Du cardinal Robert Sarah sur le Tagespost :
L'art de célébrer
9 février 2025
Je voudrais faire référence à l’herméneutique de la réforme dans la continuité dont parle le pape Benoît XVI. a pris la parole (discours du 22 décembre 2005). C'est une opinion personnelle, mais il me semble que les livres liturgiques réformés ont désespérément besoin de cette continuité avec la tradition liturgique que les Pères du Concile Vatican II ont cherché à réformer s'ils veulent être vrais, beaux et bons, et ainsi contribuer au mieux à la sanctification et à l'édification du peuple saint de Dieu. D’autres pourraient ne pas être d’accord avec moi ici. Mais selon mon interprétation du Concile, c’est bien ce qu’il signifiait : une réforme dans la continuité et non une rupture avec le passé.
Cela soulève deux questions pertinentes : (...) Premièrement, la question apparemment dépassée de la « réforme de la réforme liturgique postconciliaire », par laquelle les livres liturgiques d’aujourd’hui sont révisés en vue de les enrichir d’éléments perdus dans la réforme elle-même. Cela est assez démodé parmi ceux qui sont actuellement au pouvoir, mais la motivation et les raisons de telles mesures n’ont rien perdu de leur validité. Je ne peux pas dire quand le Seigneur, dans sa providence, permettra que cette question soit à nouveau sérieusement considérée, mais peut-être que certains de nos jeunes frères dans le sacerdoce qui sont ici aujourd'hui vivront assez longtemps pour voir les livres liturgiques réformés devenir encore plus beaux. Je pense souvent au Missel des Ordinariats des anciens anglicans et aux richesses qu’il contenait comme exemple de ce qui pourrait être possible.
Cette liturgie a un avenir
La deuxième question concerne la célébration du rite liturgique préconciliaire, l’usus antiquior du rite romain. Comme je l’ai déjà dit, surtout au vu des fruits évidents que ce rite a produits au cours des dernières décennies, malgré une attitude cléricale intransigeante contre la vénérable liturgie latino-grégorienne – attitude typique du cléricalisme que le pape François a condamné à plusieurs reprises – une nouvelle génération de jeunes est apparue au cœur de l’Église. Il s’agit d’une génération de jeunes familles qui démontrent que cette liturgie a un avenir parce qu’elle a un passé, une histoire de sainteté et de beauté qui ne peut être effacée ou abolie du jour au lendemain. Je continue à maintenir cela. Et même si je comprends que de nombreux prêtres se trouvent actuellement dans une situation très difficile concernant l’usus antiquior, je vous encourage à ne jamais oublier ni nier la profonde vérité enseignée par le pape Benoît XVI : « Ce qui était sacré pour les générations précédentes reste sacré et grand pour nous aussi ; cela ne peut pas devenir soudainement complètement interdit ou même nuisible. « Il est bon pour nous tous de sauvegarder les richesses qui ont grandi grâce à la foi et à la prière de l’Église et de leur donner la place qui leur revient » (Lettre aux évêques , 7 juillet 2007). (...) Rappelons-nous le principe de l’intégralité liturgique comme composante essentielle de la beauté liturgique – ainsi que de la vérité et de la bonté liturgiques – et tournons-nous maintenant vers certaines de ses applications pratiques.
L’Exhortation apostolique Sacramentum Caritatis – Sur l’Eucharistie, source et sommet de la vie et de la mission de l’Église – du Pape Benoît XVI, fruit des réflexions menées lors du Synode des évêques de 2005, constitue un très bon point de départ. Je voudrais souligner qu’il s’agit d’un document très important pour la formation liturgique, qui est très négligée. Si vous ne l’avez pas encore étudié, faites-le. Si cela fait un moment que vous ne l'avez pas consulté, veuillez le consulter à nouveau. Il vous guidera dans vos efforts pour garantir que vos célébrations liturgiques soient intégrales, qu’elles soient ce qu’elles devraient être et rien d’autre.
Est-ce que tout dans la liturgie est caractérisé par la beauté ?
Le pape Benoît XVI offre de nombreux conseils sages, qui ont émergé à la lumière des années turbulentes de la vie liturgique post-conciliaire, reflétées par les Pères synodaux. Peut-être que la meilleure de toutes est sa simple affirmation : « Il est nécessaire qu’en tout ce qui concerne l’Eucharistie il y ait un bon goût pour la beauté » (n° 41).
Nous pourrions bien faire de cela la base d’un examen de conscience concernant notre propre pratique liturgique : tout dans la liturgie que nous célébrons avec notre peuple est-il empreint de beauté, selon les moyens dont nous disposons ? Ou bien nous contentons-nous de pratiques, d’objets, de rituels, de musiques, etc. moins beaux – voire clairement inappropriés ?
Si l’Eucharistie est véritablement la source et le sommet de la vie et de la mission de l’Église, nous ne pouvons pas nous contenter d’un pis-aller ou d’un résultat moindre. Si nous faisons cela, nous bâtirons sur de mauvaises fondations. Tout ce que nous construisons sur ces fondations fragiles s’effondrera d’une manière ou d’une autre. Rappelons-nous les paroles du cardinal Ratzinger : « L’Église se tient et tombe avec la liturgie. … C’est pourquoi la célébration appropriée de la sainte liturgie est au centre de tout renouveau de l’Église.