Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Synode

  • Ce que changent les nouvelles règles de la Curie vaticane — et pourquoi elles sont importantes

    IMPRIMER

    D'Andrea Gagliarducci sur le NCR :

    Ce que changent les nouvelles règles de la Curie vaticane — et pourquoi elles sont importantes

    ANALYSE : En redéfinissant les compétences, en renforçant la responsabilité et en institutionnalisant la consultation, les nouvelles réglementations définissent comment la Curie romaine fonctionnera sous le pape Léon XIV dans la prochaine phase de la gouvernance papale.

    Le nouveau Règlement général et administratif de la Curie romaine, publié le 23 novembre, a marqué la conclusion de la réforme de la Curie initiée par le pape François.

    Presque simultanément, Mgr Marco Mellino, nommé secrétaire de la Commission interdicastérielle pour la révision des règlements de la Curie romaine sous le pontificat du pape François, fut nommé secrétaire adjoint du Dicastère pour les textes législatifs par le pape Léon XIV. Cette nomination marque l'achèvement des travaux et l'ouverture d'une nouvelle ère.

    Origine et objet de la nouvelle réglementation

    La nécessité d’une nouvelle réglementation découle de la profonde réforme de la Curie ordonnée par la constitution apostolique Praedicate Evangelium de mars 2022. Conformément à ce mandat, certaines procédures ne pouvaient plus être appliquées comme auparavant et les responsabilités économiques ont dû être transférées au Secrétariat pour l’Économie. La nouvelle réglementation visait également à concrétiser et à rendre vérifiable la procédure d’écoute requise par l’impulsion « synodale » que le pape François souhaitait donner à l’Église.

    Suite à la constitution apostolique, une commission interdicastérielle a été instituée en avril 2022. La composition de cette commission, composée de prélats nommés par le pape François, a précisé les responsabilités qui lui seraient confiées. Elle était présidée par Mgr Filippo Iannone, ancien préfet du Dicastère pour les textes législatifs, nommé depuis par Léon XIV à la tête du Dicastère pour les évêques.

    Il comprenait également l'archevêque Edgar Peña Parra, le sostituto (délégué aux affaires générales) du Secrétariat d'État ; l'évêque Nunzio Galantino, alors président de l'Administration du patrimoine du Siège apostolique (APSA) et maintenant retraité ; le père Juan Antonio Guerrero Alves, alors préfet du Secrétariat pour l'économie, qui a démissionné de ce poste en novembre 2022 ; et Vincenzo Buonomo, en sa qualité de conseiller général de l'État de la Cité du Vatican.

    L’APSA et le Secrétariat à l’Économie devaient assumer la responsabilité de la gestion économique, notamment en matière de recrutement, de rémunération du personnel et de gestion, auparavant dévolue au Secrétariat d’État. Ce dernier, bien que réduit en raison de sa mauvaise gestion financière, demeurait un acteur central de la coordination des dicastères.

    Continuité avec la tradition

    Cette réforme présente trois caractéristiques principales : la continuité avec la tradition de l’Église, l’adaptation administrative et une impulsion synodale.

    Premièrement, le règlement s’inscrit dans la continuité de la tradition de l’Église, sans rompre avec le passé. La langue officielle demeure le latin, bien que le règlement précise que les documents internes peuvent également être rédigés « dans d’autres langues ». La version précédente du Règlement général indiquait qu’ils devaient être rédigés en latin, les autres langues étant autorisées « en cas de besoin ». Qu’est-ce qui a changé ?

    En clair, le nouveau règlement reconnaît que le latin demeure la langue officielle de l'Église, mais que nombre de fidèles n'en ont pas une connaissance suffisante. Le latin reste la langue officielle, mais la possibilité de rédiger des actes dans d'autres langues est élargie. Après tout, l'editio typica (l'édition originale servant de référence pour toute traduction) des documents originaux du pape François était souvent en espagnol et non en latin.

    Lire la suite

  • Le pape répond aux journalistes dans l'avion qui du Liban le ramène à Rome

    IMPRIMER

    De Vatican News :

    Léon XIV: «Je pensais prendre ma retraite, mais je me suis soumis à Dieu»

    Lors du vol de retour du Liban vers Rome, Léon XIV a rencontré les journalistes et parlé du rôle du Saint-Siège qui travaille «en coulisses» aux négociations de paix afin que les parties déposent les armes. Au sujet de l'Ukraine, il a souligné l'implication de l'Europe et l'importance du rôle que pourrait jouer l'Italie. Il a répondu à une question sur sa réaction à son élection au conclave et sur sa spiritualité: donner sa vie à Dieu et laisser que lui soit «le chef».

    Retranscription en intégralité de la conférence de presse du Pape Léon XIV à bord de l'avion le reconduisant à Rome:

    «Tout d'abord, je tiens à remercier tous ceux qui ont travaillé dur. Je voudrais que vous transmettiez ce message aux autres journalistes, tant en Turquie qu'au Liban, qui ont travaillé pour communiquer les messages importants de ce voyage. Vous méritez tous également un tonnerre d'applaudissements pour ce voyage». C'est ainsi que le Pape Léon XIV a salué les 81 journalistes présents sur le vol qui le ramenait de Beyrouth, répondant à leurs questions en anglais, en italien et en espagnol. Son voyage apostolique, le Moyen-Orient, la guerre en Ukraine, la présence de l'Europe dans les négociations de paix ou la situation au Venezuela figurent parmi les thèmes abordés par le Souverain pontife, qui a reçu en cadeau d'un correspondant libanais un tableau peint à la main en direct à la télévision, le représentant ces derniers jours sur les lieux symboliques visités au pays du cèdre.

    Joe Farchakh (LBC International): Vous êtes un Pape américain qui mène un processus de paix. Ma question est la suivante: allez-vous utiliser vos contacts avec le président Donald Trump et le Premier ministre Benjamin Netanyahu? Dans l'avion, vous avez déclaré que le Vatican était l'ami d'Israël. Allez-vous soulever la question de l'arrêt des agressions d'Israël contre le Liban? Une paix durable est-elle possible dans la région?

    Tout d'abord, oui, je pense qu'une paix durable est possible. Je pense que lorsque nous parlons d'espérance, lorsque nous parlons de paix, lorsque nous regardons vers l'avenir, nous le faisons parce qu'il est possible que la paix revienne dans la région et dans votre pays, le Liban. En fait, j'ai déjà eu quelques conversations avec certains des dirigeants des pays que vous avez mentionnés et j'ai l'intention de continuer à le faire, personnellement ou par l'intermédiaire du Saint-Siège, parce que le fait est que nous entretenons des relations diplomatiques avec la plupart des pays de la région, et nous espérons, bien sûr, continuer à relayer cet appel à la paix dont j'ai parlé à la fin de la messe d'aujourd'hui (mardi).

    Imad Atrach (Sky News Arabia): Dans votre dernier discours, vous avez clairement appelé les autorités libanaises à négocier, dialoguer, construire. Le Vatican va-t-il faire quelque chose de concret dans ce sens? Lundi soir, vous avez rencontré un représentant chiite. Avant votre voyage, le Hezbollah vous a envoyé un message, je ne sais pas si vous l'avez reçu, si vous l'avez lu. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet? Je vous remercie beaucoup d'avoir visité le Liban, c'était un rêve pour nous.

    C'est un aspect de ce voyage qui n'était pas sa raison principale, car le voyage a été conçu dans une perspective œcuménique, avec le thème de Nicée, la rencontre avec les patriarches catholiques et orthodoxes et la recherche de l'unité dans l'Église. Mais, au cours de ce voyage, j'ai également eu des rencontres personnelles avec des représentants de différents groupes, représentant des autorités politiques, des personnes ou des groupes qui ont quelque chose à voir avec les conflits internes ou même internationaux dans la région. Notre travail n'est pas particulièrement une chose que nous déclarons publiquement, dans la rue, il se fait plutôt en coulisses. C'est quelque chose que nous avons déjà fait et que nous continuerons à faire pour convaincre les parties de déposer les armes, de renoncer à la violence et de se réunir autour d'une table de dialogue. Chercher des réponses et des solutions qui ne soient pas violentes mais qui puissent être plus efficaces.

    (Le message du Hezbollah)

    Oui, je l'ai vu, il est évident que l'Église propose qu'ils déposent les armes et que nous recherchions le dialogue. Je préfère ne pas faire d'autres commentaires pour l'instant.

    Lire la suite

  • Léon XIV modifie la composition de la Commission de l'État du Vatican et légalise la nomination de Raffaella Petrini

    IMPRIMER

    D'InfoVaticana :

    Léon XIV modifie la composition de la Commission de l'État du Vatican et légalise la nomination de Raffaella Petrini

    Léon XIV a promulgué sa deuxième lettre apostolique sous la forme d'un Motu Propriomodifiant la composition de la Commission pontificale pour l'État de la Cité du Vatican. Cette réforme, purement procédurale, introduit deux changements majeurs : premièrement, la possibilité pour cet organe de ne plus être composé uniquement de cardinaux, permettant au Pape d'y intégrer d'autres membres – laïcs, religieux ou experts – et ainsi favoriser une plus grande diversité au sein de la direction ; deuxièmement, l'établissement d'une durée de mandat de cinq ans, garantissant une gestion plus rigoureuse et responsable.

    L’entrée en vigueur de cet amendement légalise la nomination de la religieuse Raffaella Petrini, qui a pris ses fonctions en mars 2025 sous le mandat du pape François, à la présidence de la Commission pour l’État de la Cité du Vatican.

    Le document, signé le 19 novembre place Saint-Pierre et publié le 21 novembre, souligne la nécessité de consolider un modèle de gouvernance plus coresponsable face aux défis croissants de l'administration de l'État de la Cité du Vatican. Dans la lignée du pape François, le Motu Proprio s'inscrit dans la lignée de l'approche instaurée par Praedicate Evangelium , la Constitution apostolique qui a réorganisé la Curie selon le principe de « communion opérative » entre ses différents organes.

    Une étape conforme au programme synodal

    Cette réforme s’inscrit dans la dynamique synodale qui anime l’Église à l’heure actuelle. Il ne s’agit pas seulement d’ajuster les aspects juridiques de l’État du Vatican, mais aussi d’appliquer au sein de sa propre structure le principe de coresponsabilité exigé des diocèses du monde entier.

    Dans un récent entretien consacré à la mise en œuvre du Synode, Nathalie Becquart, sous-secrétaire du Secrétariat général du Synode , a expliqué que la véritable synodalité implique « d’investir dans des pratiques concrètes », et non de simples discours. Son point de vue nous aide à comprendre le sens du Motu Proprio : ouvrir l’espace de la prise de décision, élargir les équipes de travail et créer des structures qui reflètent une mission partagée.

    Lire aussi : Nathalie Becquart : « Il existe de nombreuses façons d’être Église et aucun modèle unique de vie ecclésiale ne devrait être imposé »

    Selon Becquart, il n’existe pas de modèle unique pour le chemin synodal. L’essentiel, affirme-t-elle, est que chaque Église locale, en fonction de son contexte, adopte des mécanismes lui permettant de cheminer, de discerner et de décider avec tout le Peuple de Dieu. Cela se traduit par des propositions concrètes : introduire le dialogue spirituel dans les conseils paroissiaux, organiser des assemblées synodales, instituer des conférences pastorales diocésaines, accroître la participation des laïcs (en particulier des jeunes et des femmes) aux responsabilités pastorales, et former les séminaristes et les prêtres à exercer une véritable autorité synodale.

    Un signe du style de gouvernement du nouveau pape ?

    Ce changement ne constitue ni une rupture avec les étapes précédentes, ni un changement de style de la part du nouveau pape. Il s'inscrit dans la continuité directe du processus de réforme déjà en cours. (processus initié durant le pontificat de François ndB)

    Le document prend effet immédiatement après sa publication dans L'Osservatore Romano et sera incorporé dans le commentaire officiel des Acta Apostolicae Sedis.

  • Le cardinal Zen demande de mettre un terme à la dérive synodale et de revenir à la doctrine apostolique

    IMPRIMER

    D'InfoVaticana

    Le cardinal Zen demande de mettre un terme à la dérive synodale et de revenir à la doctrine apostolique

    21 novembre 2025

    Le cardinal Joseph Zen, évêque émérite de Hong Kong, a publié une longue réflexion dans laquelle il critique fermement l'orientation actuelle du Synode sur la synodalité et met en garde contre le risque réel d'une déformation de l'identité catholique. À 93 ans, le cardinal s'impose à nouveau comme l'une des voix les plus claires face à la confusion doctrinale que connaît l'Église.

    Une leçon de fidélité : l'exemple d'Éléazar

    Zen part de la liturgie de ces jours-ci, où l'on lit le martyre d'Éléazar, le vieux maître de la Loi qui a préféré la mort plutôt que de scandaliser les jeunes en feignant de manger de la viande interdite. Le cardinal avoue s'identifier à ce personnage et souligne qu'un vieillard ne peut, à la fin de sa vie, donner un mauvais exemple à ceux qu'il a formés dans la foi.

    Le cardinal souligne qu'en cette époque de relativisme, la vérité est un « trésor caché » qui doit être partagé : il n'y a pas « ta vérité et ma vérité » ; il y a la vérité du Christ, qui révèle que nous sommes enfants de Dieu et héritiers de la vie éternelle.

    Les basiliques Saint-Pierre et Saint-Paul et la nature de l'Église

    À l'occasion de la dédicace des basiliques Saint-Pierre et Saint-Paul, Zen rappelle la structure apostolique de l'Église et la primauté de Pierre. Il affirme que l'Église est un corps visible et mystique fondé sur les apôtres, réalité aujourd'hui méconnue même au sein de l'Église elle-même.

    Critique frontale du processus synodal

    Il consacre la partie centrale de sa réflexion à une critique détaillée du processus synodal. Zen accuse la structure actuelle d'avoir transformé le Synodus Episcoporum en un « hybride » où la responsabilité épiscopale est diluée au profit d'un modèle confus de participation.

    Il accuse ainsi le synode d'utiliser des méthodologies « infantiles » qui évitent le véritable débat. Il y a un manque de transparence dans la conduite des sessions, le contrôle de la dynamique synodale par des facilitateurs et des experts. Le retrait des questions sensibles vers des groupes d'étude sans supervision claire et un document final précipité et présenté comme un « magistère expérimental ».

    Il ajoute en outre que la publication de Fiducia supplicans entre les deux sessions synodales a généré confusion et division, en introduisant des bénédictions pour les couples homosexuels dans certains contextes, en contradiction avec la discipline traditionnelle.

    « Vers l'autodestruction ? »

    Zen met en garde contre le risque de conduire l'Église vers une situation similaire à celle de la Communion anglicane, où l'adaptation au monde a provoqué de profondes ruptures. L'Église, affirme-t-il, ne peut pas jouer avec sa propre identité.

    Appel à prier pour le Pape et l'unité dans la vérité

    Loin de toute attitude rebelle, Zen insiste sur son obéissance filiale : il critique parce qu'il aime le Successeur de Pierre. Il demande de prier pour que le Pape reste ferme dans la vérité et que l'Église retrouve l'unité fondée sur la foi apostolique.

  • "Sensus fidei", infaillibilité et synodalité

    IMPRIMER

    De l'abbé Claude Barthe sur Res Novae :

    Infaillibilité et synodalité

    Dans sa catéchèse du 27 septembre, le pape Léon XIV a tenu ces propos : « Les petits ont de l’intuition. Ils ont un sensus fidei, qui est comme un “sixième sens” des personnes simples pour les choses de Dieu. Dieu est simple et se révèle aux simples. Voilà pourquoi il y a une infaillibilité de la foi du Peuple de Dieu, dont l’infaillibilité du Pape est l’expression [c’est nous qui soulignons] et le service. » Quelle portée donner à ces paroles ?

    Il convient de jeter un regard dans le rétroviseur théologique sur ce qui était classiquement enseigné à propos des différentes instances de l’infaillibilité et aussi de considérer le contexte actuel de synodalité.

    L’infaillibilité de l’Église enseignante et de l’Église enseignée

    Les théologiens distinguaient traditionnellement l’Église enseignante (pape et évêques), Ecclesia docens, qui bénéficie d’une infaillibilité active, et l’Église enseignée (l’ensemble du peuple chrétien), Ecclesia discens, préservée de l’erreur par une infaillibilité dite passive : l’ensemble du peuple chrétien adhère à la doctrine que lui délivrent les successeurs des Apôtres sous la motion du même Esprit-Saint qui anime leur enseignement. Cette infaillibilité est dite in credendo, l’Église ne pouvant tomber dans l’erreur en croyant1.

    Cette infaillibilité de réception est souvent explicitée par le concept de sensus fidelium, instinct de foi des fidèles, ou bien, si on considère chaque croyant, de sensus fidei, instinct, flair quant à la foi de chaque fidèle, qui accompagne la vertu de foi. Toutes les vertus en effet procurent à l’âme une espèce d’instinct connaturel (par exemple un instinct de réserve et de pudeur, qui accompagne la chasteté) ; celui produit par la foi incline le croyant à poser des actes d’adhésion à la vérité révélée2.

    On peut dire aussi que l’usage du sensus fidei relève de la croissance de la foi dans celui qui l’a reçue : il porte le fidèle à croire, par développement de ce qui lui a été enseigné, au-delà même de ce qu’il est tenu de croire, par exemple l’Immaculée Conception a été crue bien avant que le dogme n’en soit proclamé. Mais justement c’est le dogme qui tranche : l’infaillibilité du peuple de Dieu est soumise au magistère du pape et des évêques.

    Sensus fidei et synodalité

    Le pape François a fondé sa doctrine de la synodalité sur le sensus fidei, sur lequel sa première encyclique, Evangelii Gaudium, du 24 novembre 2013, s’étendait largement. Il insistait sur le fait que le troupeau possède un « odorat » qui aide l’Église à trouver de « nouveaux chemins ».

    Puis, dans un discours du 17 octobre 2015, il allait plus loin : « Le sensus fidei empêche une séparation rigide entre Ecclesia docens [Église enseignante] et Ecclesia discens [Église apprenante], puisque le troupeau possède aussi son propre “flair” pour discerner les nouvelles routes que le Seigneur ouvre à l’Église. »3

    La séparation classique entre Église enseignante et Église enseignée est ainsi relativisée à partir de la vocation « pastorale » de l’ensemble du peuple de Dieu. Par le fait, implicitement, cela relativise la distinction entre pasteurs et troupeau, l’ensemble des fidèles, pasteurs compris, étant placé sous le sensus fidelium/fidei. Et le pape François expliquait à sa manière imagée, que l’évêque pouvait parfaitement se trouver en avant de son troupeau, ou bien au milieu, et même encore derrière, à le suivre.

    Le document de la Commission théologique internationale (CTI) de 2014, « Le sensus fidei dans la vie de l’Église »4, lui avait préparé le terrain, notamment en citant les papes Pie IX et Pie XII déclarant qu’avant de proclamer respectivement les dogmes de l’Immaculée Conception et de l’Assomption, ils s’étaient enquis de la piété des fidèles sur ces points et avaient conclu à un « accord remarquable des évêques catholiques et des fidèles ». À noter qu’ils parlaient d’un accord des évêques et des fidèles. D’ailleurs la CTI prenait soin de préciser que la constitution Pastor Aeternus du premier concile du Vatican affirme que les définitions doctrinales ex cathedra du pape en matière de foi et de mœurs sont irréformables « par elles-mêmes et non en vertu du consentement de l’Église », ce qui ne rend pas le consensus Ecclesiæ superflu, mais ce qui exclut, disait la CTI, « la théorie selon laquelle une telle définition réclamerait ce consentement, antécédent ou conséquent, comme condition pour faire autorité ».

    Un apport du pape Léon ?

    Peut-on considérer la petite phrase de Léon XIV – « l’infaillibilité du Pape est l’expression et le service [de l’infaillibilité du peuple de Dieu] » – comme un pas supplémentaire ? Il pourrait ne s’agir que d’une expression malheureuse à imputer au rédacteur de la catéchèse, et en tout cas il serait exagéré de l’assimiler à la proposition condamnée par le décret du Saint-Office, Lamentabili, du 3 juillet 1907 : « Dans la définition des vérités, l’Église enseignée et l’Église enseignante collaborent de telle façon qu’il ne reste à l’Église enseignante qu’à sanctionner les conceptions communes de l’Église enseignée » (Dz 3406).

    La phrase de Léon XIV évoque l’infaillibilité du pape : mais n’est-elle pas aujourd’hui en pause, le « magistère authentique » ou « pastoral » non infaillible (Lumen Gentium, n. 25 §1) ayant concrètement remplacé le magistère ordinaire et universel infaillible ? Qui peut penser par exemple que le chapitre 8 d’Amoris Laetitia, qui répugne au sensus fidei/fidelium, relève du magistère infaillible ? Et il est vrai que ce sensus presse, pour ainsi dire, le magistère infaillible du pape d’intervenir.

    _____________

    1. Jean-Marie Hervé, Manuale theologiæ dogmaticæ, Berche, Paris, 1957, vol. 1, n. 465.

    2. Saint Thomas, Somme théologique, IIa IIæ, q. 2, a. 3, ad. 2.

    3. Discours pour la Commémoration du 50e anniversaire de l’institution du Synode des Évêques.

    4. Sensus fidei nella vita della Chiesa (2014).

  • "Une pneumatologie inversée qui « discerne » les actions de l'Esprit partout sauf dans l'Église"

    IMPRIMER

    De John M. Grondelski sur le New Oxford Review :

    Pneumatologie inversée ?

    De nombreux clercs d’Europe occidentale semblent penser que l’Esprit se déplace principalement en dehors de l’Église.

    21 octobre 2025

    La pneumatologie est la branche de la théologie qui traite du Saint-Esprit. On considère que le Saint-Esprit habite l'Église et la préserve de l'erreur.

    L'infaillibilité de l'Église n'est ni politique ni historique ; elle peut commettre des erreurs dans ces domaines, et elle en a commis. Son infaillibilité est liée à sa mission. L'Église existe pour une seule et unique raison : sauver les âmes en proclamant le Royaume de Dieu en Christ. Salus animarum suprema lex. Pour remplir sa raison d'être, l'Église doit être capable d'enseigner avec autorité et justesse en matière de foi et de morale. C'est pourquoi le Saint-Esprit habite en elle.

    Un article récent d'une source italienne a suscité cette question : sommes-nous aujourd'hui confrontés à une pneumatologie inversée ? À en croire certains membres de l'Église contemporaine, il semble que le Saint-Esprit travaille presque à rebours de la façon dont les catholiques ont généralement compris son action.

    La Nuova Bussola Quotidiana, qui rend compte de la conclusion du « processus synodal » de la Conférence épiscopale italienne, critique vivement ce qu'elle perçoit dans le document de la conférence comme une tentative d'approbation morale des activités homosexuelles (voir ici ). Cet article soulève des questions sur la manière dont certains semblent aujourd'hui comprendre le rôle du Saint-Esprit dans l'Église.

    Traditionnellement, le Saint-Esprit était perçu comme guidant l'Église – comme le Christ l'avait promis (Jn 16, 13) – « vers la Vérité tout entière ». Aujourd'hui, cependant, il semble presque que le Saint-Esprit se soit envolé par une de ces fameuses fenêtres ouvertes par Jean XXIII pour enseigner l'Église de l'extérieur. Si l'on écoute beaucoup de discours ecclésiaux aujourd'hui, on a l'impression que le Saint-Esprit s'est réfugié dans la laïcité, avec toutes ses œuvres et ses fastes, les utilisant comme instruments d'enseignement pour son Église « rétrograde » afin de se conformer au nouveau programme spirituel.

    Il est évident qu'un nombre important de clercs, notamment d'Europe occidentale, semblent penser que l'Esprit, qui se meut où il veut ( Spiritus spirat qui vult ; voir Jn 3,8), préfère se déplacer principalement hors de l'Église. Si l'on écoute cette « lecture renouvelée des signes des temps », l'aggiornamento actuel semble surtout prendre la forme du rôle de l'esprit du temps dans la mise à niveau spirituelle de l'Église. On est stupéfait par la rigidité et la résistance apparentes de l'Église, qui ont contraint l'Esprit, désormais délocalisé, à enseigner dans des bars gays, des foyers de divorcés remariés et toutes les autres religions, à l'exception de la religion catholique.

    Un appel renouvelé à l'« expérience vécue » est souvent lancé pour défendre cette approche. Mais cela soulève des problèmes théologiques cruciaux. L'expérience vécue est importante, mais elle n'est pas auto-interprétative. Elle n'est pas non plus coextensive à la fides. Le sensus fidelium présuppose un sensus fidei préalable, que les ecclésiastiques d'aujourd'hui ignorent souvent. Comme je l'ai déjà soutenu ( ici ), l'« expérience » n'est ni bonne ni mauvaise en soi ; c'est simplement un fait. L'expérience doit être mise à l'épreuve, et non canonisée. Sa signification, et surtout sa valeur, dépendent de sa compatibilité avec la foi reçue et défendue par l'Église, dans laquelle l'Esprit habite déjà.

    Cette pneumatologie inversée a également été sélective. En abordant la modernité, les lecteurs « spirituels » des signes des temps semblent avoir ignoré la seconde partie de 1 Thessaloniciens 5:21 : « Examinez tout, retenez ce qui est bon. » Cette « épreuve » ne se produit pas ex nihilo. Elle s'inscrit dans la tradition vivante et continue de l'Église, soi-disant inspirée par le Saint-Esprit et discernée selon une herméneutique de la continuité, puisque nous supposons que le Saint-Esprit n'est pas nominaliste et donc peu enclin à l'auto-contradiction.

    Je sais que certains pourraient juger ces réflexions exagérées, mais demandons-nous s'il est nécessaire d'aborder honnêtement la pneumatologie qui inspire certains développements actuels dans l'Église. Je suis assez vieux pour me rappeler comment, peu après la clôture du Concile Vatican II, il est devenu courant d'ignorer le contenu réel des textes conciliaires, préférant lire l'« esprit » du Concile. Je me souviens aussi d'un théologien français (dont le nom m'échappe maintenant) demandant que nous identifiions cet « esprit », au cas où certaines de ses manifestations nécessiteraient un exorcisme.

    Dans cette optique, il semble pertinent de se demander si certains, dans l'Église d'aujourd'hui, agissent selon une pneumatologie inversée qui « discerne » les actions de l'Esprit partout sauf dans l'Église, et quelles sont les conséquences ecclésiales d'une telle réflexion. Cette question paraît particulièrement pressante face à ce qui semble être un « processus synodal » flottant, où des questions doctrinales et morales établies semblent remises en question au nom d'un « discernement » indéfini. Avec tout le respect que je leur dois, je doute que certains semblent considérer l'« Esprit » comme parlant après 30 secondes de silence suivies d'un « partage ». Il semble que nous ayons besoin d'une pneumatologie plus riche.

    John M. Grondelski (Ph.D., Fordham) est l'ancien doyen associé de la Faculté de théologie de l'Université Seton Hall, à South Orange, dans le New Jersey.

  • Le cardinal Müller condamne le Synode sur la synodalité qu'il qualifie de « prise de pouvoir laïque »

    IMPRIMER

    Du Catholic Herald :

    12 octobre 2025

    Le cardinal Müller condamne le Synode sur la synodalité qu'il qualifie de « prise de pouvoir laïque »

    Le cardinal Gerhard Müller, ancien préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, a formulé l'une de ses critiques les plus virulentes à l'encontre du Synode sur la synodalité.

    Dans la préface d'un nouvel ouvrage intitulé The Trojan Horse in the Catholic Church (Le cheval de Troie dans l'Église catholique), écrit sous le pseudonyme « Père Enoch », le prélat allemand met en garde contre le fait que le processus synodal représente une tentative de remodeler l'Église catholique selon des idéaux laïques et démocratiques.

    Le cardinal Müller, qui a participé aux sessions 2023 et 2024 du Synode sur la synodalité à Rome, écrit qu'il a été témoin direct de la manière dont ce processus a été « utilisé comme un moyen de saper la structure hiérarchique et sacramentelle de l'Église et de la remplacer par une pyramide inversée de gouvernance ».

    Il décrit le format des assemblées comme une rupture fondamentale avec les synodes précédents, les évêques étant relégués au même niveau que les participants laïcs. Selon le cardinal, cela représente un éloignement décisif du modèle défini dans Lumen Gentium, la constitution du Concile Vatican II sur l'Église, qui définissait sa nature comme hiérarchique et sacramentelle.

    Il met en garde contre le fait que ce changement marque le passage d'un rassemblement épiscopal offrant des conseils au pape à quelque chose qui ressemble davantage à la Voie synodale allemande ou même à une assemblée de style anglican.

    Le cardinal soutient que l'Église risque de se transformer en « une institution séculière et mondaine guidée non pas par l'enseignement de Notre Seigneur tel qu'il est révélé dans les Saintes Écritures et la Tradition apostolique, mais par des principes démocratiques ». Une telle institution, écrit-il, cesserait d'être le Corps mystique du Christ pour devenir « une ONG avec un programme religieux, émotionnel et moraliste ».

    La critique du cardinal Müller va au-delà de la structure du synode pour s'étendre à son contenu. Il affirme que le processus était « extrêmement contrôlé », seuls certains intervenants sélectionnés étant autorisés à s'adresser à l'assemblée, et que ses résultats étaient prédéterminés par ceux qui le dirigeaient. Parmi ses principaux objectifs, affirme-t-il, figurait la normalisation accrue de l'homosexualité au sein de l'Église.

    Il cite des discussions et des interventions qui, selon lui, visaient à réinterpréter l'enseignement moral de l'Église en invoquant de « nouvelles révélations » du Saint-Esprit qui permettraient de bénir les unions entre personnes du même sexe.

    Le cardinal insiste sur le fait que de telles tentatives constituent un « blasphème contre le Saint-Esprit » et une déformation délibérée de la doctrine catholique. Il qualifie l'idéologie LGBT promue par certains dans le cadre du processus synodal d'« antichrétienne », avertissant que « le Christ et l'Antéchrist ne peuvent être réconciliés ».

    Son avant-propos se termine par un appel aux évêques, aux prêtres et aux laïcs à lire Le cheval de Troie dans l'Église catholique afin de comprendre ce qu'il considère comme les graves dangers spirituels et ecclésiaux que représente l'expérience synodale.

    Le cardinal Gerhard Ludwig Müller a été ordonné prêtre en 1978 pour le diocèse de Mayence. Il a poursuivi des études supérieures en théologie sous la direction de Karl Lehmann et Joseph Ratzinger (futur pape Benoît XVI). Il est devenu professeur de théologie dogmatique à l'université Ludwig Maximilian de Munich en 1986 et a été nommé évêque de Ratisbonne en 2002.

    En 2012, le pape Benoît XVI a nommé Müller préfet de la CDF, faisant de lui l'une des figures les plus influentes de la supervision théologique et doctrinale du Vatican. Il a été élevé au rang de cardinal par le pape François en 2014. Après avoir quitté la CDF en 2017, il est devenu un critique virulent du libéralisme théologique et de nombreux aspects du pontificat du pape François.

  • Synodalité : du jargon jusqu'à la nausée

    IMPRIMER

    De FSSPX Actualités :

    Synodalité : du jargon “ad nauseam”

    Le 7 juillet 2025, le Secrétariat général du synode a publié un document de 24 pages, intitulé « Pistes pour la phase de mise en œuvre du synode, 2025-2028 ». Le pape Léon XIV a approuvé la publication du texte, il a ainsi confirmé le processus triennal de cette mise en œuvre du synode sur la synodalité.

    De juin 2025 à décembre 2026, les Eglises locales et les groupements internationaux auxquels elles appartiennent se concentreront sur les « voies de mise en œuvre ». Au premier semestre 2027, les diocèses tiendront des « assemblées d’évaluation ». Au premier trimestre 2028, des assemblées se tiendront à l’échelle continentale.

    En juin 2028, un document de travail sera publié pour l’assemblée ecclésiale du Vatican, qui se tiendra en octobre de la même année. A la fin, le document romain se réjouit du Jubilé des équipes synodales et des organismes participatifs qui se tiendra à Rome en octobre prochain.

    Du jargon…

    Sur The Catholic Thing du 18 juillet, le père Gerald Murray se montre beaucoup plus critique, avec un titre particulièrement explicite : « Une trajectoire synodale emplie de jargon. » Le prêtre américain écrit : « Lorsque le pape Léon XIV s’est exprimé depuis le balcon de la basilique Saint-Pierre le jour de son élection, il a déclaré : “Nous voulons être une Eglise synodale”. L’importance de cette déclaration dépend, bien sûr, de la façon dont le pape Léon comprend la synodalité.

    « La notion d’Eglise une, sainte, catholique, apostolique – et désormais synodale – est peu claire pour la plupart, car la synodalité est un concept largement méconnu. » Sauf pour Sœur Nathalie Becquart, sous-secrétaire du Secrétariat du synode, qui déclarait sans détour, le 7 juillet sur Vatican News : « Je cite souvent un théologien australien présent à notre synode, Ormond Rush, affirmant : “La synodalité, c’est le concile Vatican II en résumé”.

    « Tous nos documents, et encore dans le Document final, soulignent que notre démarche se réfère véritablement à la vision du concile Vatican II. On peut dire que la synodalité est la voie à suivre pour comprendre l’ecclésiologie du concile Vatican II à ce stade de sa réception. Il ne s’agit donc que de poursuivre la réception du concile Vatican II. Car, d’une certaine manière, le Concile n’est pas encore mis en œuvre partout. »

    Le P. Murray relève aux pages 18 et 19 du document romain une volonté de promouvoir une « diversité pacifiée » en surmontant certaines « polarités et tensions » dont il énumère quelques-unes :

    « L’Eglise entière et l’Eglise locale ; l’Eglise comme peuple de Dieu, comme Corps du Christ et comme Temple de l’Esprit ; la participation de tous et l’autorité de certains ; la synodalité, la collégialité et la primauté ; le sacerdoce commun et le sacerdoce ministériel ; le ministère (ministères ordonnés et institués) et la participation à la mission en vertu de la vocation baptismale sans forme ministérielle ».

    Et le document de proposer un mode d’emploi « synodal » des tensions dans l’Eglise : « La mise en œuvre de la Déclaration finale [du synode] exige d’aborder et de discerner ces tensions au fur et à mesure qu’elles apparaissent dans les circonstances de chaque Eglise locale.

    « La voie à suivre ne consiste pas à rechercher un arrangement impossible qui éliminerait les tensions au profit de l’une des parties. Il sera plutôt nécessaire, dans l’ici et maintenant de chaque Eglise locale, de discerner lequel des équilibres possibles permet un service plus dynamique de la mission. Il est probable que des décisions différentes seront prises à différents endroits. »

    Face à cette dilution de la vérité dans un relativisme « synodal », le P. Murray n’hésite pas à écrire : « Le concile de Nicée ne passerait pas le test de la synodalité car il a de fait accompli “l’arrangement impossible” d’“éliminer les tensions” en décidant “en faveur de l’un des camps”, c’est-à-dire que l’orthodoxie a été affirmée et l’hérésie a été anathématisée.

    « Quand l’Eglise a-t-elle enseigné que les doctrines catholiques sont des “polarités” révélant des “tensions” devant être surmontées pour parvenir à un “équilibre” ? C’est du pur hégélianisme. Première étape : la thèse rencontre l’antithèse, aboutissant à une synthèse ; deuxième étape : répéter la première étape à l’infini.

    « Dans ce schéma, l’Eglise n’enseigne pas la vérité dogmatique, mais réfléchit plutôt à différentes approches qui doivent être mises en balance. Dans une situation de polarité, les deux camps doivent se satisfaire d’une certaine forme de “diversité réconciliée”. La permanence de la vérité a disparu, le “dynamisme” remodelant les “catégories ecclésiologiques” est à la mode. »

    Et de conclure : « L’Eglise n’a pas besoin d’être reconfigurée en un groupe de discussion synodal perpétuel dirigé par des responsables du Vatican, impliquant des évêques et des non-évêques désignés, dans lequel les tensions (naturellement produites lorsque des idées hérétiques sont présentées comme des versions nouvelles et améliorées de la foi catholique) doivent être apaisées, parce que la synodalité exige la notion fausse de “diversité réconciliée”. »

    … ad nauseam

    Tout aussi sévère, Mgr Marian Eleganti, le collaborateur de Mgr Vitus Huonder à Coire, réagit sur son blogue le 11 juillet. Il interpelle les responsables du synode : « Le peuple de Dieu dans son ensemble ignore vos documents. D’après mon expérience, rares sont les croyants qui en ont connaissance ou qui les lisent.

    « Cessez de tourner en rond dans un processus qui n’a éveillé l’amour de Jésus-Christ dans aucune âme, mais qui occupe surtout jusqu’à présent les “catholiques réformateurs” (occupant une fonction officielle) germanophones. Cessez de vous multiplier et de vous démultiplier dans des groupes de travail et des commissions ! Le peuple de Dieu ne s’y intéresse pas.

    « Les résultats sont un brouillard, des bénédictions qu’il vaudrait mieux s’abstenir de donner, des modèles de gestion qui contredisent le Droit canonique en vigueur, de nouveaux comités ou conseils, comme si nous n’en avions pas assez depuis 60 ans. Vous vivez dans une bulle et vous employez les mauvaises personnes. […] Vous invoquez trop facilement le Saint-Esprit. »

    Voici ce qu’il faudrait plutôt faire, selon le prélat suisse : « Proclamez l’Evangile, pour l’amour du Christ ! Proclamez le Christ à une Europe qui s’est détournée de lui ! Proclamez le Christ à un monde qui présente des traits apocalyptiques et qui mène sans cesse de nouvelles guerres ! Parlez de Jésus-Christ plutôt que de synodalité !

    « Ce que vous entendez par ce dernier terme, d’autres l’ont déjà utilisé (par exemple les anglicans), avec pour résultat de nouvelles divisions. Cessez de maintenir l’Eglise dans une frénésie synodale sans fin, soi-disant pour échanger des bienfaits. » Et de mettre en garde : « Les problèmes réels qui existent dans l’Eglise ne sont pas abordés :

    « l’abandon massif par les baptisés et les confirmés des contenus essentiels de la foi (la divinité de Jésus, sa résurrection physique) ; l’informalité liturgique et les abus dans le Novus Ordo ; l’absence de vocations sacerdotales dans de nombreuses Eglises particulières ; la prédication hétérodoxe largement répandue (catéchèse, théologie universitaire) et une pratique pastorale qui contredit la doctrine catholique et le Droit canonique, soi-disant parce que “la réalité est plus grande que l’idée” [François dixit, NDT].

    « La liste est incomplète… Je ne peux plus écouter votre propagande. Je suppose que je ne suis pas le seul. Cela fait longtemps que l’Eglise n’avait pas été dirigée de manière aussi autoritaire et manipulatrice que sous la nouvelle synodalité du pape François, en une tentative sans fin pour obtenir les résultats souhaités. »

    Mgr Eleganti s’interroge sur l’honnêteté intellectuelle et l’objectivité avec lesquelles le processus synodal a été mené : « Où sont les partisans de la tradition – principalement des jeunes et des familles – dans ce processus ? Où est leur vote dans ce processus synodal sui generis tant vanté ? Jusqu’à présent, ils ont été laissés de côté.

    « Dans certains pays (France, Angleterre), de nombreux jeunes adultes souhaitent être baptisés. Les jeunes qui s’intéressent à la foi, étudient le catéchisme, souhaitent une liturgie célébrée avec recueillement, réclament plus de mystère dans la célébration de la messe, où l’on parle trop. […]

    « Dans le processus synodal, qui se soucie du défi de l’islam ? Ne faites pas de l’Eglise une bourse d’idées pour des initiatives et des inventions hétérodoxes ! Faites quelque chose pour le renouveau de la liturgie et de la catéchèse en ces temps antichrétiens ! Plus de missionnaires, moins de conseillers en communication [spin doctors]. »

    Et de conclure par ce constat malheureusement exact sur le fonctionnement de l’Eglise « synodale » : « Le berger suit les brebis. L’enseignant apprend de l’élève. L’action détermine le devoir. La majorité fait la vérité. Le prêtre obéit au laïc. L’évêque est assis à côté. Et au-dessus de tous plane l’Esprit. Mais quel Esprit ? »

  • Pourquoi Léon XIV a évité une tempête médiatique à la François lors de sa première interview

    IMPRIMER

    De Jonathan Liedl sur le NCR :

    Pourquoi Léon XIV a évité une tempête médiatique à la François lors de sa première interview

    ANALYSE : Comment la perception papale façonne ce qui est considéré comme une controverse

    Le pape Léon s'exprime lors de la messe du 21 septembre 2025, à l'église Sainte-Anne au Vatican.
    Le pape Léon XIV prononce un discours lors de la messe du 21 septembre 2025 en l'église Sainte-Anne au Vatican. (Photo : Francesco Sforza / Vatican Media)

    La première interview du pape Léon XIV a été accueillie sans trop de remous. Des médias grand public aux conservateurs catholiques (et même à certains traditionalistes), le principal message est que le pape se préoccupe avant tout de l'unité de l'Église et qu'aucun bouleversement majeur n'est à prévoir.

    Il convient de noter que cette réaction est très répandue.

    Ce n’est pas seulement parce que l’époque des bombes papales lâchées lors d’interviews ou de conférences de presse en vol, une caractéristique du pape François, semble révolue.

    Mais parce que lors de sa conversation avec Elise Allen de Crux , le pape Léon XIV a dit certaines choses qui, si elles avaient été prononcées par le pape François, auraient probablement généré une controverse généralisée.

    Et pourtant, quand Léon les a prononcés, ils ne l'ont pas fait. Et il convient de se demander pourquoi.

    Par exemple, considérez ce que le pape d'origine américaine a déclaré à propos de l'enseignement de l'Église sur la sexualité et le mariage : « Je pense que nous devons changer d'attitude avant même d'envisager de modifier la position de l'Église sur une question donnée. Je trouve très improbable, surtout dans un avenir proche, que la doctrine de l'Église concernant la sexualité et le mariage change. » 

    Si le pape François avait déclaré que des changements doctrinaux dans ces domaines étaient peu probables en raison de la nécessité de suivre un ordre ecclésial – et non en raison de l'immuabilité fondamentale de ces enseignements –, cela aurait provoqué une tempête médiatique. Les gros titres se seraient emparés de cette citation, soulignant que François était potentiellement ouvert au prétendu « mariage homosexuel », même si ce n'était pas « dans un avenir proche ».

    Mais à part les suspects habituels, comme le militant LGBTQ et père jésuite James Martin d'un côté et certains traditionalistes de l'autre, peu de gens semblaient intéressés à pousser la rhétorique du pape Léon dans cette direction.

    Pourquoi pas?

    Oui, Léon a dit beaucoup plus sur le sujet au cours de l’interview, affirmant l’idée que l’Occident est « fixé » sur l’identité sexuelle, que les personnes s’identifiant comme LGBTQ devraient être accueillies comme fils et filles de Dieu et non parce qu’elles s’identifient comme gays ou lesbiennes, et que l’Église doit continuer à se concentrer sur la « famille traditionnelle » et le mariage. 

    Mais un contexte similaire n'a pas empêché les médias de présenter la célèbre phrase du pape François de 2013, « Qui suis-je pour juger ? », comme une bombe laissant entrevoir des changements radicaux dans l'approche de l'Église en matière de moralité sexuelle — malgré le fait que François ait cité le Catéchisme approuvé par saint Jean-Paul II et son interdiction de discrimination injuste comme base de son commentaire et ait réaffirmé le caractère pécheur des actes sexuels entre personnes de même sexe.

    La différence de traitement de la rhétorique des deux papes est encore plus claire lorsque nous examinons la manière dont le pape Léon XIV a évoqué l’hypothétique « ordination des femmes » au diaconat dans sa récente interview. 

    Lire la suite

  • Léon XIV, un pas à la fois

    IMPRIMER

    D'Andrea Gaglarducci sur Monday Vatican :

    Léon XIV, un pas à la fois

    L’image qui se dessine de Léon XIV n’est pas celle d’un pape qui fait des choix impétueux ou de grands gestes, mais celle d’un pape réfléchi qui pèse calmement chaque décision .

    Avec la nomination de Monseigneur Miroslaw Wachowski comme nonce en Irak, par exemple, Léon XIV a peut-être posé la première pierre de ce qui promet d’être un changement important, qui ne se produira pas soudainement mais au fil des années.

    Après douze ans de pape François, nous nous sommes habitués à l'impétuosité et aux gestes grandioses – souvent spectaculaires – et nous en sommes venus à attendre, voire à désirer, ce genre de choses . Pour les journalistes, elles font un excellent article. Pour l'Église, elles constituent l'exception plutôt que la règle de la gouvernance papale.

    Pourquoi la nomination des Wachowski est-elle si importante alors ?

    Wachowski était sous-secrétaire aux Relations avec les États du Vatican depuis 2019. Vice-ministre des Affaires étrangères très respecté, il a dirigé la délégation du Vatican lors des négociations avec la Chine et le Vietnam ces dernières années. Sa promotion au poste de nonce, surtout dans un pays clé comme l'Irak, n'est pas inattendue. Si François avait encore été pape, cette promotion aurait été attendue et n'aurait suscité aucun intérêt.

    Nous sommes cependant à l'époque de Léon XIV. Wachowski est le premier nom important de la Secrétairerie d'État à être réaffecté. Ainsi, une nomination, jusque-là passée sous silence, devient médiatisée, ne serait-ce que parce que le choix de Léon XIV pourrait aussi envoyer un signal clair à la Secrétairerie d'État, indiquer une direction et établir une ligne directrice.

    En termes simples, cette nomination est significative autant pour le poste qu’elle laisse vacant à la Secrétairerie d’État que pour le poste qu’elle occupe à la nonciature en Irak.

    Il faudra cependant au moins un mois au pape pour nommer un nouveau vice-ministre des Affaires étrangères. Tant que Wachowski sera en poste, cette nomination n'aura pas lieu. Et il en sera de même pour de nombreuses autres nominations auxquelles Léon XIV devra réfléchir.

    Michael Czerny, Arthur Roche, Kurt Koch, Marcello Semeraro et Kevin Farrell prendront leur retraite à l'âge de la retraite (ils ont tous entre 76 et 79 ans). Le pape devra également nommer un successeur au poste de préfet du Dicastère des évêques. En résumé, six postes clés de la Curie sont à pourvoir.
    Léon XIV prendra son temps pour décider . Cela ne signifie pas que tous les organes directeurs seront modifiés en même temps. Nombreux sont ceux qui parlent avec insistance de la destitution du secrétaire d'État, le cardinal Pietro Parolin. Une telle destitution, cependant, ne semble pas logique, compte tenu de la réputation diplomatique bien connue et respectée de Parolin .

    Nombreux sont ceux qui souhaiteraient voir les têtes des cardinaux défenseurs de la synodalité, à commencer par Mario Grech et Victor Manuel Fernandez . Mais pourquoi Léon XIV couperait-il des têtes sans discernement ? En définitive, aucun cardinal ne peut prendre de décisions importantes sans le consentement du pape.
    Tout porte à croire que le pontificat de Léon XIV absorbera la plupart des situations survenues sous le pontificat du pape François.

    C'est ce qui ressort également de la seule interview longue durée accordée jusqu'à présent par le Pape, pour le livre Léon XIV : Citoyen du monde, missionnaire du XXIe siècle.

    Dans l'interview, la prudence de Léon XIV sur de nombreux sujets est évidente. Il ne nie pas l'accueil des personnes homosexuelles, mais affirme en même temps que la doctrine de l'Église ne changera pas . Il ne nie pas que des femmes occuperont des postes de direction au Vatican, mais il écarte de fait toute promotion des femmes diacres, soulignant que le diaconat doit encore être véritablement compris. Il ne nie pas la politique du pape François à l'égard de la Chine, mais il affirme clairement qu'il pourrait la modifier et souligne qu'il est également en contact avec les communautés chinoises « clandestines ».

    Lire la suite

  • « Je regarde Léon XIV avec confiance » (cardinal Sarah)

    IMPRIMER

    De Giacomo Gambassi sur Avvenire :

    Entretien. Le cardinal Sarah à 80 ans : « Je regarde Léon XIV avec confiance. »

    12 septembre 2025

    Synodalité, la messe dans le rite antique, la bénédiction des couples homosexuels, la mozzetta du pape, l'Afrique : une conversation avec le préfet émérite du culte divin

    Il dit avoir eu « le privilège de connaître et de collaborer avec certains saints : je pense à Mère Teresa de Calcutta et à Jean-Paul II. Puis aux papes les plus récents : Benoît XVI et François. Et aujourd'hui, je regarde avec une grande confiance Léon XIV . » Le cardinal Robert Sarah porte le même prénom que le nouveau pontife. Dix ans les séparent : le premier pape d'origine américaine fête ses 70 ans dimanche ; le préfet émérite du Dicastère pour le culte divin et la discipline des sacrements a fêté ses 80 ans à la mi-juin. Juste à temps pour entrer au conclave qui a élu le prévôt au trône de Pierre. « Léon XIV », a expliqué le cardinal guinéen à Avvenire , commentant les quatre premiers mois de son pontificat, « met en évidence la centralité indispensable du Christ, la conscience évangélique que “sans Lui nous ne pouvons rien faire” : ni construire la paix, ni construire l’Église, ni sauver nos âmes. De plus, il me semble porter une attention intelligente au monde, dans un esprit d’écoute et de dialogue, toujours avec une considération attentive de la Tradition. » Et il ajoute immédiatement : « La Tradition est comme un moteur de l’histoire : de l’histoire en général et de celle de l’Église. Sans une Tradition vivante qui permette la transmission de la Révélation divine, l’Église elle-même ne pourrait exister. » Tout cela s'inscrit parfaitement dans la continuité des enseignements du Concile Vatican II. Il faut donc se garder d'interpréter la démarche du pape Léon XIV en partant, par exemple, de la mozzetta que le nouveau pontife portait dès ses débuts et qui a suscité de nombreux commentaires au sein et au-delà des frontières ecclésiastiques. « Je ne comprends pas le tollé suscité par ce choix », tranche le cardinal. « La mozzetta est un signe qui indique la juridiction du pape, mais aussi celle des évêques. Ce tollé a peut-être été provoqué par le fait que le pape François ne l'avait pas portée le jour de son élection. Mais cela ne me semble pas être une raison valable pour une telle surprise. »

    La barrette de Sarah unit le Nord et le Sud du monde. Le cardinal est originaire d'Afrique, où il est devenu prêtre et nommé archevêque ; il a ensuite rejoint la Curie romaine : Jean-Paul II l'a nommé secrétaire de la Congrégation pour l'évangélisation des peuples ; Benoît XVI l'a nommé président du Conseil pontifical « Cor Unum » et l'a créé cardinal ; François l'a nommé préfet de la Congrégation pour le Culte divin, poste qu'il a occupé jusqu'en 2021. Après l'élection de Léon XIV, la décision du pape de le nommer envoyé au sanctuaire de Sainte-Anne-d'Auray, en France, pour les célébrations du 400e anniversaire des apparitions de sainte Anne, fin juillet, a suscité un large écho. « Je crois que les nouvelles qu'il est nécessaire et juste de souligner ne manquent pas chaque jour. Et parmi elles, celle qui me concerne ne manque certainement pas », souligne Sarah.

    Éminence, Léon XIV fait souvent référence à l'unité de l'Église. Est-ce urgent ?

    Nous devons dépasser une approche idéologique qui a favorisé deux visions concurrentes de l'Église. D'un côté, certains voudraient effacer et nier la Tradition au nom d'une ouverture inconditionnelle et d'une assimilation au monde et à ses critères de jugement. De l'autre, d'autres considèrent la Tradition comme quelque chose de cristallisé et de momifié, éloigné de tout processus historique fécond. La mission de l'Église est unique et, à ce titre, elle doit s'accomplir dans un esprit de pleine communion. Les charismes sont divers, mais la mission est une et présuppose la communion.

    Le pape nous demande d'annoncer « le Christ avec clarté et une immense charité ». Existe-t-il aujourd'hui une annonce « faible » ?

    Le message est toujours le même et ne peut être différent. L'homme abandonne l'Église, ou la foi, lorsqu'il s'oublie lui-même, lorsqu'il censure ses propres questions fondamentales. L'Église n'a jamais abandonné et n'abandonnera jamais l'homme. Certains chrétiens, à tous les niveaux de la hiérarchie, ont pu abandonner des hommes chaque fois qu'ils n'étaient pas eux-mêmes, c'est-à-dire lorsqu'ils avaient honte du Christ, dissimulant la raison de leur existence chrétienne et réduisant le travail pastoral à une simple promotion sociale.

    Lire la suite

  • Il est temps de passer du synode à l’application des fruits des trois dernières années à la mission et à l’évangélisation

    IMPRIMER

    De George Weigel sur le NCR :

    Il est temps d’aller au-delà du « synodage » ?

    COMMENTAIRE : Il est peut-être temps de passer du synode à l’application des fruits des trois dernières années à la mission et à l’évangélisation.

    Les délégués au Synode 2024 sur la synodalité participent à des tables rondes le 10 octobre 2024, dans la salle Paul VI au Vatican.
    Les délégués au Synode de 2024 sur la synodalité participent à une table ronde le 10 octobre 2024, dans la salle Paul VI du Vatican. (Photo : Daniel Ibañez/CNA / EWTN)

    Dans le premier volume de sa trilogie, Jésus de Nazareth, le pape Benoît XVI a salué les importantes contributions que l’analyse historico-critique des formes littéraires et des « couches » éditoriales des textes anciens a apportées à la compréhension de la Bible.

    Le pape a également suggéré que les fruits essentiels de cette méthode avaient été récoltés et que le temps était venu d'une approche moins disséquante de l'interprétation biblique : une approche qui « lit les textes [bibliques] individuels dans la totalité de l'unique Écriture, qui éclaire ensuite les textes individuels » ; une approche qui prend en compte « la tradition vivante de toute l'Église » ; et une approche qui lit la Bible dans le contexte de la foi de l'Église et des vérités interdépendantes au sein de cette foi.

    Pourrait-on dire quelque chose d’analogue à propos des récentes explorations de l’Église sur la « synodalité » – que ses fruits essentiels ont été récoltés et qu’il est temps de mettre ces fruits au service de la mission de l’Église, qui (comme le pape Léon nous l’a rappelé depuis son élection) est la proclamation de Jésus-Christ comme la lumière des nations et la réponse à la question de toute vie humaine ?

    Quels sont les fruits des dernières années de « synodage » ?

    Premièrement, les jeunes Églises d'Afrique et d'Asie, où se trouvent de nombreux pans vivants du catholicisme mondial, ont été entendues. Leurs voix se sont renforcées au fil du processus synodal pluriannuel. Et lors des discussions entre cardinaux avant l'élection du pape Léon XIII, il semblait que c'était ce que signifiait la « synodalité » pour de nombreux cardinaux des « périphéries » : nous sommes pris au sérieux. C'est une très bonne chose.

    Deuxièmement, le mandat missionnaire universel qui appelle chaque catholique baptisé à être évangéliste a été souligné. Il en va de même pour l'appel universel à la sainteté qui rend possible la mise en pratique de ce mandat missionnaire. Ce sont là aussi de très bonnes choses.

    Troisièmement, l'obstacle que représente un système de castes cléricales pour l'évangélisation a été identifié. Le processus synodal a montré que les responsables ordonnés qui écoutent, prennent conseil et collaborent avec ceux qu'ils sont appelés à diriger sont les pasteurs les plus efficaces de l'Église. De plus, nous devrions maintenant savoir que des structures collaboratives et consultatives existent déjà dans la majeure partie de l'Église mondiale – et qu'être une Église en mission permanente dépend moins de la répartition des postes à la Curie romaine (ou à la chancellerie diocésaine) que de la capacité des membres des ordres sacrés à donner aux laïcs les moyens d'agir pour l'évangélisation.

    Quatrièmement, les composantes vivantes de l'Église mondiale ont démontré avec force qu'une évangélisation réussie implique d'offrir et de vivre pleinement le catholicisme, et non de stagner dans l'Église du « peut-être ». Certes, la vie de foi est un cheminement continu. Ce cheminement doit cependant avoir une destination, et la clarté de la doctrine et une vie juste nous permettent de rester concentrés sur cette destination : le Royaume de Dieu manifesté en la personne de Jésus-Christ. Un témoignage audacieux de cette vérité a été un autre fruit du Synode sur la synodalité.

    En supposant que le processus synodal ne soit pas une fin en soi et en reconnaissant que le processus synodal de 2021-2024 a produit de bons fruits, on peut peut-être suggérer qu’il est maintenant temps de passer du synodisme à l’application des fruits des trois dernières années à la mission et à l’évangélisation.

    Il n'est pas évident de savoir comment cette transition sera facilitée par la récente publication du Secrétariat général du Synode, intitulée « Pistes pour la phase de mise en œuvre du Synode 2025-2028 ». Ce document envisage un processus de trois ans, long et très coûteux, de réunions nationales et continentales, suivi d'une « Assemblée ecclésiale » mondiale à Rome, longue et encore plus coûteuse, dont la nature reste indéfinie. De plus, ce nouveau processus, tel que décrit par Sœur Nathalie Becquart, responsable du Secrétariat du Synode, ne cherche pas à résoudre les « tensions » entre les « parties » par un « arrangement impossible », mais à gérer ces tensions dans un « dynamisme » qui sera vécu différemment selon les secteurs de l'Église mondiale.

    En ce 1700e anniversaire du Concile de Nicée, il convient de souligner, avec le Père Gerald Murray , que si une telle approche avait été adoptée à l'époque, il n'y aurait pas de Credo universellement confessé dans l'Église aujourd'hui. À Nicée, les « tensions » au sein de l'Église n'ont pas été résolues de manière dynamique, mais définitive : la négation arienne de la divinité du Christ a été rejetée avec autorité et l'orthodoxie chrétienne a été affirmée avec autorité.

    Ce n’est pas dénigrer les réalisations du processus synodal 2021-2024 que de suggérer que ses fruits essentiels ont été récoltés et qu’il est temps de passer à autre chose : non pas avec davantage de réunions, ni avec des débats circulaires sur des questions réglées de la foi et de la pratique catholiques, mais avec la proclamation de Jésus-Christ qui, comme l’a enseigné Vatican II, révèle la vérité sur Dieu et la vérité sur nous.