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Idées - Page 94

  • Quand Chantal Delsol et Remi Brague débattent de la modernité

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    La modernité dans l'impasse

    Source : La Nef n°257 Mars 2014

    Chantal Delsol et Rémi Brague publient en même temps deux essais importants très critiques sur la modernité, montrant qu’une société ne peut vivre sans transcendance : Les pierres d'angle (Cerf) et Modérément moderne (Flammarion). C’était l’occasion de les faire débattre sur ce thème central.

    La Nef – Chantal Delsol, pouvez-vous nous faire la généalogie de ces valeurs auxquelles nous tenons et que vous nommez les « pierres d’angle », titre de votre livre ?

    Chantal Delsol – Je n’aime pas parler de valeurs, c’est un terme relativiste qui signifie que chacun a ses propres valeurs, mais plutôt de principes, qui sont les fondements communs. Et ce n’est pas non plus véritablement une généalogie que je fais : je cherche plutôt à dégager une origine de ces pierres d’angle. Je crois que ce qui nous caractérise en tant que civilisation occidentale, c’est d’abord notre attachement non négociable à la dignité humaine, le statut de l’homme en tant qu’être sacré, parce qu’au départ nous le croyons « créé à l’image et à la ressemblance de Dieu ». En même temps cette culture s’inscrit dans un temps fléché, qui est d’abord le temps du Salut et de l’espérance, puis celui du progrès, sécularisation du Salut. C’est la première fois, car avant et ailleurs, le temps est circulaire, c’est celui de l’éternel retour et de la fatalité. Parmi ces principes fondamentaux, il y a aussi notre reconnaissance de la vérité, je dirai même plus précisément notre reconnaissance du fait qu’elle existe, qu’on peut donc la chercher – et cette conviction nous attire vers l’universel. Ce qui me frappe, c’est que ces différents principes, propres à la civilisation judéo-chrétienne, nous n’avons pas du tout envie de nous en séparer : nous y tenons, même si nous en avons perdu les racines religieuses.

    Rémi Brague – Je suis bien d’accord : il vaut mieux parler de principes que de valeurs. Le discours catholique est aujourd’hui infesté de « valeurs », terme dont on oublie qu’il a été popularisé par Nietzsche. Quant au fond, il est vrai que chez les Grecs, la révélation n’a pas lieu à un moment précis de l’Histoire. Les dieux antiques sont l’objet de mythes qui n’ont jamais été des événements datables. Dans l’Ancien Testament, au contraire, il y a un commencement, une histoire, une communauté créée par Dieu. Il y a une libération après une captivité. Et on peut ainsi remonter en amont jusqu’à la Création qui est racontée elle aussi dans ces livres. Vous avez eu raison de rappeler, dans L’Âge du renoncement, que le temps biblique, judéo-chrétien, est en effet ce temps qui ne tourne pas en rond, mais qui est, comme vous le dites dans une heureuse expression, « fléché ».

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  • Fabrice Hadjadj : "il n'y a avait pas plus antichrétien que moi"

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    Philosophe, auteur de pièces de théâtre et écrivain français – Fabrice Hadjadj a reçu l’an dernier le prix « Spiritualités d’aujourd’hui » pour son livre Comment parler de Dieu aujourd’hui : Anti-manuel d'évangélisation; il enseigne également la philosophie au Collège St-Michel (Fribourg). Il se confie à l’Apic à l’occasion du 10e anniversaire de cet Institut qui accueille en ce moment 51 étudiants venus de divers pays européens.

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  • Les Pierres d'Angle, le nouveau livre de Chantal Delsol

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    Présentation du nouveau livre de Chantal Delsol par H. de Crémiers (source)

    Chantal Delsol voudrait aider une certaine élite de l'élite à penser juste, en un temps où presque tout le monde à renoncer même à penser,  comme elle l'avait vigoureusement montré dans son livre précédent L'Age du renoncement (Cerf, 2011).

    C'est donc à ceux qui veulent bien encore réfléchir sur l'état actuel de la société occidentale et singulièrement sur les modes intellectuelles qui la dominent et qui régissent l'élite dirigeante, que s'adresse notre philosophe ; on devrait dire plutôt notre « sage », car Chantal Delsol n'est point un professeur qui exposerait, comme les autres, des systèmes de pensée, un système, le sien ; non, sa réflexion infiniment ductile conduit le lecteur avec intelligence et toute l'érudition nécessaire à se poser les seules bonnes, vraies et belles questions sur le sens de la vie, de notre vie personnelle mais aussi sociale, politique, économique et finalement écologique, dans le sens véritable de ce terme qui ramène l'esprit au réalité de notre « maison », de notre « chez nous ». Comment vivre sans d'abord l'affirmation de ce qui constitue les fondements de notre civilisation : la personne qui définit la singulière dignité de l'être, son rapport évident, tragique et magnifique, avec le monde, l'autre, Dieu qui se révèle et qui parle, la vérité qui ne relève pas d'une structure fermée mais qui incite à la quête de ce qui rassasie l'esprit de manière universelle et donc partagée, le projet qui en découle et qui porte l'espérance humaine, dirige l'âme, l'induit à la joie, l'inscrit dans une histoire et donne à la société tout entière une dynamique de progrès. La liberté est à ce prix, psychologique, morale mais aussi bien politique, où la démocratie se conçoit et devient possible, sinon elle n'est qu'un prétexte à tous les totalitarismes, comme le passé ne l'a que trop montré, comme la tentation en revient aujourd'hui, malgré les objurgations du « plus jamais ça ». Car, franchement, cet athéisme proclamé de l'élite française, qui substitue son système intellectuel de domination du peuple à la religion dont nul ne peut se passer, est une escroquerie monstrueuse. Tout le mal de notre société est là. Qui ne le voit ? Retrouvons donc nos « pierres d'angle », notre « maison ». Faisons de « l'écologie » intelligente et sage. D'ailleurs les jeunes catholiques ont compris la leçon, eux qui, à l'école de Benoît XVI, cherchent les fondements d'une « écologie humaine ».

    Les pierres d'angle, de Chantal Delsol, le Cerf, 260 p., 20 euros.

  • A l’Université de Liège : Mgr Delville a ouvert un nouveau cycle de lunchs débats sur le rôle de l’humanisme chrétien dans la société.

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    DSCF0380 (1).JPGLe nouvel évêque de Liège, Monseigneur Jean-Pierre Delville, a inauguré un nouveau cycle de lunchs débats à l’Université de Liège. Le cycle est organisé par le groupe « éthique sociale » de l’Union des étudiants catholiques, sur le thème « Humanisme chrétien, Travail et Société ».

    La conférence de Mgr Delville était intitulée « l’humanisme dans l’engagement social de l’Eglise, hier et aujourd’hui ».  Docteur en Philosophe (UCL), théologien (Université grégorienne à Rome) et musicien (prix d’orgue du Conservatoire royal de Liège), Mgr Delville est aussi licencié en histoire de l’Université de Liège.  Au moment de sa nomination épiscopale (31 mai 2013), il était professeur ordinaire à l’Université catholique de Louvain, où il enseigna l’histoire du christianisme.

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     « Deus caritas est » : C’est le lien de l’amour qui constitue l’unicité de Dieu  dans l’altérité des personnes trinitaires. À la suite de saint Jean, Benoît XVI, dans sa première encyclique, a développé les conséquences cette affirmation, avec beaucoup d'intelligence et de fraîcheur d’âme.

    De là résulte que l’autre, dans la foi, est toujours pour nous le visage de Dieu, même s’il est parfois bien défiguré.

    Jésus est formel. Au jour du jugement, lorsque toutes les nations seront rassemblées devant lui, il dira à ceux qui sont à sa droite : «  j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » Et aux autres : « Allez-vous-en loin de moi, maudits, dans le feu éternel préparé pour le démon et ses anges » (cfr  Matthieu, 25, 31-46)

    De cette Parole, qui émaille aussi sous d’autres formes tous les textes évangéliques, procède une double démarche : l’amour inconditionnel des pauvres, quels qu’ils soient, et la recherche de la pauvreté spirituelle qui purifie l’âme. Au fil de son histoire, même peuplée par tous les vices des cercles de l’enfer de Dante, la chrétienté l’a toujours su et exalté cet idéal. C’est ce que nous rappelle d’abord l’orateur. 

    Mais, au XVIIIe siècle, dans la société occidentale, a pris naissance un profond bouleversement de la condition humaine issu de ce que Paul Hazard a appelé « la crise de la conscience européenne » : la révolution des lumières philosophiques et celle de l’industrialisation qui s’en suivirent ont introduit  dans la vie sociale une rupture inédite, exaltant la liberté de l’homme pour mieux l’asservir. Aux idéologies contradictoires qui l’expriment et ambitionnent de tenir  lieu de religion à l’ère du progrès industriel et technique, l’Eglise a opposé une doctrine sociale tirée de l’Evangile. Monseigneur Delville nous montre en quoi il ne s’agit pas d’une idéologie de plus.

    JPSC

     On lira ci-dessous la transcription in extenso de l’enregistrement de sa conférence (les intertitres sont de notre fait) :

     

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  • Quand Gallimard réédite l'Enracinement de Simone Weil

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    D'Eugénie Bastié sur causeur.fr :

    Simone Weil, prophète pour notre temps

    Gallimard réédite L’Enracinement

    Alain, qui fût son maître, l’appelait la « martienne », ses camarades de Normale « la vierge rouge », la philosophe Marie-Madeleine Davy la qualifie de « prophète ». Quant à Simone de Beauvoir, elle dit d’elle dans ses Mémoires « J’enviais un cœur capable de battre à travers l’univers entier ». Syndicaliste, chrétienne, mystique, pour tous ses contemporains, Simone Weil demeure un être à part, « archangélique » et mystérieux, sorte de cerveau monté directement sur cœur, d’une capacité intellectuelle hors du commun, dénuée de tout cynisme et vouée sans conditions à un seule cause : la vérité.

    L’Enracinement, son œuvre la plus achevée, essai politique d’une lucidité vertigineuse, est republié chez Gallimard, dans le cadre d’une parution des œuvres complètes entamée en 1988. Terminé en 1943, quelques semaines avant sa mort, on le considère comme son « testament spirituel ». C’est aussi un des écrits politiques les plus saisissants du XXème siècle, dimension que s’attache à mettre en valeur l’édition admirablement annotée par Patrice Rolland et Robert Chenavier.

    Dans cet essai écrit dans une langue lumineuse, illustré par un art de la métaphore limpide, Simone Weil met le doigt dans la plaie de notre époque : le déracinement, cause principale selon elle, de la débâcle de 40. Mais, n’en déplaise aux néo-barrésiens adeptes de théories remplacistes, ici les racines ne sont pas celles de l’arbre de Monsieur Taine, où se mélangent la terre et le sang, mais plutôt des racines spirituelles et culturelles. Et le déracinement est moins dû à des logiques de métissage qu’à la technicisation progressive du monde et la bureaucratisation jacobine du « monstre froid » étatique.

    L’histoire pour Simone Weil, loin d’être linéaire, est plutôt un océan de mensonges écrits par les vainqueurs où surnagent de temps à autres des « ilots de vérités », trésors égarés de l’âme humaine qu’il s’agit de retrouver.

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  • Des individus réduits à l'état d'atomes interchangeables et anonymes...

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    "... on a mis dans la tête des gens que la société relevait de la pensée abstraite alors qu'elle est faite d'habitudes, d'usages, et qu'en broyant ceux-ci sous les meules de la raison, on pulvérise des genres de vie fondés sur une longue tradition, on réduit les individus à l'état d'atomes interchangeables et anonymes. La liberté véritable ne peut avoir qu'un contenu concret : elle est faite d'équilibres entre des petites appartenances, des menues solidarités : ce contre quoi les idées théoriques qu'on proclame rationnelles s'acharnent; quand elles sont parvenues à leurs fins, il ne leur reste plus qu'à s'entre-détruire. Nous observons aujourd'hui le résultat."
    Claude Lévi-Strauss - De près et de loin (1988).
     
    (via Metablog)

  • Théorie du genre : réponse au professeur Axel Kahn

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    Réponse au professeur Axel Kahn sur la théorie du genre (11 mn)

    Par Arnaud Dumouch, philosophie, 2014.

    Pour le professeur Axel Kahn, généticien, l’homme serait divisé en deux parties :

    1° sa vie biologique qui est déterminée par la génétique tandis que

    2° son comportement serait déterminé par son éducation et les superpositions de ses tradition et présupposés culturels.

    Cette vision dualiste n’est pas réaliste. Les plus grands philosophes ont montré en l’homme trois degrés de vie :

    1° sa vie biologique (déterminée par la génétique) ;

    sa vie sensitive (psychisme commun aux animaux supérieurs) qui est intermédiaire et qui est en partie déterminée par sa génétique et en partie par son éducation et

    sa vie spirituelle, propre à l’homme, qui est le domaine où s’épanouit la liberté.

    Ainsi, écraser la vie sensible humaine en la déterminant uniquement par un choix de la liberté (théorie du genre), est un extrémisme tout aussi grave que de déterminer la totalité du comportement humain par l’aspect génétique (attitude talibane). Dans la psychologie humaine (degré 2), il y a de l’inné (génétique) qu’il faut respecter et de l’acquis (culture) qui doit l’humaniser et l’influencer sans l’écraser. Tel est le domaine de la féminité et de la masculinité.

  • L'affaire Dieudonné, l'avis d'un catholique (Arnaud Dumouch, 2014)

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    Dieudonné : Antisémite ou antisystème ? (34 mn). Cette vidéo n'engage que son auteur, pas l'Eglise catholique.
    Analyse de la crise de l'humoriste Dieudonné comme un thermomètre du malaise de l'Europe.
    Une cause : l'Europe et son passé douloureux : La génération de mai 68 y a réagi légitimement et violemment aux horreurs des générations précédentes (capitalisme pur, Nationalisme, Nazisme) autour de l'hyper mémoire de ces malheurs et, au sommet, de la shoah. Par réaction passionnelle, elle a exalté des valeurs inverses de celles du XIX° et XX° s. 
    Une maladie : La génération suivante (qu'elle soit de Droite, de Gauche, traditionaliste, catholique, d'origine immigre musulmane et Noire) est en train de réagir à cet excès mémoriel. Mais une partie le fait en l'attribuant à un complot des élites Juives (parce que beaucoup de Juifs sont dans les élites). 
    Un thermomètre : Dieudonné a surfé sur ce courant et sa position « anti-pensée unique » a touché l'axe de la pensée de mai 68 : la mémoire de la shoah.
    Le remède : Interdire le thermomètre est contre-productif. Par contre, analyser cette maladie Occidentale de son histoire est essentiel. Le faire sans idéologies : toutes les mémoires doivent être mises en avant, et surtout les mémoires soigneusement cachées par mai 68 : Sa complicité avec le Communisme, son exaltation folle de l'hédonisme destructeur jusqu'au excès actuels.
    Le faire par des films, des humoristes, des débats. Eviter les procès et les lois mémorielles, sauf s'il peuvent soulager l'overdose actuelle du politiquement correct.

    Par Arnaud Dumouch, agrégé en sciences religieuses, 2014.

  • Vient de paraître : Vérité et Espérance/Pâque Nouvelle, 4e trimestre 2013

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    SOMMAIRE

    Editorial : Une Parole dans la nuit 

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    Liturgie : embrouilles sur la traduction du « Notre Père »

    « Evangelii gaudium » : le pape François persiste et signe

    Europe : le Parlement rejette le « rapport Estrela »

    Belgique : la culture de mort se porte bien

    Des bourgeons sous la neige ? 

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    Projet d’amour fou : le tout-puissant se fait tout-petit

    Esotérisme et mystère chrétien

    L’Eglise et les personnes divorcées remariées

     Secrétaires de Rédaction : Jean-Paul Schyns et Ghislain Lahaye

    Editeur responsable: SURSUM CORDA a.s.b.l. ,

    Vinâve d’île, 20 bte 64 à B- 4000 LIEGE.

    La revue est disponible gratuitement sur simple demande :

    Tél. 04.344.10.89  e-mail : sursumcorda@skynet.be 

    Les dons de soutien sont reçus au compte IBAN:  BE58 0016 3718 3679   BIC: GEBABEBB de Vérité et Espérance 3000, B-4000 Liège

     JPSC

  • L'apparition d'un nouveau conformisme

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    De Jean-Michel Castaing sur Liberté Politique :

    Aux sources du conformisme qui vient

    Pour saisir la crise spirituelle de la postmodernité, il faut revenir aux sources du nihilisme. L’absence de transcendance dans notre société a un effet inattendu : l’apparition d'un nouveau conformisme.

    LA “CRISE DE SENS” constatée par les sociologues, déplorée par les hommes d'Église, représente à la fois une perte de foi en la signification de l'existence, et une désespérance devant sa privation de finalité. « À quoi bon? », « La vie n'est-elle pas absurde au final? »: ces deux questions se recoupent, sont solidaires. Le sens est à la fois  signification et direction. Mais plus importante que la définition de ce nihilisme, et que la tentative d'en cerner les origines, demeure la question de son accointance surprenante avec le conformisme du moment.

    Pourquoi la crise de la notion de vérité a-t-elle partie liée avec l'assentiment au monde comme il va? N'est-ce pas là une thèse paradoxale? Comment le déboulonnage du Vrai, qui était censé, dans l'esprit des relativistes, libérer l'homme de carcans ancestraux, en est-il venu à rendre ce même homme si docile à l'idéologie dominante, renonçant à tout esprit critique à son endroit? Afin de répondre à cette question, un bref excursus sur les origines du nihilisme est nécessaire. 

    Lire la suite sur Liberté Politique

  • Le centième anniversaire de la naissance d'Etty Hillesum

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    Etty Hillesum est née le 15 janvier 1914. L'occasion de la découvrir à travers une émission du "Jour du Seigneur" qui lui a été consacrée :

  • Quand le pape pose des questions stimulantes aux économistes

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    Lu sur OuestFrance-entreprises.fr :

    Point de vue. L'économie et la Foi par Michel Renault

    Le pape François a publié, fin novembre, une exhortation apostolique intitulée/ La joie de l'évangile/. Ce texte pose des questions stimulantes aux économistes et à leurs théories. Il souligne ainsi que la « théorie économique », qui se veut scientifique, n'est bien souvent qu'une idéologie. Point de vue par Michel Renault, Maître de conférences à la faculté des sciences économique de l'université de Rennes 1.

    Le pape évoque ainsi la théorie de la « rechute favorable » que les économistes connaissent mieux sous le terme de « ruissellement ». Cette « théorie » est simple : l'enrichissement de quelques-uns finira par profiter à tous par « ruissellement » depuis le haut de la pyramide des revenus. Cette thèse a été partiellement rendue « scientifique » par l'intermédiaire de la « courbe de Kuznets » (du nom de l'économiste américain qui développa cette approche en 1954).

    Cette courbe est censée montrer que le développement économique des nations s'accompagne initialement d'une forte hausse des inégalités. Celles-ci atteignent un point maximum, puis décroissent à mesure que la richesse « ruisselle » des plus riches vers les classes moyennes puis vers les plus pauvres.

    Depuis la fable des abeilles de Mandeville, en 1714, la même idée est au coeur de l'idéologie libérale. Elle a, depuis, constamment justifié la diminution des « charges » pesant sur les plus riches, par exemple lors de la révolution conservatrice initiée par Ronald Reagan aux États-Unis et Margaret Thatcher en Grande-Bretagne. Elle a refait surface lors de la récente crise. Pour le pape, « cette opinion, qui n'a jamais été confirmée par les faits, exprime une confiance grossière et naïve dans la bonté de ceux qui détiennent le pouvoir économique et dans les mécanismes sacralisés du système économique dominant ».

    Or, Simon Kuznets écrivait lui-même, un an après sa publication, que l'article « relève peut-être pour 5 % d'information empirique et pour 95 % de spéculation, probablement pour une large part entachée d'un raisonnement privilégiant fâcheusement les souhaits à la réalité ».

    Le creusement sans précédent des inégalités, le fait, comme l'affirme le pape, que « l'économie tue », est ainsi relié à des « idéologies qui défendent l'autonomie absolue des marchés et la spéculation financière », et cela, sans but « véritablement humain ».

    Ce faisant, le pape se place dans la filiation de la doctrine sociale de l'Église, du catholicisme social, d'intellectuels et d'économistes tels Henri Desroches ou François Perroux, du courant Économie et Humanisme, inspirés notamment par le père Lebret, qui ont cherché à construire une « économie de tout l'homme et de tous les hommes ». Dans ce texte, François met en cause l'aspect purement idéologique et « fétichisé » d'une partie des thèses dominantes en économie. Car le libéralisme économique « sacralisé » est également une religion.

    Leonard Read, qui inspira ceux qu'on a appelés les « évangélistes du marché », écrivait ainsi : « Ayez foi dans les hommes et les femmes libres qui répondent à la main invisible. Cette foi sera fortifiée. » Même si l'on n'est pas croyant, le texte du pape invite à réfléchir sur les dogmes de cette religion, sans autre dieu que le marché et sa « main invisible » qu'est parfois l'économie.