de père russe, part avec sa mère et sa sœur ainée en URSS afin de rejoindre son père.
    Mais elles n’y découvriront pas le paradis espéré.
    Victime des purges staliniennes, Geneviève va être emprisonnée dans un premier temps puis déportée dans les camps de travaux forcés du Goulag.
    Geneviève y restera enfermée, dans des conditions inhumaines, en pleine Mordovie, jusqu’en 1954, un an après la mort de Staline.
    Même une fois libérée, elle devra encore rester en URSS et ne pourra regagner la France qu’en 1991.
    Avec ce récit, le seul connu d’une Française concernant ces camps de concentration communistes, nous revivons les longues heures
    d’interrogatoires, les travaux forcés, le froid, la faim, les souffrances physiques et morales infligées aux prisonniers.
    Collection Histoire
    ISBN 978-2-87466-370-3
    EAN 9782874663703
    Date de parution 28/03/2015
    Format 14 x 21,5
    Nombre de pages 136
    Prix public 12,90

    http://www.editionsjourdan.com

  • Le cri du patriarche Gregorios III : « Restez en Syrie ! »

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    Le patriarche grec-melkite catholique Gregorios III résidant à Damas s’alarme du "tsunami" de l’émigration des jeunes et leur demande de rester. Lu sur le site « aleteia », sous la plume de Sylvain Dorient :

     000_nic6276691-c2a9-louai-beshara-afp.jpg« La vague presque générale d’émigration des jeunes, en particulier de Syrie, mais aussi du Liban et d’Irak, me brise le cœur, me blesse profondément et me porte un coup fatal. Compte tenu de ce tsunami d’émigration, (…) quel avenir reste-t-il à l’Église ? Qu’adviendra-t-il de notre patrie ? Qu’adviendra-t-il de nos paroisses et de nos institutions ? » La lettre du patriarche Grégorios III parvenue à l’Aide à l’Église en détresse (AED) ne fait pas l’impasse sur les difficultés que connaissent les chrétiens d’Orient, mais leur demande avec insistance de ne pas abandonner des paroisses déjà durement touchées.

    450 000 chrétiens déplacés

    Sur 1 170 000 chrétiens qui vivaient en Syrie avant la guerre, une « estimation prudente » de l’AED compte 450 000 déplacés intérieurs ou extérieurs. Pour convaincre les chrétiens de rester, le patriarche s’appuie sur l’histoire tumultueuse des chrétiens de cette région, qui ont connu des périodes de persécutions massives sans jamais disparaître : « Nos ancêtres ont subi de grandes difficultés, mais ils ont été patients, c’est pourquoi l’Église s’est maintenue, le christianisme a perduré et le nombre de chrétiens a même augmenté après 1860 ».

    La Syrie et l’Irak, terres d’asile des chrétiens

    L’ancien président de l’AED, Didier Rance, rappelle qu’un habitant sur trois de l’Empire ottoman de 1900 était chrétien, dans son ouvrage Chrétiens du Moyen-Orient(éditions bibliothèque de l’AED). Devant la terreur turque, les chrétiens se sont réfugiés au nord de l’Irak, notamment dans la plaine de Mossoul et en Syrie. À présent que la Syrie et l’Irak ne sont plus des refuges sûrs, certains tentent de revenir en Turquie, où il ne restait presque aucun chrétien (Aleteia). Beaucoup songent à émigrer en Occident, accablés par la succession de malheurs qui frappent leur peuple. Un mouvement facile à comprendre, mais fatal à leur identité.

    C’est l’âme des chrétiens d’Orient qui est en jeu

    Or, l’émigration met gravement en danger leur culture. D’abord parce que leurs édifices et leurs livres sont promis aux autodafés des islamistes radicaux (Aleteia). Ensuite parce que l’émigration s’accompagne le plus souvent de la dispersion des familles au sens large, et ce sont elles qui structurent la société. Didier Rance explique que pour ces chrétiens « la famille restreinte n’existe pas. Quand un chrétien parle de sa famille, c’est toujours de la famille élargie, de la parenté qu’il s’agit ». C’est par elle que se transmet le respect de la tradition, des « anciens », ces personnes âgées qui sont tenues pour des piliers de sagesse et de protection. Ils sont tenus pour indispensable. Un proverbe libanais dit : « Que celui qui n’a pas un ‘ancien’ s’en achète un ».

    Le clergé en première ligne contre l’émigration

    Les clergés irakiens et syriens sont les premiers opposants au mouvement d’émigration de leurs paroissiens. Ils sont souvent les derniers à partir, comme le père Pius Affas, à Mossoul, ou le père Yeghiche Elias Janji, à Alep. Ils tentent par tous les moyens de maintenir la vie de leur paroisse. Ils sont aussi les premiers à revenir : à Maaloula, ville syrienne conquise par les djihadistes puis reconquise par l’armée syrienne, les chrétiens exilés ont attendu que leurs prêtres réintègrent leur ville pour s’y réinstaller à leur tour. »

    Ref. Le cri du patriarche Gregorios III : « Restez en Syrie ! »

    JPSC

  • Crise migratoire : justice et charité sont indissociables

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    HNoyQ.jpgDans un communiqué en date du 10 septembre 2015, Monseigneur Marc Aillet, évêque de Bayonne, Lescar et Oloron, aborde la question de la crise migratoire sous le prisme de la justice et de la charité, deux vertus indissociables. Une réflexion lue sur le site de son diocèse mais a une vocation emblématique  pour nous tous : 

    1. L’appel du Pape François :

    Après la prière de l’Angélus du dimanche 6 septembre, le Pape François a évoqué le drame « des dizaines de milliers de réfugiés fuyant la mort, à cause de la guerre et de la faim, et qui sont en marche vers une espérance de vie » ; et il a appelé les paroisses, les communautés religieuses, les monastères et les sanctuaires de toute l’Europe « à manifester l’aspect concret de l’Evangile et à accueillir une famille de réfugiés ». Il a demandé à ses frères évêques d’Europe, que dans leurs diocèses « ils soutiennent son appel, rappelant que la miséricorde est le deuxième nom de l’amour : ‘Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait’ » (Mt 25,40).

    Je sais la générosité des fidèles de mon diocèse et je veux remercier ici les familles, souvent dans le cadre de leurs paroisses, qui accueillent déjà des réfugiés en provenance d’Irak et de Syrie et manifestent ainsi une vraie solidarité concrète envers les chrétiens d’Orient persécutés pour leur foi.

    Grâce à l’annonce faite par le gouvernement français, il y a un peu plus d’un an, d’ouvrir toutes grandes les portes de notre pays à ces chrétiens et autres minorités religieuses, expulsés par l’Etat Islamique de leurs villes de Mossoul et de la plaine de Ninive, sous menace de conversion à l’Islam ou de mort, ils se sont conformés aux règles administratives en vigueur en déposant leurs demandes de visa auprès des consulats de France. Force est de constater que les visas sont délivrés par Paris au compte-gouttes et qu’il s’agit, pour les plus chanceux d’entre eux, d’un parcours du combattant des plus éprouvants. Comme j’ai pu le constater en visitant ces réfugiés à Erbil, en octobre dernier, les moyens en personnels mis à la disposition des Consulats pour traiter ces dossiers manquent souvent cruellement, malgré la très bonne volonté des consuls et de leurs collaborateurs. Beaucoup de ceux qui répondent aux critères retenus – déplacement de Mossoul et de la plaine de Ninive l’an dernier et attestation d’une famille d’accueil en France – se découragent et prennent le chemin de l’exil vers le Liban, la Jordanie ou la Turquie… Aussi, qu’en est-il aujourd’hui du généreux effet d’annonce qui avait suscité tant d’espoir ?

    Tout en partageant la compassion causée par ces files de migrants jetées sur les mers et les routes, on ne peut s’empêcher de comparer le traitement concret qui est réservé aux réfugiés de Mossoul et de la plaine de Ninive, avec la volonté d’accueil universel affichée aujourd’hui à l’endroit des migrants qui forcent, souvent malgré eux, le passage !

    Dans son appel du 6 septembre, le Pape François se situe dans le registre du précepte évangélique de la charité, en se référant explicitement à la parabole du Jugement dernier : « J’avais faim et vous m’avez donné à manger, j’avais soif et vous m’avez donné à boire … j’étais un étranger et vous m’avez accueilli » (Mt 25). On reconnaît ici ce que la tradition de l’Eglise appelle les œuvres corporelles de miséricorde. Jésus n’a pas l’intention ici de promouvoir un programme politique qui s’imposerait tel quel aux Etats, mais exhorte les fidèles à l’exercice de la charité dans une situation concrète. Comme l’écrivait le Pape Benoît XVI dans son encyclique Dieu est amour : « La charité chrétienne est avant tout simplement la réponse à ce qui, dans une situation déterminée, constitue la nécessité immédiate » (n. 31). C’est que l’appel du Pape François ne saurait se réduire à une incantation in abstracto : « l’Evangile nous appelle, affirme-t-il, nous demande d’être ‘proches’ des plus petits et des laissés-pour-compte. De leur donner une espérance concrète. Leur dire « courage, patience !... » ne suffit pas » (Angelus du 6 septembre).

    On notera en effet qu’ici, le Pape ne s’adresse pas aux Etats et se garde bien de préconiser des solutions politiques au problème des migrants, comme il l’avait fait par contre en interpellant avec vivacité la Communauté internationale pour venir au secours des chrétiens et autres minorités religieuses d’Orient persécutés. Il évite de poser un jugement sur des gouvernements pris de cours par l’ampleur soudaine du problème.

    Le Pape demande aux paroisses catholiques d’Europe d’accueillir une famille de réfugiés « fuyant la mort, à cause de la guerre ou de la faim ». Dans un discours circonstancié, il ne parle pas des « migrants » en général mais des « réfugiés ». Certes il ne précise pas comment discerner s’il s’agit effectivement de réfugiés, même si son propos le suggère. Il ne dit rien non plus sur le caractère temporaire qui s’impose à un accueil concret qui nécessitera, en lien avec des organismes ad hoc, une inscription dans la durée : papiers administratifs, logement, apprentissage de la langue, travail, ce qui s’avère un nouveau parcours du combattant des plus difficiles.

    De même, l’accueil des étrangers, en particulier ceux qui ne sont pas chrétiens, ne nous dispense pas, sans prosélytisme et dans le respect de la liberté, de leur partager le trésor de la foi (cf. Règle de Saint Benoît à propos de l’hospitalité ; Instruction du Conseil pontifical pour la pastorale des migrants et des personnes en déplacement, Erga migrantes Caritas Christi, du 3 mai 2004, nn. 59-68).

    Nous ne pouvons donc pas rester insensibles à l’appel du Saint-Père et nous continuerons à accueillir les réfugiés d’Irak et de Syrie, en lien avec l’association chaldéenne de Pau. L’Oeuvre d’Orient, se tient à la disposition des diocèses, des paroisses et des familles qui souhaitent répondre positivement à l’appel du Pape pour accueillir unefamille de réfugiés (contact@oeuvre-orient.fr)

    2. Pour aller plus loin

    Il n’est pas interdit pour autant d’aller plus avant dans la réflexion et de se poser la question politique, non plus seulement de la charité, mais de la justice, en évitant de se laisser submerger par une vague d’émotion, suscitée par des images savamment diffusées par les médias au nom d’un moralisme culpabilisateur et manquant passablement de recul. D’aucuns ont souligné la différence de traitement qui a été faite entre la photo, il est vrai insupportable, du petit Aylan, qui a défrayé bien légitimement la chronique, et celle des 21 coptes égyptiens décapités par l’Etat Islamique en haine de la foi ! On ne gouverne pas avec des émotions, qui conduisent tout droit au risque du despotisme, qu’il soit celui des idées – la « pensée unique », qui peut être source de culpabilisation – ou qu’il soit celui des décisions précipitées et irréfléchies.

    L’accueil exprimé par l’Allemagne, à grands renforts de campagnes médiatiques, pour généreux qu’il soit, pourrait cacher des intentions moins altruistes qu’il n’y paraît : l’Economie-locomotive de l’Europe n’a-t-elle pas un besoin urgent de main d’œuvre pour faire fonctionner ses usines et ses entreprises, en raison du cruel déficit démographique ? Cet accueil largement relayé, pour donner un espoir légitime à tant de migrants en situation de détresse, pourrait avoir pour effet pervers d’encourager de nouveaux migrants à prendre des risques disproportionnés, en se jetant corps et âmes entre les mains de passeurs sans scrupules, qui exploitent cette vague migratoire à des fins mercantiles et parfois même de conquête idéologique inavouable.

    En corollaire de l’appel à la charité concrète faite par le Pape François, il me semble que de graves questions d’ordre politique s’imposent, pour que la vague d’émotion et l’authentique générosité suscitées par ce drame ne manquent pas d’un éclairage nécessaire.

    1. Les Etats occidentaux ne devraient-ils pas reconnaître, dans un beau geste de repentance, leurs erreurs de ces dernières années, en intervenant dans plusieurs pays et en y provoquant plus ou moins directement le chaos qui règne aujourd’hui dans ces pays (Irak, Libye, Syrie…) ?

    N’est-il est pas permis de douter de l’entière générosité des motifs avancés alors pour justifier ces interventions désastreuses : faire avancer la cause de la démocratie et des droits de l’homme, certes en s’attaquant à des Régimes forts, mais pour défendre des intérêts économiques, stratégiques, géopolitiques occidentaux, dans une région où les richesses pétrolières sont convoitées…

    2. Quels moyens sont mis en place pour lutter efficacement contre les passeurs ?

    3. Quelles résolutions de la Communauté internationale, quelle voie diplomatique sont mises en œuvre pour permettre aux migrants de demeurer chez eux ?

    Dans son message du 12 octobre 2012 pour la journée mondiale des migrants de 2013, le pape émérite Benoît XVI soulignait en effet qu'"avant même le droit d'émigrer, il faut réaffirmer le droit de ne pas émigrer, c'est-à-dire d'être en condition de demeurer sur sa propre terre, répétant avec le Bienheureux Jean-Paul II que le droit primordial de l'homme est de vivre dans sa patrie". C'est donc à juste titre que la déclaration du Conseil Permanent de la Conférence des évêques de France du 7 septembre 2015 souligne "l'importance de se préoccuper des causes de ces migrations. La communauté internationale, l'Europe, les gouvernements, ne peuvent ignorer la situation politique et économique des pays d'origine ou encore le rôle des filières qui exploitent la misère humaine".

    4. Quelle solution concrète pour secourir les chrétiens d’Orient et autres minorités religieuses, et nourrir leur espérance de recouvrer leurs maisons et leurs terres, injustement confisquées ?

    Une bonne part de la réponse à ces questions passe par la volonté de stopper l’avancée de l’Etat Islamique et de détruire cette organisation. Ce qui supposerait une coalition associant les Pays occidentaux et les pays arabes, la Russie et l’Iran, et qui ne semble pas pouvoir faire l’économie d’une opération terrestre.

    5. Enfin quelle politique mettre en œuvre en Europe pour répondre à cette vague migratoire sans précédent et qui ne saurait être déconnectée de la résolution des questions ci-dessus ?

    La Doctrine Sociale de l’Eglise ne dénie pas aux Etats la légitimité à réguler les flux migratoires au nom du Bien commun d’une nation, tout en réaffirmant le principe absolu du respect dû à la dignité de toute personne humaine.

    C'est ainsi que le Catéchisme de l'Eglise catholique affirme que "les nations mieux pourvues sont tenues d'accueillir autant que faire se peut l'étranger en quête de la sécurité et des ressources vitales qu'il ne peut trouver dans son pays d'origine" mais rappelle que "les autorités politiques peuvent en vue du bien commun dont ils ont la charge subordonner l'exercice du droit d'immigration à diverses conditions juridiques, notamment au respect des devoirs des migrants à l'égard du pays d'adoption" tout en précisant qu'en tout état de cause, "l'immigré est tenu de respecter avec reconnaissance le patrimoine matériel et spirituel de son pays d'accueil, d'obéir à ses lois et de contribuer à ses charges" (CEC n° 2241).

    Régulation des flux migratoires et accueil des réfugiés, justice et charité, ne sont pas inconciliables. Ils sont même inséparables.

    Quelle grande voix portera ces questions cruciales sans lesquelles on ne parviendra pas à endiguer les drames humanitaires et civilisationnels qui se préparent ? 

    + Marc Aillet  Évêque de Bayonne, Lescar et Oloron
    10 septembre 2015

    Ref. Crise migratoire : justice et charité sont indissociables

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