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Histoire - Page 3

  • Le bienheureux Clemens August von Galen : un évêque face au nazisme (22 mars)

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    Clemens August von Galen - évêque, opposant, bienheureux

    Du numero 145 de la revue Sedes Sapientiae (Fraternité Saint-Vincent-Ferrier) :

    Le cardinal von Galen, évêque de Münster de 1933 à 1946, a été béatifié par Benoît XVI le 9 octobre 2005. Jérôme Fehrenbach, dans la biographie qu’il lui consacre [1], s’arrête à sa mort en mars 1946 et n’évoque pas du tout la procédure de béatification engagée à la fin des années 1950 et qui a abouti près d’un demi-siècle plus tard. Incompréhensiblement, il n’utilise pas la très abondante source historique et biographique que constituent les témoignages sous serment recueillis lors du procès de béatification [2]. Sans doute a-t-il estimé que les très importantes et intéressantes archives de la famille von Galen auxquelles il a eu accès (correspondances, etc.) suffisaient à dresser un portrait intime, personnel et spirituel à la fois, du grand évêque. Mais, ce faisant, il s’est privé des résultats d’une enquête systématique qui, comme dans tout procès de béatification, a porté, non seulement sur toutes les étapes de la vie du cardinal von Galen, mais aussi sur la façon dont il a pratiqué les différentes vertus (cardinales et théologales) et sur les questions difficiles qui pouvaient donner lieu à des objections.

    Si cette nouvelle biographie de von Galen apporte beaucoup d’éléments nouveaux, elle peut être complétée par d’autres travaux et d’autres sources pour mieux connaître cette grande figure de l’Église allemande contemporaine et mieux comprendre certaines de ses décisions et certains de ses actes.

    Une famille ancrée dans la tradition catholique

    Mgr von Galen était fier de ses séculaires origines terriennes et westphaliennes. Il les revendiqua publiquement dans un sermon prononcé en novembre 1937 : « C’est un fait établi, assorti de preuves documentaires, que mes ancêtres, des hommes de mon nom et de ma maison, dont le sang coule dans mes veines, depuis plus de 700 années, ont leur fief ici en Münsterland et sur les rives de la Lippe, que mes ancêtres en tant qu’allemands et allemandes ont vécu ici et sont morts ici. »

    C’est une famille de grands propriétaires terriens qui a compté de nombreux officiers, des ecclésiastiques et, au XIXe et XXe siècles, des députés. Déjà curé à Münster, Clemens August écrivait à sa sœur Agnès en 1921 : « Souvent je repense à la chance et au privilège que nous avons eus – et qu’ont vos enfants […] d’avoir en partage la foi catholique et la vie de l’Église catholique comme quelque chose de parfaitement naturel, au point que cela signifierait une rupture avec son propre passé, avec les racines natales, avec le foyer familial, si l’on s’en éloignait [3]. »

    La marque commune à tous les membres de cette famille est l’attachement à la foi catholique, non seulement par une pratique régulière (messe quotidienne et prière du soir dans la chapelle du château ancestral de Dinklage), mais aussi par une vie privée conforme à ses convictions et par un engagement public au service de l’Église.

    Né en 1878, Clemens August fit sa première communion, avec son frère Franz, en 1890, à l’âge tardif de 12 ans, selon la coutume de l’époque que Pie X modifiera vingt ans plus tard. À cette occasion, leur mère leur offrit à chacun un exemplaire de l’Imitation de Jésus-Christ, avec comme dédicace un seul mot : Modicum. Tout un programme de vie.

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  • L'asile occidental. Le livre de dénonciation de Meotti : « C'est ainsi que nous effaçons tout ce que nous sommes et nos origines »

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    Du Nuovo Sismografo :

    L'asile occidental. Le livre de dénonciation de Meotti

    Selon la culture dominante, seule l'acceptation inconditionnelle de l'autre, idéalement non occidental, à travers l'islam, l'immigration et le wokisme, permet d'entrevoir l'espoir d'une rédemption et d'une régénération sur les ruines d'un monde sécularisé. Voilà l'esprit nouveau qui souffle sur l'Occident, mélange de décadence et de barbarie.

    Nous publions ci-dessous un court extrait du livre de Giulio Meotti, Manicomio Occidente - Gender, multiculturalism, woke : anatomy of a suicide, publié par les éditions Il Timone.

    *****

    Londres, capitale du Nouveau Monde, pont occidental entre l'Europe et l'Amérique. Sous la direction du maire travailliste Sadiq Khan, les panneaux d'affichage dans le métro ou sur les bus contenant de la « honte corporelle », c'est-à-dire montrant des femmes en bikini, ou de la « malbouffe », comme des hamburgers et des frites, sont interdits. En revanche, M. Khan ne voit aucun inconvénient à ce que les islamofascistes fassent de la publicité pour le « tawhid », le doigt levé vers le ciel en signe de soumission à Allah. Le métro de Londres lui-même n'a pas hésité à interdire les publicités pour les nus d'Egon Schiele, le grand peintre expressionniste autrichien, alors que la publicité « Allah est grand » ne pose aucun problème.

    Khan lui-même teint en violet la colonne de Trafalgar Square pour célébrer le Ramadan, allume les illuminations du Ramadan à Piccadilly Circus, assiste à des réunions islamiques où les femmes sont séparées des hommes, et pense que Winston Churchill est « problématique ». Le personnel travaillant pour le maire de Londres, M. Khan, a quant à lui été prié d'éviter les expressions sexistes telles que « mesdames et messieurs ». Plus question de qualifier les migrants d'« illégaux ». Au lieu de cela, il faut les appeler « personnes dont le statut d'immigration est incertain » ou « sans-papiers ». Évitez d'utiliser « hommes et femmes », préférez « gens » ou « Londoniens ». Et encore : « De même, au lieu de “ladies and gentlemen”, dites quelque chose qui n'exclut pas les personnes non binaires ». Selon le document, « les termes “mâle” et “femelle” sont datés et médicalisés ».

    Il ne s'agit pas d'un mystère amusant, mais d'un modèle qu'ils appellent désormais « diversité » dans le Nouveau Monde. Ils acceptent que la charia affiche ses bannières, mais censurent la publicité d'un gâteau de mariage parce qu'il est « malsain ». Pendant ce temps, à Grenoble, la capitale des Alpes françaises, le maire vert Éric Piolle a proposé de supprimer les fêtes chrétiennes du calendrier scolaire. Piolle a sorti du chapeau une idée ingénieuse : « Supprimons les références aux fêtes religieuses dans notre calendrier et déclarons jours fériés les fêtes laïques qui marquent notre attachement aux révolutions, à la commune, à l'abolition de l'esclavage, aux droits des femmes et aux droits des LGBT ». Au diable la Pentecôte, Noël, Pâques, l'Ascension. 

    Le maire avait déjà organisé et financé le « mois décolonial » dans sa ville, au cours duquel l'homme blanc a été « mis à l'épreuve ». Le concept est simple : l'homme blanc occidental, après avoir dépouillé ses anciennes colonies et ruiné la biodiversité, est raciste, sexiste et colonialiste à l'égard des migrants venus s'installer en Europe. La ville de Grenoble fait également campagne contre le foulard islamique dans ses affiches de rue, mais ne trouve rien de schizophrénique à créer des « écoles non mixtes ». Alors pourquoi ne pas construire aussi une nouvelle méga mosquée de 2 200 mètres carrés ? Et pourquoi ne pas empêcher la construction d'une église Saint-Pie X ? Jean Messiha, président copte du club intellectuel Vivre français, écrit : « Faisons de notre pays une exoplanète vierge prête à être colonisée par toutes les identités. Effaçons tout ce que nous sommes et nos origines et recommençons à zéro ».

    Giulio Meotti est journaliste à « Il Foglio ». Il a écrit pour des journaux internationaux tels que le Wall Street Journal et le Jerusalem Post, et collabore avec le mensuel Il Timone.

  • La transmission de la foi dans l’Église cachée au Japon : un miracle

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    De Solveig Parent sur "1000 raisons de croire" :

    Japon

    De 1587 à 1853

    Le miracle de la transmission de la foi dans l’Église cachée japonaise

    Au Japon, une politique de fermeture du pays débute en 1587 avec l’expulsion des missionnaires chrétiens, puis avec l’interdiction pour les Japonais de sortir du territoire – ou d’y revenir s’ils s’étaient installés outre-mer – et l’expulsion de tous les étrangers illégaux. Un isolement complet vis-à-vis de l’Occident (sakoku) est mis en place, coupant de l’Église les Japonais chrétiens convertis quelques années plus tôt. Les chrétiens sont ensuite violemment persécutés pendant plus de deux cents ans : certains d’entre eux meurent martyrs lors d’exécutions publiques, d’autres continuent de pratiquer leur foi en secret. Il est véritablement exceptionnel que, dans ces circonstances, la foi en Christ ait pu se transmettre sur dix générations jusqu'à ce que le pay mette fin à l'isolement.

    Statue de la Vierge Marie, ressemblant au Kannon bouddhiste (collection Nantoyōsō, Japon) / © CC0, wikimedia.
    Statue de la Vierge Marie, ressemblant au Kannon bouddhiste (collection Nantoyōsō, Japon) / © CC0, wikimedia.

    Les raisons d'y croire :

    • Le christianisme a été introduit au Japon en 1549 par saint François-Xavier et s’est développé rapidement. Bien qu’il s’agisse d’une religion étrangère très différente du bouddhisme et du shintoïsme pratiqués jusqu’alors, on compte jusqu’à 30 000 chrétiens en 1570 et 150 000 dix ans plus tard. Si bien qu’une cinquantaine d’années seulement après le débarquement des premiers missionnaires, ils sont déjà 300 000 chrétiens japonais.
    • Mais le christianisme est interdit en 1614. Les shoguns s’ingénient à éradiquer cette religion : organisation d’un système de surveillance du voisinage, prime à la délation, torture pour pousser à l’apostasie, utilisation régulière de la méthode du fumi-e pour repérer les chrétiens qui refusent de piétiner les images de Jésus et de la Vierge Marie... Malgré la répression violente et durable, le christianisme ne s’éteint pas : des Japonais parviennent à demeurer chrétiens en secret et forment de petites communautés clandestines.
    • Les prières qui leur avaient été apprises sont en latin et, à cause des persécutions, il n’est pas possible de conserver d’écrits. Les communautés chrétiennes sont donc coupées du reste de l’Église, sans prêtres, sans catéchisme, sans bibles, sans livre de prières… Dans de telles conditions, il aurait été logique que le christianisme japonais disparaisse en l’espace de quelques dizaines d'années. Les exemples dont nous disposons ailleurs, dans des circonstances similaires, montrent qu’habituellement, la langue et la religion se perdent au bout de trois générations.
    • Le Japon ne s’ouvre à nouveau aux échanges avec les nations étrangères que deux cent vingt années plus tard, en 1853, mais le christianisme est alors toujours interdit aux Japonais. Un jeune prêtre des Missions étrangères de Paris, le père Bernard Thaddée Petitjean (1829 – 1884) débarque à Nagasaki. Le 17 mars 1865, il voit un groupe de femmes s’approcher, et l’une d’elles lui demande : « Où est la statue de la Vierge ? » À la grande surprise du prêtre, le groupe récite ensuite l’Ave Maria en latin. La femme explique au prêtre : « Notre cœur est semblable au vôtre », et elle ajoute qu’il y en a beaucoup comme eux derrière les collines. Ni le père Petitjean ni aucun autre occidental n’aurait osé espérer que des chrétiens soient encore présents sur la terre nipponne.

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  • Le grand héritage de saint Patrick (17 mars)

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    SAINT PATRICK ET L'IRLANDE (source)

    Saint Patrick pourrait être considéré comme le Père de la grande Évangélisation de l’Occident. Le roi Baudouin de Belgique y a fait allusion alors qu’il s’adressait aux Irlandais. On cite ses paroles dans ce beau livre que le cardinal Suenens a consacré à ce roi mort comme un saint en 1993. « Aux Irlandais, je leur ai dit combien nous aimions l’Irlande. Vous savez, leur dis-je, que l’Irlande est connue pour sa foi, et que ce sont des Irlandais qui ont converti l’Europe au Christianisme. Ne perdez pas votre Foi. Gardez-la précieusement. »

    Le roi Baudouin faisait allusion à ces moines irlandais qui avant l’an mille ont parcouru, comme saint Paul, des régions éloignées qu’ils ont transformées par leur prédication enthousiaste et la fondation de nombreux monastères.

    Saint Patrick (ou Patrice) serait né en Angleterre vers 385. À 16 ans, capturé par des pirates, il est vendu comme esclave en Irlande. On raconte qu’il était chrétien, mais pas très fervent. Or son exil en Irlande où il est tenu captif lui aurait permis justement de réfléchir au point que ces années « ont été les plus importantes de ma vie ». Patrick devient fervent et se décide d’apprendre la langue gaélique pour pouvoir convertir les Irlandais. Son malheur devient son bonheur. Mais il croit bon d’approfondir sa foi catholique. Il réussit donc à s’évader et à se rendre en Gaule (en France) où il reçoit une bonne formation auprès de saint Germain d’Auxerre, puis dans le célèbre monastère de l’île de Lérins qui existe toujours sur la Côte d’Azur.

    En 432, l’ancien esclave revient donc en Irlande en libérateur des âmes. Évêque d’Armagh, il sort les Irlandais de l’obscurantisme. Ce n’est pas très facile pour lui et ses compagnons de lutter contre l’influence des druides. Il a heureusement la bonne idée de commencer par amener au Christ les personnages importants, ce qui lui facilite rapidement les choses pour ouvrir le cœur des Irlandais en général et leur permettre de saisir le sens profond de la vie et de la mort et de comprendre que l’on ne peut être vraiment humain que si l’on est charitable et généreux en adhérant à l’Évangile et en vivant de la vie même du Christ. Les Irlandais se montrent en effet généreux et lui offrent des terres pour construire des églises et des monastères. Comme Patrick est un évêque convaincu et exemplaire, un grand priant et un homme plutôt ascétique, il réussit à bien évangéliser et à entraîner déjà à sa suite des foules de jeunes. Saint Patrick meurt finalement le 17 mars 461. Cette vie de saint Patrick, même si elle tient de la légende, demeure fort inspirante et même très belle.

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  • Sainte Gertrude de Nivelles (17 mars)

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    Gertrud_von_Nivelles.jpgLA VIE DE SAINTE GERTRUDE DE NIVELLES - fête au 17 mars (source)

    Sainte Gertrude était donc fille de Pépin de Landen et de Sainte Itte, et parente de Saint Bavon. Elle naquit à Landen en 626. Dès sa jeunesse, elle est considérée comme un modèle de vertu: dédaignant les vanités de ce monde, elle consacra, sur le conseil de Saint Amand, sa virginité à Dieu.

    Un jour, le fils d'un grand seigneur d'Austrasie l'aperçut à la cour du roi, et s'éprit d'elle. Il en parla au roi, qui fit mander Pépin et sa fille pour leur proposer ce qui devait être un excellent parti. Mais Gertrude refusa catégoriquement, faisant remarquer au roi qu'elle avait depuis son enfance voué sa virginité au Christ. Le roi, bien qu'étonné, approuva cette attitude. Le jeune seigneur, lui, en conçut, comme il fallait s'y attendre, un vif dépît. Quant à Pépin, il désapprouvait totalement le refus de sa fille et il était décidé à employer toutes les ressources de l'autorité paternelle pour modifier les intentions de Gertrude. Pour la jeune fille, il n'y avait plus qu'une solution: la fugue. Avec le consentement de sa mère, Gertrude s'enfuit de la maison paternelle et se retira en un lieu solitaire où elle passa quelque temps dans la prière, la retraite et la pratique de la vertu. Pépin fut obligé de comprendre et rappela sa fille, enfin décidé à respecter son engagement.

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  • Maria Valtorta : une grande visionnaire ou une romancière exceptionnelle ?

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    D'Olivier Bonnassies sur La Sélection du Jour :

    Maria Valtorta, grande visionnaire ou romancière exceptionnelle

    Photo : Maria Valtorta, auteur religieuse italienne et mystique alitée, à l'époque de ses mystérieuses visions. Crédits : ©Wikimedia Commons, image du domaine public

    Maria Valtorta (1897-1961) est une mystique catholique qui a grandi en Italie, à Viareggio. Une blessure grave au dos, en 1925, l'a conduite à rester alitée. Malgré ses souffrances physiques, elle a mené une vie de grande piété, se consacrant à la prière et à l'écriture. Elle est connue pour avoir écrit « Le poème de l'Homme-Dieu », une œuvre monumentale rassemblant près de 700 visions et dictées qu'elle dit avoir reçues de Jésus-Christ et de la Vierge Marie. Ce que conteste une série de prises de position d'autorités de l'Église catholique. Mais une lettre récente, encore peu connue, signée de la main du pape François, encourage à faire connaître activement Maria Valtorta et son « œuvre littéraire » pour « le bien de l'Église et de la société ».

    Un court communiqué du Vatican sur les écrits de la mystique catholique italienne Maria Valtorta vient de mettre en émoi le petit monde catholique français. Le texte publié en italien par le Dicastère pour la Doctrine de la Foi (ex Saint-Office), en date du 22 février dernier, indique que « les prétendues visions et révélations contenues dans les écrits de Maria Valtorta (...) ne peuvent être considérées comme d'origine surnaturelle ». Les grands médias catholiques et Wikipédia ont relayé l'information en évoquant une « condamnation » de l'œuvre principale de Maria Valtorta, intitulée en français « L'Évangile tel qu'il m'a été révélé » (le titre originel italien « Le poème de l'Homme-Dieu », sans doute meilleur, ne donne pas l'impression de concurrencer l'Evangile). Mais il semble que le communiqué du Vatican n'apporte, en réalité, rien de nouveau. Comme une note de la Conférence des Évêques de France, qui avait déjà mis en garde, en 2021, contre l'idée que de telles « méditations » puissent remplacer l'Évangile , il s'inscrit dans une longue série de réserves et de controverses entre des institutions et personnalités d'Église - jusqu'au pape François lui-même - au sujet de cette mystique qui connait un succès d'édition croissant.

    En réalité, la dernière enquête du Vatican sur Maria Valtorta date de 1959, et elle aboutit l'année suivante à une mise à l'Index de ses écrits. La censure du Saint-Office avait, à l'époque, des réticences envers les mystiques et elle s'opposa aussi à sainte Faustine Kowalska (mise à l'Index en mars 1959), à saint Padre Pio (combattu à partir de juillet 1960), ou à mère Yvonne-Aimée de Malestroit (procès interrompu en juin 1960 car « trop de miracles »). Mais l'Église ne prétend aucunement à l'infaillibilité dans ce type de jugement : en canonisant Padre Pio et Faustine Kowalska, elle reconnaît les manques de discernement passés, comme cela arrive souvent. On peut citer à ce sujet le cas emblématique de Jeanne d'Arc, condamnée à être brûlée vive sur la base de 70 faux chefs d'accusation, qui sera finalement canonisée 500 ans plus tard, ou l'exemple de Medjugorje, combattu et déclaré « non surnaturel » pendant des décennies, avant de recevoir finalement en 2024, le plus haut degré d'approbation possible selon les nouvelles normes.

    Ce qui interroge aujourd'hui, c'est que le texte du Vatican affirme que les visions de Maria Valtorta « ne peuvent être considérées comme d'origine surnaturelle » et qu'elle ne serait en fait qu'une romancière très imaginative. Or, ses 9 000 pages écrites à la main, d'une traite, sans la moindre rature, décrivent 750 personnages dont 230 validés par des sources historiques (comme le montre le dictionnaire publié par François-Michel Debroise et son site encyclopédique), 70 groupes ethniques, 220 villages, 110 sites géographiques, 150 plantes, 200 espèces animales, 50 espèces minérales et 24 000 détails concrets vérifiés et validés sans erreurs ni anachronismes par Jean-François Lavère qui, de son côté, a publié sur la géographie extraordinaire des visions. On aurait pu arguer que cela pouvait aussi venir du diable, ou être mêlé, mais comment une femme clouée au lit aurait-elle pu « romancer » tout cela, seule, sans aide, grâce à de simples « méditations » ?

    Plus étonnant encore : le polytechnicien Jean Aulagnier a pu reconstituer un « calendrier de Jésus au jour le jour. » À partir des 5 000 indications spatio-temporelles contenues dans les visions, il est parvenu à déterminer la date de chaque scène de l'Évangile dans notre calendrier actuel (datations consultables sur le site Valtorta.fr). A sa grande stupéfaction, il a ensuite constaté que cette reconstitution était parfaitement cohérente avec le calendrier des phases lunaires (indépendant) sur plus d'une centaine de visions qui décrivent la position et les phases de la Lune. Il y a vu, parmi bien d'autres détails sidérants, « une preuve à la saint Thomas » du caractère surnaturel de cette œuvre unique au monde qui mérite, selon lui, d'être « bien plus largement connue ».

    Les réserves du Vatican sont également tempérées par d'autres prises de position importantes : le pape Pie XII a lu l'œuvre et a dit : « Publiez, qui lira comprendra » ; après sa mort, le corps de Maria Valtorta a été transféré en 1973 dans la basilique de la Santissima Annunziata de Florence ; depuis quelques années, Mgr Giulietti, l'évêque du diocèse de Maria Valtorta, célèbre l'anniversaire de son décès avec des homélies de plus en plus positives : « Ce qu'elle écrit, dans certaines parties, ne peut pas être simplement d'origine naturelle » ; et last but not least, en réponse à un envoi du professeur Liberato di Caro (cf. son interview à 1h03'00), Don Ernesto Zucchini et la Fondation Maria Valtorta ont reçu de la Secrétairerie d'Etat du Vatican, une lettre signée du pape François, datée du 24 février 2024 : « Je vous encourage à poursuivre avec enthousiasme votre mission de faire connaître la vie de Maria Valtorta et son œuvre littéraire, et tout ce qu'elle peut offrir pour le bien de l'Église et de la société. En avant ! »

    On peut aussi se référer aux grands théologiens et sommités mondiales qui l'ont étudiée. Par exemple, le père Gabriel Roschini (1900-1977), de renommée internationale, fondateur de l'Institut théologique pontifical Marianum à Rome, auteur de 125 livres : « "La mariologie qui se dégage des écrits de Maria Valtorta a été pour moi une vraie découverte. Aucun autre écrit marial, pas même la somme de tous ceux que j'ai lus et étudiés, n'avait été en mesure de me donner sur Marie, chef-d'œuvre de Dieu, une idée aussi claire, aussi vive, aussi complète, aussi lumineuse et aussi fascinante, à la fois simple et sublime. »

    En 2011, Mgr René Laurentin (1917-2017) se positionna aussi favorablement. Expert au Concile et mariologue de réputation internationale, il a jugé Maria Valtorta comme étant la plus crédible des quatre grandes mystiques examinées lors de son étude comparative réalisée avec François-Michel Debroise. Et pour le bienheureux Gabriel Maria Allegra (1907-1976), prêtre, bibliste et linguiste franciscain, fondateur du Studium Biblicum Franciscanum à Hong Kong, béatifié en 2012 par Benoît XVI, l'œuvre est un « écrin de trésors célestes » : « Je ne crois pas qu'il soit sage et juste de rester indifférent devant de tels trésors. »

    Alors, plus grande visionnaire du monde ou romancière extraordinaire ? A vous de choisir, mais peut-être faut-il pour cela ouvrir le dossier et suivre la recommandation de saint Paul : « N'éteignez pas l'Esprit Saint, ne méprisez pas le don de prophétie, mais vérifiez tout, et ce qui est bon, gardez-le » (1 Th 5,19-21). Les écrits de Maria Valtorta, qui touchent de plus en plus de monde, ne doivent évidemment jamais être mis au niveau des Evangiles, qui sont pour les chrétiens uniques et normatifs ; ils méritent cependant notre attention, car il n'y a aucun équivalent de cette œuvre dans toute la littérature mondiale. Mais, comme ce sujet déchaîne les passions, ceux qui s'y intéressent devraient se souvenir du sage conseil de saint Ignace de Loyola : « Sur l'essentiel, l'unité ; sur le reste, la liberté ; en tout, la charité. »

    Maria Valtorta, un don de Dieu validé par la science

    >>> Voir la vidéo sur la chaîne Youtube Marie de Nazareth

  • Sainte Louise de Marillac (15 mars)

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    Sainte Louise de Marillac (1591-1660) (source)

    Sainte Louise de Marillac,

     

    A travers ombres et lumières

    Durant de longues années, Louise de Marillac est une femme habitée par l'anxiété, la culpabilité. Du fait de sa naissance illégitime, hors mariage, elle est rejetée par sa famille, placée dans des institutions : chez les religieuses Dominicaines de Poissy, puis dans un foyer pour jeunes filles à Paris. Louise n'a qu'un désir, s'enfermer dans un cloître, loin du monde et par la prière et les mortifications. « vaincre la justice de Dieu ». Mais son tuteur lui refuse l'entrée au monastère des religieuses Capucines, à cause de sa faible santé. Le mariage lui est imposé. Il est célébré le 5 février 1613. Elle devient Mademoiselle Le Gras. La découverte de l'amour humain et de la maternité l'apaise et lui procure un début de bien-être. La maladie de son mari vers 1622 ravive ses angoisses. Elle s'imagine que Dieu la punit pour n'avoir pas répondu à son appel d'être religieuse. De nouveau, longues prières, jeûnes, mortifications corporelles se multiplient en vain. Nuit de l'âme et état dépressif la plongent dans le noir. Une lumière le jour de la Pentecôte 1623 vient éclairer ses ténèbres. Elle perçoit un avenir dans une communauté où elle pourra se consacrer à Dieu, elle entrevoit son nouveau directeur spirituel et elle comprend surtout qu'elle doit rester près de son mari et son fils qu'elle voulait quitter pour retrouver la paix. Le 21 décembre 1625, elle devient veuve avec la charge d'un enfant de 12 ans. Assez désemparée, elle accepte la direction de Vincent de Paul malgré sa « répugnance » (terme employé par elle dans le récit de sa lumière de Pentecôte)

    Au-delà de l'aspect maladif et tourmenté de cette femme, Vincent découvre peu à peu la richesse enfouie de cette personnalité. Il la conduit vers une relation à Dieu plus sereine, et surtout il l'oriente vers la rencontre du pauvre à travers l'œuvre des Confréries de la Charité.
    Une profonde évolution s'amorce. Louise se décentre d'elle-même, son regard découvre plus pauvre qu'elle. Sa prière ne s'arrête plus sur un Dieu austère, lointain, mais découvre la personne de Jésus-Christ. Dieu a voulu faire connaître son amour de l'homme en envoyant son Fils sur terre. Elle admire la totale disponibilité et l'humilité de la Vierge Marie qui donne au Fils de Dieu son humanité. Elle réalise que Dieu a besoin des hommes et des femmes pour perpétuer son œuvre. Avec Vincent de Paul, elle ose proposer aux paysannes, femmes peu reconnues par la société dirigeante de l'époque, de vivre une vie religieuse, sans cloître, sans voile, vie consacrée au service des rejetés de la société. 
    La méditation de la vie de Jésus est soutien et orientation de ce service. Seul un « amour fort » de Dieu permet d'avoir un « amour suave », compatissant et doux, envers les pauvres. Toute relation aux pauvres que Jésus reconnait comme ses frères a besoin d'être empreinte d'un amour plein de tendresse et d'un vrai respect. L'un ne peut aller sans l'autre. 
    Louise n'hésite pas à regarder ce service comme une suite de l'œuvre rédemptrice du Christ. C'est une joie et une lourde responsabilité de « coopérer avec Dieu au salut du monde ». L'Eucharistie devient pour toutes les servantes des pauvres, source de vie. « Cette admirable invention incompréhensible aux sens humains » manifeste le fort désir de Jésus non seulement de demeurer présent, mais de partager son amour par une forte union. La communion est un moment inoubliable pour Louise.

    Cependant Louise de Marillac reste une femme fragile. Elle connaît des périodes difficiles, notamment lorsque des Sœurs quittent la Compagnie. Elle s'avoue responsable de leur abandon. Il lui faudra du temps pour découvrir la miséricorde de Dieu envers elle, cette miséricorde qui pardonne au-delà de ce que l'homme peut espérer. 

    Après des années obscures, Louise a compris que seul l'amour de Dieu et du prochain pouvait guider sa vie. Elle peut maintenant aller sereinement à la rencontre de son Seigneur. De sa chambre de malade, Vincent de Paul lui envoie ce message. « Vous partez la première, j'espère, si Dieu m'en fait la grâce, vous rejoindre bientôt. » Louise meurt le 15 mars 1660, entourée de son fils avec sa femme et sa petite fille et de nombreuses Filles de la Charité.

    Elisabeth Charpy, fille de la charité
    Auteur du livre Prier quinze jours avec Louise de Marillac, Nouvelle Cité n° 105

  • José Aparicio Sanz et ses 232 compagnons, martyrs victimes des "Rouges" espagnols (11 mars)

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    D'Evangile au Quotidien :

    José Aparicio Sanz et ses 232 compagnons
    Martyrs de la Guerre Civile Espagnole (1936-1939)
    Béatification record du 11 mars 2001 par saint Jean-Paul II
    Mémoire commune : 11 mars
    Mémoire individuelle : ‘dies natalis’ de chacun

    Fruit du grand Jubilé de l'An 2000, cette béatification du 11 mars 2001 est la première du nouveau siècle et du nouveau millénaire. Jamais autant de serviteurs de Dieu n'ont été béatifiés à la fois. (Il faut remonter au Bx Pie IX - Giovanni Maria Mastai Ferretti, 1846-1878, en 1867, pour avoir la béatification de 205 martyrs du Japon.) Chaque cause a été étudiée individuellement. Chacun de ces martyrs avait déjà mené une vie sainte digne de béatification avant que le martyr ne vienne couronner leur carrière. L'Église de Valence, suivie par celles de Barcelone et de Lérida, a commencé à instruire les procès de béatification depuis 50 ans déjà. Une masse de documents a été recueillie.
    Avant cette béatification, saint Jean Paul II avait déjà célébré 10 béatifications pour des martyrs de la guerre civile espagnole, soit, avec ceux de ce jour, 471 martyrs. A savoir: 4 évêques, 43 prêtres séculiers, 379 religieux, 45 laïcs.

    La seconde République instaurée en 1931 amène le "Frente popular" (Front populaire) au pouvoir. Composée de communistes, socialistes et anarchistes, elle est essentiellement anticléricale. Pourtant les évêques ont reconnu au début sa légitimité. Si les violences ne se déclenchent pas tout de suite, néanmoins ce gouvernement révolutionnaire entame d'emblée une persécution juridique : dissolution des ordres religieux et nationalisation de tous leurs biens, approbation du divorce, crucifix retirés des classes.

    Après les lois restrictives vient la persécution sanglante avec la "Révolution des Asturies" en 1934 et les martyrs de Turon.
    En l'été 1936, les "Rouges", comme on les appelle, (à juste titre car leur but est de faire de l'Espagne un état satellite de la Russie), déclenchent la plus grande persécution religieuse qu'ait jamais connu l'Espagne. Sur la liste noire des personnes à abattre figurent en premier lieu tous les prêtres. A cause de sa brièveté dans le temps et de son intensité, c'est un ouragan révolutionnaire comparable à celui de la Révolution française qui s'abat sur toutes les régions où domine leur influence : incendie de couvents, d'évêchés, d'églises, destruction du patrimoine artistique sacré, bref, de tout ce qui rappelle la religion catholique. Mais les révolutionnaires ne sont pas suivis par tout le peuple ; au contraire, il se produit un sursaut de la conscience nationale.

    Une partie de l'armée avec le général Francisco Franco se révolte et crée le "Mouvement national". C'est alors la guerre civile entre "Rouges" et "Nationaux" qui dure de 1936 à 1938. Les révolutionnaires ont vraiment l'intention d'éradiquer l'Église et ils procèdent à des exécutions massives, accompagnées d'une férocité inouïe.
    Sont victimes: 13 évêques, 4184 prêtres, 2365 religieux, 283 religieuses, des milliers et des milliers de laïcs. Ils sont vraiment martyrs car ils ont été tués "en haine de la foi", ce ne sont pas des "victimes de guerre", car ils sont pacifiques et ne prennent pas part aux événements, ni des "victimes politiques ", car ils n'ont pas pris partie. (Notons à ce propos que le parti qui soutenait Franco, la "Phalange", influente surtout au début, avait certaines accointances avec les Nazis.). Conscients de mourir pour leur foi, beaucoup criaient « Vive le Christ-Roi! », ce qui n'est pas sans rappeler la guerre des "Cristeros" au Mexique (1926-1929), et tous, avant de mourir, pardonnaient de tout cœur à leurs bourreaux.

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  • "Depuis une cinquantaine d'années, l'Eglise considère ce qu'elle a fait de mal dans son histoire, sans voir ce qu'elle a fait de bien"

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    Lu sur Atlantico :

    Christophe Dickès : « L’Eglise catholique ose-t-elle être ce qu’elle est ? »

    Christophe Dickès a publié "Pour l'Église" aux Éditions Perrin.

     

    Atlantico : Vous publiez un livre de défense de l'Eglise. Qui sont ses pires ennemis aujourd'hui ? Notre indifférence ou de vrais adversaires ?

    Christophe Dickès : Dans la perspective de mon livre, paradoxalement, le pire ennemi de l'Eglise, ce sont ces hommes d'Eglise eux-mêmes qui ne défendent pas ou trop peu ce qu'elle a été. De fait, vous ne pouvez pas défendre quelque-chose que vous ne connaissez pas. Certes, les hommes d'Eglise connaissent naturellement l'Evangile, la théologie mais ils ne connaissent pas ou peu l'histoire de l'Eglise et ses richesses. Plus précisément, c'est l'antiantellectualisme qui est, selon le mot de l'académicien Michel Zink, le plus grand danger dans l'Eglise. Ce contre quoi le grand historien René Rémond mettait déjà en garde dans son essai stimulant Le Christianisme en accusation paru il y a vingt-cinq ans! Il y expliquait par exemple que, dans la presse catholique, le témoignage et la surface des choses étaient favorisés au détriment de la réflexion et de l'étude. Un constat amer qu'il aurait pu faire aujourd'hui au regard de la quasi-absence de l'histoire dans les médias chrétiens. Après, il existe en dehors de l'Église des courants anticléricaux nombreux qui se sont systématisés, pour faire court, à partir du XVIe siècle, au moment de la Réforme protestante. L'anticléricalisme des XVIIIe, XIXe et du début du XXe siècle a produit de nombreux ouvrages et une critique dont s'est imprégnée, là aussi paradoxalement, l'Eglise. Tant et si bien que, depuis une cinquantaine d'années, l'Eglise considère ce qu'elle a fait de mal dans son histoire, sans voir ce qu'elle a fait de bien. Mon livre vise en quelque sorte à rééquilibrer cette balance. 

    Alors que le gouvernement envisage de lancer un grand débat sur « qu'est-ce qu'être Français ? », que répondriez-vous à la question miroir : « qu'est-ce qu'être catholique » ?

    Une phrase me hante depuis de nombreuses années. Elle est de Boileau qui disait "Rarement un esprit ose être ce qu'il est". L'Eglise souhaite-t-elle être ce qu'elle est, à savoir une force de contradiction dans un monde occidental qui la rejette ? Souhaite-t-elle aussi assumer son passé et rendre compte de la vitalité qui l'a habitée pendant des siècles? Voyez-vous, on ne peut aimer les autres, si on ne s'aime pas soi-même. Or, l'Eglise, empêtrée dans la crise des abus sexuels, semble paralysée et sans perspectives. Si elle connaissait son histoire, elle verrait non seulement que la question des abus n'est pas nouvelle mais elle pourrait par ailleurs trouver des clés afin de mieux répondre aux défis du temps présents et de son avenir. Ce que dit autrement l'historien Andrea Riccardi dans son livre L'Eglise brûle : « La culture ecclésiastique, celle des dirigeants de l’Église, est peu attentive à l’histoire et ne la considère pas utile pour comprendre d’où l’on vient et où l’on vit, ni pour gouverner l’Église alors qu’elle insiste fortement sur la philosophie […]. Le manque de culture historique dans l’évaluation des phénomènes a conduit à un appauvrissement de la compréhension du réel. C’est l’une des faiblesses de la culture et du gouvernement des ecclésiastiques de nos jours». Pour répondre à votre question donc, être catholique, c'est aussi être héritier ce qui suppose un minimum de connaissance de ce que nos ancêtres ont réalisé de bien, de beau et de bon. Ce n'est évidemment pas simplement cela mais c'est aussi cela. 

    Pour en revenir à l’identité française, qu’avons-nous perdu en perdant notre culture chrétienne ?

    Je crois que les années 1960 ont joué un rôle particulièrement critique pour la culture chrétienne. En effet, le progressisme a voulu effacer des siècles d'histoire dans une forme d'orgueil afin de renouveler l'image de l'Eglise. Or, ce progressisme a très vite montré ses limites tant et si bien que les pontificats de Jean-Paul II et Benoît XVI ont souhaité, assez schématiquement, réaffirmer l'identité de l'Eglise. D'où le mot du pape polonais "N'ayez pas peur!" qui était aussi une façon de dire "N'ayez pas peur d'être ce que vous êtes". Certes, en 2000, Jean-Paul II fait repentance pour les fautes des hommes d'Eglise dans l'histoire, mais il encourage par ailleurs la recherche historique afin de ne pas tomber dans des conceptions binaires et simplistes comme le fait aujourd'hui la cancel culture. Or, l'Eglise a uniquement considéré cette repentance en oubliant cette culture chrétienne qui, pendant des siècles, a fait la fierté de l'Eglise et lui a permis simplement de croire en elle et en ce qu'elle était. Le meilleur exemple est son rôle pendant la Deuxième Guerre mondiale. Alors que les études historiques montrent l'existence d'une résistance catholique bien plus importante qu'on ne le dit généralement, les évêques ont souhaité faire repentance pour leur liens avec Vichy. Ce qui était en soi très réducteur, voire complètement simpliste. Cela témoignait d'une méconnaissance réelle de la réalité historique.

    Vous dites que l'Etat, comme la laïcité, sont des concepts totalement chrétiens, pouvez-vous nous l’expliquer ?

    L'Etat n'est pas un concept chrétien en soi puisque le pouvoir politique possède une longue histoire depuis l'antiquité archaïque. En revanche, là aussi les recherches historiques ont montré comment l'Etat moderne tel qu'il apparaît à partir du XIVe siècle, trouve son inspiration dans les structures même de la papauté réformée du XIe siècle. Ce qu'on appelle communément la réforme grégorienne du nom du pape Grégoire VII. Quant à la laïcité, elle est un concept tout à fait chrétien. Il ne faut pas confondre laïcité et laïcisme. De fait, l'Occident de tradition chrétienne fait une distinction entre le pouvoir de l'Etat et le pouvoir de l'Eglise, le temporel et le spirituel. Or, cette distinction remonte au moins au pape Gélase Ier qui a régné à la fin du Ve siècle. Il définit les relations entre les deux entités et, en agissant de la sorte, il les distingue. Cette distinction est au fondement de notre civilisation. Elle permet à terme la séparation des Eglises et de l'Etat du début du XXe siècle en France. Cette distinction puis cette séparation n'existe pas dans d'autres civilisations comme la civilisation islamique où la charia mêle à la fois le politique et le religieux..  

    Alors que la santé du pape François décline et que la question du profil d'un éventuel successeur s'installe dans les esprits, quel avenir voyez-vous, à court et moyen terme pour l'Église, notamment au regard de la composition du collège de cardinaux majoritairement nommés par le pape actuel.

    Il est quasiment impossible de répondre à une telle question. Les Italiens disent Morto un papa, se ne fa un altro. C'est-à-dire "Quand un pape meurt, on en fait un autre". La centralisation pontificale et la médiatisation du pape constituent une caractéristique de notre société contemporaine, mais je suis persuadé que les renaissances de l'Eglise ne peuvent venir seulement de la tête de l'Eglise. Dans l'histoire, elles viennent du silence des monastères mais aussi d'un élan de foi des fidèles qui n'ont pas peur d'affirmer ce qu'ils sont. Je vois dans les sociétés occidentales un mouvement bien éloigné de la frilosité des années 1970 et 1980, surtout dans la jeunesse. Dans le monde individualiste du tout à l'ego, dans lequel nous vivons le christianisme peut constituer une alternative en proposant un récit en commun qui trouve ses racines dans l'Évangile. Est-ce à dire que ce mouvement va être suffisant pour sortir l'Église de la crise ? Seul l'avenir le dira.  

    La cathédrale Notre-Dame de Paris attire une foule de fidèles depuis sa réouverture et Donald Trump a récemment évoqué la qualité des travaux de rénovation et a salué les efforts d’Emmanuel Macron sur ce dossier. Que reste-t-il de spécifiquement chrétien dans l’icône qu’est devenue la cathédrale de Paris ?

    Les Français mais aussi le monde occidental ont considéré l'incendie de Notre-Dame comme un glaive planté dans le cœur même de ce que nous sommes : une civilisation aux fondements chrétiens. Notre-Dame s'inscrit à la fois au cœur de notre Histoire mais elle est aussi plus que cela. Plus qu'un édifice de pierre qui dit le génie du christianisme, elle est aussi l'âme de la France et du christianisme occidental. Je crois que Notre-Dame joue aussi le rôle que jouaient les reliques au Moyen Âge: à savoir qu'elle est une passerelle vers la transcendance. Elle nous permet de nous connecter à l'au-delà. Même si nous ne savons pas quelle est la part de Foi chez les visiteurs qui déambulent sous ses voûtes, je suis persuadé qu'il existe chez eux une part d'émerveillement qui conduit inconsciemment à cette transcendance.  N'est-ce pas Dostoïevski qui disait que c'est "la beauté qui sauvera le monde"? 

    Christophe Dickès a publié "Pour l'Église" aux Éditions Perrin.

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  • La vie et l'héritage du cardinal George Pell

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    De Hugh Somerville-Knapman OSB sur le Catholic Herald :

    Pax Invictis par Tess Livingstone : la vie et l'héritage du cardinal George Pell

    8 mars 2025

    Pour ceux qui vivent aujourd'hui, l'héritage de George Pell sera à jamais marqué, voire défini, par la parodie de justice qu'il a subie de la part du système judiciaire de l'État australien de Victoria. L'État de Victoria était l'État d'origine de George Pell, et le traitement épouvantable qu'il y a subi devrait nous alerter sur un élément peu connu de la réalité de sa vie d'adulte : en dépit de son éminence et de son rang, il était en grande partie un étranger. Pour beaucoup, dans ses deux foyers, l'Église et l'Australie, le courage des convictions de Pell était pour le moins déstabilisant. Beaucoup ne voulaient pas l'entendre.

    En effet, il semblait avoir quelque chose de Georgius contra mundum, et Pell s'est souvent retrouvé, sinon seul, du moins isolé. On peut dire que cela a été le plus évident lors de sa nomination au Vatican au Secrétariat de l'économie par le pape François en 2014. Conformément à sa mission avouée de réformer la curie papale, François a nommé un homme dont il savait certainement qu'il avait des principes tout en étant expérimenté dans les réalités de l'administration ecclésiastique, qu'il était loyal sans être un larbin, qu'il agissait plutôt qu'il ne parlait, qu'il était tenace et intrépide, même s'il était parfois trop inflexible, et qu'il était imperméable aux blandices ou aux menaces. Comme François l'a dit à un évêque anonyme : « C'est un homme honnête ». Trop honnête, peut-être.

    Une telle personne est susceptible d'être accueillie avec au moins de l'ambivalence dans la plupart des endroits. Dans sa préface au livre de Tess Livingstone, George Weigel souligne le traitement papal auquel Pell a été confronté à partir de 2014. Après avoir affiché des références réformistes, François les a renforcées en nommant Pell pour faire face à l'enchevêtrement des finances du Vatican. Le pape et le préfet étaient tous deux des outsiders curiaux, et tous deux apparaissaient comme des hommes qui n'accepteraient aucune absurdité. Weigel note que l'outsider Pell avait deux options lorsqu'il est entré dans la fosse aux lions curiale : aller lentement et essayer de gagner les récalcitrants, ou « mettre la pédale au plancher » et faire le maximum dans ce qui pouvait être, et était, une petite enveloppe de temps. Sans surprise, Pell a choisi cette dernière voie : l'ingratitude soyeuse n'était pas sa ligne de conduite.

    Ce choix était basé, selon Weigel, sur l'hypothèse que François était aussi sérieux que Pell dans son intention de réformer les finances du Vatican, et que Pell bénéficierait donc d'un soutien papal sans faille. Dans la pratique, certaines décisions de François ont renforcé le pouvoir des récalcitrants et sapé celui qu'il avait nommé, son compagnon d'infortune, comme le révèle Livingstone. Pell était un outsider, même pour le pape lui-même, et n'a jamais fait partie de la cour parallèle que François a créée entre lui et la curie établie. Pell, qui n'était pas un béni-oui-oui, s'est retrouvé seul à tenir un calice empoisonné : un outsider à la fois pour l'ancienne et la nouvelle curie papale, et de plus en plus une cible.

    Au fur et à mesure que la deuxième édition, entièrement mise à jour, de la biographie de Livingstone, parue en 2002, avance, Pell l'outsider apparaît clairement. Pell a été trahi au cœur même de l'Église à laquelle il avait consacré sa vie, et il a été trahi dans son pays natal par une société dont il était un fier fils. Il était loyal envers les deux, mais n'a jamais pu s'accommoder des faiblesses et des défauts de l'un ou de l'autre. Nous voyons qu'il avait des amis, bons et loyaux, mais peut-être trop peu là où il en avait le plus besoin.

    Livingstone est manifestement une admiratrice de Pell, comme le serait toute personne qui prendrait soin d'examiner objectivement sa vie et son héritage ; son livre permet à cette vie et à cet héritage d'être mieux connus. Il s'agit rarement d'une biographie critique, et elle tend même parfois vers l'hagiographie, mais ce qu'elle présente de la vie et de l'œuvre de Pell justifie son approche positive. Compte tenu de la plume venimeuse de plusieurs journalistes australiens, dont les livres sur Pell sont au mieux des hachettes et au pire des calomnies éhontées, il était impératif qu'un compte rendu plus gracieux, généreux et complet de la vie et de l'héritage de Pell voie le jour, et qu'il le fasse.

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  • Conclave / Des « primaires » entre cardinaux pour éviter les divisions et assumer l'héritage complexe de François

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    Conclave, des « primaires » entre cardinaux pour éviter les divisions et assumer l'héritage complexe de Bergoglio

    de Franca Giansoldati sur Il Messaggero :

    L'héritage de François est complexe, fait de nombreuses réformes, parfois critiquées, et de processus ouverts.

    Cette attitude profondément ancrée qui, depuis des siècles, incite les cardinaux à regarder autour d'eux en pensant au bien de l'Église pour l'avenir, a déjà été mise en branle. Et ce, de manière transversale. Ce sont les « primaires » préliminaires à un Conclave. Un peu comme les joueurs d'échecs qui analysent tous les scénarios possibles pour le prochain coup. « Ce que je vois, c'est un débat normal et, franchement, il n'y a rien d'irrespectueux à l'égard du souverain pontife. Cela s'est toujours produit. Et c'est un signe de grande responsabilité qu'ils aient commencé à raisonner à ce sujet maintenant ». Gian Maria Vian, historien et philologue, professeur depuis trente ans à l'Université Sapienza et depuis onze ans rédacteur en chef de L'Osservatore Romano, analyse ce temps suspendu, marqué par l'hospitalisation prolongée du Pape, même s'il gouverne pleinement à partir de l'hôpital. Mais en douze ans de règne, le collège des cardinaux a radicalement changé, il s'est mondialisé à l'extrême, à tel point que Bergoglio lui-même, un jour, s'adressant à des journalistes, en a plaisanté, se demandant ce qui pourrait un jour sortir d'un corps électoral aussi anormal par rapport au passé. Les membres votants n'ont jamais été aussi nombreux - 137 - et parmi eux, ils ne se connaissent même pas bien. « Avec Jean-Paul II, par exemple, il y a eu des consultations au moins dix ans avant sa mort. Il n'y a rien de scandaleux à cela. Au contraire, les cardinaux y sont obligés, puisque leur tâche principale est de donner un évêque à Rome et donc un pape à l'Église ». Le dernier livre publié par Vian avec un titre curieux, presque provocateur (« Le dernier pape », Marcianum Press), fait référence à une interview de Benoît XVI et à une prophétie, celle attribuée à saint Malachie, moine ami de saint Bernard, selon laquelle Ratzinger serait le dernier des papes. Nous sommes au milieu du XIIIe siècle. « Lors de cette conversation, Benoît XVI a démonté la prophétie en affirmant qu'il s'agissait d'un faux fabriqué en 1590 pour soutenir un candidat réformateur des cercles de saint Philippe Néri (même si ce candidat n'a pas été élu par la suite). On lui a alors demandé : « Mais avez-vous le sentiment d'être le dernier pape ? ». Et lui : « Je n'appartiens plus à l'ancien monde, mais le nouveau n'a pas encore commencé ». Et cela signifiait bien sûr que même François, selon Ratzinger, n'appartient pas au « nouveau monde ».

    D'où la question qui se pose désormais aux cardinaux de savoir qui pourrait être le nouveau pape à l'avenir. Les conservateurs craignent depuis longtemps que François ne veuille réformer la Constitution apostolique « Universi dominici gregis » pour abaisser le quorum et favoriser, par ce stratagème, un pontife « bergoglien » pour perpétuer son héritage (il faudrait actuellement 91 ou 92 voix, un nombre très élevé, les deux tiers des votants). Vian est plutôt sceptique. « La rumeur a également circulé avec insistance ces derniers temps, mais je ne pense pas que ce sera le cas. Au cours des neuf derniers siècles, la majorité des deux tiers n'a jamais été levée, ce qui est objectivement une règle de bon sens pour ne pas diviser l'Église. La dernière fois que cela s'est produit, cela a eu des conséquences inquiétantes ». Le professeur rappelle qu'en 1378, Grégoire XI, septième pape français en Avignon, voulait une majorité simple. En même temps, il a ramené la papauté à Rome et, « immédiatement après, comme par hasard, le schisme occidental a commencé ». Bien sûr, d'autres dynamiques étaient également en jeu, mais l'histoire enseigne qu'il n'est jamais sage de se contenter d'une majorité simple. Cela signifie que l'Église est divisée ».

    L'héritage de François est complexe, fait de nombreuses réformes, même critiquées, et de processus ouverts. À l'avenir, c'est le successeur qui devra s'en occuper. « Rien n'est jamais irréversible, plusieurs acquisitions seront poursuivies et d'autres devront être corrigées, mais cela dépendra évidemment beaucoup de la personne qui sera élue. Pour l'instant, je ne vois pas de candidats qui s'imposent, même s'il y a une sorte d'agenda défini par le cardinal Müller dans son livre « In good faith » (Solferino), qui me semble être l'agenda potentiel du futur Conclave ». M. Vian ne croit pas non plus qu'il y ait des « dauphins » évidents, comme le cardinal philippin Tagle ou l'italien Zuppi. « Il y a ensuite, à mon avis, des figures plus couvertes, par exemple le Hongrois Erdő, l'Italien Filoni, le Suédois Arborelius, l'Américain Prevost, et même un deuxième Italien, mais probablement considéré comme trop jeune, Pizzaballa. » Jeune, c'est-à-dire avec un long pontificat devant lui. Le fait que les papes nomment leurs propres « dauphins » est physiologique : Pie XI a succédé à Pacelli et Jean XXIII à Montini. Ce qui est amusant, c'est que le pape Bergoglio aurait déjà identifié le nom de son successeur. « Il l'a dit lui-même à deux reprises lorsqu'on lui a demandé s'il irait à Raguse en 2025, puis au Vietnam, et qu'il a répondu : ce ne sera pas moi, mais Jean XXIV ».

  • L'échec de la recherche de corps met fin à l'enquête canadienne sur les enterrements de masse dans les écoles gérées par l'Église

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    De Simon Caldwell sur le Catholic Herald :

    L'échec de la recherche de corps met fin à l'enquête canadienne sur les enterrements de masse dans les écoles gérées par l'Église

    3 mars 2025

    Le gouvernement canadien a suspendu une enquête sur les allégations d’enterrements massifs d’enfants dans d’anciens pensionnats gérés par l’Église, car aucune tombe n’a été découverte.

    Des allégations d’abus et de meurtres de centaines d’enfants autochtones ont déclenché des incendies criminels, des actes de vandalisme et la profanation d'environ 120 églises à travers le Canada au milieu d’une vague de deuil national.

    L'hystérie a même atteint le Vatican, où le pape François a déploré, lors d'un discours de l'Angélus, « la découverte choquante des restes de 215 enfants ».

    Le gouvernement canadien a mis sur pied le Comité consultatif national sur les pensionnats, les enfants disparus et les sépultures anonymes afin d’enquêter sur les allégations et sur l’ampleur des abus et des meurtres présumés d’enfants indiens par des chrétiens d’origine européenne.

    Mais après trois ans de recherches de corps, au coût de 216,5 millions de dollars, pas un seul reste humain n'a été retrouvé.

    Le gouvernement a désormais discrètement retiré le financement de la commission d’enquête et la dissoudra à la fin du mois.

    Crystal Gail Fraser, membre du comité, a qualifié cette décision de « trahison », malgré l’impossibilité de trouver des preuves corroborant le meurtre. « Nous perdons de vue nos valeurs autour de la vérité et de la réconciliation », a-t-elle déclaré à CBC News.

    L’hystérie a éclaté en 2015 avec l’affirmation selon laquelle 215 sites funéraires avaient été découverts au pensionnat indien de Kamloops grâce à des analyses radar à pénétration de sol.

    Bien que les recherches ultérieures n’aient révélé aucun corps, le Premier ministre canadien Justin Trudeau a affirmé publiquement, l’année dernière encore, que des meurtres avaient eu lieu.

    Les écoles, gérées principalement par les églises catholique et anglicane et financées par le gouvernement, ont été fondées pour éduquer les enfants indiens de la fin du XIXe siècle jusqu'aux années 1990.

    Certains enfants sont morts dans les écoles, mais les registres montrent que ces décès étaient principalement dus à des maladies comme la tuberculose.

    Malgré les preuves contraires, de nombreux Canadiens hésitent encore à admettre que les allégations se sont révélées sans fondement.

    Le Regent College, une école supérieure évangélique située sur le campus de l'Université de la Colombie-Britannique, a par exemple annulé une conférence publique, Le procès doit avoir lieu ce jeudi, par Lord Biggar, un vicaire anglican britannique et historien distingué, après que des étudiants l'ont qualifié d'apologiste des pensionnats et de « négationniste des fosses communes ». En réponse à cette annulation, Lord Biggar a accusé le collège de « favoriser et d’encourager le règne continu d’une culture agressivement répressive au Canada, qui est investie dans une histoire qui discrédite complètement et injustement le travail des missions chrétiennes et justifie la démolition de dizaines d’églises chrétiennes ».