Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Idées

  • Anticatholicisme : À la découverte de quelques monstres modernes

    IMPRIMER

    De sur The Catholic Thing :

    À la découverte de quelques monstres modernes

    Samedi 6 décembre 2025

    Lorsqu'un journaliste demanda au romancier américain Walker Percy pourquoi il s'était converti au catholicisme, il répondit, avec son franc-parler légendaire : « Que faire d'autre ? » Son intelligence et son esprit analytique l'empêchaient de se montrer désinvolte. Il savait que les autres religions et philosophies, même si elles pouvaient receler des éléments de vérité et de sagesse, ne pouvaient satisfaire la soif humaine d'une vision globale qui embrasse toutes les exigences et les aléas de l'existence terrestre, et qu'elles contenaient souvent des erreurs et les germes de comportements déviants. Sans compter que certaines étaient, par nature, farouchement anti-catholiques.

    Dans son dernier ouvrage, « Monstres modernes : Les idéologues politiques et leur guerre contre l’Église catholique », George Marlin met en lumière les aspects les plus obscurs de l’anticatholicisme qui ont imprégné la pensée de cinq siècles de religieux, philosophes, militants et hommes politiques influents. Comme le titre l’indique, ce livre ne vise pas à promouvoir le dialogue œcuménique ni à jeter des ponts entre les camps opposés. Il s’agit d’une analyse clinique des maux du monde moderne, de leurs causes et, implicitement, des solutions nécessaires à leur guérison.

    S'appuyant sur une abondance de citations de sources primaires et secondaires – qui, à elles seules, justifient la lecture de cet ouvrage –, Marlin brosse des portraits saisissants de plus d'une douzaine de penseurs éminents dont les idées et l'anticatholicisme virulent ont façonné notre culture, le plus souvent à notre détriment. Qu'il écrive sur Martin Luther ou Machiavel, ou, plus près de notre époque, sur les nazis, les fascistes et les communistes, on retrouve à maintes reprises illustrés les propos du pape Pie XI dans son encyclique de 1937, Mit brennender Sorge :

    Quiconque exalte la race, le peuple, l'État, une forme particulière d'État, les dépositaires du pouvoir ou toute autre valeur fondamentale de la communauté humaine – aussi nécessaire et honorable que soit leur fonction dans les affaires du monde – quiconque les élève au-dessus de leur valeur normale et les divinise jusqu'à un niveau idolâtre déforme et pervertit un ordre du monde planifié et créé par Dieu : il est loin de la vraie foi en Dieu et des conceptions de la vie que cette foi soutient.

    L'ouvrage documente également l'assurance quasi mégalomaniaque des propagateurs de ces idées idolâtres, persuadés que leur mise en œuvre mènerait à un monde bien supérieur à celui que nous connaissons, voire à un paradis terrestre. En bref, la plupart des individus décrits par Marlin se révèlent être des utopistes qui, face à l'opposition à leur vision, se muent en totalitaires déterminés à anéantir tout ce qui entrave la réalisation de leur société idéale.

    Cela explique leur hostilité invariable envers l'Église catholique, toujours prêts à combattre la tendance des idéologues à réduire l'individu à un simple moyen ou à un rouage de la machine et, avec un réalisme parfait, à affirmer également qu'aucun individu ni groupe n'est capable de créer le paradis dans ce monde déchu.

    Du début à la fin, Marlin se heurte à ceux qui, absolument certains de leur vision d'un monde parfait, ne tolèrent aucune opposition à la mise en œuvre de leurs plans. Comment le pourraient-ils ? Ils se sont arrogé le rôle de Dieu, mais sans sa miséricorde ni son amour. Quiconque s'oppose à eux doit être éliminé par tous les moyens. Leur arrogance est stupéfiante.

    Martin Luther, qui a compris la Bible comme personne auparavant.

    Machiavel, le premier à avoir perçu la véritable nature de la politique.

    Thomas Hobbes, qui souhaitait remplacer l'Église catholique par une Église du Commonwealth fondée sur la science.

    Les idéologues des Lumières, qui avaient perçu la vérité derrière tout ce qui avait précédé, ont jeté les bases de la Terreur de la Révolution française.

    Jean-Jacques Rousseau, qui affirmait la bonté naturelle de l'homme et le mal inhérent à la civilisation.

    Les libéraux du XIXe siècle, qui pensaient que l'homme était perfectible par des moyens scientifiques et purement rationnels.

    Georg Wilhelm Friedrich Hegel, qui pensait avoir découvert le secret pour déchiffrer le code de l'histoire.

    Auguste Comte, qui prétendait fonder une nouvelle Église de l'Humanité.

    Karl Marx, qui a combiné la dialectique de Hegel avec le matérialisme de Comte, a inspiré la montée du communisme athée et le massacre de millions de personnes.

    Les fascistes européens, qui vénéraient l'État et s'étaient eux-mêmes confortablement installés à sa tête.

    Hitler et les nazis, qui vénéraient leur sang et leur race, considéraient tous les autres comme des sous-hommes et, par conséquent, comme des êtres jetables.

    Les révolutionnaires de la justice sociale du XXe siècle, qui nous ont apporté la révolution sexuelle, la théorie critique de la race et la théorie critique du genre.

    Tous infectés par un égocentrisme titanesque, sûrs de leur propre rectitude, intolérants à toute opposition ; tous parfaitement à l'aise avec l'élimination, d'une manière ou d'une autre, de ceux qui s'opposent à eux, leur fin grandiose justifiant les moyens les plus abominables.

    Le livre de George Marlin n'est pas une lecture réjouissante. Les spécialistes de l'un ou l'autre de ses sujets pourraient contester certaines de ses caractérisations et conclusions. Cependant, son thème central, l'hostilité manifeste envers le catholicisme chez ceux dont il examine la vie et la pensée, est difficilement réfutable et devrait, à tout le moins, ouvrir un débat important.

    Hélas, les woke et autres idéologues contemporains semblent peu intéressés par une telle discussion. Ils sont comme la reine de Blanche-Neige , malheureux et remplis de haine envers quiconque ou quoi que ce soit qui oserait suggérer qu'ils ne sont pas les plus beaux de tous. Tant pis pour eux. Tant pis pour notre société.

    Je dirais du livre de Marlin : « Lisez-le et pleurez », mais je ne veux décourager personne de le lire. Permettez-moi donc de terminer sur une note d'espoir en citant, comme le fait Marlin, le grand historien catholique Christopher Dawson :

    Inévitablement, au cours de l'histoire, il arrive des moments où l'énergie spirituelle [de l'Église] est temporairement affaiblie ou obscurcie… Mais vient toujours un moment où elle renouvelle ses forces et met de nouveau son énergie divine inhérente au service de la conversion des nouveaux peuples et de la transformation des anciennes cultures.

    Puisse le livre de George Marlin contribuer à l'avènement prochain de ce temps.

  • Saint Clément d'Alexandrie "le pédagogue" (4 décembre)

    IMPRIMER

    Lors de l'audience générale du mercredi 18 avril 2007, le pape Benoît XVI a consacré sa catéchèse à ce Père de l'Eglise (source) :

    Chers frères et sœurs,

    Après le temps des fêtes, nous revenons aux catéchèses habituelles, même si apparemment, il règne encore un climat de fête sur la Place. Avec les catéchèses, nous revenons, comme je l'ai dit, au filon commencé auparavant. Nous avons tout d'abord parlé des douze apôtres, puis des disciples des apôtres, et à présent des grandes personnalités de l'Eglise naissante, de l'Eglise antique. Dans la dernière, nous avions parlé de saint Irénée de Lyon, nous parlons aujourd'hui de Clément d'Alexandrie, un grand théologien qui naquit probablement à Athènes vers le milieu du deuxième siècle. Il hérita d'Athènes cet intérêt prononcé pour la philosophie, qui devait faire de lui l'un des hérauts du dialogue entre foi et raison dans la tradition chrétienne. Encore jeune, il rejoignit Alexandrie, la "ville symbole" de ce carrefour fécond entre différentes cultures qui caractérisa l'époque hellénistique. Il y fut le disciple de Pantène, jusqu'à lui succéder dans la direction de l'école catéchétique. De nombreuses sources attestent qu'il fut ordonné prêtre. Au cours de la persécution de 202-203, il quitta Alexandrie pour se réfugier à Césarée, en Cappadoce, où il mourut vers 215.

    Les œuvres les plus importantes qui nous restent de lui sont au nombre de trois:  le Protreptique, le Pédagogue et les Stromates. Même s'il ne semble pas que cela fût l'intention originelle de l'auteur, le fait est que ces écrits constituent une véritable trilogie, destinée à accompagner de manière efficace la maturation spirituelle du chrétien. Le Protreptique,  comme  le dit la parole elle-même, est une "exhortation" adressée à celui qui commence et cherche le chemin de la foi. Mieux encore, le Protreptique coïncide avec une Personne:  le Fils de Dieu, Jésus Christ, qui se fait l'"exhortateur" des hommes, afin qu'ils entreprennent de manière décidée le chemin vers la Vérité. Jésus Christ lui-même se fait ensuite Pédagogue, c'est-à-dire l'"éducateur" de ceux qui, en vertu du Baptême, sont désormais devenus des fils de Dieu. Enfin, Jésus Christ est aussi Didascalo, c'est-à-dire le "Maître" qui propose les enseignements les plus profonds. Ceux-ci sont rassemblés dans la troisième œuvre de Clément, les Stromates, parole grecque qui signifie "tapisseries":  il s'agit, en effet, d'une composition non systématique de thèmes divers, fruit direct de l'enseignement habituel de Clément.

    Lire la suite

  • À propos du bon sens surprenant de Bill Gates sur le changement climatique… …et ce que l’Église catholique peut apprendre du récent essai de Gates sur le sujet

    IMPRIMER

    De sur le Catholic World Report :

    À propos du bon sens surprenant de Bill Gates sur le changement climatique…

    …et ce que l’Église catholique peut apprendre du récent essai de Gates sur le sujet.

    Voilà ce que j'enseigne depuis des années, et que j'ai développé récemment dans des cours magistraux sous l'égide de  l'écologie intégrale . Mais l'entendre de la bouche du fondateur de Microsoft, un homme qui a consacré des décennies à financer des initiatives visant à réduire l'impact humain sur le climat, c'était une toute autre histoire. Après avoir terminé cette chronique, je vous encourage à prendre cinq minutes pour lire au moins une partie de l'article de Gates. Oui, vous avez bien lu : Bill Gates a écrit un article remarquablement nuancé sur le changement climatique – « Trois vérités difficiles sur le climat »  (27 octobre 2025) – et vous devriez vraiment le lire. Certes, vous pourriez être en désaccord avec certains points. Mais Gates, malgré ses imperfections, a apporté une dose bienvenue de bon sens au débat climatique, offrant au passage un aperçu clair de la situation actuelle.

    Mais le but de cet article n'est pas simplement de faire l'éloge de Bill Gates ni de reprendre ses propos récents. Après avoir résumé quelques points essentiels, je souhaite mettre en relation ses réflexions avec les enseignements de nos papes sur le sujet et dégager quelques implications de ce dialogue. Je crois d'ailleurs que les papes pourraient tirer profit de la nuance que Gates apporte à ce débat.

    Les vérités dérangeantes de Gates sur le climat

    « D’ici quelques décennies, un changement climatique catastrophique anéantira la civilisation. Les preuves sont partout autour de nous : il suffit de voir toutes les vagues de chaleur et les tempêtes provoquées par la hausse des températures mondiales. Rien n’est plus important que de limiter cette hausse. »

    Nous avons tous entendu cet argument, ou plutôt ce discours incessant, un nombre incalculable de fois. À chaque tornade, ouragan ou vague de chaleur, les médias nationaux accusent automatiquement le changement climatique. À en croire les gros titres, les décès dus à la chaleur et aux catastrophes naturelles explosent, et la situation ne fait qu'empirer.

    « Heureusement pour nous tous », affirme Gates, « cette opinion est erronée. » Conformément au large consensus des climatologues et aux enseignements des papes récents, il soutient que la hausse des températures mondiales est due aux gaz à effet de serre d'origine humaine et qu'elle touchera plus durement les populations des pays les plus pauvres. Cependant, dans ce dernier article, il prend position en soulignant que le changement climatique n'entraînera pas la disparition de l'humanité.

    De plus,  bien qu'il ne soit absolument pas le premier à le souligner , Gates insiste sur le fait que le discours apocalyptique si souvent véhiculé par les écologistes transforme toute cette affaire en une compétition à somme nulle autour de quelques degrés sur un thermomètre, ce qui finit par « détourner des ressources des actions les plus efficaces que nous devrions entreprendre pour améliorer la vie dans un monde qui se réchauffe ».

    Gates étaye sa thèse par de nombreux arguments. Par exemple, il réfute l'idée reçue selon laquelle les décès liés à la chaleur sont les seuls à être mortels, en soulignant que les décès dus au froid sont en réalité dix fois plus nombreux que ceux dus à la chaleur à l'échelle mondiale. De plus, il constate que les décès liés à la chaleur sont en fait en baisse dans le monde, non pas parce que les températures mondiales diminuent, comme on pourrait le supposer, mais grâce aux progrès technologiques.

    Pour illustrer son propos, il cite le cas tragique, bien réel, d'un gouvernement sri-lankais qui, il y a quelques années, a interdit de manière imprudente les engrais synthétiques dans le but de lutter contre le changement climatique. Comme on pouvait aisément le prévoir, cette décision a entraîné une chute brutale des rendements agricoles, une flambée de l'inflation et des souffrances inutiles pour d'innombrables personnes – tout cela parce qu'il a été décidé de privilégier la réduction des émissions au détriment du bien-être humain à court terme. Plutôt que de blâmer une entité en particulier, Gates souligne que ce genre d'erreurs évitables résulte des pressions exercées par de riches bailleurs de fonds et actionnaires sur les pays en développement pour qu'ils laissent le pétrole, le gaz et le charbon dans le sol, au lieu de prendre des mesures simples pour garantir un accès fiable à l'électricité dans les foyers, les écoles et les centres de santé.

    Lire la suite

  • Pourquoi trois papes affirment que le roman sur l'Antéchrist « Le Maître de la Terre » a prédit notre époque

    IMPRIMER

    De KV Turley sur le NCR :

    Pourquoi trois papes affirment que le roman sur l'Antéchrist « Le Maître de la Terre » a prédit notre époque

    Dans la vision prophétique de Benson, l'Église persiste au sein d'un monde sans Dieu, obsédé par le progrès, le plaisir et le pouvoir.

    Le pape Benoît XVI, le pape François et le pape Léon XIV.
    Le pape Benoît XVI, le pape François et le pape Léon XIV. (photo : Wikimedia Commons / Domaine public)

    En 2015, lors d'un vol retour des Philippines vers le Vatican, le pape François déclara aux journalistes : « Il y a un livre… il s'intitule Le Maître de la Terre. L'auteur est Benson… Je vous suggère de le lire. Sa lecture vous permettra de bien comprendre ce que j'entends par colonisation idéologique. » Il poursuivit en qualifiant le roman de prophétique, notamment au regard des évolutions modernes telles que la laïcité, le relativisme et la notion de « progrès » déconnectée de tout ancrage spirituel ou moral. 

    Le livre en question, Le Maître de la Terre (1907), est un roman dystopique et apocalyptique écrit par le père Robert Hugh Benson, un Anglais converti. Il imagine un monde du XXIe siècle où le christianisme a largement décliné tandis que l'humanisme séculier – ou « humanitarisme » – a pris le pouvoir, les élites politiques et culturelles s'unissant autour d'un leader charismatique mondial. L'Église – et la papauté – survivent, de justesse, et c'est là le nœud du conflit au cœur de l'intrigue. 

    C’était pour le moins un choix inhabituel de la part d’un pape. Mais le pape François a réitéré sa suggestion lors d’un discours prononcé à Budapest en 2023, mettant en garde son auditoire issu du monde universitaire et culturel contre un avenir dominé par la technologie – et la menace que cela représente pour la culture et, en fin de compte, pour ce que signifie être humain. 

    Le prédécesseur du pape François, alors cardinal Joseph Ratzinger, avait également cité « Le Maître de la Terre » lors d'une conférence à Milan en février 1992, le qualifiant d'ouvrage qui « donne matière à réflexion ». Son successeur, le pape Léon XIV, s'exprimant en septembre 2023 en tant que cardinal Robert Prevost, a lui aussi recommandé le roman de Benson, affirmant qu'il met en garde contre ce qui pourrait arriver à un monde sans foi.  

    Il n'est peut-être pas surprenant que ce roman ait suscité autant d'attention, puisque son intrigue est centrée sur un pontife assiégé à une époque où la religion est attaquée par des élites laïques technologiquement supérieures. 

    Fils d'un ancien archevêque anglican de Canterbury, Benson se convertit au catholicisme le 11 septembre 1903, à l'âge de 31 ans. Il avait publié plusieurs œuvres de fiction avant Le Seigneur du monde , principalement des romans historiques. Son roman de 1907 marquait donc une rupture à bien des égards et soulève la question : d'où lui venait cette inspiration ? 

    « À la fin du XIXe siècle, la littérature apocalyptique connaissait une sorte de renaissance, à l'image de l'essor de la science-fiction », explique l'auteure et critique Kristen Van Uden Theriault. Dans un entretien accordé au Register, elle précise que cette période a vu naître une littérature dystopique largement imprégnée d'une perspective laïque positive, tout en distillant des avertissements prophétiques sur les dangers d'un progrès technologique effréné, du collectivisme et du totalitarisme. Elle cite deux œuvres marquantes qui intègrent une dimension religieuse à la littérature dystopique :  le Conte allégorique de l'Antéchrist de Vladimir Soloviev (1900) et Le Maître de la Terre de Benson  . 

    Elle perçoit également un lien fascinant entre ce genre et saint John Henry Newman. Newman, contemporain de Benson et lui aussi un converti de renom de l'anglicanisme, avait beaucoup écrit sur l'Antéchrist, s'intéressant principalement à la montée des idéologies erronées qui ont préparé le monde à son avènement. 

    « Benson et Newman reconnaissaient tous deux les dangers des idéologies modernes — à savoir le communisme, le socialisme et le modernisme, mais aussi le libéralisme, que l’on peut caractériser comme la version tempérée et lente de ces homologues plus radicaux », a poursuivi Thériault. 

    Au cœur de la mise en garde de Newman, suggérait-elle, se trouve « la tyrannie du subjectivisme » : le désir de réduire la religion à une affaire de conscience personnelle plutôt que de la percevoir comme une vérité objective. Elle affirme que le système fictif de l’humanitarisme de Benson — un substitut athée à la religion — « incarne les forces sociales contre lesquelles Newman nous avait mis en garde. L’ordre social, qui ressemblait jadis à la hiérarchie céleste, est désormais façonné à l’image de l’homme déchu. » 

    Alors, étant donné que le roman se déroule au XXIe siècle, dans quelle mesure le juge-t-elle prophétique aujourd'hui ? Thériault le considère comme « prémonitoire à bien des égards ». Elle cite les prédictions de Benson concernant un organisme de gouvernance international – semblable à la Société des Nations, puis aux Nations Unies – et l'euthanasie institutionnalisée, notamment au regard de la loi canadienne sur l'aide médicale à mourir. 

    « Plus profondément, sa description d'une société sans Dieu, guidée par le plaisir, le scientisme et le rejet de Dieu, résonne comme une description de notre siècle. La vie ne vaut rien dans le paysage apocalyptique infernal de Benson, tout comme dans notre culture de mort contemporaine », ajoute-t-elle. 

    À la fin du roman de Benson, l'Église n'est plus qu'un vestige et l'Antéchrist semble triompher. Pourtant, Thériault estime que le message du livre demeure « celui de tous les écrits véritablement catholiques sur l'Antéchrist : un message d'espoir. Malgré les machinations perfides de l'Antéchrist, nous savons qui l'emporte à la fin. » 

    En tant que roman suscitant un débat théologique, il fonctionne – mais en tant qu'œuvre de fiction, comment résiste-t-il à l'épreuve du temps aujourd'hui ? 

    « Au début du XXe siècle, les romans dystopiques et futuristes pullulaient : un amas sombre, déprimant et mal écrit », observait la romancière et universitaire Eleanor Bourg Nicholson . Pourtant, elle trouve le roman de Benson différent. 

    « À la fois spéculatif et mystique, [cet ouvrage] se distingue pour deux raisons : premièrement, il présente des personnages réels et vivants — des hommes et des femmes crédibles et auxquels on peut s’identifier — et non pas une simple allégorie prosélyte ; et deuxièmement, parce qu’il aborde avec audace la réalité sombre et oppressante que le monde doit et va finir, et qu’il perçoit cette réalité à travers le prisme de la foi. » 

    L'un des grands atouts du genre spéculatif, expliquait-elle, réside dans la possibilité qu'il offre aux lecteurs de se confronter à des questions morales profondes. « Quelle est la relation de l'homme avec Dieu ? Quel est le but de la religion ? Quel est le sens même de l'existence humaine ? La vie et la mort, le salut et la damnation – ces thèmes se retrouvent au cœur de nombreuses œuvres de ce genre, et ils sont assurément au cœur même du Maître de la Terre. » C'est peut-être là, à elle seule, ce qui explique son attrait auprès des papes et des prélats. 

    Nicholson perçoit également une dimension prophétique dans le livre, dont elle constate que nombre d'éléments se retrouvent dans la vie moderne. « Benson conçoit l'Antéchrist comme un homme politique affable et inoffensif, une figure charismatique promouvant la "paix" — quelqu'un que l'on peut facilement imaginer séduire le public de nos jours », a-t-elle observé. 

    S'adressant au Register, l'auteur et éditeur Joseph Pearce considère lui aussi Benson comme « un visionnaire », soulignant que son roman inattendu a ouvert la voie à des œuvres ultérieures telles que Le Meilleur des mondes d'Huxley et 1984 d'Orwell.  

    « Benson était en avance sur son temps, un pionnier, un avant-gardiste au sens le plus profond du terme », a déclaré Pearce, ajoutant : « Ce livre a manifestement exercé une influence considérable sur le XXe siècle et semble résonner de façon tout aussi inquiétante à notre époque. La pérennité de la pertinence est l'une des marques d'un grand livre, et celui-ci en est assurément un. » 

    Benson a bien écrit, sinon une suite à proprement parler, du moins un livre avec un thème similaire mais une perspective totalement différente, a noté Pearce. 

    Il semble qu'il ait écrit son roman futuriste suivant, L'Aube de toutes choses, pour donner une tournure plus optimiste à l'atmosphère sombre du Maître de la Terre. Mais je ne pense pas que l'Apocalypse soit sombre d'un point de vue chrétien. Dans la mesure où le roman se termine sur une note apocalyptique, il annonce le Second Avènement promis par les Écritures. 

    « Comment cela pourrait-il être autre chose que la plus heureuse des fins ? » 

  • Marcel De Corte à l'honneur aux éditions de l'Homme Nouveau

    IMPRIMER

    "Collection Marcel De Corte" :

    Petit visuel du produit
    Descartes Philosophe de la ...

    20,00 €

    Descartes Philosophe de la modernité

    Marcel De Corte

    Préface d´Arnaud Jaÿr

    Octobre 2022. 226 pages

    Qui n’a pas entendu dire que les Français étaient un peuple cartésien ? Mais qu’est-ce qu’être cartésien exactement ?

    En plongeant au cœur de la philosophie de René Descartes, Marcel De Corte montre qu’il ne s’agit pas tant de donner à la raison toute sa place que d’opérer une rupture radicale avec l’héritage reçu des Anciens, dans une conception prométhéenne de l’homme à l’origine de la modernité et qui postule qu’il peut agir sur l’ordre naturel, la société et l’être humain lui-même.

    Collection Marcel De Corte

    Petit visuel du produit
    Philosophie de l'économie

    25,00 €

    Philosophie de l'économie

    Marcel De Corte

    Introduction d’Adrien Peneranda

    282 pages. Octobre 2024

    Philosophe aristotélicien, Marcel De Corte (1905-1994) s’est confronté toute sa vie aux questions contemporaines et notamment à la place et au rôle de l’économie dans nos sociétés modernes. Les réflexions qu’il propose dans cet essai inédit sont destinées aux (futurs) chefs d’entreprise, aux cadres et plus largement à tous ceux qui transforment la matière en utilités économiques. Il pointe notamment l’influence grandissante des techniques qui, dans le domaine de la production, se libère de plus en plus de la finalité de l’économie.

    Collection Marcel De Corte

    Petit visuel du produit
    Les mutations de l'Église au ...

    25,50 €

    Les mutations de l'Église au XXe siècle

    Marcel De Corte

    Introduction de Mère Marie-Geneviève Rivière

    Novembre 2025, 538 pages

    Les textes et les analyses du célèbre philosophe sur la crise traversée par l’Église après le concile Vatican II, telle qu’il a pu la vivre à son rang de laïc engagé et d’intellectuel catholique intervenant dans les débats de l’époque. Après d’autres, il s’agit là d’un témoignage historique sur une époque difficile pour l’Église.

    Collection Marcel De Corte

  • Quand un physicien et normalien explore les liens profonds entre science et foi

    IMPRIMER

    De la chaîne youtube REVHEALING (Ahlem Schröder) :

    Et si le monde quantique nous menait à reconsidérer complètement la façon dont nous voyons la vie, voire à nous confronter à la présence d’un esprit créateur… à Dieu, peut-être ? Dans cet échange fascinant, le physicien et normalien Yves Dupont explore les liens profonds entre science et foi. Il interroge les mystères de l’univers : la réalité serait-elle une création de l’esprit ? Et Dieu… une dimension de la conscience elle-même ?

    Au cœur de cette conversation :

    • La physique quantique comme langage spirituel du réel
    • Les limites du rationalisme face à l’invisible
    • Le rôle de la conscience dans la création du monde matériel

    Une discussion lumineuse où la science devient mystique, et la foi, une expérience du réel.

    Merci à notre invité du jour, Yves Dupont, pour son ouvrage et son travail : L’Empreinte de Dieu dans le monde quantique, à la recherche de l’esprit créateur au-delà de la matière.

  • C'est un grand redressement intérieur qu'il nous faut, pas la peur d'un remplacement ni le fatalisme d'un renoncement

    IMPRIMER

    D'Emmanuel Tourpe sur le site de la Libre (libre accès) :

    Devant les peurs migratoires : grand remplacement ou grand redressement ?

    L'avenir appartient à ceux qui rêvent haut : c'est un grand redressement intérieur qu'il nous faut, un destin attirant et désirable – pas la peur d'un remplacement ni le fatalisme d'un renoncement.

    2-11-2025

    Une chronique d'Emmanuel Tourpe (tourpe@hotmail.com), philosophe, théologien, homme de médias

    "L'avenir appartient à ceux qui investissent tôt". Cette publicité d'une banque française – un jeune homme tapotant sur son ordinateur, de toute évidence pour placer des actions – m'arrête net près d'une colonne Morris. Autant je reste de marbre devant les convulsions politiques et budgétaires de l'heure, autant ce marketing de degré zéro m'attriste subitement au milieu de la rue.

    À quel moment avons-nous donc troqué les idéaux de Mai 68 ("l'imagination au pouvoir") pour un appel aussi vide, n'offrant plus pour horizon que l'argent ? Boltanski et Chiapello ont donné la clé : Mai 68 voulait libérer l'homme de la société de consommation, mais le capitalisme a su recycler cette révolte ; l'autonomie, la créativité et la liberté en sont devenues les slogans. L'utopie anti-matérialiste s'est muée en moteur du marché.

    Mais devant ce miroir publicitaire, je vois surtout ce qu'il reste de notre projet de société : une liberté vide, un sens de la vie réduit à des "placements". Quel échec pour la génération de la liberté sans entraves de nous avoir ainsi enfermés dans la superficialité et l'individualisme. Était-ce cela, la plage sous les pavés ? Ce sont les rives d'un égout existentiel. C'est vraiment cela que nous proposons à nos jeunes ?

    Me revient alors la mise en garde de Pierre Brochand, ancien patron de la DGSE, qui alarme le Tout-Paris en ce moment : l'immigration incontrôlée, la disparition des repères collectifs et la montée de l'individualisme menaceraient la paix civile. La "société des individus", centrée sur les désirs personnels, a dissous l'idée de bien commun. L'État, débordé, ne garantit plus ni ordre ni solidarité. Sans sursaut, dit-il, la France risque la fracture, voire le chaos. Il faut protéger notre culture.

    Le mot n'est pas prononcé mais le thème du "Grand Remplacement" de Renaud Camus résonne derrière cet appel angoissé. Eh bien, moi, devant cette réclame écœurante, je vois autre chose. Un grand Effacement – par notre faute.

    Le vrai danger est intérieur : un déficit civilisationnel. S'il y a remplacement, c'est qu'il y a d'abord un estompement de notre puissance culturelle propre. La nature a horreur du vide : comme Rome, nous ne tomberons pas sous la poussée des barbares, mais par l'effondrement de notre garde spirituelle. Ce qui est grand tient dans la tempête – et nous sommes devenus médiocres dans nos désirs, visions, et projets communs.

    Voici donc à quoi nos idéaux de Mai 68 se sont donc réduits : investir, acheter, soigner nos pensions, maximiser nos congés, éviter les contraintes, y compris d'enfants ; défendre nos libertés tournées vers nous-mêmes ; nous enfoncer dans la peur de perdre et la hargne à gagner, faire ce que je veux quand je veux où je veux : tout est "moi, ma gueule – et mon pognon".

    Et l'on s'étonne que ce vide d'idéal soit menacé par le plein de convictions de cultures plus habitées de transcendance ? Qu'un "grand remplacement" de rêves saturés se substitue à nos illusions?

    Non, la réponse n'est pas dans la peur de l'autre ni dans la défense d'une société fatiguée. Elle est dans le relèvement spirituel – et certes pas à la manière des resucées de Charles Maurras, comme dans le dernier livre d'Éric Zemmour (La messe n'est pas dite) : revenir à la source, à ce qui fit la grandeur et l'attraction de notre culture, mais à la manière d'un rayon qui réchauffe et non d'une identité figée. Redonnons l'envie non pas de nous "remplacer", mais de s'intégrer à une vision du monde redevenue nôtre, qui ne se réduise ni à la liberté abstraite ni à l'argent insipide, mais porte un élan violent, combatif vers le vrai toujours plus grand, le beau toujours plus sublime et le bien toujours plus commun.

    Theodor Haecker, inspirateur de la Rose Blanche, écrivait dans son Virgile, père de l'Occident : "L'homme, isolé, n'est pas l'homme, et il ne peut, à lui seul, faire l'unité de sa diversité. Chez Virgile, la piété et la grandeur ne font qu'un : son héros n'est pas celui qui conquiert, mais celui qui porte. Rome fut grande parce qu'elle désira de grandes choses ; sa grandeur ne fut pas avidité, mais service : la volonté de donner un ordre au monde."

    L'avenir appartient à ceux qui rêvent haut : c'est un grand redressement intérieur qu'il nous faut, un destin attirant et désirable – pas la peur d'un remplacement ni le fatalisme d'un renoncement.

  • Newman « a pressenti le monde dans lequel nous vivons et a essayé de préparer les chrétiens à y faire face »

    IMPRIMER

    D'Edward Pentin sur le NCR :

    Un nouveau livre éclaire d'un jour nouveau la vision de Newman pour les laïcs et sa pertinence moderne : « La sainteté est la fin ultime ».

    Paul Shrimpton, expert reconnu de Newman, affirme que le plus récent docteur de l'Église « a pressenti le monde dans lequel nous vivons et a essayé de préparer les chrétiens à y faire face ».

    Le nouveau livre de Paul Shrimpton est disponible chez Word on Fire.
    Le nouveau livre de Paul Shrimpton est disponible aux éditions Word on Fire. (Photo : Courtoisie de Word on Fire/Paul Shrimpton)

    ROME — Saint John Henry Newman, que le pape Léon XIV a déclaré officiellement docteur de l'Église au Vatican samedi, a défendu le rôle essentiel des laïcs dans l'Église catholique, insistant sur leur besoin d'une foi bien formée, d'une solide formation théologique et d'un engagement actif dans la vie et la mission de l'Église.

    Newman enseignait que les laïcs ont un rôle central et indispensable et que, dans l'histoire de l'Église, ils ont souvent défendu l'orthodoxie lorsque le clergé a failli. Il insistait sur le fait que les laïcs devaient être saints et connaître le credo « si bien qu'ils puissent en rendre compte » et le défendre – un concept novateur au XIXe siècle. 

    Mais jusqu'à présent, aucune étude approfondie n'a été menée sur son héritage à cet égard, ni aucune argumentation sérieuse avancée pour anticiper l'enseignement de l'Église sur le sujet. Or, dans un ouvrage majeur récemment paru, intitulé « L'homme le plus dangereux d'Angleterre : Newman et les laïcs »Paul Shrimpton, spécialiste reconnu de Newman, propose une analyse inédite, originale et exhaustive des conceptions audacieuses du théologien du XIXe siècle sur les laïcs, conceptions qui ont remis en question les structures ecclésiales de son époque. 

    Dans cet entretien par courriel du 29 octobre avec le Register, Shrimpton, qui enseigne à la Magdalen College School d'Oxford, explique comment la pensée de Newman sur les laïcs a influencé le concile Vatican II, sa recherche d'équilibre et la réalisation de la complémentarité entre la hiérarchie et les laïcs, et ce que Newman penserait de la synodalité et de l'utilisation de son célèbre enseignement sur le développement de la doctrine à des fins idéologiques. 

    Docteur Shrimpton, quelle a été l'impulsion derrière ce livre, et quelle a été l'ampleur du projet ? 

    L'écriture de ce livre a duré trois ans, mais sa réflexion, trente-trois. Le thème de Newman et des laïcs a toujours été présent en filigrane dans mes recherches sur Newman, axées sur l'éducation. Au fil des ans, j'ai constaté que ce sujet était négligé, malgré l'affirmation selon laquelle sa « théologie des laïcs » compte parmi ses contributions majeures à l'Église moderne. 

    Pourquoi n'y a-t-il pas eu, jusqu'à votre livre, d'étude majeure sur Newman et les laïcs, étant donné que le rôle des laïcs dans l'Église était un sujet si central pour lui ? 

    Je soupçonne que cette omission peut s'expliquer par le fait que les chercheurs se concentrent sur les contributions théologiques abondantes et fondamentales de Newman au détriment de ses enseignements et de son exemple plus pratiques ; par le fait qu'ils privilégient Newman le penseur plutôt que l'homme d'action ; par le fait qu'ils se consacrent aux facultés théologiques plutôt qu'au monde actif.

    Il existe d'autres domaines connexes des études newmaniennes qui ont été relativement peu explorés, comme Newman et le journalisme ou son don pour l'amitié. Ce seront des sujets passionnants à explorer.

    Lire la suite

  • George Gänswein parle du relativisme comme d'une menace pour la foi et la liberté

    IMPRIMER

    De Bryan Lawrence Gonsalves sur omnesmag.com :

    George Gänswein parle du relativisme comme d'une menace pour la foi et la liberté

    L’archevêque a mis en garde à Šiluva (Lituanie) contre les dangers du relativisme, qu’il a décrit comme « un poison qui empoisonne la foi ».

    27 octobre 2025

    liberté de foi

    L'archevêque Gänswein prononce sa conférence. ©Juozas Kamenskas

    Le nonce apostolique en Lituanie, en Lettonie et en Estonie, l'archevêque Georg Gänswein, a rappelé aux chrétiens les dangers du relativisme dans la société actuelle lors d'une récente conférence à Šiluva, en Lituanie. Il a souligné que ce relativisme « conduit à l'érosion, et finalement à la destruction, d'une foi fondée sur la confession de la vérité. Et cela conduit à un empoisonnement de la foi ».

    La conférence, organisée conjointement par le groupe civique lituanien Laisvos visuomenės institutas (Institut d'une société libre), le Syndicat des travailleurs chrétiens lituaniens et la Faculté de théologie catholique de l'Université Vytautas Magnus, a réuni des universitaires, des dirigeants civiques, des intellectuels publics et des membres du clergé pour discuter des principes de la Déclaration de Šiluva.

    Construire positivement

    Il s'agit de la troisième conférence de ce type consacrée à la réflexion sur la Déclaration de Šiluva, publiée le 12 septembre 2021, lors de la fête mariale annuelle de la ville. Ce document public prône la défense des droits humains fondamentaux, la promotion de la vertu et le bien commun de la société. Il reconnaît l'importance d'une société fondée sur les piliers de la vérité, des valeurs familiales, de la dignité humaine et de la foi en Dieu. Il est depuis devenu une référence morale pour les penseurs sociaux catholiques en Lituanie.

    L'archevêque Georg Gänswein, ancien préfet de la Maison pontificale et secrétaire personnel de longue date du pape Benoît XVI, a prononcé le discours d'ouverture, s'appuyant largement sur la philosophie du défunt pontife. Sa conférence a offert une riche réflexion philosophique et théologique sur la foi, la raison et le relativisme, aspects qu'il a décrits comme un « thème constant dans l'œuvre de Ratzinger ». L'archevêque Gänswein a averti que l'affaiblissement de la foi ou de la raison conduit inévitablement à « des pathologies et à la désintégration de la personne humaine ».

    La conférence a été ouverte par les discours de l'archevêque de Kaunas, Kęstutis Kėvalas, et de l'archevêque de Vilnius, Gintaras Grušas, qui ont tous deux souligné le devoir chrétien de défendre la vérité dans la vie publique.

    Dans son discours d'ouverture, l'archevêque K. Kėvalas a appelé à la vigilance contre les tentations d'expérimentation sur la nature et la dignité humaines. Il a également rappelé aux participants que Šiluva, sanctuaire marial connu pour l'une des premières apparitions approuvées d'Europe, symbolise la fidélité à l'ordre divin dans la création. « Le lieu saint de Šiluva invite au respect de l'ordre que le Créateur a donné à ce monde », a-t-il déclaré.

    Lire la suite

  • Matthieu Lavagna : comment réfuter les mauvais arguments pro-avortement

    IMPRIMER

    De Teresa Aguado Peña sur Omnes :

    Matthieu Lavagna : comment réfuter les mauvais arguments pro-avortement

    L'auteur de « La raison est pro-vie » remet en question les mythes sur le fœtus, démonte les arguments simplistes tels que « des amas de cellules » ou « mon corps, ma décision », et montre pourquoi le débat sur la vie n'est pas seulement religieux mais une question de raison.

    10 octobre 2025

    Matthieu Lavagna

    Matthieu Lavagna ©Avec l'aimable autorisation de l'auteur

    En rapport

    Matthieu Lavagna, diplômé en mathématiques, philosophie et théologie, dans son livre « La raison est pro-vie », analyse l'avortement d'un point de vue scientifique, philosophique et éthique, déconstruisant les mythes les plus répandus sur le fœtus et défendant la protection de la vie humaine dès la conception. Il y aborde les arguments concernant l'avortement, le statut moral du fœtus et l'urgence de défendre la vie humaine dès la conception.

    Pourquoi écrire un livre sur un sujet aussi tabou et sensible ?

    Parce que l'avortement est un acte banalisé dans la plupart des sociétés modernes. Le nombre d'avortements (IVG) est très élevé chaque année, et cette pratique est considérée comme de plus en plus banale. On constate également que nombre de nos contemporains sont très mal informés sur cette question. Les faits scientifiques et biologiques liés à l'avortement sont souvent mal expliqués au public, et en pratique, les arguments pro-vie sont rarement entendus. Ce livre vise à combler ce manque d'information et à éclairer objectivement le lecteur sur cette question, d'un point de vue scientifique et philosophique.

    En fin de compte, c'est le statut moral du fœtus qui est en jeu. Pourquoi ?

    En effet. Gregory Koukl résume parfaitement la situation avec cette phrase : « Si le fœtus n’est pas un être humain, il n’y a aucune raison de justifier la légalisation de l’avortement. Inversement, si le fœtus est un être humain, aucune justification à la légalisation de l’avortement n’est valable. »

    Dans le débat sur l'avortement, tout le monde admet que le fœtus est éliminé. Mais qu'est-ce qu'un fœtus ? S'il ne s'agit que d'un amas de cellules, l'avorter n'est pas plus immoral que de se couper les ongles ou d'aller chez le dentiste. Si le fœtus n'est pas un être humain, l'avortement devrait quand même être légal. Aucun problème. Mais si le fœtus est un être humain, et que tous les êtres humains ont droit à la vie, il y a de bonnes raisons de penser que l'avortement est immoral et devrait être interdit. J'explique cela en détail dans le livre.

    Du point de vue scientifique, vous montrez qu’il existe un consensus général sur le fait que le fœtus est un être humain.

    Oui. Le fœtus est biologiquement un être humain, car c'est un organisme vivant appartenant à l'espèce  Homo sapiens . Cet organisme génétiquement distinct se développe continuellement jusqu'à sa maturité. Dès la conception, il possède l'intégralité de son patrimoine génétique, qui le caractérise en tant qu'individu. Les manuels d'embryologie sont unanimes pour affirmer que la vie humaine commence dès la conception.

    Lire la suite

  • La « droite » et la « gauche » ont-elles leur place dans l’Église catholique ?

    IMPRIMER

    De R. Jared Staudt sur le CWR :

    La « droite » et la « gauche » ont-elles leur place dans l’Église catholique ?

    Les factions sont peut-être inévitables, voire nécessaires, comme l'a concédé Paul. Mais le Corps du Christ, en revanche, ne peut être divisé dans son essence.

    Les divisions partisanes profondément ancrées aux États-Unis ont récemment pris une tournure violente. Les affiliations politiques révèlent des visions contradictoires de l'avenir du pays et, de plus en plus, de la vie humaine elle-même.

    La liberté est-elle absolue et doit-elle progresser quelles qu'en soient les conséquences ? Ou existe-t-il des vérités et des biens fondamentaux qui doivent être préservés et respectés ?

    Nous parlons souvent de la division fondamentale entre ces positions générales de droite et de gauche, de conservatrice et de libérale, comme étant uniquement politique, sans réaliser le lien catholique surprenant avec leur origine.

    Il est courant d'entendre les catholiques s'opposer à l'utilisation d'étiquettes droite-gauche et conservatrices-libérales dans l'Église. Néanmoins, il est impossible de nier l'existence de factions qui se sont largement développées dans ce sens. Les factions ne sont pas nouvelles, bien sûr, comme l'a clairement expliqué saint Paul aux Corinthiens : « D'abord, lorsque vous vous réunissez en Église, j'apprends qu'il y a des divisions parmi vous ; et je le crois en partie, car il faut qu'il y ait des divisions parmi vous, afin que soient reconnus parmi vous les véritables » (1 Co 11, 18-19). Les controverses sur la doctrine, la liturgie et la morale tendent à diviser en deux factions principales, et les étiquettes conservatrices et libérales reflètent, de manière généralement précise, les positions de préservation ou d'innovation.

    Les divisions contemporaines au sein de l'Église, bien que différentes des camps politiques, convergent souvent de manière surprenante. Cette réalité a récemment pris le devant de la scène lorsqu'une figure majeure du camp catholique progressiste, le cardinal Blaise Cupich, a suscité une vive controverse en cherchant à honorer un homme politique démocrate, le sénateur Dick Durbin, auteur d'un long historique de soutien à l'avortement. En revanche, les ecclésiastiques engagés dans la défense de la vie humaine, du mariage et de la liberté religieuse trouvent souvent des alliés au sein du Parti républicain. D'ailleurs, trois évêques américains siègent actuellement à la Commission sur la liberté religieuse du président Trump. Compte tenu des dynamiques internes et externes à l'Église, les distinctions « gauche-droite » ou « libéral-conservateur » ne doivent pas être écartées comme inapplicables ou hors de propos.

    Les étiquettes politiques « droite » et « gauche » remontent à la Révolution française, notamment à l'Assemblée nationale, où les représentants se plaçaient à droite ou à gauche du président de l'Assemblée, selon qu'ils soutenaient les droits du roi (la droite), la position de la majorité des catholiques, ou l'abolition de la monarchie (la gauche) et, par conséquent, les droits de l'Église. Après la chute du roi, ceux qui étaient considérés comme de droite étaient favorables à une restauration de l'Ancien Régime, tandis que la gauche continuait de prôner une libéralisation accrue de la société selon des principes républicains ou démocratiques.

    Cette division politique avait une énorme signification religieuse, car un camp avançait la notion française de laïcité (la suppression de tout rôle public de l'Église) et la légalisation du divorce, tandis que l'autre cherchait à restaurer l'union du trône et de l'autel.

    Après la Révolution française, les papes ont soutenu la restauration des monarques catholiques et ont même sanctionné les prêtres qui prônaient la démocratie. Le concile Vatican II, cependant, a permis une réhabilitation des catholiques affichant des positions associées au libéralisme politique en favorisant une plus grande ouverture au monde moderne. Vatican II a largement enterré la traditionnelle division droite-gauche entre catholiques, qui avaient soutenu soit la restauration de la monarchie, soit la démocratie moderne (bien que le mot « démocratie » n'apparaisse pas dans ses documents).

    Le clivage droite-gauche des dernières décennies se situe désormais principalement entre ceux qui soutiennent les valeurs traditionnelles de la démocratie moderne (la nouvelle droite) et ceux qui continuent à pousser la révolution contre toute forme d’autorité et de moralité traditionnelles (la nouvelle gauche).

    Lire la suite

  • "Contre la machine"; sur la destruction de l'humanité

    IMPRIMER

    De sur le CWR :

    Against the Machine est une critique pénétrante de la culture des illusions, fortement axée sur la technologie.

    Paul Kingsnorth est loin d’être le premier écrivain à décrire nos conditions actuelles, mais il apporte un mélange unique de passion, d’expérience passée, d’une richesse de sources et d’une logique persuasive à son récit.

    Mon entretien avec Kingsnorth, réalisé il y a deux ans, est disponible ici.  L'étendue de son œuvre est impressionnante. Son roman «  Awake  », paru en 2015 et écrit dans une langue de l'ombre mêlant anglais ancien et anglais moderne, est un récit formidable de la résistance anglo-saxonne, païenne et vouée à l'échec, face à l'invasion normande de l'Angleterre au XIe siècle  . Son ouvrage « Abbey of Misrule Substack » est une mine d'or de textes de qualité, allant de réflexions sereines sur la nature et les saints à une critique culturelle urgente. Kingsnorth possède le don rare de transmettre un contenu profond dans un style élégant et d'une clarté simple.

    Son histoire personnelle renforce l'attrait de son œuvre. Ancien militant écologiste sans convictions religieuses, il a migré vers la Wicca et le bouddhisme à l'âge adulte, avant de se convertir au christianisme en 2020. Il a été baptisé dans l'Église orthodoxe en 2021. Sa foi imprègne désormais presque tout ce qu'il écrit.

    Et cela nous ramène à son dernier livre.

    Contre la Machine  s'appuie sur deux années d'  essais préliminaires visant à peaufiner les idées de l'auteur. En bref, il s'agit d'une critique pénétrante de la culture faustienne, accro aux machines et à la technologie, des illusions que nous avons tissées autour de nous depuis 300 ans, un cocon d'artifices rutilants qui menace désormais d'étouffer et de supplanter l'humanité de ses créateurs.

    Comme le note Kingsnorth dans ses premières pages, « il n'y a jamais eu d'organisation unitaire de la culture occidentale en dehors de l'Église chrétienne » – un cadre religieux qui donnait un sens à la vie quotidienne et constituait un fondement de cohésion sociale. « Derrière le modèle en constante évolution de la culture occidentale », écrit-il, « il y avait une foi vivante qui donnait à l'Europe un certain sentiment de continuité spirituelle, malgré tous les conflits, les divisions et les schismes sociaux qui ont marqué son histoire. »

    Ce jour est désormais passé. Et il ajoute que

    Lorsqu'une culture bâtie autour d'un ordre aussi sacré disparaît, des bouleversements s'ensuivent à tous les niveaux de la société, du politique jusqu'au niveau spirituel. La notion même de vie individuelle est bouleversée. La structure familiale, le sens du travail, les attitudes morales, l'existence même de la morale, les notions de bien et de mal, les mœurs sexuelles, les perspectives sur tout, de l'argent au travail, en passant par la nature, la parenté, la responsabilité et le devoir : tout est à prendre.

    Aujourd'hui, comme on pouvait s'y attendre, alors que le christianisme recule en Occident, « nous [les modernes] – du moins si nous sommes parmi les plus chanceux – avons à notre disposition tous les gadgets, sites web, boutiques et vacances exotiques du monde », mais il nous manque les deux choses dont nous avons le plus besoin : un sens et des racines. Par conséquent, nous sommes à la dérive dans une époque que l'auteur présente comme « Le Grand Déstabilisation ». C'est le fruit de nos appétits et de nos vanités à courte vue, incarnés de façon éclatante par nos élites.

    Kingsnorth est loin d'être le premier écrivain à décrire notre situation actuelle. Il n'est pas non plus le premier à utiliser la Machine comme métaphore des troubles spirituels et des menaces technologiques croissantes qui pèsent sur notre humanité. EM Forster a écrit sa nouvelle prophétique, « La Machine s'arrête », il y a près de 120 ans. Mais Kingsnorth apporte à son récit un mélange unique de passion, d'expérience, de richesse des sources et de logique persuasive.

    L'auteur emprunte une phrase au théoricien social américain Craig Calhoun pour suggérer son propre esprit directeur : une sorte de « radicalisme réactionnaire ». Dans l'approche de Kingsnorth, il ne s'agit  pas d'une idéologie politique. Elle opère en dehors des conflits habituels gauche-droite. Elle est « radicale » au sens premier du terme : elle s'attaque aux racines ; en l'occurrence, aux racines de ce que signifie être humain et de ce dont nous avons besoin.

    Il s'agit d'une « tentative active de création, de défense ou de restauration d'une économie morale fondée sur les quatre P ». Ces quatre éléments incluent, premièrement, le passé :  l'origine d'une culture, son histoire et ses ancêtres. Deuxièmement, le peuple, qui définit une culture : le sentiment communautaire d'être un « peuple » distinct. Troisièmement, le lieu,  où se situe une culture, son sentiment d'appartenance, la nature dans sa beauté locale et ses manifestations particulières. Quatrièmement, et enfin,  la prière,  où une culture se dirige, sa tradition religieuse et sa destinée, sa compréhension de Dieu ou des dieux.

    La culture machiniste annihile tous ces éléments d'une réalité saine, à échelle humaine, pour en faire une homogénéité mondialisée et consumériste. Ce faisant, elle assure l'abondance matérielle tout en aspirant l'âme de la Création. Kingsnorth ne prétend pas que la technologie soit intrinsèquement mauvaise. Au contraire, ses nombreux avantages sont évidents, à commencer par l'ordinateur qu'il utilise pour écrire. Mais lorsque nous laissons cette technologie devenir une forme d'idolâtrie – comme c'est le cas actuellement dans le monde postmoderne « développé » – l'idole dévore ses fidèles.

    Il m'est impossible de choisir un chapitre préféré du texte. Trop nombreux sont ceux qui sont trop bons : Mille Mozart, Want Is the Acid, Come the Black Ships, You Are Harvest, Kill All the Heroes, The Abolition of Man (and Woman), What Progress Wants, et d'autres. Mais le dernier chapitre, The Raindance, est peut-être le plus important, car il offre une voie à suivre ; une voie difficile, mais qui, dans les temps apparemment sombres, fonctionne invariablement :

    J'en suis arrivé au bout, et voici ce que je pense : l'ère de la Machine n'est finalement pas désespérée. En réalité, c'est l'époque pour laquelle nous sommes nés. Impossible de la quitter, il nous faut donc l'habiter pleinement. Il nous faut la comprendre, la défier, y résister, la subvertir, la traverser vers quelque chose de meilleur. Si nous pouvons la voir, nous avons le devoir de la dire à ceux qui ne la voient pas encore, tout en luttant pour rester humains. Les gens, les lieux, la prière, le passé. La communauté humaine, les racines dans la nature, le lien à Dieu, les souvenirs transmis de génération en génération. Voilà les choses éternelles.

    En fin de compte, nous ne sommes pas impuissants. Aucun chrétien ne l'est jamais. La seule révolution qui compte est celle que nous menons dans notre cœur ; le choix de connaître, de vivre et d'agir réellement selon la foi que nous prétendons croire, quel qu'en soit le prix.

    Quand cela se produit, le monde commence à changer. Dieu, en son temps, s'occupe du reste.

    Contre la machine : sur la destruction de l'humanité
    par Paul Kingsnorth

    Penguin Random House, 2025
    Relié, 368 pages