Europe 1 a diffusé ce 26 décembre une entretien de près d’une heure avec le cardinal Sarah. Ref. site web « le salon beige » : L’Europe, la France, son socle religieux fondateur c’est le christianisme
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Noël 2021 : une heure de rendez-vous pour le Cardinal Sarah sur les ondes d’Europe 1 /CNEWS
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Il n'y a pas qu'Israël; le Saint-Siège a aussi ses "accords abrahamiques"
Un article de Sandro Magister, vaticaniste à L’Espresso.
Il n'y a pas qu'Israël; le Saint-Siège a aussi ses "accords abrahamiques".
Avec les "accords d'Abraham", qui débuteront en 2020, l'État d'Israël a noué des relations fructueuses avec des États arabes qui, hier encore, étaient ses ennemis jurés, Émirats arabes unis et Bahreïn en tête. Mais quelque chose de similaire se produit également pour le Saint-Siège, avec ces mêmes monarchies islamiques qui ont historiquement été parmi les plus fermées à la présence chrétienne.
En ce qui concerne Israël, "malgré l'évidente référence biblique, ces accords ont peu de contenu religieux", a écrit "La Civiltà Cattolica", la revue jésuite de Rome si amie du pape François. Entre-temps, toutefois, ils ont marqué un tournant par rapport à des décennies d'hostilité apparemment invincible. La transition obligatoire du pétrole vers des sources d'énergie écologiquement propres conduit les États pétroliers du Golfe à acquérir massivement des technologies "vertes", dont Israël est l'un des principaux producteurs et exportateurs.
En conséquence, le conflit israélo-palestinien, qui dure depuis longtemps, a été relégué au second plan par les pays arabes - qui, comme Israël, sont bien plus préoccupés par la menace que représente l'Iran - tandis que d'autres États adhèrent progressivement aux "accords abrahamiques", que le Maroc et le Soudan ont également signés cette année et qui ont déjà été appliqués en partie par le biais d'accords informels à Oman et en Arabie saoudite.
Avec des effets bénéfiques également dans le domaine religieux. La seule petite communauté juive du Golfe qui subsiste, dans l'État de Bahreïn, avec sa propre synagogue, a vu son droit à la liberté religieuse reconnu pour la première fois dans le texte des accords. "C'est un moment historique auquel nous ne nous attendions pas à assister de notre vivant", a déclaré le chef de la communauté, Ebrahim Dahood Nonoo, dont un parent, Huda Al-Nonoo, a été ambassadeur de Bahreïn aux États-Unis de 2008 à 2013.
L'ancien grand rabbin de Jérusalem, Shlomo Amar, s'est également rendu à Bahreïn, invité par l'émir Hamad bin Isa Al-Khalifa. Alors qu'aux Émirats arabes unis, à Abu Dhabi, on a annoncé "la création d'une maison familiale abrahamique qui contiendra dans son complexe une mosquée, une église et une synagogue", et qu'à l'Expo de Dubaï, le pavillon israélien a trouvé sa place pour la première fois, avec la visite de personnalités juives de premier plan venues du monde entier, y compris de Rome.
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Et le Saint-Siège ? Il y a également un pavillon du Vatican à l'Expo de Dubaï. Mais des nouvelles bien plus importantes ont accompagné et suivi l'événement générateur de ce tournant : le document " sur la fraternité humaine " signé conjointement à Abu Dhabi le 4 février 2019 par le pape François et le grand imam d'Al-Azhar Ahmad Al-Tayyeb.
La consécration à Bahreïn, le 10 décembre, de la cathédrale Notre-Dame d'Arabie, la plus grande église catholique de la péninsule arabique, a été particulièrement spectaculaire.
Cette imposante église, pouvant accueillir 2 300 fidèles, à laquelle sont rattachés une curie épiscopale, une maison d'hôtes et un centre de formation, était le rêve de Mgr Camillo Ballin, vicaire épiscopal pour l'Arabie du Nord, décédé en 2020 des suites du Covid.
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Quand l’Europe faisait face à des esclavagistes arabo-musulmans
D'Alexandre Del Valle sur Atlantico :
Ces 1000 ans durant lesquels l’Europe a fait face à des esclavagistes arabo-musulmans
Face à l'idéologie woke, il est utile de rappeler certains faits historiques, notamment sur les raids esclavagistes barbaresques en Méditerranée.
Cette semaine, Alexandre del Valle poursuit sa série d'articles-feuilletons consacrés aux "mythes fondateurs du cosmopolitiquement correct" et du "wokisme" anti-occidental. Notre chroniqueur montre que face aux adeptes wokistes de la punition permanente de l'Homme occidental Blanc judéo-chrétien sommé de s'auto-flageller pour expier des fautes passées, rien n'est plus utile que de rappeler des faits historiques incontestables et d'entrer en résistance intellectuelle et psychologique.
Alexandre Skirda, essayiste et historien d’origine russe, explique dans son ouvrage La Traite des Slaves : l’esclavage des Blancs du VIIIe au XVIIIe siècle[1], qu’avant-même la traite atlantique, des millions de Blancs furent soumis à une traite encore plus terrible et meurtrière que celle des Noirs d’Afrique par les Européens. Skirda distingue deux traites des Slaves : la traite dite « occidentale », qui s’exerça en Europe centrale, et la traite « orientale », qui sévit de la Pologne à la Russie. La première débuta au VIIIe siècle. Elle visait les Tchèques, les Moraves, les Slovaques, les Polonais, les Slovènes et les Croates de Slavonie, régulièrement razziés ou faits prisonniers dans les guerres les opposant aux germains ou hongrois. Les Esclavons de Slavonie étaient capturés sur les côtes dalmates puis étaient acheminés vers Cordoue, en « Al-Andalous », ou vers la Syrie, l’Egypte, l’Irak ou le Maghreb. Cette traite « occidentale » prit fin au XIe siècle en raison de la reconquista et de l’éclatement, en 1031, du califat de Cordoue, qui se fragmenta en de multiples « taïfas ». Ainsi la chute du soi-disant royaume musulman « éclairé » de Cordoue fut une bénédiction pour les victimes européennes des esclavagistes arabes. Quant à la traite des Slaves d’Europe orientale, elle dura plus de 1000 ans[2]. Les captifs étaient aussi bien des slavophones originaires d’Ukraine, de Pologne, de Russie, etc. Et les esclavagistes musulmans, dont les descendants ne se sont jamais repentis et n’ont jamais été condamnés par la « communauté internationale », étaient aussi bien des nomades turco-mongols venus des steppes de l’Asie centrale, des Polovtses, des Khazars et d’autres peuplades turcophones islamisées comme les Tatars. Les Khazars acheminaient leurs captifs vers la Volga, Boukhara et Samarcande, grands foyers industriels de castration et du lucratif commerce de l’esclavage destiné à Bagdad et à l’Extrême-Orient. Ensuite, les razzias mongoles et leurs intermédiaires génois alimentèrent en jeunes captifs mâles les armées d’esclaves slaves et grecs orthodoxes de l’Egypte des Mamelouks. Les Tatars, peuple turco-mongol converti à l’islam au XIVe siècle, sont ceux qui terrifièrent le plus les Russes-orthodoxes et les dominèrent pendant des siècles. Apparentés aux Turc-ottomans, les Tatars ravitaillaient la cour d’Istanbul en esclaves capturés en terre slave orientale. Cet état de fait dura jusqu’au règne de la tzarine Catherine II, qui vainquit l’Empire ottoman. L’Encyclopédie ukrainienne (2002) évalue à deux millions et demi au minimum le nombre d’esclaves slaves prélevés par les Tatars sur l’Ukraine, la Biélorussie et la Moscovie, rien que pour la période allant de 1482 et 1760. Sachant que la population de ces régions à cette époque était estimée à six millions d’âmes, ce chiffre est plus que considérable. Mais ceux qui pratiquèrent le plus longtemps cette traite des Slaves furent les Turcs ottomans. Cette traite des Slaves fut contemporaine des traites arabo-berbéro-turco-musulmanes qui terrifièrent l’Europe du Sud durant des siècles. Auteurs de L'Atlas des esclavages (2007), Marcel Dorigny et Bernard Gainot, notent que l’on ne dispose que de très peu de traces des esclaves en pays musulman pour la bonne raison qu’ils étaient castrés de façon industrielle et qu’en plus des autres mauvais traitements, ceci provoqua une mortalité extrêmement importante qui devait être compensée par des captures continuelles de nouveaux esclaves. On peut toutefois avoir un ordre d’idée. Ainsi, d’après Alexandre Skirda, le nombre total des victimes de la traite des Slaves entre le VIIIe et le XVIIIe siècle s’élèverait à quatre ou cinq millions d’âmes, en se fondant sur le bilan de la traite barbaresque établi par Robert Davies à 1 250 000 esclaves européens pour le seul domaine de la Méditerranée occidentale, sur une période quatre fois plus réduite.
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Le père Jean Pierre, homme de paix et prophète de l'avenir
De Mgr Giovanni D'Ercole* sur le site de la Nuova Bussola Quotidiana :
Le père Jean Pierre, homme de paix et prophète de l'avenir
29-11-2021
La mort et les funérailles au Maroc du moine trappiste de 97 ans qui avait échappé au massacre de Tibhirine (Algérie) en 1996 ont montré comment l'amitié entre chrétiens et musulmans peut naître lorsque la foi est vécue dans la fidélité quotidienne à l'Évangile, sans compromis, même au prix de sa vie. L'étreinte des chrétiens et des musulmans autour de sa tombe était le miracle d'une amitié possible lorsque la recherche sincère de Dieu habite le cœur humain.
Le père Jean Pierre Schumacheur repose, enterré à même la terre comme le veut la tradition des trappistes, dans le cimetière du monastère de Notre Dame de l'Atlas à Midelt, au Maroc, aux côtés de six sœurs franciscaines missionnaires de Marie qui ont consacré toute leur vie aux peuples du Maghreb. Jean Pierre est le premier trappiste à reposer dans ce cimetière. Il a lui-même souhaité reposer dans ce cimetière parce qu'il se trouve à quelques mètres seulement du cimetière de ses frères musulmans, avec lesquels il a toujours recherché une entente non pas fondée sur un dialogue théologique mais sur une amitié humaine capable de dépasser les barrières et les préjugés. Et d'assister à son enterrement, immédiatement après la célébration eucharistique présidée par l'archevêque de Rabat Card. Cristobal Lopez, en fin de matinée du 23 novembre, ce sont eux, ses amis musulmans, qui le traitaient comme un père et le vénéraient déjà comme un saint.
Pourquoi ? Qu'a fait cet humble trappiste qui a échappé au massacre de 1996 à Tibhirine, en Algérie, où sept moines, déclarés bienheureux en 2008, ont été martyrisés ? Les nombreux messages qui continuent d'arriver de toutes les parties du monde montrent que la vie de ce prêtre de 97 ans, devenu trappiste après plusieurs années d'appartenance à la congrégation des Pères Maristes, a été un témoignage de paix et une "prophétie de l'avenir". C'est ainsi que je définirais sa mort et ses rites funéraires.
Un "homme de paix", c'est ce qu'écrivent et disent de lui tous ceux qui, dans toutes les parties du monde, commentent sa mort au monastère de Notre Dame d'Atlas, lieu solitaire de présence chrétienne au milieu d'un territoire habité par des Berbères, islamisé par l'occupation des Arabes.
Jean Pierre Flachaire, qui est en France pour un traitement médical, et cela m'a donné l'occasion de respirer l'atmosphère de soins que les cinq moines, plus un ermite, ont entretenu pour leur frère âgé, dont la santé était de plus en plus fragile mais dont le tempérament était celui d'un chef sur le champ de bataille jusqu'à la fin.
Son apostolat était un dialogue par correspondance : il recevait et répondait toujours personnellement aux milliers de lettres d'amis et de connaissances avec lesquels il maintenait un contact spirituel constant. Il m'a dit un jour, en me montrant un paquet de lettres : "Je suis en correspondance régulière avec ces personnes depuis 17 ans, même si je ne les connais pas et ne les ai jamais vues. Ma mission est d'écouter, de prier et de consoler. Mais maintenant, je ne peux plus le faire.C'est vrai, malgré lui, il a dû finir par s'y résoudre, car il ne pouvait même plus écrire, et son seul engagement était la prière. Il était à mes côtés dans le chœur et je l'ai souvent surpris dans l'obscurité de la chapelle en pleine contemplation silencieuse. Il était de plus en plus faible, on sentait la fatigue et la faiblesse de l'âge, mais de son visage transparaissait la paix intérieure qui l'habitait et qu'il était capable de communiquer à tous. Oui, c'était son charisme : vivre dans la paix et la transmettre à tous ceux qu'il rencontrait.
Le mardi 16 novembre, je me suis absenté pour participer à une session de formation pour le clergé du diocèse de Rabat, et je suis rentré tard dans la soirée du samedi 20 novembre. "Les frères ont été très gentils avec moi", c'est ce qu'il m'a dit quand je suis allé dans ma cellule pour lui dire au revoir, et ce sont ses derniers mots car pendant la nuit il a accéléré son voyage vers la rencontre avec Dieu. Il semblait qu'il nous attendait car il a immédiatement commencé à partir sans gémir ni haleter, sans les halètements de l'agonie. Il lui restait un léger sourire sur le visage, qui devenait progressivement de plus en plus absent, semblant déjà plongé dans un autre monde illuminé par le mystère de la Vie. Il est décédé alors que le moine infirmier récitait le chapelet, une dévotion mariale qui lui était très chère.
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L’islamisme n’a-t-il rien à voir avec l’islam ?
L’islamisme : rupture ou continuité de l’islam ?
(Valeurs actuelles du 05-11-2021: entretien avec Marie-Thèrése Urvoy, auteur du livre Islam et Islamisme. Frères ennemis ou Frères siamois? Ed. Artège 2021)
L’islamisme n’a-t-il rien à voir avec l’islam ? Cette affirmation, courante chez certains médias, est battue en brèche à la lecture du nouvel ouvrage de Marie-Thérèse Urvoy, Islam et islamisme, frères ennemis ou frères siamois ? Professeur émérite de l’université Bordeaux-III et de l’institut catholique de Toulouse, l’islamologue, historienne et essayiste, expose avec rigueur et fermeté les origines du problème suscité par une religion tiraillée par une ambiguïté de départ et un besoin de réforme. L’experte reconnnue nous fait découvrir les schémas mentaux propres à cette religion, ses tiraillements et ses enjeux.
Valeurs actuelles. Il y a un an était annoncée la loi sur le séparatisme islamiste. Quel regard portez-vous dessus ?
Marie-Thérèse Urvoy. C’est le mot même de “séparatisme” qui fait difficulté. L’islamisme ne vise pas à séparer mais à conquérir. Il n’y a pas de partage, mais seulement l’utilisation des moyens administratifs et financiers de l’État en place avec l’intention de les subvertir au profit non pas seulement d’une communauté particulière parmi d’autres mais de la communauté islamique (umma) universelle. Ce qu’exprime la proclamation : “Nous gagnerons par vos lois et nous vous gouvernerons par nos lois. ” Et ce qu’illustre l’imam Iquioussen en incitant ses coreligionnaires à traiter avec des candidats aux élections : apport des voix contre engagement à soutenir leurs exigences.
Valeurs actuelles. Dans les textes d’origine du Coran, vous relevez deux courants opposés. Lesquels ? Que nous apprennent-ils ?
Marie-Thérèse Urvoy. Dans les sourates les plus courtes du Coran, qui figurent vers la fin du recueil et qui sont considérées par tous comme les plus anciennes, domine le souci des fins dernières, de façon comparable à d’autres courants de l’Antiquité tardive au Moyen-Orient, et notamment certains auteurs chrétiens syriaques. Dans ces textes, le Prophète est présenté comme un simple “avertisseur”. Ce trait persiste dans les sourates du reste de la période dite mecquoise, c’est-à-dire antérieure à l’émigration (hégire), où le Prophète montre une allure pacifique et un caractère magnanime. Mais une plus grande partie du texte, réputée de révélation ultérieure à l’hégire, donne un tableau d’autorité temporelle et d’action guerrière. Or c’est ce dernier aspect qui a été considéré par les institutions islamiques comme les fondements de la communauté, ce qui a donné la prédominance au juridisme. Les thèmes apocalyptiques peuvent être repris par certains auteurs mais soit à titre seulement personnel, soit dans un contexte de subversion de la religion qui a toujours été combattu comme hérésie. Ce qui a pu subsister, c’est une forme atténuée, appelée le murgisme, qui séparait le jugement des actes, relevant de la communauté, du jugement des cœurs, “renvoyé” à Dieu. Accepté très largement de fait, le murgisme n’en a pas moins été souvent invoqué comme une marque de laxisme. Ce n’est qu’en 1925 que le caractère politique de l’islam a commencé à être mis en question par Ali Abdelrazik, qui a été chassé du corps des ulémas et dont la thèse est toujours disputée, puis par Mahmoud Mohamed Taha, qui a été jugé apostat et pendu, et dont le mouvement qu’il a fondé au Soudan est aujourd’hui bien diminué. De nos jours, la critique historique du texte coranique par les orientalistes envisage, plutôt qu’une unique continuité linéaire, la présence simultanée de deux grands courants. L’un, pacifique, va en s’amoindrissant, l’autre, agressif, se renforce. Ainsi, la tradition islamique a sacralisé, sous forme d’une “dictée divine” unique, un texte issu en réalité d’une “histoire plurielle”.
Valeurs actuelles. « L’islam a toujours connu divers niveaux de tension. » Lesquels et
pourquoi ?Marie-Thérèse Urvoy. Au niveau de l’individu, le croyant ordinaire est tenté de se contenter de respecter les obligations et les interdits clairement formulés par le Coran. Mais il y a des indications moins évidentes de ce qui est “louable” ou de ce qui est “blâmable”, dont la mise au jour relève de spécialistes. À quoi s’ajoute une vertu de “scrupule” spécifique à l’islam, qui invite à éviter – et à faire éviter – tout ce qui, à quelque degré que ce soit, pourrait impliquer une souillure. Le croyant peu exigeant sera donc en bute à ceux qui, “spontanés” ou titulaires d’une fonction officielle, rappellent tout ce qu’ils considèrent comme des exigences de la Loi. Au niveau de la communauté, il y a les rappels à l’ordre des autorités et la dénonciation, au besoin par des soulèvements de foule, de quiconque est considéré comme un danger moral. Finalement, la communauté islamique étant un système socioreligieux toujours susceptible de contestations, les révoltes sont souvent érigées en mouvements réformistes.
Valeurs actuelles. L’exigence de réforme est une réflexion particulière dans l’islam...
Marie-Thérèse Urvoy. Il y a dès l’origine de l’islam une tension entre des formules radicales et les exigences du réalisme social. Cette tension est pérennisée par l’ambiguïté du texte fondateur, qui fusionne avec la même autorité d’une “dictée divine” ces tendances antithétiques. Le besoin de “réforme” est donc constant et s’exprime particulièrement dès que la communauté est troublée soit par une crise interne, soit – surtout à l’époque moderne -par une confrontation défavorable avec des agents extérieurs. Le plus souvent, l’appel à la réforme prend l’aspect d’un appel à un retour vers les débuts, supposant que l’histoire n’a apporté que des dégradations. On oppose donc la pureté initiale, qui est supposée valable toujours et partout puisqu’elle émane de l’enseignement divin, aux multiples compromissions humaines. Le contact avec un Occident plus développé matériellement a suscité deux attitudes antagonistes. Pour l’une, il fallait séparer ses acquis scientifiques et techniques de leur arrière-plan mental jugé pervers, et assimiler seulement les premiers. Pour l’autre, très minoritaire, l’Occident pouvait apparaître comme un modèle en matière de respect des libertés, d’égalité devant la loi, de respect de la femme, etc. Mais ici encore, on pouvait prétendre que ces valeurs étaient déjà présentes dans l’islam, qu’elles avaient seulement été occultées et qu’il suffisait de les raviver. La remise en question de soi a très rarement amené à une révision de la religion, mais a plutôt débouché sur un discret abandon du terrain.
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Saint-Siège : de la diplomatie de la Vérité du pape Benoît à la Realpolitik du pape François
Lu sur le site « diakonos.be » :
« Si pour Benoît XVI, c’est la « diplomatie de la vérité » qui comptait, pour François c’est la « Realpolitik » qui prévaut. Le changement de cap politique et diplomatique est on ne peut plus net entre les deux derniers pontificats, en particulier dans les rapports avec la Chine et l’Islam. C’est ce que souligne Matteo Matzuzzi, rédacteur en chef du quotidien italien « Il Foglio » et vaticaniste chevronné qui vient de publier un ouvrage sur la géopolitique du Vatican, intitulé « Il santo realismo », édité par LUISS University Press.
En ce qui concerne la Chine, le changement de cap est sous nos yeux à tous. Celui avec l’Islam l’est moins. Mais c’est précisément sur ce terrain que les deux pontificats suivent des voies divergentes, pour ne pas dire opposées, et que le livre de Matzuzzi reconstruit avec clarté.
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En ce qui concerne Benoît XVI, on garde en mémoire l’incident de Ratisbonne, lorsque sa critique argumentée du rapport incertain dans l’islam entre la foi et la raison a déchaîné une réaction furieuse et violente dans le monde musulman. Mais bien peu se souviennent que non seulement le Pape Benoît n’a pas reculé d’un pouce sur ce qu’il avait dit à l’époque mais que son discours du 12 septembre 2006 avait permis l’émergence d’un dialogue d’une intensité sans précédent d’abord avec trente-huit et ensuite avec cent-trente-huit personnalités musulmanes faisant autorité, issues de nations et d’orientations diverses, aussi bien sunnites que chiites.
Ce dialogue s’est concrétisé dans de longues lettres au pape signées par ces sages et par la première visite au Vatican du roi d’Arabie Saoudite et gardien des lieux saints de l’islam, ainsi que des émissaires de la plus haute autorité chiite hors d’Iran, le grand ayatollah Sayyid Ali Husaini Al-Sistani. Tandis qu’à son tour, Benoît XVI, après un voyage en Turquie réussi contre toute attente en novembre de cette même année 2006 – avec une prière silencieuse dans la Mosquée bleue d’Istanbul -, en est venu, en dressant un bilan lors de son discours de fin d’année à la Curie romaine, à encourager ouvertement le monde musulman à entreprendre lui aussi cette « longue recherche laborieuse » dans laquelle – disait-il – les chrétiens sont déjà engagés depuis longtemps, c’est-à-dire « accueillir les véritables conquêtes des Lumières, les droits de l’homme et spécialement la liberté de foi et de son exercice, en reconnaissant en eux les éléments essentiels notamment pour l’authenticité de la religion ».
En s’adressant au corps diplomatique, en janvier 2006, le pape Benoît n’avait pas hésiter à reconnaître dans le temps présent le réel « risque de conflits de civilisations » auquel il fallait opposer, disait-il, « l’engagement pour la vérité », notamment « de la part des diplomaties », une vérité que « ne peut être atteinte que dans la liberté » et « dans laquelle l’homme lui-même en tant que tel est en jeu, le bien et le mal, les grands défis de la vie et le rapport avec Dieu ».
En s’en tenant à cette « diplomatie de la vérité » sans jamais en dévier, Benoît XVI en a payé le prix. Le prix fort en 2011, quand une voiture piégée a explosé devant une église remplie de fidèles rassemblés pour la messe à Alexandrie, en Égypte. Il y avait eu des dizaines de morts. Et le 2 janvier, à la fin de l’Angélus, le pape ne s’est pas tu. Pas plus que le grand imam d’Al-Azhar, Ahmed Al-Tayyeb, qui avait réagi à « l’ingérence » papale en suspendant tous les rapports avec le Saint-Siège, lui s’était à plusieurs reprises par le passé déclaré favorable aux attentats suicides en territoire israélien.
Les rapports avec Al-Azhar n’avaient repris qu’en 2016, avec une embrassade à Rome entre Al-Tayyeb et le pape François. Mais justement, beaucoup de choses avaient déjà changé avec ce nouveau pape.
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Entretemps, le dialogue profond sur la foi et la raison avec les cent-trente-huit sages musulmans avait tout de suite été interrompu. Parce que les initiatives du pape François envers l’islam obéissaient à des critères totalement différents et bien plus pragmatiques.
Son premier geste, à grand renfort de jeûne pénitentiel, fut l’offensive publique contre l’attaque occidentale imminente contre la Syrie de Bachar Al-Assad. Les hiérarchies orthodoxes et catholiques de ce pays étaient résolument dans le camp du régime alaouite, qui faisait office de bouclier contre l’hostilité d’autres tendances islamiques. Mais l’initiative de François était à bien plus large spectre. Parmi ceux qui étaient opposés à une intervention militaire en Syrie, il y avait Vladimir Poutine. Et c’est ce qui avait incité le pape à écrire au leader russe une lettre-appel, en guise de drapeau blanc. Cette initiative avait atteint son but et à partir de ce moment, les rapports entre François et Poutine ont été au beau fixe, jusqu’à donner lieu, le 12 février 2016, à la rencontre historique à l’aéroport de La Havane entre le pape et le patriarche de Moscou, Cyrille, avec la signature conjointe d’un document – souligne Matzuzzi – « qui n’avait pas grand-chose à voir avec le Vatican et semblait avoir été écrit au Kremlin ».
Cette volte-face pro-russe, plus encore que pro-syrienne, a conduit à sacrifier l’Église catholique d’Ukraine, rattachée, y compris militairement, à Moscou sur son territoire. Mais au jugement de François, la balance des intérêts penchait naturellement en faveur d’une entente avec Moscou.
Quant à l’islam, François a rapidement montré qu’il entendait poursuivre une « fraternité » interreligieuse générique, même au prix de se taire sur les actes d’agression perpétrés au nom d’Allah, qu’il est même allé jusqu’à parfois justifier.
Le 7 janvier 2015, à paris, des islamistes radicaux massacrent des dizaines de journalistes et de dessinateurs de la revue satyrique « Charlie Hebdo », accusés de tourner leur foi en dérision. Et huit jours plus tard, au cours de la conférence de presse dans l’avion pendant le vol entre le Sri Lanka et Manille, le pape a fait ce commentaire textuel, en mimant avec le poing serré vers son majordome Alberto Gasbarri :
« C’est vrai que l’on peut réagir violemment, mais si M. Gasbarri, un grand ami à moi, dit une grossièreté contre ma mère, il recevra un coup de poing! C’est normal! C’est normal! […] Beaucoup de personnes parlent mal des religions, se moquent d’elles, disons qu’elles transforment en jouet la religion des autres, ces personnes provoquent et il peut arriver ce qui arrive si M. Gasbarri dit quelque chose contre ma mère ».
Le 26 juillet 2016, en France, nouvel assassinat au nom d’Allah, et un prêtre âgé, Jacques Hamel, est décapité sur l’autel. Cinq jours plus tard, dans l’avion de retour de Cracovie, interrogé sur cette question, voici comment a répondu François :
« Je n’aime pas parler de violence islamique, car tous les jours, quand je feuillette les journaux je vois des violences, ici en Italie : celui qui tue sa fiancée, un autre qui tue sa belle-mère… Et il s’agit de catholiques baptisés violents ! Ce sont des catholiques violents… […] Je crois qu’il n’est pas juste d’identifier l’islam avec la violence. Cela n’est pas juste et cela n’est pas vrai ! J’ai eu un long dialogue avec le grand imam de l’université d’Al-Azhar et je sais ce qu’ils pensent : ils cherchent la paix, la rencontre. […] Le terrorisme grandit quand il n’y a pas d’autre option, quand au centre de l’économie mondiale il règne le dieu argent et non la personne, l’homme et la femme. Cela est un terrorisme de base contre toute l’humanité ».
Et effectivement, le « long dialogue » cité par le pape avec le grand imam d’Al-Azhar avait bien eu lieu deux mois auparavant, le 23 mai 2016, à Rome, en réparation de la fracture qui avait eu lieu en 2011 avec Benoît XVI. Et cette nouvelle entente a connu au cours des années qui suivirent des développements spectaculaires, de la signature conjointe d’un document sur la « fraternité humaine » à Abou Dhabi aux Émirats Arabes Unis le 4 février 2019, à l’encyclique « Fratelli tutti » du 3 octobre 2020, que le pape a ouvertement déclaré avoir écrit « motivé de manière particulière par le grand imam ».
Toutefois, dans le même temps, il y a un régime musulman avec lequel François entre en froid : la Turquie de Recep Tayyip Erdogan.
En effet, Erdogan était irrité depuis l’initiative du pape en défense du régime syrien d’Al-Assad, son rival régional. Et François en avait soigneusement tenu compte, en faisant profil bas lors de sa visite en Turquie de novembre 2014.
Mais ensuite, après avoir choisi le grand imam d’Al-Azhar comme son compagnon de route, il abandonna Erdogan avec toutes les précautions diplomatiques. Le 12 avril 2015, à la messe en mémoire du martyre du peuple arménien, François a pour la première fois dans la bouche d’un pape désigné ce martyre comme un véritable « génocide » à proprement parler, perpétré par la Turquie cent ans auparavant, « le premier génocide du XXe siècle ».
Que n’avait-il fait là ! Les réactions courroucées n’ont pas tardé à fuser depuis la Turquie et d’Erdogan en personne. L’ambassadeur auprès du Saint-Siège a été rappelé à Ankara et ne reviendra à Rome qu’un an plus tard. Mais François n’en démord pas. En 2016, il visite l’Arménie et dénonce à nouveau le « génocide », en ajoutant par-dessus le marché – lors de la traditionnelle conférence de presse sur le vol du retour » – n’avoir jamais eu d’autre mot pour désigner l’extermination des Arméniens, pendant toutes ses années passées en Argentine.
Le 5 février 2018, à Rome, Erdogan est reçu en audience par le pape François, et finissent par trouver un terrain d’entente anti-israélienne temporaire en condamnant la décision de Donald Trump de déplacer l’ambassade américaine à Jérusalem, en tant que véritable capitale de l’État hébreu. Mais les désaccords avec le pape François reprennent de plus belle le 12 juillet 2020, quand François se déclarera publiquement « très affecté » par la transformation de la basilique Sainte-Sophie en mosquée.
Mais entretemps, la seconde opération de bon voisinage avec les musulmans prenait forme, ce qui pour François revient à tisser des rapports non pas avec des États mais avec des personnes individuelles particulièrement représentatives. Après l’entente avec le sunnite Al-Tayyeb, le pape mise sur une rencontre avec le grand ayatollah chiite Al-Sistani. Et il réussit à la concrétiser le 3 mars 2021, au cours d’un voyage en Iraq audacieux et bien conçu, le premier jamais effectué par un pape.
Et en effet, Al-Sistani est une personnalité d’une envergure exceptionnelle, y compris au niveau géopolitique. Il est né en Iran, mais il est antithétique aussi bien au régime politique qu’à la volonté de puissance de sa nation d’origine, que surtout à la version de l’islamisme chiite incarnée par Khomeini et ses successeurs. En Iraq, où il vit depuis plusieurs dizaines d’années, Al-Sistani prêche une coexistence pacifique entre sunnites et chiites et conteste à la racine la « wilayat al-fahiq », le théorème khomeiniste qui assigne aux docteurs de la loi islamique le pouvoir politique en plus du pouvoir religieux.
L’un des effets de la rencontre entre le pape François et Al-Sistani sera que bientôt le grand imam sunnite d’Al-Azhar se rendra lui aussi en Iraq, à Najaf, pour rencontrer pour la première fois le grand ayatollah chiite. Les préparatifs de ce voyage sont déjà bien avancés et auront un impact important sur les ententes et les rivalités qui sont en pleine évolution dans le monde musulman.
En effet, l’opposition séculaire entre sunnites et chiites ou entre arabes et perses, dans laquelle le Vatican a traditionnellement tendance à privilégier l’entente avec Téhéran, fait aujourd’hui place à une configuration plus complexe avec d’un côté l’Iran, la Turquie, le Qatar, les libanais du Hezbollah et les palestiniens du Hamas et de l’autre l’Égypte, l’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis, le Maroc et en partie l’Iraq également, avec des sunnites et des chiites mélangés sur l’un et l’autre front.
Par ses initiatives, François s’est dans les fait alignés au second front, qui est également celui qui est le plus ouvert à Israël et le plus hostile à l’idéologie des Frères Musulmans et des réseaux terroristes connexes. Il a même contribué lui-même à le construire en favorisant le rapprochement entre Al-Tayyeb et Al-Sistani. Miraculeusement, même ses battements d’aile finissent par influer sur l’équilibre mondial.
Un article de Sandro Magister, vaticaniste à L’Espresso.
Ref.François, Al-Tayyeb, Al-Sistani. Le miracle de la triple entente
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Quand le Conseil de l'Europe promeut le hijab
De François-Xavier Bellamy sur le site du Figaro via artofuss.blog :
François-Xavier Bellamy: «Le Conseil de l’Europe promeut le hijab, un indice de plus de l’entrisme des islamistes»
3 novembre 2021
TRIBUNE – Le Conseil de l’Europe, institution distincte de l’Union européenne, a soutenu et financé, avec le concours de la Commission européenne, une campagne faisant l’apologie du hijab, avant de la suspendre devant le tollé. Cette affaire n’est en rien une maladresse anecdotique, démontre le député européen.
François-Xavier Bellamy est chef de la délégation de LR au sein du groupe du Parti populaire européen (PPE). Par ailleurs normalien et professeur agrégé, il est notamment l’auteur de «Demeure. Pour échapper à l’ère du changement perpétuel» (Grasset, 2018).
C’est une courte vidéo promotionnelle comme on en voit tant sur les réseaux sociaux. Une jeune femme vous regarde, souriante. Une ligne balaie l’écran de gauche à droite: cette fois, le visage est voilé. L’opération se répète plusieurs fois, avec des visages différents, et un message: «La liberté est dans le hijab.» Ce message publicitaire est relayé sur les réseaux sociaux, accompagné d’un slogan: «Joy in hijab», «la joie dans le hijab».
Contre toute apparence, cette campagne n’est pas diffusée par une organisation islamique, mais par le Conseil de l’Europe, avec le cofinancement de la Commission européenne. C’est une courte vidéo, qui aura en quelques heures fait couler beaucoup d’encre. Pourtant, elle n’est qu’un symptôme parmi bien d’autres, qui ensemble permettent d’établir le constat d’une dérive de grande ampleur.
À LIRE AUSSI «La liberté dans le hijab»: une campagne de communication du Conseil de l’Europe fait polémique
Depuis des années, des hauts fonctionnaires, des universitaires, des chercheurs alertent sur les stratégies d’entrisme qu’ils observent de la part d’une nébuleuse islamiste qui, sous couvert d’antiracisme, prend place dans l’environnement des institutions européennes: des associations, des fédérations, des organisations non gouvernementales proposent des projets et obtiennent des financements européens.
Elles utilisent les mots-clés en vogue: défendre l’inclusion, promouvoir la diversité, contrer les «discours de haine»… Et, au nom de la «lutte contre l’islamophobie», elles parviennent à imposer leurs thèses. Ainsi du projet «dialogue sur la radicalisation et l’égalité» (DARE), financé dans le cadre du programme de recherche européen Horizon 2020, qui a conclu au fait que la «radicalisation» (le mot islamisme n’est jamais cité) s’expliquait par les «discriminations structurelles» en Europe. Improbable retournement: les pays victimes d’une série d’attentats en deviennent soudain les coupables…
Le Parlement européen lui-même ne manque plus une occasion de relayer ce type d’accusation: quelques jours après la mort de George Floyd, il votait une résolution dénonçant «l’oppression et le racisme structurel en Europe», ainsi que «le recours excessif ou létal de la force par la police dans l’Union européenne», sans qu’on voie bien où pouvait se trouver la responsabilité des forces de l’ordre européennes dans la mort d’un citoyen américain au Minnesota.
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Une remise en cause de l’histoire des débuts de l’islam telle qu’elle est généralement transmise
Des propos recueillis par Annie Laurent sur le site de La Nef :
Les débuts de l’islam démythifiés
Hela Ouardi, universitaire tunisienne, publie une œuvre importante qui démythifie l’histoire des débuts de l’islam. Rencontre à l’occasion de la sortie du troisième tome des Califes maudits.
La Nef – Votre œuvre remet en cause l’histoire des débuts de l’islam telle qu’elle est généralement transmise : vous qui enseignez la littérature française à l’Université de Tunis, comment avez-vous décidé de vous plonger dans ce travail d’historienne à la fois iconoclaste et titanesque ?
Hela Ouardi – Il y a deux points importants dans votre question. Le premier concerne « la remise en cause » : je pense que je fais exactement l’inverse dans la mesure où je tente de restaurer la véritable histoire des débuts de l’islam et de mettre en évidence le caractère mythique et mystificateur de la version « généralement transmise » comme vous dites. Au début de mon investigation, je me suis posé cette double question : où se trouve cette version authentique ? Qui est chargé de la transmettre ? La réponse aux deux questions c’est : nulle part et personne. Tout ce que le musulman connaît de la genèse de sa religion, ce sont des bribes de récits légendaires et incohérents. Donc j’estime que mon projet se fonde sur deux gestes majeurs qui n’ont rien à voir avec une quelconque attitude subversive : mettre de l’ordre dans cette histoire et la rendre intelligible. Le parti pris narratif dans mes livres me permet d’atteindre ce double objectif.
Quant au rapport avec ma spécialité académique, il va de soi. Ma formation littéraire, loin de me rendre étrangère au travail d’investigation historique sur la Tradition musulmane, m’y a très bien préparée. Le corpus de cette tradition est un corpus littéraire par excellence (et nous n’avons que cela pour nous renseigner sur les débuts de l’islam – il n’y a aucune trace archéologique datant de la période du Prophète et même de ses premiers successeurs). L’historien de l’islam est donc condamné à analyser une tradition littéraire. Et là je dois reconnaître que je suis un peu « comme un poisson dans l’eau » car ma grande familiarité avec l’analyse des textes me met dans de très bonnes prédispositions en la matière. Le seul changement notable par rapport à mes recherches précédentes (littérature et civilisation françaises) c’est celui de la langue ; or, comme je suis bilingue, l’étude des textes en arabe et leur restitution en français ne me posent pas de problèmes particuliers.
Vos enquêtes se réfèrent à une multitude de sources islamiques, sunnites et chiites. Par quel moyen avez-vous pu y accéder alors que beaucoup d’entre elles semblent non transmises, comme si on voulait les rendre suspectes pour ne pas gêner l’approche hagiographique de l’histoire ?
Comme je vous l’ai dit, il n’existe pas de « version officielle » de l’histoire de l’islam. Par ailleurs, je ne suis pas tout à fait d’accord avec l’idée de suspicion que vous évoquez : les musulmans vénèrent les sources de la Tradition sans les lire et sans les connaître ; et tout mon travail consiste à révéler le contenu de ces livres pour les rendre accessibles en brisant un peu la cage en verre dans laquelle on les a emprisonnés pendant des siècles.
Vous soulignez qu’aucun texte écrit par Mahomet ou dicté par lui à ses secrétaires n’a été conservé alors que, contrairement à la légende, il n’était pas illettré : pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?
L’illettrisme présumé de Mahomet est une ruse théologique destinée à appuyer le dogme du miracle coranique. Pour montrer que le Coran est une œuvre divine et non humaine, on a véhiculé l’idée qu’un analphabète n’était pas capable de produire un livre aussi érudit et bien écrit. Dans mes ouvrages, je donne des preuves irréfutables tirées de la tradition musulmane qui anéantissent la légende de l’illettrisme du prophète de l’islam. Cette légende s’est d’ailleurs imposée à la faveur du flou sémantique qui entoure l’adjectif arabe « ummî » dont Mahomet est souvent flanqué : ce mot désigne à la fois l’analphabète, l’adepte d’une religion sans Livre (au début, les détracteurs de Mahomet ont refusé de reconnaître sa prophétie parce qu’il n’a pas apporté de livre sacré) ; enfin, le mot « ummî » peut également désigner un homme originaire de La Mecque qui était surnommée « Umm al-qurâ » (ce surnom figure dans le Coran). Donc vous voyez, le flou autour de l’illettrisme de Mahomet est le pur produit d’une polysémie lexicale !
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International : la lucidité du cardinal Coutts
De FSSPX.NEWS :
La lucidité d’un cardinal
28 OCTOBRE, 2021Le cardinal Joseph Coutts Un haut prélat pakistanais pointe du doigt l’action des Etats-Unis et de l’Union européenne au Proche Orient, les accusant de « duplicité » et d’« hypocrisie », les rendant en partie responsables des persécutions subies par les chrétiens dans la région.
Le cardinal Joseph Coutts est archevêque émérite de Karachi, au Pakistan. C’est au cours d’un voyage à Rome qu’il a accordé, le 18 octobre 2021, un entretien à l’agence d’informations Crux, évoquant largement la situation des chrétiens dans son pays.
Le haut prélat évoque l’islamisation croissante de son pays, avec la mise en place de programmes scolaires de plus en plus hostiles à la minorité chrétienne :
« De nombreux musulmans voient en nous le diable, ou un produit du colonialisme. S’il se passe quelque chose contre l’islam en Occident, par exemple, à Dieu ne plaise, un cas de blasphème quelque part, nous sommes ici sur des charbons ardents, parce que cela signifie une église de plus qui sera attaquée, et des chrétiens qui seront brutalement assassinés. »
Le cardinal Coutts refuse l’idée selon laquelle les catholiques de son pays ne seraient pas de vrais Pakistanais : « nous ne sommes pas des migrants, attention. Nous appartenons au pays autant qu’aux musulmans, aux hindous et à tout le monde, comme l’a rappelé le fondateur [du Pakistan], Muhammad Ali Jinnah, qui était un contemporain du Mahatma Gandhi et de Nehru. »
L’influence de l’Arabie saoudite dans le pays est également pointée du doigt : « désormais, même les musulmans les plus modérés se radicalisent, en s’inspirant de l’Arabie saoudite, car nous recevons beaucoup d’argent de la part Saoudiens », explique le cardinal.
Ce sont l’Arabie Saoudite, les Etats-Unis et l’Union européenne qui ont créé les talibans
Quand on lui parle de l’Occident, notamment des Etats-Unis et de l’Union européenne, l’archevêque émérite de Karachi se fait plus accusateur, les taxant de « duplicité » et d’« hypocrisie ».
Et Mgr Coutts de rappeler que « la première fois qu’une église a été attaquée au Pakistan, c’était une semaine après que les Marines américains ont commencé à bombarder l’Afghanistan avec des bombardiers B52 et que les images des télévisions ont montré des dizaines de milliers de réfugiés qui ont commencé à traverser la frontière, les femmes et les enfants en pleurs.
« Chez nous, tout le monde a été choqué. Deux jeunes gens armés de fusils automatiques ont alors fait irruption dans une église un dimanche, au Pakistan, massacrant purement et simplement les chrétiens qui priaient là. Nous n’avions jamais eu ça auparavant. »
Pour le haut prélat, cela ne fait aucun doute : « ce sont l’Arabie saoudite, les Etats-Unis et l’Union Européenne qui ont créé les talibans ». Et de conclure avec lucidité :
« Les Américains sont intervenus en Afghanistan en 2001, pensant que, par la force, ils pourraient tout résoudre, dépenser des milliards afin de créer une armée nationale afghane, ne comprenant pas qu’il s’agit d’une société tribale vieille de plusieurs siècles, où la première loyauté des jeunes hommes que vous recrutez et payez n’est pas une nation, mais leur ethnie. »
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Michael Nazir-Ali, ancien évêque anglican de renom et autorité en matière d'islam, reçu dans l'Église catholique
D'Edward pentin sur le National Catholic Register :
Michael Nazir-Ali, ancien évêque anglican de renom, reçu dans l'Église catholique
La décision de Lord Nazir-Ali est un geste d'une "proportion et d'une signification monumentales", déclare un autre ancien anglican et converti à l'Église catholique, Gavin Ashenden.
14 octobre 2021
Un éminent évêque retraité de l'Église d'Angleterre, autrefois pressenti pour devenir un futur archevêque de Canterbury, a été reçu dans l'Église catholique, devenant ainsi l'un des ecclésiastiques anglicans les plus en vue à faire le voyage à Rome, probablement depuis le père Ronald Knox en 1917.
Michael Nazir-Ali a été reçu dans l'Église le 29 septembre, en la fête de saint Michel Archange et de tous les anges, et sera ordonné prêtre catholique "en temps voulu", selon une déclaration publiée par l'Ordinariat personnel de Notre-Dame de Walsingham et la Conférence des évêques d'Angleterre et du Pays de Galles.
L'ancien évêque anglican a déclaré qu'il croyait que le "désir anglican d'adhérer à l'enseignement apostolique, patristique et conciliaire peut maintenant être mieux maintenu dans l'Ordinariat" et qu'il était "impatient de bénéficier des richesses d'autres parties de l'Église, tout en apportant peut-être une modeste contribution au maintien et à l'amélioration du patrimoine anglican au sein de la communauté élargie".
"Le ministère dans l'Église du Pakistan, au Moyen-Orient en général, dans l'Église d'Angleterre et dans la Communion anglicane au sens large reste précieux pour moi et je vois cela comme une étape supplémentaire dans le ministère de notre Seigneur commun et de son peuple", a déclaré Nazir-Ali. "En ce moment, je demande des prières comme je continue à prier pour toutes les parties de l'Église".
Benoît XVI a créé l'ordinariat personnel en 2010, une structure canonique par laquelle les anglicans souhaitant entrer en pleine communion avec l'Église catholique pouvaient le faire tout en conservant leur patrimoine anglican.
Mgr Keith Newton, l'Ordinaire de l'Ordinariat, a déclaré que lui-même et les autres membres de la structure canonique "se réjouissent de sa réception dans la pleine communion et de son ordination prochaine".
Il a ajouté que l'ancien évêque anglican "apporte une grande expérience de la communion anglicane et se trouve dans une position unique pour articuler ce patrimoine anglican, décrit par le pape Benoît XVI comme un trésor à partager, qui a maintenant une place honorée dans l'Église universelle".
Une autorité en matière d'islam
Marié et père de deux fils, possédant la double nationalité pakistanaise et britannique, Nazir-Ali a dirigé pendant 15 ans l'ancien diocèse de St John Fisher en tant qu'évêque anglican de Rochester en Angleterre, période pendant laquelle il s'est forgé une réputation de grand défenseur de la foi et de la culture chrétiennes et de défenseur des chrétiens persécutés.
Ses commentaires parfois francs, étayés par ce que l'ancien archevêque de Canterbury, Rowan Williams, a appelé son "énorme compétence théologique", l'ont parfois amené à se heurter aux pouvoirs séculiers, en particulier sur l'islam, sujet sur lequel il faisait autorité au sein de la Communion anglicane.
En 2008, un an avant son départ de Rochester, il a reçu des menaces de mort pour avoir déclaré à un journal dominical que les extrémistes islamiques créaient des "zones interdites" pour les non-musulmans en Grande-Bretagne. Il a également déclaré que l'Église ne faisait pas assez pour convertir les musulmans au christianisme et a mené des initiatives de dialogue entre la Communion anglicane et des institutions universitaires islamiques telles que l'université Al-Azhar au Caire et son équivalent chiite en Iran.
En 2009, il a déclaré que le comportement homosexuel était un péché et a appelé les homosexuels à "se repentir et à être changés". Plus tôt cette année, il a écrit un article dans The Spectator appelant l'Église d'Angleterre à se concentrer sur "l'aide aux personnes en difficulté de notre nation, le soutien de la vie familiale et l'encouragement des gens à revenir à l'église" au lieu de se consacrer à la "théorie critique des races". Il a également accusé l'Église d'Angleterre de "sauter sur les vagues à la mode" telles que la "cancel culture" et le "wokisme".
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L'appel du muezzin retentira dans le ciel de Cologne
De Delphine Nerbollier sur le site du journal la Croix :
La ville de Cologne autorise l’appel à la prière musulmane
La cité rhénane lance un projet pilote de deux ans et suscite une vaste polémique.
13/10/2021
Les muezzins peuvent désormais appeler les fidèles à la prière du vendredi, la plus importante de la semaine pour les musulmans, dans un créneau prévu entre 12 heures et 15 heures, et sans dépasser la durée de cinq minutes.DORIS.H/
L’appel à la prière pour les musulmans est officiellement autorisé à Cologne. Les autorités de la cité rhénane ont annoncé, le 6 octobre, la mise en place d’un projet pilote, en concertation avec les représentants des 35 mosquées de la ville. Les muezzins peuvent désormais appeler les fidèles à la prière du vendredi, la plus importante de la semaine pour les musulmans, dans un créneau prévu entre 12 heures et 15 heures, et sans dépasser la durée de cinq minutes.
Chaque mosquée devra en faire la demande auprès des autorités, adapter le niveau sonore et informer au préalable les habitants du quartier. Autre condition : chaque communauté devra designer une personne chargée de répondre aux possibles plaintes. Dans deux ans, le projet devra être évalué pour être éventuellement prolongé.
Valoriser la diversité religieuse
Pour la maire de Cologne, Henriette Reker, sans étiquette politique, ce projet est un « signe d’acceptation mutuelle des religions ». « Nous prenons en compte les intérêts religieux légitimes des nombreux musulmans de notre ville cosmopolite », a déclaré cette élue, victime en 2015 d’une attaque au couteau de la part d’un extrémiste de droite. « Lorsque nous entendons l’appel du muezzin en plus des cloches des églises de notre ville, cela montre que la diversité est valorisée et vécue de manière concrète à Cologne », a-t-elle ajouté dans un communiqué. Connue pour son imposante cathédrale et comme le siège du plus grand évêché catholique d’Allemagne, la cité rhénane compte 120 000 musulmans, soit 12 % de sa population.
Cette annonce a suscité la satisfaction des principales associations musulmanes, à commencer par l’Union des affaires turco-islamiques (Ditib) qui a financé la plus grande mosquée de la ville. « Cette mesure est l’expression de l’implantation des musulmans qui vivent depuis des générations en Allemagne », estime cette institution, bras droit en Allemagne du ministère turc des affaires religieuses. Bülent Ucar, directeur de l’institut de théologie islamique à l’université d’Osnabrück, juge cette décision « tardive » mais conseille de ne pas utiliser de haut-parleurs « afin de ne pas trop déranger le voisinage ».
Un « acte symbolique naïf » pour des opposants
Car le projet divise la société. Serap Güler, ministre régionale de l’intégration en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, membre du parti conservateur CDU et d’origine turque, estime ne « pas avoir besoin de l’appel à la prière pour exercer son droit à la religion ». Sa collègue Lale Akgün, du parti social démocrate, y voit une manière pour l’association Ditib d’imposer ses vues sur les opposants au régime turc. « C’est un coup de poing dans le visage de tous les dissidents d’Erdogan », écrit-elle sur le réseau social Twitter. Quant au psychologue Ahmad Mansour, il estime que cet « acte symbolique naïf »«ne renforce pas l’acceptation envers les musulmans mais mène à plus de divisions au sein de la société ».« Dans une société laïque, il ne doit pas être question de présence de la religion dans la sphère publique mais de liberté de croyance » ajoute-t-il.
L’extrême droite vent debout
Sans surprise, le parti d’extrême droite, Alternative pour l’Allemagne (AfD) est vent debout. L’appel à la prière « est l’expression d’une revendication politique de pouvoir, de soumission et d’islamisation. L’AfD rejette cela », résume la députée Beatrix von Storch.
Polémique, ce projet n'est toutefois pas une première outre Rhin. La région de la Hesse et d'autres villes de Rhénanie-du-Nord-Westphalie comme Munster autorisent déjà l'appel à la prière. Du ressort des autorités locales, aucune réglementation fédérale n’est à attendre sur ce sujet.
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Le « lent génocide » des chrétiens au Nigeria
De Filipe Avillez sur Aleteia.org :
L’Église dénonce le « lent génocide » des chrétiens au Nigeria
09/10/21L’Église catholique du Nigeria affirme que les chrétiens de ce pays sont victimes d’un processus de nettoyage ethnique effectué par les musulmans peuls, avec la complicité de l’État.
Les mots sont forts et témoignent de l’urgence de la situation au Nigeria. « Il ne s’agit pas seulement de questions de pâturage. Pour moi, c’est une guerre de religion », a déclaré Mgr Wilfred Anagbe, évêque du diocèse de Makurdi, dans l’État de Benue (Nigeria), lors d’une conférence organisée par l’Aide à l’Église détresse (AED). Plusieurs participants ont confirmé que la violence qui sévit dans le pays depuis plusieurs années n’est pas seulement due à des « affrontements » entre bergers musulmans et agriculteurs chrétiens pour la possession de la terre. « Ils ont un programme qui est d’islamiser ce pays. Et ils le font en éliminant méthodiquement tous les chrétiens et en occupant les territoires. S’il s’agissait de pâturage, pourquoi tuer des gens ? Et pourquoi brûler leurs maisons ? », interpelle-t-il.
Implication des plus hautes sphères de l’État
Johan Viljoen, directeur de l’Institut sud-africain Denis Hurley Peace, qui œuvre à la promotion de la paix, de la démocratie et de la justice et qui étudie les attaques armées des Peuls dans le sud-est du Nigeria, parle d’une « occupation concertée et bien planifiée ». « Tout cela se passe sous le couvert de Miyetti Allah, dirigée par le président Buhari », dit-il, faisant référence à une organisation qui prétend défendre les droits des bergers peuls.
L’implication des plus hautes sphères de l’État est l’une des raisons pour lesquelles les forces armées se sont montrées réticentes à intervenir et à contrôler la violence. « Je ne pense pas que l’armée essaie de résoudre quoi que ce soit. Ils chercheraient plutôt à encourager les choses », a déclaré Johan Viljoen, en rappelant une récente mission d’enquête au Nigeria au cours de laquelle des collaborateurs de son institut ont été arrêtés tous les cinq kilomètres par des soldats, tous peuls, qui se montraient menaçants et pointaient des armes sur eux. Après des années de violence, « pas un seul Peul n’a été poursuivi en justice pour violences », ajoute-t-il.
Mgr Wilfred a souligné que les forces armées sont sous le contrôle direct du président, et que par ailleurs, « tous les chefs de service, de la marine, de l’armée de l’air et de la police, sont musulmans ». Les chiffres officiels indiquent que cette vague de violence a causé environ 3.000 morts au cours des dernières années, mais les personnes présentes sur le terrain affirment que ce chiffre pourrait atteindre 36.000, sans compter les nombreuses personnes déplacées, démunies et profondément traumatisées par ce qu’elles ont vécu. De nombreuses ONG ayant quitté les zones dangereuses, l’Église catholique et ses institutions sont les seules alternatives fiables pour apporter de l’aide aux populations sur le terrain.
Les représentants de l’Église demandent aux occidentaux de contribuer à l’acheminement des secours, mais aussi d’aider autrement. « Il faut changer le discours, on ne peut pas suivre le récit du gouvernement nigérian », a insisté le père Remigius Ihyula, qui est également du diocèse de Makurdi. « Ils ont placé leurs protégés dans les ambassades du monde entier, si bien que la parole officielle donne l’impression qu’il ne se passe rien ».
Ce n’est pas un affrontement, c’est un lent génocide. Déplacer des personnes de leur terre ancestrale, les priver de leurs moyens de subsistance et les massacrer est une forme de génocide.
Le père Joseph Fidelis, du diocèse de Maiduguri, a expliqué pour sa part qu’il est irritant d’entendre parler « d’affrontements » ou de « conflits » entre groupes opposés. « Ce n’est pas un affrontement, c’est un lent génocide. Déplacer des personnes de leur terre ancestrale, les priver de leurs moyens de subsistance et les massacrer est une forme de génocide ».
Le Nigeria est le pays le plus peuplé d’Afrique. Il n’y a pas de chiffres officiels, mais les estimations indiquent une répartition égale entre musulmans et chrétiens, les premiers étant majoritaires dans le nord et les seconds dans le sud. Cependant, la violence s’est maintenant propagée dans tout le pays, menaçant la stabilité de l’ensemble du pays.
Lire également : Persécutions religieuses, violences… Le cri d’alarme d’un évêque nigérian