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Foi - Page 543

  • L’enseignement catholique et la francophonie au Moyen-Orient

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    "Savez-vous qu’il y a 329 écoles catholiques au Liban, 170 en Egypte, et 35 en Terre Sainte ? Implantées avant la fin de l’Empire ottoman, ces écoles restent un des principaux leviers de la francophonie aujourd’hui. Certaines écoles enregistrent même une nette augmentation des élèves qui choisissent le français comme première ou seconde langue.

    Organisé par l’Œuvre d’Orient et le Secrétariat Général des écoles Catholiques au Liban se tient aujourd’hui et demain à Beyrouth un colloque sur la Francophonie au Moyen-Orient."

    Reportage sur ces écoles au Moyen-Orient publié par le site web « France Catholique » :

     

    Ref. L’enseignement catholique et la francophonie au Moyen-Orient

    JPSC

  • Mgr Delville, évêque de Liège, propose cinq clés pour interpréter l’exhortation « Gaudete et exsultate » du pape François

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    Gaudete et exsultate cq5dam.thumbnail.cropped.750.422.jpeg« Gaudete et exsultate » est une exhortation à la sainteté  récemment publiée par le pape François dans le cadre de son magistère ordinaire. Elle ne devrait pas faire polémique, même si certains y ont relevé des « invectives » comme autant de flèches visant des catégories de fidèles qui n’épouseraient pas ses visions « pastorales ». Sur le site web de son diocèse, l’évêque de liège propose cinq clés de lecture qui peuvent aider à placer chaque chose à sa juste place. Voici le texte de cette note:

    « Publiée le 19 mars 2018, en la fête de saint Joseph, l’exhortation apostolique « Gaudete et exsultate » du pape François est centrée «sur l’appel à la sainteté dans le monde actuel ». Le but général de ce document est d’inviter chaque chrétien à un cheminement personnel sur la voie de la sainteté ; c’est donc une invitation adressée à tous. Pour préciser le cheminement de la pensée du pape, notre évêque Mgr Jean-Pierre Delville propose de voir dans chacun des 5 chapitres une question sous-jacente concernant la sainteté, et il les formule de la façon suivante : la sainteté, pour qui ? (ch. 1), pourquoi ? (ch. 2), c’est quoi ? (ch. 3), comment ? (ch. 4), et quand ? (ch. 5).

    « Parcourons ce questionnement et voyons les réponses que propose le pape. Je choisis pour cela les phrases qui me paraissent les plus emblématiques:

    1.Le chapitre 1, intitulé « L’appel à la sainteté » répond à la question « pour qui ? » et le pape formule sa thèse : « ce que je voudrais rappeler par la présente Exhortation, c’est surtout l’appel à la sainteté que le Seigneur adresse à chacun d’entre nous » (10). « Ce qui importe, c’est que chaque croyant discerne son propre chemin et mette en lumière le meilleur de lui-même » (11). Le pape met cela en lumière en présentant différents exemples de saints, des hommes et des femmes (12), des gens de différentes époques, depuis les martyrs de l’Église primitive jusqu’aux martyrs d’aujourd’hui, et spécialement ceux de toutes les confessions chrétiennes (9). C’est une sainteté qui se vit aussi en peuple et en communauté (6, 7). Dans ce chapitre, le pape s’adresse au lecteur en « tu » : c’est exceptionnel dans un document pontifical. C’est une manière de personnaliser le discours ; il est « pour toi aussi » (14). Le pape rappelle à chacun son itinéraire de foi, depuis son baptême et le don de l’esprit Saint (15). Il épingle les gestes concrets de la sainteté ; par exemple, face à la tentation de parler mal de l’autre, savoir se dire : « Non, je ne dirai du mal de personne » (16). La sainteté, c’est un chemin de conversion. Comme l’écrivait le cardinal Van Thuân lorsqu’il était en prison : « Je saisis les occasions qui se présentent chaque jour, pour accomplir les actes ordinaires de façon extraordinaire » (17). Le pape ajoute : « Toi aussi, tu as besoin de percevoir la totalité de ta vie comme une mission » (23). Pour cela, il faut être en présence du Seigneur, car la sainteté « consiste à s’associer à la mort et à la résurrection du Seigneur d’une manière unique et personnelle, à mourir et à ressusciter constamment avec lui » (20). Il peut y avoir des spiritualités des différents états de vie, « par exemple, d’une spiritualité du catéchiste, d’une spiritualité du clergé diocésain, d’une spiritualité du travail, une spiritualité de la mission, une spiritualité écologique » (28). Le pape conclut ce chapitre en disant : « N’aie pas peur de viser plus haut, de te laisser aimer et libérer par Dieu » (34).

    2. Le chapitre 2 répond à la question « Pourquoi la sainteté ? », en épinglant « deux ennemis subtils de la sainteté » (35). À travers ces deux côtés négatifs, le pape fait apparaître deux raisons positives de la sainteté : on doit être saint pour faire de sa vie un chemin de découverte et pour vivre sa vie dans l’action de grâces et le « merci ». Si on fait l’inverse, on vise une connaissance absolue des choses et on veut tirer son plan tout seul : ce sont les deux ennemis dont parle le pape et qu’il rattache à d’anciennes hérésies : le gnosticisme et le pélagianisme. Le gnosticisme, c’est « un élitisme narcissique et autoritaire, où, au lieu d’évangéliser, on analyse et classifie les autres » ; et dans le pélagianisme, « au lieu de faciliter l’accès à la grâce, les énergies s’usent dans le contrôle » (35). Le gnosticisme est l’aliénation de l’intelligence et le pélagianisme est l’aliénation de la volonté.

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  • Jésus réellement présent dans l'hostie; prédication pour le troisième dimanche de Pâques par le Père Michel-Marie Zanotti-Sorkine

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    Jésus réellement présent dans l'hostie / Michel-Marie Zanotti-Sorkine (Lc 24, 35-48)

    Prédication pour le troisième dimanche de Pâques (archives du 22 avril 2012) par le père Michel-Marie Zanotti-Sorkine (Lc 24, 35-48).

    http://www.delamoureneclats.fr / http://www.unfeusurlaterre.org 

    Évangile : Le Christ ressuscité envoie les Apôtres en mission (Luc 24, 35-48)

    Les disciples qui rentraient d'Emmaüs racontaient aux onze Apôtres et à leurs compagnons ce qui s’était passé sur la route, et comment ils avaient reconnu le Seigneur quand il avait rompu le pain. Comme ils en parlaient encore, lui-même était là au milieu d'eux, et il leur dit : « La paix soit avec vous ! » Frappés de stupeur et de crainte, ils croyaient voir un esprit. Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous bouleversés ? Et pourquoi ces pensées qui surgissent en vous ? Voyez mes mains et mes pieds : c'est bien moi ! Touchez-moi, regardez : un esprit n'a pas de chair ni d'os, et vous constatez que j'en ai. » Après cette parole, il leur montra ses mains et ses pieds. Dans leur joie, ils n'osaient pas encore y croire, et restaient saisis d'étonnement. Jésus leur dit : « Avez-vous ici quelque chose à manger ? » Ils lui offrirent un morceau de poisson grillé. Il le prit et le mangea devant eux. Puis il déclara : « Rappelez-vous les paroles que je vous ai dites quand j'étais encore avec vous : Il fallait que s'accomplisse tout ce qui a été écrit de moi dans la loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes. » Alors il leur ouvrit l'esprit à l'intelligence des Écritures. Il conclut : « C'est bien ce qui était annoncé par l'Écriture : les souffrances du Messie, sa résurrection d'entre les morts le troisième jour, et la conversion proclamée en son nom pour le pardon des péchés à toutes les nations, en commençant par Jérusalem. C'est vous qui en êtes les témoins. »

    Références bibliques : http://aelf.org/

  • La liquidation du catholicisme romain ?

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    De Roberto Pertici publié par Sandro Magister et traduit sur diakonos.be :

    La réforme de Bergoglio, Martin Luther l’a déjà écrite

    Beaucoup de choses ont déjà été écrites pour faire le bilan des cinq premières années du pontificat de François et de sa « révolution », vraie ou imaginaire.

    Mais cela a rarement été fait avec une telle acuité et hauteur de perspective que l’analyse que nous publions ci-dessous.

    L’auteur, Roberto Pertici, 66 ans, est professeur d’histoire contemporaine à l’université de Bergame et a ses principaux objets d’études portent sur la culture italienne du dix-neuvième et du vingtième siècle, avec une attention particulière aux rapports entre l’Eglise et l’Etat.

    L’essai qu’il nous transmet est inédit et est publié pour la première fois sur Settimo Cielo.

    *

    Est-ce la fin « catholicisme romain » ?

    de Roberto Pertici

    1. Au stade actuel du pontificat de François, je crois que l’on peut raisonnablement soutenir que celui-ci marque le déclin de cette réalité historique majeure que l’on peut définir comme le « catholicisme romain ».

    Cela ne signifie pas, entendons-nous bien, que l’Eglise catholique serait sur le point disparaître mais bien que la manière dont elle s’est historiquement structurée et dont elle s’est elle-même représentée au cours des derniers siècles touche à sa fin.

    Il me semble en effet évident qu’il s’agisse là du projet poursuivi par le « brain trust » rassemblé autour de François : un projet qui se veut aussi bien une réponse radicale à la crise entre l’Eglise et le monde moderne qu’un nouveau parcours œcuménique commun avec les autres confessions chrétiennes et plus particulièrement avec les protestants.

    *

    2. Par « catholicisme romain », j’entends cette grande construction historique, théologique et juridique qui a commencé avec l’hellénisation (pour l’aspect philosophique) et la romanisation (pour l’aspect politico-juridique) du christianisme primitif et qui repose sur le primat des successeurs de Pierre, telle qu’elle a émergée de la crise de l’antiquité tardive et telle qu’elle a été théorisée à l’époque grégorienne (« Dictatus Papae »).

    Au cours des siècles qui suivirent, l’Eglise s’est également dotée d’un droit interne propre, le droit canon, basé sur le modèle du droit romain. Et cet élément juridique a peu à peu contribué à donner forme à une organisation hiérarchique complexe avec des normes internes précises réglant aussi bien la vie de la « bureaucratie des célibataires » (l’expression est de Carl Schmitt) qui en assurent la gestion que celle des laïcs qui en font partie.

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  • Il faut baptiser les enfants

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    De zenit.org :

    « N’oubliez pas de faire baptiser les enfants! » (traduction complète)

    « N’oubliez pas de faire baptiser les enfants ! », exhorte le pape qui déplore un manque de « confiance dans l’Esprit Saint ».

    Le pape François a entamé un nouveau cycle de catéchèses sur le thème du baptême, par une catéchèse sur le baptême comme « fondement de la vie chrétienne », ce mercredi 11 avril 2018, Place Saint-Pierre, en présence de quelque 25 000 personnes en provenance de l’Italie et du monde entier.

    « Quand nous baptisons un enfant, l’Esprit Saint entre dans cet enfant et l’Esprit Saint fait grandir en cet enfant, en tant qu’enfant, des vertus chrétiennes qui fleuriront ensuite. Il faut toujours donner cette occasion à tout le monde, à tous les enfants, d’avoir en eux l’Esprit Saint qui les guidera pendant leur vie. »

    « Le baptême est le “fondement de toute la vie chrétienne” », a rappelé le pape François, en citant le Catéchisme de l’Église catholique. « Le baptême permet au Christ de vivre en nous et à nous de vivre unis à lui, pour collaborer dans l’Église, chacun selon sa condition, à la transformation du monde ».

    Voici notre traduction de la catéchèse donnée en italien par le pape François

    Catéchèse du pape François

    Chers frères et sœurs, bonjour !

    Les cinquante jours du temps liturgique pascal sont propices pour réfléchir sur la vie chrétienne qui, par sa nature, est la vie qui provient du Christ lui-même. Nous sommes en effet des chrétiens dans la mesure où nous laissons vivre Jésus-Christ en nous. D’où partir alors pour raviver cette conscience, sinon du principe, du Sacrement qui a allumé en nous la vie chrétienne ? Et c’est le baptême. La Pâque du Christ, avec son poids de nouveauté, nous rejoint à travers le baptême pour nous transformer à son image : les baptisés appartiennent à Jésus-Christ, c’est lui le Seigneur de leur existence. Le baptême est le « fondement de toute la vie chrétienne » (Catéchisme de l’Église catholique, 1213). C’est le premier des sacrements, dans la mesure où il est la porte qui permet au Christ Seigneur de faire sa demeure en notre personne et à nous de nous immerger dans son mystère.

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  • Catholiques, n'ayez plus peur !

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    De Jean-Pierre Denis, directeur de l’hebdomadaire « La Vie » :

    brigitte-et-emmanuel-macron-discussion-au-college-des-bernardins.jpg« Aux hargneux, aux anxieux et aux pointilleux du laïcisme, donnons raison sur un point : le discours qu’Emmanuel Macron a prononcé lundi soir au Collège des ­Bernardins à l’invitation de la Conférence des évêques de France fera date. Il décrispe les relations entre l’Église catholique et l’État et il déplace l’axe de la laïcité. Après les désillusions de la présidence bling-bling et les tensions de la présidence sociétale, les Bernardins ouvrent l’ère de la considération. À bon droit, les responsables catholiques affichaient, en fin de soirée, une mine réjouie. Ils ont réussi leur opération de communication, peut-être mieux qu’ils ne l’auraient cru. On passe de la fausse ignorance à la reconnaissance distante.

    Le discours d'Emmanuel Macron au Collège des Bernardins

    Fausse ignorance, car la République n’a jamais pu complètement nier le christianisme. La loi de 1905 ne « reconnaît » aucun culte, selon son célèbre article 2, mais elle monte à l’échelle pour régler la sonnerie des cloches. Aumôneries de prison, enseignement sous contrat, jours fériés… les liens sont variés. Et cependant la reconnaissance selon Macron reste distante. Sous les voûtes médiévales, on n’a d’ailleurs noté aucun geste concret. Ni sur les migrants, où le Président se tient droit dans ses bottes. Ni sur la bioéthique, où sa majorité sinue avec une trouble habileté. Ni sur les inégalités, ni… On l’aura compris : la causerie n’engage que ceux qui sont sensibles à la flatterie. Et après tout, c’est bien normal, car dans un État laïque, le Président reste légitimement libre. Au moins peut-on se parler, ce qui est un progrès ou bien un retour à la raison.

    Le Président invite les catholiques à redevenir eux-mêmes, assumant une histoire exemplaire et un présent contributif. Rarement, on leur a si clairement signifié que la France a besoin d’eux, y compris en politique. Cela fait un bien fou. Vous me direz qu’ils n’ont pas attendu la permission de Jupiter pour s’épanouir. Parfois pourtant, s’excusant de s’excuser, ils semblent raser les murs et porter fardeau. Ou alors ils tombent par réaction dans l’excès inverse, entre vice identitaire et délire de persécution. Si la rencontre des Bernardins marque rupture, c’est bien pour cela, comme une sortie de ce faux dilemme. Le cœur du discours tient dans une expression que Macron s’est retenu de prononcer, et que l’on entend pourtant : « N’ayez pas peur ! » Il fait écho au « France, qu’as-tu fait des promesses de ton baptême ? » lancé en 1980 par Jean Paul II, et qui fut d’ailleurs diversement apprécié.

    La contradiction ou la contrainte de Macron est de dénoncer le relativisme, mais de s’y inscrire au nom des « évolutions de la société », ce concept mou. 

    Macron convoque le syndicalisme chrétien, les Justes, le père Hamel… Son discours fourmille d’évocations exaltantes et de références pertinentes à la réalité du terrain. En parole et presque sans omission, il adresse le salut de la Nation aux curés et aux religieuses, aux contemplatifs et aux caritatifs, aux penseurs d’hier, aux écrivains d’aujourd’hui, à Benoît et à François… Tout l’enjeu sera de réduire l’écart entre mots et action. Le Président des Bernardins n’est-il point ce chef d’État qui dînait la veille encore au Louvre avec le prince saoudien pour lui vendre des armes dont il fera si bon usage ? Qui aura entendu des allocutions comparables, par exemple à l’occasion des 500 ans de la Réforme, ne pourra qu’en saluer cette fois encore l’ambition spirituelle, littéraire, intellectuelle. Tout le monde critique l’aplatissement du discours politique.

    Reconnaissons ici la hauteur de vue. Mais ensuite ? Peut-on convoquer le personnalisme sans en tirer les conséquences quant aux maux de l’individualisme ? La contradiction ou la contrainte de Macron est de dénoncer le relativisme, mais de s’y inscrire au nom des « évolutions de la société », ce concept mou. Le Président a compris que la France avait besoin de retrouver un corps et une âme, mais sa politique ne s’accorde pas toujours. Jusqu’où ce grand écart est-il tenable ? C’est aussi cette question qui reste, à tête reposée, après le moment inspiré des Bernardins. »

    Ref. Catholiques, n'ayez plus peur ! 

    Une chose est d’inviter, par un discours bienveillant,  l’Eglise catholique à apporter, sans complexe, sa contribution à la vie en société, une autre de la reconnaître sur le plan légal comme un acteur à part entière de la vie publique, auquel l’Etat accorde son aide et sa coopération.

    L’article 1er de la constitution française de 1958 proclame que la France est un Etat laïc, sans définir ce qu’il entend par là.

    Rien n’est simple. Ainsi, le concept de laïcité n’est pas forcément synonyme de séparation des Eglises et de l’Etat. De ce point de vue même, la célèbre loi de 1905 expulsant l’Eglise de la sphère publique française n’a pas empêché la République d’entretenir des liens avec elle : loi sur les édifices publics mis à la disposition du culte (1907), rétablissement des relations diplomatiques avec le Saint-Siège (1921), applicabilité du concordat de 1801 en Alsace-Moselle (1925), loi Debré sur les rapports entre l’Etat et les établissements scolaires privés (1959), accord avec le Saint-Siège sur la reconnaissance des diplômes délivrés par l’enseignement supérieur catholique (2008) etc.

    Ajoutant à la perplexité de l’observateur étranger, le Président Nicolas Sarkozy, lors de sa réception paradoxale (pour le Chef d’un Etat séparé de l’Eglise) comme chanoine honoraire de l’archi-basilique du Latran à Rome (2007), a appelé de ses vœux l’avènement d’une laïcité positive reconnaissant que les religions constituent un atout sociétal et aujourd’hui (2018) le Président Macron lui emboîte allégrement le pas dans son discours au Collège des Bernardins.

    Faut-il aller plus loin ?

    En Belgique, l’Etat n’est pas laïc en ce sens qu’il serait porteur de valeurs publiques transcendant les religions privées, ni obligatoirement agnostique devant le phénomène religieux. Parler de séparation des cultes et de l’Etat serait inapproprié, si l’on entend par là que ceux-ci n’ont rien à voir ensemble. Les dispositions constitutionnelles et légales organisent plutôt une certaine indépendance dans le respect mutuel, et même un peu plus.

    On comprend aussi pourquoi la neutralité des pouvoirs publics n’est pas mentionnée, comme telle, dans la constitution même si certains la déduisent de l’interdiction des discriminations et du principe d’égalité qui y sont inscrits : face à la pluralité des religions, cette neutralité est en effet toute relative puisque l’Etat (et à sa suite les autres pouvoirs publics) soutient le libre développement des activités religieuses et apporte son aide et sa protection légale à sept cultes (laïcité comprise) qu’il subsidie et dont il rémunère les ministres : il faut donc, à tout le moins, parler d’une neutralité « positive ». 

    En Europe, comme ailleurs, le statut des cultes varie et l’article 17 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne précise que :

    - « L’Union respecte et ne préjuge pas du statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les Eglises et les associations ou communautés religieuses dans les Etats membres » ;

    -« L’Union respecte également le statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les organisations philosophiques et non confessionnelles » ;

    -« Reconnaissant leur identité et leur contribution spécifique, l’Union maintient un dialogue ouvert, transparent et régulier avec ces Eglises et organisations ».

    Il en résulte que :

    - de la laïcité de l’Etat (France) aux religions d’Etat (Danemark, Grèce, Norvège, Royaume-Uni), en passant par les régimes concordataires (du type espagnol, italien, polonais, portugais, allemand, alsacien-mosellan) ou sui generis (comme en Belgique ou en Irlande), l’Union européenne respecte et s’accommode des divers statuts conférés aux cultes par les droits nationaux de ses Etats membres ;

    - dans sa propre relation avec les cultes, l’Union est plus proche du modèle belge que de la laïcité républicaine à la française : celle-ci demeure une exception historiquement datée et sans doute appelée à évoluer. 

    Il est intéressant de noter que, dans son allocution au Collège des Bernardins, Emmanuel Macron a clairement rejeté le concept archaïque selon lequel la laïcité française serait une sorte de religion d'Etat civique transcendant, à l'image de celle de la Rome antique, toutes les religions privées tolérées par l'empire. Ce concept ne s'appuie d’ailleurs sur aucun texte légal. "Comme chef de l’État, a déclaré le Président de la France, je suis garant de la liberté de croire et de ne pas croire, mais je ne suis ni l’inventeur ni le promoteur d’une religion d’État substituant à la transcendance divine un credo républicain".

    Plus outre, la question pourrait être posée d’une révision de la loi de 1905 sur la séparation des églises et de l’ Etat stipulant que la République « ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte » (art. 2). Mais ceci est une autre histoire : déclencher une nouvelle guerre de religion avec l'idéologie laïque pour obtenir une forme de reconnaissance légale ouvrant un droit à l'aide du pouvoir séculier suppose d'évaluer au préalable si un tel statut constitue bien une garantie supérieure à l’existence d’une Eglise libre dans l’Etat libre. 

    JPSC

  • Homélie présidentielle au Collège des Bernardins

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    Le-president-Republique-Emmanuel-Macron ron-devant-eveques-France-college-Bernardins-Paris-9-avril-2018_0_1399_933.jpgA l'occasion de la Conférence des évêques de France, lundi 9 avril au soir, Emmanuel Macron a prononcé un discours au ton hasardeux et aux thématiques multiples, dans lequel on retrouve davantage de questions que de réponses. Sur le site web « Atlantico », le point de vue de Bertrand Vergely, philosophe et théologien :

    « Quand on l’écoute attentivement, le discours que le chef de l’État a prononcé hier soir aux Bernardins à l’invitation des évêques de France suscite plus de questions qu’il n’apporte de réponses.

    En premier lieu, le ton général du discours pose question. Celui-ci n’a pas tant été un discours qu’une homélie, le chef de l’État invitant les catholiques sur le ton de l’exhortation à « faire un don de leur sagesse, de leur engagement et de leur liberté ».

    Exhortation pour le moins singulière, comme si les catholiques n’avaient pas déjà l’habitude du don d’eux-mêmes.

    Dans le projet par ailleurs, annoncé d’emblée, là encore on s’interroge. « Réparer le lien entre l’Église et l’État ». Le chef de l’État, sur ce point, est demeuré sibyllin en n’expliquant pas ce qui a été gâté entre l’Église et l’État,  pourquoi cela l’a été et comment il entendait réparer ce qui a été gâté. Avec cette formule, il avait pourtant un boulevard qui s’ouvrait afin de redéfinir ce que doit être l’attitude de la laïcité à l’égard des religions en général et de l’Église catholique en particulier et ce que doit être en retour l’attitude des religions en général et de l’Église catholique en particulier à l’égard de la laïcité.  Ce qui n’a pas été fait.  À un moment du discours, il a été question de donner un cap. Celui-ci a été donné : sous la forme d’un appel à la dignité de l’homme et au sens. Ce qui ne répond guère à la question de savoir ce qu’est la laïcité et ce que doivent être les relations de la République laïque à l’égard des religions et l’attitude des religions à l’égard de la République laïque. Est-ce d’ailleurs la question des relations entre l’Église et l’État dont il convient de parler ? Cette référence à la loi de 1905 est-elle pertinente ? Le lien entre l’Église et l’État a été rompu et nul ne songe à vouloir le rétablir.  C’est bien plutôt celle des relations entre la République et le religieux en général ainsi que l’Église catholique en particulier qui pose problème. Ainsi, quand il est expliqué  que les valeurs de la République résident dans la liberté et que la liberté réside dans le droit au blasphème, n’y a-t-il pas urgence à redéfinir ce que sont les principes de la République, le sens de la liberté ainsi que ses limites ? Le chef de l’État est demeuré étrangement silencieux sur ce problème pourtant crucial. En lieu et place d’une réflexion sur le sens de la liberté aujourd’hui, de façon kierkegaardienne,  il a été surtout question d’un appel à vivre de façon déchirée, dans l’inconfort et l’incertitude. En un mot, il a été question, pour les catholiques, d’aller sur la croix et d’y rester en souffrant.

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  • Gaudete et exsultate : une exhortation pontificale qui ne devrait pas faire polémique mais...

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    De Samuel Pruvot sur le site de l'hebdomadaire Famille Chrétienne :

    « Gaudete et exsultate » : l’appel vibrant du pape à la sainteté

    Jamais une exhortation pontificale n’a aussi bien porté son nom. Dans Gaudete et exsultate (« Soyez dans la joie et l’allégresse ») le pape François exhorte à temps et contre temps. Au fil des 120 pages du document, il encourage les fidèles du monde entier à s’engager sur la route de la sainteté. Evidemment, ce chemin de la perfection peut faire peur et même paraître inaccessible. « Le Seigneur (…) veut que nous soyons saints, insiste pourtant François, et il n’attend pas de nous (…) une existence médiocre. »

    Après avoir évoqué la vie de l’Église universelle dans sa première exhortation (Evangelii gaudium , 2013) la famille dans la seconde (Amoris Laetitia , 2016), le pape concentre aujourd’hui son attention sur le secret des âmes. Comme si le pontificat voulait embrasser à la fois l’infiniment grand et l’infiniment petit. Chaleureuse et didactique, cette exhortation a un petit air de famille avec les Exercices spirituels de saint Ignace de Loyola. Le pape n’est pas jésuite pour rien. Si l’objectif est bien de se mesurer aux défis du monde postmoderne, le texte fourmille de références archi classiques : la primauté absolue de Dieu, l’existence du diable ou la nécessité de l’examen de conscience. Cela tombe sans doute à pic pour rééquilibrer la balance après les incompréhensions qui ont suivi la publication d’Amoris Laetitia sur les questions de théologie morale.

    Même si on pourra relever quelques formules choc, Gaudete et exsultate ne devrait pas faire polémique. Car l’objectif est clairement spirituel. Il s’agit moins d’un document à lire que d’un itinéraire intérieur à emprunter. Saint Ignace proposait « quatre semaines » en suivant le Christ pas à pas. François offre cinq méditations successives comme cinq marches pour se rapprocher de Dieu.

    Dans le premier chapitre, le pape lance donc un appel vibrant à la sainteté. En s’appuyant sur l’intuition de Vatican II qui rappelle que tous les fidèles ont vocation à la sainteté.  « J’aime voir la sainteté dans le patient peuple de Dieu écrit-il, dans cette constance à aller de l’avant chaque jour, je vois la sainteté de l’Eglise militante. » Le chapitre suivant est consacré à la dénonciation de deux ennemis de la sainteté. Pour François, il s’agit de la résurgence de vielles hérésies à savoir le gnosticisme qui prétend obtenir le salut par le savoir et le pélagianisme qui estime à tort que « tout est possible par la volonté humaine ». Dans son troisième chapitre François propose de marcher à la lumière du Maître. En clair, une imitation de Jésus dans un style très ignatien. Le chapitre suivant invite les fidèles à cultiver certaines vertus propices à la sainteté comme l’endurance ou l’audace. Le pape termine son exhortation en soulignant que la sainteté est d’abord un combat qui demande vigilance et discernement : « Notre chemin vers la sainteté est aussi une lutte constante. Celui qui ne veut pas le reconnaître se trouvera exposé à l’échec ou à la médiocrité. »

     

    ... toutefois, Sandro Magister relève des "invectives" présentes dans ce document qui visent des catégories de gens qui n'épouseraient pas la vision du pape :

    "Dans « Gaudete et exsultate », François brosse un portrait particulièrement négatif de ses détracteurs.

    Ce sont ceux qui ont « un visage d’enterrement », qui sont « obsédés par la loi, l’ostentation dans le soin de la liturgie, de la doctrine et du prestige de l’Eglise ».

    Ce sont ceux qui plient la religion « au service des propres élucubrations psychologiques et mentales ».

    Ce sont ceux qui conçoivent la doctrine comme « système clos, privé de dynamiques capables d’engendrer des questions, des doutes, des interrogations ».

    Ce sont ceux qui s’enferment dans une « médiocrité tranquille et anesthésiante » faite d’ « individualisme, spiritualisme, repli dans de petits cercles, dépendance, routine, répétition de schémas préfixés, dogmatisme, nostalgie, pessimisme, refuge dans les normes. »

    Ce sont ceux qui aiment « avoir le regard figé dans une prétendue extase » et une « sainteté de façade, toute belle, toute bien faite » mais qui en réalité est « feinte ».

    Ce sont, en deux mots, les « gnostiques » et les « pélagiens » modernes, dans une version actuelle de ces deux hérésies antiques.

    Dans toutes ces invectives de François contre ses détracteurs, est-il possible d’identifier quelques attaques « ad personam » ?

    Si l’on s’en tient à ce qu’écrit le Père Spadaro, on dirait bien que oui.

    Il y a un passage, au paragraphe 26 de « Gaudete et exsultate » qui semble vouloir en finir avec deux millénaires de monachisme contemplatif, masculin et féminin.

    « Il n’est pas sain d’aimer le silence et de fuir la rencontre avec l’autre, de souhaiter le repos et d’éviter l’activité, de chercher la prière et de mépriser le service. Nous sommes appelés à vivre la contemplation également au sein de l’action ».

    Et voilà ce qu’écrit Spadaro dans l’exégèse qu’il fait de ce passage :

    « C’est cela l’idéal ignacien, en fait, selon la célèbre formule d’un de ses premiers compagnons, le P. Jerónimo Nadal : être ‘simul in actione contemplativus’. Les alternatives telles que ‘Dieu ou le monde’ ou encore ‘Dieu ou rien’ sont fausses ».

    Attention : « Dieu ou rien » et « La force du silence » sont exactement les titres des deux principaux livres du cardinal Robert Sarah, c’est-à-dire du principal défenseur d’une vision de l’Eglise catholique différente de celle promue par le Pape François."

     

  • Paris : Emmanuel Macron a rencontré l’Église catholique au Collège des Bernardins (lundi soir, 9 avril)

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    Après une rénovation complète achevée en septembre 2008, le collège des Bernardins (XIIIe siècle) est aujourd’hui un lieu de rencontres, de dialogues, de formation et de culture proposant une programmation riche de conférences et colloques, d’expositions, de concerts, d’activités pour le jeune public ainsi qu’un centre de formation théologique et biblique. Depuis 2009, il abrite l'Académie catholique de France.

    Organisée par la Conférence des évêques de France (CEF), une grande soirée inédite s’y est tenue ce lundi 9 avril au soir, en présence du président de la République et de 400 invités. Après trois témoignages émouvants illustrant en binôme la plus grande des trois vertus théologales et le discours Mgr Pontier, Président de la CEF, on a pu entendre, en retour, celui du Président de la République consacré à la place du catholicisme dans la vie politique et sociale de la France. Nous y reviendrons. Voici l’enregistrement video de cette soirée (JPSC) :

  • L'exhortation apostolique Gaudete et Exsultate du Saint-Père François sur l'appel à la sainteté dans le monde actuel

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    EXHORTATION APOSTOLIQUE

    GAUDETE ET EXSULTATE

    DU SAINT-PÈRE FRANÇOIS

    SUR L’APPEL À LA SAINTETÉ DANS LE MONDE ACTUEL

    source

     

    1. « Soyez dans la joie et l’allégresse » (Mt 5, 12), dit Jésus à ceux qui sont persécutés ou humiliés à cause de lui. Le Seigneur demande tout ; et ce qu’il offre est la vraie vie, le bonheur pour lequel nous avons été créés. Il veut que nous soyons saints et il n’attend pas de nous que nous nous contentions d’une existence médiocre, édulcorée, sans consistance. En réalité, dès les premières pages de la Bible, il y a, sous diverses formes, l’appel à la sainteté. Voici comment le Seigneur le proposait à Abraham : « Marche en ma présence et sois parfait » (Gn 17, 1).

    2. Il ne faut pas s’attendre, ici, à un traité sur la sainteté, avec de nombreuses définitions et distinctions qui pourraient enrichir cet important thème, ou avec des analyses qu’on pourrait faire concernant les moyens de sanctification. Mon humble objectif, c’est de faire résonner une fois de plus l’appel à la sainteté, en essayant de l’insérer dans le contexte actuel, avec ses risques, ses défis et ses opportunités. En effet, le Seigneur a élu chacun d’entre nous pour que nous soyons « saints et immaculés en sa présence, dans l’amour » (Ep 1, 4).

     

    Premier chapitre

    L’APPEL À LA SAINTETÉ

    Les saints qui nous encouragent et nous accompagnent

    3. Dans la Lettre aux Hébreux, sont mentionnés divers témoignages qui nous encouragent à « courir avec constance l’épreuve qui nous est proposée » (12, 1). On y parle d’Abraham, de Sara, de Moïse, de Gédéon et de plusieurs autres (cf. 11, 1-12, 3) et surtout on nous invite à reconnaître que nous sommes enveloppés « d’une si grande nuée de témoins » (12, 1) qui nous encouragent à ne pas nous arrêter en chemin, qui nous incitent à continuer de marcher vers le but. Et parmi eux, il peut y avoir notre propre mère, une grand-mère ou d’autres personnes proches (cf. 2 Tm 1, 5). Peut-être leur vie n’a-t-elle pas toujours été parfaite, mais, malgré des imperfections et des chutes, ils sont allés de l’avant et ils ont plu au Seigneur.

    4. Les saints qui sont déjà parvenus en la présence de Dieu gardent avec nous des liens d’amour et de communion. Le Livre de l’Apocalypse en témoigne quand il parle des martyrs qui intercèdent : « Je vis sous l’autel les âmes de ceux qui furent égorgés pour la Parole de Dieu et le témoignage qu'ils avaient rendu. Ils crièrent d’une voix puissante : ‘‘Jusques à quand, Maître saint et vrai, tarderas-tu à faire Justice ?’’ » (6, 9-10). Nous pouvons dire que « nous nous savions entourés, conduits et guidés par les amis de Dieu […] Je ne dois pas porter seul ce que, en réalité, je ne pourrais jamais porter seul. La troupe des saints de Dieu me protège, me soutient et me porte ».[1]

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  • L'existence de l'enfer

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    Du site de France Catholique :

    L’enfer existe-t-il ?

    par Françoise Breynaert, docteur en théologie

    Le pape françois, d’une part réaffirme l’existence de Satan : «  Si tu commences à dialoguer avec Satan tu es perdu, il est plus intelligent que nous et il te renverse, te fait tourner la tête et tu es perdu. Non, va-t’en !  (1) » Et d’autre part minimiserait ou nierait l’existence de l’enfer : «  L’enfer n’existe pas, ce qui existe c’est la disparition des âmes pécheresses  », aurait-il déclaré (2). De tels propos reflètent tout un courant de pensée. Replacés dans l’histoire de la théologie, ils apparaissent comme de simples déductions logiques et émotionnelles. Cette simple page nous invite à revenir à l’Évangile, complet…

    Le Christ a souvent parlé de la Géhenne ou du feu éternel, on lit par exemple : «  Alors il dira encore à ceux de gauche : "Allez loin de moi, maudits, dans le feu éternel qui a été préparé pour le diable et ses anges"  » (Mt 25, 41). Et on lit dans l’Apocalypse : «  Et celui qui ne se trouva pas inscrit dans le livre de vie, on le jeta dans l’étang de feu  » (Ap 20, 15).

    Le Christ a aussi donné un enseignement sur la vie éternelle (l’éternelle Vie !), donnée aux disciples dès cette terre (Jn 5, 24), dès maintenant aux défunts qui accueillent la voix du Fils de l’homme (Jn 5, 25), et à travers un ultime jugement au dernier jour, pour la résurrection finale (Jn 5, 27-28). La première lettre de saint Pierre déclare plus simplement : «  La Bonne Nouvelle a été également annoncée aux morts…  » (1P 4,6). Ce que le Credo exprime en disant «  Jésus-Christ… est descendu aux enfers  » (non pas «  en enfer  », l’enfer de Satan, mais «  aux enfers  », le séjour des morts).

    En contradiction avec ces passages, saint Augustin enseigne qu’il faut que tout soit déjà joué durant la vie terrestre, sans quoi, explique-t-il (3), les exhortations morales seraient inutiles sur la terre, de même que l’évangélisation ! De la sorte, saint Augustin, vers l’an 400, a opéré un tournant dont il ne pouvait sans doute pas imaginer les conséquences…

    Dans l’Église latine, depuis saint Augustin, la Bonne Nouvelle aux défunts ayant été passée sous silence, on ne voyait plus comment ceux qui n’avaient pas été évangélisés pouvaient invoquer le Christ : vont-ils donc en enfer ? Et l’augustinisme produisit (à l’époque médiévale) l’imaginaire d’un enfer débordant ! En compensation, et pour ne pas dire que les non-chrétiens sont forcément en enfer, les théologiens occidentaux ont produit des systèmes plus ou moins obscurs ou erronés.

    Avec la bonne intention de ne pas dire que les non-chrétiens sont damnés, un type de raisonnement, contradictoire avec le Nouveau Testament, a été d’imaginer que l’enfer ne soit que virtuel, ou qu’il soit momentané, ou que les âmes non méritantes disparaissent, etc. Toutes ces solutions re­lèvent de préoccupations affectives de la part des théologiens. Elles sont en réalité absurdes : car alors était-ce bien la peine que Jésus parle de l’enfer et accomplisse la Rédemption au prix de la croix ?

    C’est pourtant le raisonnement d’un très grand théologien, Urs von Balthasar. Le volume et la complexité de son œuvre écrite ne parvient pas à cacher ni la contradiction interne ni l’omission de cette vérité que le Christ est venu pour détruire l’œuvre du diable (1Jn 3, 8 : si diable il y a, l’enfer n’est donc ni vide, ni virtuel).

    En corollaire, si l’enfer n’a plus de consistance, la morale non plus.
    Le récent Catéchisme de l’Église catholique remet en valeur la Bonne Nouvelle aux défunts (§ 634-635). Il peut alors réaffirmer le Paradis et l’enfer en toute équité, en évitant les deux excès inverses d’un enfer débordant et d’un enfer inexistant. Il peut affirmer à la fois que Dieu est amour et miséricorde, et qu’il est juste (1Jn 1,9 ; 3, 7).

    — -

    (1) 2 décembre 2017, conférence de presse dans l’avion.

    (2) Dans un entretien redoutablement informel avec Eugenio Scalfari, le fondateur du journal italien La Repubblica, paru le vendredi 28 mars 2018.

    (3) Saint Augustin, Lettre 164 à Evodius.

    Françoise Breynaert, La bonne nouvelle aux défunts. Perspective de la théologie des religions, Via Romana, préface Mgr Minnerath, 260 pages, 19 e.
    www.foi-vivifiante.fr

    https://sites.google.com/site/fbreynaert/

  • L’Eglise, combien de divisions ?

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    De Philippe Maxence sur le site web du bimensuel « L’Homme Nouveau » :

    Resurrection.jpg« L’Église, combien de divisions ? On connaît la célèbre phrase de Staline, bien révélatrice de son matérialisme et de sa volonté hégémonique qui entendait écarter définitivement l’Église de la face du monde. L’Église, combien de divisions ? Mais, beaucoup, aurait-on tendance à répondre aujourd’hui. Et, même, beaucoup trop ! Non plus, cette fois, en référence aux unités blindées ou, plus largement, aux armées auxquelles pensait le maître du Kremlin, mais à celles qui divisent les catholiques entre eux. 

    Certes, c’est une vieille histoire. Dès les origines, l’Église fut traversée par des courants et des tentatives de scission. Judas, choisi par le Christ, reste la figure emblématique de la trahison radicale et donc de cette division au sein du collège des Apôtres. Saint Paul ne cesse d’intervenir auprès des chrétientés qu’il a créées pour calmer les passions et ramener les récents prosélytes à l’unité de la doctrine. Plus tard, les grandes hérésies vont traverser l’Église, offrant à celle-ci la possibilité d’approfondir sa doctrine, de la préciser et de la définir. Saint Paul, encore lui, avait d’ailleurs prévenu les Corinthiens : « Oportet haereses esse ». Il faut qu’il y ait des hérésies. Terrible constat ! Terrible nécessité ! 

    Par une étrange sorte d’optimisme, bien peu surnaturel, nous voudrions échapper à cette loi qui n’a cessé d’habiter l’Église, depuis Arius jusqu’au modernisme en passant par le protestantisme. Nous aimerions l’unanimisme que l’on confond facilement avec l’unité. Saint Pie X s’était attaqué avec force au modernisme qu’il qualifiait de « rendez-vous de toutes les hérésies ». Plus récemment, après le concile Vatican II, Jacques Maritain qualifia, dans son Paysan de la Garonne, la crise moderniste de « rhume de foin » en comparaison de « l’espèce d’apostasie “immanente” » qui s’affichait alors. Ne nous y trompons pas ! Maritain n’était en rien ce qu’on appelle couramment un intégriste. Dans le même livre, il dénonce les « ruminants de la Sainte-Alliance », à savoir la droite catholique avec laquelle il avait rompu au temps de la crise de l’Action française. 

    Des aveugles conduisant des aveugles ?

    Et, aujourd’hui ? Il faut vraiment être aveugle, et parfois aveugle volontaire, pour ne pas constater une réelle division dans l’Église. Il suffit de le voir à travers la production des faiseurs d’opinion au sein du catholicisme français. Récemment, Le Figaro publiait un sondage mettant le Pape au centre des discussions des catholiques. Pour ou contre, en tout ou en partie ? À l’aune d’un tel procédé, Pie IX, béatifié par le pape Jean-Paul II, n’aurait eu que peu d’opinions favorables, lui dont les Romains voulurent jeter la dépouille mortelle dans le Tibre. 

    L’esprit du monde a vraiment pénétré l’Église et nous sommes sommés maintenant d’être pour ou contre le Pape, comme s’il n’était qu’un vulgaire chef d’État d’une vulgaire démocratie. Comme si nous oublions aussi sa mission de service de l’unité et de la vérité catholique. Des prêtres sur twitter s’agitent dans ce sens. Des laïcs s’écharpent à ce sujet sur facebook ou via des sites internet. Des livres prétendent expliquer le changement radical de notre époque, que nous n’aurions pas perçu. On est allé jusqu’à demander à Benoît XVI de préfacer l’ouvrage d’un hérétique sous prétexte que ­celui-ci présentait un aspect de la pensée théologique du pape François (cf. p. 11). 

    Ne pas varier

    C’est peu dire que la confusion règne ! Au risque de ne pas suivre ceux qui veulent absolument sauver la situation, il me semble que ce temps d’épreuve est aussi un temps de grâce. La Semaine sainte que nous venons de vivre nous a montré l’abandon du Christ, y compris par ses Apôtres et saint Pierre lui-même. Elle nous a permis de revivre la solitude absolue du Christ face à sa Passion, au point d’avoir sué des gouttes de sang. Mais, nous avons revécu aussi son triomphe, celui de la Résurrection et nous allons suivre désormais les Apôtres autour de saint Pierre et de saint Paul dans la conquête (pacifique) du monde, jusqu’au prix de leur sang, à eux aussi. 

    Dans les périodes de crise, de doute et de souffrance, il faut s’enraciner dans un regard surnaturel. Celui-ci ne nie pas la réalité de ce qui se déroule sous ses yeux. Il ne tente même pas de l’effacer par de pieux discours. Le constatant, et parce qu’il le constate, il recourt encore plus fortement aux moyens certains du salut. Comme l’enseignent nombre d’auteurs spirituels, dans la désolation, il écarte les nouveautés et s’en tient aux vérités de la doctrine et de la théologie traditionnelles, aux sacrements, à une foi renouvelée et une prière plus intense. Il prépare ainsi l’avenir qui débouchera à l’heure de Dieu sur une renaissance et un renouveau. 

    Notre espérance ? C’est bien le Christ ressuscité, l’Église qu’il a établie et la doctrine ne varietur qu’il a enseignée. Le reste n’est certes pas un simple rhume de foin. Il s’agit bien d’une croix. Grave, pénible, source de souffrance. Mais qui conduit involontairement et malgré tout à la Résurrection. Saint temps pascal à tous ! 

    Ref. Oportet haereses esse !

    L’histoire de l’Eglise n’a jamais été un long fleuve tranquille et les grands conciles oecuméniques qui jalonnent son existence ont été le théâtre des enjeux majeurs qu’elle dût maintes fois affronter. A Nicée (325) c’était la divinité même de la personne du Christ qui était la cause d’une controverse dont l’issue incertaine faillit  emporter l’objet de la révélation chrétienne. Et plus tard, à Trente (1545-1563) comme à Vatican II (1962-1965), ce sont des mutations anthropologiques majeures de la société qui ont appelé, de la part de l’Eglise, une réponse fidèle au dépôt de la foi reçue des apôtres. Dans l’un comme dans l’autre cas, une mise en œuvre équilibrée suppose du temps: plus de cinquante ans après la clôture de Vatican II, oscillant aujourd’hui encore entre les pontificats contrastés de Benoît XVI et de François, l'histoire de ce concile n’est manifestement pas encore vraiment écrite, contrairement à celle du Christ ressuscité, seule Espérance de notre salut.

    JPSC