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  • Quand la synodalité est contredite par les faits; journal de guerre de l’Église syro-malabare

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    De Sandro Magister sur Settimo Cielo (en français sur diakonos.be) :

    Quand la synodalité est contredite par les faits. Journal de guerre de l’Église syro-malabare

    En l’espace de quelques semaines, le Pape François a élevé de simple prêtre à évêque, puis cardinal et enfin préfet du Dicastère pour le dialogue interreligieux l’Indien George Jacob Koovakad, 51 ans, qui est depuis quatre ans – et sera encore à l’avenir – l’organisateur de ses voyages à travers le monde.

    Fort heureusement, le nouvel élu ne devra s’occuper que du dialogue « ad extra » avec les autres religions parce que pour ce qui est du dialogue « ad intra », il est issu d’une Église qui ne pourrait pas être plus divisée, et même en opposition frontale avec le Pape.

    Mgr Koovakad appartient à l’Église catholique syro-malabare, qui compte 4,5 millions de fidèles qui résident pour la plupart dans le Sud de l’Inde, dans l’État du Kerala, où il a été ordonné évêque le 24 novembre dernier. Il s‘agit d’une Église dont les origines remontent aux premiers siècles, elle a été fondée par l’apôtre Thomas dont le tombeau est vénéré à Chennai (Madras), elle appartient à la famille syro-orientale, avec un gouvernement autonome de modèle synodal et elle est dotée d’une liturgie eucharistique propre, y compris la très ancienne anaphore d’Addai et Mari qui est la seule à ne pas inclure les paroles de Jésus sur le pain et le vin offerts comme son corps et son sang.

    Depuis le XVIè siècle, après l’arrivée des Portugais, l’Église syro-malabare a été fortement latinisée, avant de récupérer, avant et après le Concile Vatican II, certaines de ses caractéristiques ancestrales. L’une d’elles concerne la position des célébrants pendant la « Qurbana », la messe. En 2021, le synode de l’Église syro-malabare tout entière a défini définitivement et à l’unanimité que les célébrants devaient être tournés vers le peuple pendant la liturgie de la parole et la bénédiction finale, mais avec le dos au peuple et tournés vers l’autel pendant la liturgique eucharistique.

    C’est là que les romains s’empoignèrent. Car la quasi-totalité des nombreux prêtres du siège primatial, l’archéparchie d’Ernakulam-Angamaly, désobéirent à l’ordre et s’obstinèrent à célébrer toute la messe tournés vers le peuple. L’archevêque majeur de l’archéparchie, le cardinal George Alancherry, déjà mal vu de ses fidèles et durement mis en cause dans une affaire de malversation, ainsi que son administrateur apostolique nommé par le Pape, l’archevêque Andrews Thazhath, par ailleurs ancien président de la Conférence épiscopale indienne, se sont retrouvés presque seuls contre tous à défendre la décision du synode.

    Le climat s’était dégradé à tel point que Mgr Thazhath devait célébrer la messe sous protection policière pendant que les factions rivales s’affrontaient physiquement jusque dans les églises et qu’il a fallu fermer la cathédrale de Sainte-Marie à Ernakulam pendant plusieurs mois.

    Pendant ce temps, à Rome, le Pape François avait mis en branle le synode sur la synodalité, avec l’intention ouvertement déclarée d’étendre à toute l’Église ce modèle de gouvernement collégial. Et c’est donc le Pape qui souhaitait avant toute chose que les normes décidées par le synode syro-malabar de 2021 soient respectée.

    À l’été 2023, pour mettre un terme à la controverse, le Pape a dépêché en ces terres rebelles, en tant que délégué expert en la matière, le jésuite Cyril Vasil, archevêque de l’éparchie grecque catholique de Košice en Slovaquie et ancien Secrétaire du Dicastère pour les Églises orientales.

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  • La foi catholique du Premier ministre français critiquée après sa décision de scinder le projet de loi sur la fin de vie

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    De Solène Tadié sur CNA :

    La foi catholique du Premier ministre français critiquée après sa décision de scinder le projet de loi sur la fin de vie

    La décision du Premier ministre français François Bayrou de scinder en deux le controversé projet de loi sur la « fin de vie » — pour séparer la question de « l'aide active à mourir » de celle des soins palliatifs, annoncée le 21 janvier — lui a valu les foudres de ses propres responsables politiques, qui ont remis en cause ses convictions catholiques. 

    Les opposants au projet initial, dont les débats ont été interrompus par la dissolution de l'Assemblée nationale en juin dernier, y ont vu, au contraire, un choix courageux qui s'efforce de respecter la pluralité des opinions parlementaires sur ces deux questions de société d'une importance centrale.

    Pour le président Emmanuel Macron, ce projet de loi devait être l'une des mesures sociétales phares de son second mandat — avec l'inscription du droit à l'avortement dans la Constitution française, officialisée en mars 2024 — pour satisfaire sa base électorale progressiste, largement favorable à l'euthanasie. 

    Le projet de loi relatif à « l’accompagnement des malades et à la fin de vie », présenté initialement en Conseil des ministres le 10 avril 2024, puis à l’Assemblée nationale le 27 mai, comportait deux volets : les soins palliatifs et l’accompagnement des malades, et l’aide active à mourir – soit l’euthanasie et le suicide assisté – pour les maladies incurables et/ou les douleurs qui ne peuvent être soulagées. 

    Le texte prévoyait notamment d’autoriser la fourniture de cette substance mortelle à « une personne qui en fait la demande, pour qu’elle s’en administre elle-même ou, si elle ne peut le faire, pour qu’elle soit administrée par un médecin, une infirmière, un proche ou une personne volontaire de son choix ». 

    « Le projet de loi débattu avant la dissolution aurait fait de la France l'une des législations les plus extrêmes au monde, en prévoyant que l'acte mortel soit accompli par un proche, en exerçant une forte coercition sur le personnel médical et en prévoyant une procédure propice aux abus et aux dérives », a déclaré à CNA Laurent Frémont, maître de conférences à Sciences Po Paris et cofondateur de l' association Démocratie, éthique et solidarités . 

    En effet, si le projet de loi prévoyait une clause de conscience pour les professionnels de la santé, il ne s’appliquait pas aux pharmaciens et ne comportait aucune dimension collective pour un service ou un établissement de santé.  

    Si l’ instabilité gouvernementale qui a suivi les élections européennes du 9 juin et la dissolution de l’Assemblée nationale a fait gagner du temps aux opposants à l’aide active à mourir, ses promoteurs cherchent à rattraper le temps perdu en en faisant une priorité politique. Ainsi, depuis début novembre 2024, la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, exhorte le gouvernement à reprendre les discussions sur le projet de loi au plus tard début février. 

    En reprenant cette demande, Bayrou, Premier ministre depuis le 13 décembre 2024, a néanmoins surpris ses propres alliés politiques en annonçant, fin janvier, que le texte initial sur la fin de vie serait finalement scindé en deux. Les débats parlementaires s'articuleront donc autour de deux projets de loi distincts, le premier sur les soins palliatifs, le second sur l'aide active à mourir.  

    « Il faut qu'on puisse voter sur chacun de ces deux textes de manière différente », avait expliqué le leader centriste lors de son annonce, soulignant qu'il n'avait pas l'intention de retarder l'examen du projet de loi au Parlement.  

    Cette décision a été saluée par les critiques du projet initial, qui y voyaient une antinomie flagrante entre les deux parties du projet de loi.

    « Depuis le début des débats sur le sujet, Emmanuel Macron a tenté un "en même temps" particulièrement audacieux en annonçant l'avènement d'un "modèle français de fin de vie" fondé à la fois sur les soins palliatifs et la mort provoquée », a déclaré M. Frémont.

    « Il ne peut y avoir de continuité entre ces deux pratiques radicalement opposées. La mort induite ne peut être un soin, car elle interrompt le soin en éliminant la personne soignée. Malgré une forte opposition des soignants, cette confusion a été entretenue lors des débats qui ont précédé la dissolution. »

    L'annonce a également provoqué une levée de boucliers chez les partisans de l'aide active au suicide, qui y voient une tentative de reporter sine die le débat. Ils ont également pointé du doigt les convictions religieuses de Bayrou, qui n'a jamais fait mystère de sa foi catholique.

    « Le Premier ministre est en pleine illumination mystique », écrit dans un communiqué l'Association française pour le droit à mourir dans la dignité, le comparant au « prédicateur d'une congrégation religieuse » et l'invitant à « mettre de côté ses convictions religieuses et à s'intéresser enfin à l'intérêt général des Français ». 

    Plus nuancés, des responsables politiques du camp présidentiel ont néanmoins estimé que le jugement de l'homme politique était obscurci par ses convictions personnelles, même si lui et son entourage insistaient sur le contraire.

    Pour l'éditorialiste Guillaume Tabard, Bayrou a surtout fait preuve d'habileté politique en se soustrayant aux pressions du président de l'Assemblée nationale et en cherchant à « déminer un sujet brûlant sans l'enterrer ».  

    « En promettant de séparer les deux sujets, François Bayrou montre qu’il a bien saisi l’enjeu de ce débat. Cela permettra d’éviter que les soins palliatifs ne servent de prétexte à la légalisation de la mort administrée en France », a déclaré M. Frémont. 

     
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    Solène Tadié est correspondante Europe du National Catholic Register. Franco-suisse, elle a grandi à Paris. Diplômée en journalisme à l'Université de Rome III, elle commence à couvrir Rome et le Vatican pour Aleteia. Elle rejoint L'Osservatore Romano en 2015, où elle travaille successivement pour la rubrique française et les pages culturelles du quotidien italien. Elle a également collaboré avec plusieurs médias catholiques francophones. Solène Tadié est titulaire d'une licence en philosophie de l'Université pontificale Saint-Thomas d'Aquin.
  • GPA, fin de vie : le nouveau gouvernement belge toujours plus libéral, sauf en matière d’IVG

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    Une synthèse de presse de gènéthique.org :

    GPA, fin de vie : le nouveau gouvernement belge toujours plus libéral, sauf en matière d’IVG

    5 février 2025

    Vendredi dernier, les parties sont parvenues à un accord pour le nouveau gouvernement fédéral de Belgique. Il compte différentes mesures en matière de bioéthique.

    Vers un « cadre légal » pour la GPA

    Actuellement, il n’existe pas de législation belge relative à la gestation par autrui (GPA). La nouvelle coalition compte instaurer un « accord préalable » entre les « parents d’intention » et la mère porteuse, devant être ratifié par le tribunal de la famille. Les commanditaires se verraient ainsi dotés de « tous les droits parentaux » dès la naissance de l’enfant. « Toute forme de commercialisation de la GPA » sera en revanche interdite (cf. « Il n’y a pas de GPA éthique, c’est un terme marketing »).

    Par ailleurs, l’anonymat des donneurs de sperme et d’ovocytes sera supprimé.

    Des déclarations « anticipées » pour les personnes démentes

    En matière d’euthanasie, l’accord gouvernemental prévoit d’« élargir la déclaration anticipée aux personnes devenues incapables de donner leur consentement en raison d’une démence » (cf. Québec : les demandes « anticipées » d’euthanasie bientôt autorisées). Une question « sur la table depuis plusieurs législatures » qui n’a pas abouti jusqu’à présent.

    Pas d’accord en matière d’IVG

    En ce qui concerne la question de l’avortement, la coalition indique vouloir « poursuivre le débat sociétal ». Différents partis ont essayé d’augmenter le délai autorisé pour avorter mais le CD&V [1] s’y est toujours opposé. Sammy Mahdi, le président de ce parti, a déclaré que tout allongement au-delà de 14 semaines était « non discutable » (cf. Luxembourg : le gouvernement s’oppose à l’allongement du délai légal pour avorter). Or seul un consensus au sein des partis de la majorité pourrait aboutir à une modification de la loi.

    Enfin, l’accord prévoit la création d’un dispositif d’« accouchement discret ». Les données des mères y ayant recours seront conservées par un organisme indépendant et transmises plus tard à l’enfant s’il le souhaite.

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    [1] Chrétiens-démocrates et Flamands

    Source : RTL Info (01/02/2025)

    Lire également : Fin du 15 août, élargissement de l’euthanasie, GPA… le programme du nouveau gouvernement belge

  • Église catholique en Chine : l'étrange cas de l'évêque Ji Weizhong

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    De sur Bitter Winter :

    Église catholique en Chine : l'étrange cas de l'évêque Ji Weizhong

    Dans plusieurs cas, nous voyons le schéma suivant à l’œuvre, qui ne correspond probablement pas à l’accord. Premièrement, le PCC « élit » un évêque et annonce publiquement la nouvelle. Deuxièmement, pendant plusieurs mois, il n’y a aucune réaction du Saint-Siège, ce qui suggère fortement qu’il n’avait pas été informé auparavant de l’élection. Troisièmement, après une pause de plusieurs mois, le pape « nomme » l’évêque – dont le PCC avait déjà annoncé l’élection des mois plus tôt. Quatrièmement, une cérémonie de consécration a lieu où le mandat papal n’est pas du tout mentionné comme s’il n’était pas pertinent, tandis qu’une lettre d’approbation est lue par la « Conférence des évêques » de l’ Église catholique patriotique , qui n’est pas reconnue comme telle par Rome.

    Le dernier cas de ce genre concerne l’évêque Ji Weizhong. Le PCC a informé que le 19 juillet 2024 , Ji a été élu évêque du diocèse de Lüliang. Il est intéressant de noter qu’à cette date, le diocèse de Lüliang n’existait pas encore. Le PCC souhaitait qu’un tel diocèse soit créé dans le cadre du plan du PCC visant à réduire le nombre de diocèses catholiques chinois et à les adapter aux divisions administratives de la Chine. Le 19 juillet 2024, pour le Vatican, Lüliang faisait toujours partie du diocèse de Fenyang. Aucun évêque de Lüliang ne pouvait être valablement élu car il n’y avait pas de diocèse de Lüliang.

    Comme dans d’autres cas précédents, notamment celui impliquant le nouvel évêque de Shanghai , des négociations sous la table auraient dû suivre et le 20 janvier 2025, le Bulletin officiel du Saint-Siège a annoncé que « le 28 octobre 2024 », le pape François avait supprimé l’ancien diocèse de Fenyang, érigé le nouveau diocèse de Lüliang et nommé le père Ji Weizhong évêque de Lüliang.

    Une autre question intéressante est de savoir pourquoi, si le Pape avait pris les décisions de « ratifier » les décisions du PCC sur les diocèses et l’évêque le 28 octobre 2024, le communiqué de presse correspondant n’a été publié que le 20 janvier 2025. 

    La réponse est qu'il était urgent de « légitimer » la consécration publique de l'évêque Ji Weizhong, qui a eu lieu précisément le 20 janvier . Comme d'habitude, lors de la cérémonie de consécration, aucune approbation ou mandat pontifical n'a été mentionné, tandis qu'une lettre de la Conférence épiscopale chinoise a été lue, comme si cet organisme non reconnu par le Vatican était la source de la légitimité de l'évêque plutôt que le pape.

    L’ accord Vatican-Chine de 2018 sur la nomination des évêques continue de fonctionner de manière assez curieuse.

  • Les martyrs de Nagasaki (6 février)

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    source Missel.free

    Saint Paul Miki et ses compagnons martyrs

    Historique

    Si le nom de Nagasaki évoque pour le monde entier la déflagration atomique du 9 août 1945, il doit aussi rappeler aux catholiques les vingt-six croix dressées face à la mer, le 5 février 1597. Ces vingt-six crucifiés reproduisaient l’image de la nouvelle chrétienté japonaise : il y avait là des missionnaires[1], trois jésuites[2] dont Paul Miki qui était japonais, et six franciscains[3] , dix-sept laïcs, tertiaires franciscains [4], et même deux enfants : Louis (onze ans) et Antoine (treize ans). Alors qu’ils étaient attachés à leur croix, le R.P. Pierre Baptiste chanta le Benedictus et le petit Antoine entonna le Laudate pueri Dominum.  Du haut de sa croix, saint Paul Miki continuait à prêcher, invitant les gens qui l’entouraient à se convertir et pardonnant à ceux qui étaient responsables de sa mort. Tous étaient souriants, plusieurs chantaient. On leur transperça le cœur d’un coup de lance, ce qui achevait de les configurer au Christ. Urbain VIII les béatifia en 1627 et Pie IX les canonisa le 8 juin 1862.


    [1] Les Jésuites et les Franciscains ont été arrêtés à Ozaka le 9 décembre 1596.

    [2] Paul Miki, Jean de Goto et Jacques Kisoï.

    [3] Pierre Baptiste, chef de la mission franciscaine au Japon, qui, un jour de Pentecôte, avait guéri une jeune fille lépreuse ; Martin d’Aguire, professeur de théologie qui prêchait en japonais ; François Blanco, prêtre ; Philippe de Las Casas ; Gonzales Garcia, frère convers ; François de Saint-Michel, frère convers.

    [4] Tous membres de la communauté de Méaco, ils furent arrêtés le 31 décembre 1596 : Côme Tachegia, Michel et Thomas Cozaki, Paul Ibarki, Léon Carasumo (catéchiste et interprète), Mathias, Bonaventure, Joachim Saccakibara (mèdecin), François de Méaco (médecin), Thomas Dauki (interprète), Jean Kinoia, Gabriel de Duisco, Paul Suzuki (catéchiste et interprète) ; François Danto et Pierre Sukejiro n’étaient pas sur la liste des arrestations mais, comme ils s’obstinaient à suivre les prisonniers et à les soigner, ils furent arrêtés à leur tour.

  • Ce que l'IA chinoise DeepSeek dit (et ne dit pas) à propos du christianisme

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    De Courtney Mares sur le NCR :

    Ce que l'IA chinoise DeepSeek dit (et ne dit pas) à propos du christianisme

    Certaines réponses étaient franches, d’autres ont disparu quelques instants plus tard – mais toutes ont révélé quelque chose sur l’état de l’Église catholique en Chine.

    DeepSeek-R1, le nouveau chatbot chinois basé sur l'intelligence artificielle, fait beaucoup parler de lui. La semaine dernière, il a dépassé ChatGPT d'OpenAI en tant qu'application pour smartphone la plus téléchargée, a secoué Wall Street en déclenchant une vente massive d'actions liées à l'IA et a fait sourciller les internautes en raison de ses politiques strictes d'autocensure.

    Comme d'autres modèles de langage étendu (LLM), DeepSeek-R1 peut répondre à des questions de culture générale, générer du texte et résoudre des problèmes mathématiques complexes. Mais il a également été conçu pour éviter les sujets que le gouvernement chinois considère comme « sensibles » — notamment certains événements historiques, des questions politiques et même des questions de foi.

    Pour les chrétiens, ce dernier point est particulièrement troublant. Lorsqu’on les interroge sur Jésus, le catholicisme, l’accord Vatican-Chine, la politique de l’enfant unique et la persécution des chrétiens en Chine, DeepSeek-R1 révèle une approche soigneusement contrôlée – une approche qui, parfois, avertit activement les utilisateurs des répercussions potentielles de la pratique de leur foi et leur conseille de « faire preuve de discrétion ».

    Alors, jusqu’où s’étend la censure de DeepSeek en ce qui concerne le christianisme ?

    Pour le savoir, le Register a effectué une série de tests. 

    Les résultats ont été révélateurs. Certaines questions ont reçu une réponse complète, pour être censurées quelques instants plus tard. D’autres ont déclenché un monologue interne de l’IA alors qu’elle débattait de la manière de répondre. Dans certains cas, DeepSeek a même fourni des conseils précis aux chrétiens sur la façon de s’y retrouver dans les restrictions religieuses en Chine, notamment un guide étape par étape sur la rédaction d’une homélie qui résisterait à l’examen du gouvernement.

    Voici ce que nous avons trouvé :

    Le christianisme de base ? Pas mal.

    Nous avons commencé avec des questions simples :

    Je souhaite en savoir plus sur Jésus et le christianisme. Que pouvez-vous me dire et où dois-je aller pour en savoir plus ?
    Dois-je devenir catholique ?

    DeepSeek a géré ces problèmes assez bien, en proposant des réponses similaires à celles que vous obtiendriez de ChatGPT. Mais il y avait une particularité : DeepSeek permet aux utilisateurs de voir son « processus de réflexion » interne avant de générer une réponse finale. Dans ce cas, l'IA a réfléchi :

    Bon, je veux en savoir plus sur Jésus et le christianisme. Hmm, par où commencer ? Je suppose que j'en sais un peu plus d'après ce que j'ai entendu, mais je ne suis pas sûr de ce qui est exact. Laissez-moi réfléchir...

    En fin de compte, le chatbot a recommandé de lire les quatre Évangiles, d’explorer des œuvres comme Mere Christianity de CS Lewis et de visiter des églises pour découvrir différentes manières d’adorer.

    De même, lorsqu'on lui a demandé si quelqu'un devrait devenir catholique, DeepSeek a répondu :

    Je dois faire preuve de respect et ne pas les forcer à prendre une décision. Au contraire, je dois leur fournir des conseils pour les aider à prendre leurs propres décisions. Éviter les préjugés.

    Il a ensuite suggéré d'assister à la messe, de prier le rosaire, de lire le Catéchisme de l'Église catholique , de parler à un prêtre et de rejoindre un programme RCIA. Pas un mauvais conseil.

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  • «Tout ce qui est beau vient de Dieu et parle de Dieu», déclare un artiste français

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    De Solène Tadié sur le NCR :

    «Tout ce qui est beau vient de Dieu et parle de Dieu», déclare un artiste français

    Augustin Frison-Roche, qui s'est fait connaître ces dernières années grâce à son travail sur des sites religieux emblématiques comme la cathédrale de Chartres, est actuellement au centre d'une nouvelle exposition à Paris.

    L'artiste Augustin Frison-Roche à côté d'une de ses œuvres des Trois Rois (peinture complète présentée ci-dessous).
    L'artiste Augustin Frison-Roche à côté d'une de ses œuvres Les Rois Mages (tableau complet ci-dessous). (photo : Antoine Dominique / Courtesy of Augustin Frison-Roche)

    PARIS — Augustin Frison-Roche est une étoile montante de l’art français. Récemment reconnu internationalement pour la réalisation d’une colonne-tabernacle et d’une croix peinte pour la crypte de l’emblématique cathédrale de Chartres à l’occasion de son millénaire , il est actuellement au cœur d’une exposition sur le thème « Épiphanies » au Collège catholique des Bernardins à Paris. 

    Cette institution, dont les fondations remontent à l'époque de Saint-Louis, est aujourd'hui un lieu majeur de rencontres culturelles chrétiennes dans la capitale française.

    Jusqu'au 26 février, l'exposition offre un aperçu du monde onirique de Frison-Roche, avec ses paysages animaliers luxuriants et ses nombreuses références au monde invisible. 

    Cet artiste de 37 ans travaille depuis 15 ans sur toutes sortes de créations à la croisée de l'art profane et sacré, de la peinture à la sculpture en passant par le mobilier liturgique. Pour lui, l'art et sa portée universelle sont le complément parfait de la théologie conceptuelle.

    Manifeste artistique 

    L’Épiphanie ouvre l’âme à la transcendance, selon l’artiste.

    « J’ai aimé développer ce thème qui m’a toujours inspiré », a déclaré Frison-Roche dans une conversation avec le Register le 7 janvier. « Il ne représente qu’une vingtaine de lignes de saint Matthieu, mais il a été enrichi par la tradition chrétienne au fil du temps, et ce n’est pas un hasard s’il a inspiré tant de peintres à travers l’histoire, un peu comme l’Apocalypse : ces thèmes séduisent les peintres, car ils peuvent produire de belles images. »

    Selon lui, les dimensions de liberté et de poésie associées à l’Épiphanie ont permis à cette fête chrétienne de pénétrer la culture populaire et de séduire un public laïc et religieux, captivé par l’image des Rois Mages d’Orient et de leurs processions, flanqués d’éléphants, de dromadaires et d’autres créatures exotiques.

    « L’Adoration des Mages est pour moi presque un manifeste artistique, car je crois que l’art doit toujours être une épiphanie », a-t-il déclaré. 

    "L'Adoration des Mages" (2024) d'Augustin Frison-Roche
    'L'Adoration des Mages' (2024) d'Augustin Frison-Roche

    Au fil des 19 tableaux qui composent l’exposition, l’artiste développe également sa vision des grandes « apparitions » qui ont marqué l’histoire sacrée et qu’il perçoit comme d’autres formes d’épiphanie. C’est pourquoi il a choisi la forme plurielle pour le titre.

    Pour agrémenter ses œuvres, quatre concerts de musique pour clavecin baroque composée pour l'occasion, inspirée de son tableau L'Oiseau de Paradis , figurent au programme.

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  • «Les chrétiens sont les victimes innocentes de la guerre entre le Hezbollah et Israël»

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    D'Elisa Gestri sur la NBQ :

    Interview / Père Abdo Raad

    «Les chrétiens sont les victimes innocentes de la guerre entre le Hezbollah et Israël»

    Malgré la prolongation de la trêve entre le Hezbollah et Israël jusqu'au 18 février, il y a une "dévastation indescriptible" au Liban et "les prévisions pour le futur proche ne sont pas roses". Et les chrétiens sont les premières victimes du conflit. La Bussola interviewe le père Abdo Raad, un melkite libanais.

    05_02_2025

    Au Liban, la trêve entre le Hezbollah et Israël, qui avait expiré le 27 janvier, a été prolongée jusqu'au 18 février. Selon les accords conclus deux mois plus tôt, à cette date, le Hezbollah devait se retirer à 30 km de la frontière avec l'État juif, laissant le contrôle de la région sud à l'armée régulière libanaise, et les forces israéliennes (FDI) devaient se retirer du pays. En réalité, l'armée israélienne occupe toujours le secteur oriental du sud du Liban et a provoqué la mort d'au moins trente citoyens libanais qui tentaient de regagner leurs villages, encouragés par les dirigeants des partis chiites.

    Le père Abdo Raad, prêtre melkite libanais (c'est-à-dire de rite grec-catholique) du diocèse de Sidon, actuellement Fidei donum dans le diocèse de Campobasso-Bojano, vient de rentrer du sud du Liban. Nous profitons de cette occasion pour lui demander de nous dire comment se déroule actuellement la vie dans la région, et notamment quelles sont les difficultés auxquelles les chrétiens sont confrontés.

    Père Abdo, quelle est la situation au Sud-Liban en ce moment ?
    Durant les quatre jours que j'ai passés dans le sud du pays, j'ai visité l'évêque melkite de Tyr, S.E. Georges Iskandar, et les paroisses de quelques villages du diocèse : Tibnin, Safad al-Battikh, Derdghaya, Baraashit. Je n'ai pas pu me rendre dans les villages frontaliers car ils sont toujours occupés par Israël et il n'est pas permis d'y aller ; Partout où je suis allé, j’ai vu une dévastation indescriptible. Les prévisions pour un avenir proche ne sont pas roses : il ne semble pas que le Hezbollah ait la volonté de remettre ses armes à l'armée libanaise, étant donné que l'Etat hébreu est le premier à ne pas respecter la trêve et a même déclaré qu'il ne voulait pas quitter le Liban avant d'avoir complètement éliminé les armes et les hommes du Hezbollah.

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  • Février 2025 : prier pour les vocations sacerdotales et religieuses

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    De Jean-Benoît Harel sur Vatican News :

    Les vocations sacerdotales et religieuses, l’intention de prière du Pape pour février

    Pour le mois de février, le Saint-Père propose à l’Église universelle de prier pour les vocations sacerdotales et religieuses. Si Dieu ne se lasse jamais d’appeler à le suivre sur le chemin de la vie consacrée, l’Église doit accueillir «les désirs et les doutes» des jeunes qui ressentent cet appel, demande le Pape François.

    Depuis 1997, l’Église célèbre chaque année le 2 février la Journée de la vie consacrée, pour mettre en lumière le rôle des personnes engagées dans ce choix de vie. À la suite de cette journée, le Pape François propose à toute l’Église de prier pour les vocations sacerdotales et religieuses lors du mois de février 2025.

     «Quand j’avais 17 ans, j’étais étudiant et je travaillais. J’avais des projets. Je ne pensais absolument pas à devenir prêtre. Mais un jour, je suis entré dans la paroisse. Et Dieu était là, m’attendant!», se souvient le Pape François, au début de la vidéo de présentation de l’intention du mois.

    Écouter l'appel de Dieu

    Dans un contexte de baisse du nombre de vocations sacerdotales et religieuses, le Saint-Père assure qu’«aujourd’hui encore, Dieu continue d’appeler les jeunes, parfois de manière inimaginable». Selon l’«Annuaire des Statistiques de l’Église», mis à jour au 31 décembre 2022, le nombre total de prêtres dans le monde a diminué pour atteindre 407 730. L’Église catholique compte également 49 414 religieux non prêtres et 599 228 religieuses, deux chiffres également en chute par rapport aux années précédentes.

    En réalité, pour François, le problème n’est pas dans l’appel de Dieu mais dans l’écoute et dans la réponse des jeunes appelés. «Parfois, nous ne l’écoutons pas parce que nous sommes trop occupés avec nos affaires, nos projets, et même nos occupations de l’Église».

    La voix de Dieu peut prendre de multiples moyens, souligne le Pape argentin, et notamment à travers «les rêves» et «les préoccupations que les jeunes ressentent dans leur cœur». Il demande ainsi à toute l’Église d’accompagner les jeunes qui reçoivent l’appel du Seigneur, comme une manière de voir «comment Dieu fait des choses nouvelles avec eux». Le Souverain pontife encourage ainsi les jeunes à s’engager dans leur vocation religieuse ou sacerdotale reçue de Dieu, un appel «à mieux servir l’Église et le monde d’aujourd’hui».

    Ce samedi 1er février, le Pape a présidé les Premières Vêpres en la basilique Saint-Pierre, à l’occasion de la fête de la Présentation du Seigneur, qui est aussi la fête de la vie ...

    Accueillir les désirs et les doutes

    Dans la fin de la vidéo, le Pape lance un message d’espérance: «Faisons confiance aux jeunes! Et surtout, faisons confiance à Dieu, car Il appelle chacun de nous!». «Prions pour que la communauté ecclésiale accueille les désirs et les doutes des jeunes qui ressentent l’appel à vivre la mission de Jésus dans la vie aussi bien sacerdotale que religieuse», a-t-il conclu.

    Le Père Cristóbal Fones, S.J., directeur international du Réseau Mondial de Prière du Pape, propose comme acte concret l'attitude d'ouverture à la mission d’encourager les vocations, sans entraver les chemins que Dieu lui-même ouvre, particulièrement au sein des familles.

    Enfin, à l’occasion du Jubilé 2025, la prière aux intentions du Souverain pontife figure parmi les conditions requises pour obtenir les indulgences accordée en cette année sainte, en plus de la participation à l’Eucharistie, du sacrement de la réconciliation et du passage d’une Porte sainte.

  • Un témoignage fort de Mgr Rey et ses projets pour l'avenir

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    De Philippe Marie sur Tribune Chrétienne

    Pour Tribune Chrétienne, Monseigneur Rey livre un témoignage fort et évoque ses projets pour l’avenir

     
    "Il faut que le séminaire de la Castille garde son âme, son originalité et son charisme propre."

    4 février 2025

    Il est souvent dit que les voies du Seigneur sont impénétrables. Pourtant, parfois, la Providence se manifeste de manière étonnante, orchestrant des événements et des rencontres à des moments clés de notre vie. Ce fut le cas ce mardi 4 février 2025, lors d’un voyage en train en direction de Toulon, où j’ai eu la chance, non pas un simple hasard, mais par un signe du destin, de rencontrer Monseigneur Rey, évêque émérite du diocèse de Toulon. Cette rencontre, totalement improvisée, a pris une tournure significative lorsque Monseigneur m’a spontanément livré ses réflexions sur sa démission forcée.

    Dans un monde où l’Église semble parfois perdre de vue ses racines spirituelles au profit de structures ou de logiques bureaucratiques, Monseigneur Rey a souligné les points d’attention, notamment pour l’avenir du séminaire.

    Il a exprimé son inquiétude par rapport à la très forte diminution du nombre d’entrées au séminaire de la Castille, un lieu cher à son cœur : « Il faut que le séminaire de la Castille garde son âme, son originalité, son charisme propre pour faire en sorte que l’ADN du séminaire soit préservé et soit inspirant pour les jeunes qui se posent des questions sur leur vocation » et de rajouter « il faut que ce séminaire porte les repères fondamentaux qui sont l’attachement au Magistère de l’Eglise, l’accueil et l’accompagnement des différentes sensibilités, spirituelles et liturgiques (les traditionnalistes en particulier), mais aussi l’orientation missionnaire. ».

    Monseigneur Rey a souligné que, bien que les normes et les structures de l’Église soient nécessaires pour l’harmonisation et la solidité de la formation, « elles ne doivent pas étouffer le dynamisme et la créativité car la bureaucratie peut être un frein à l’épanouissement », mettant en lumière un problème de fond au sein de l’Église actuelle : « Trop souvent, les règles rigides masquent l’essence spirituelle de la formation des prêtres. »

    Comme l’a rappelé récemment le souverain Pontife aux recteurs de séminaires français venus le rencontrer à Rome, il faut savoir accepter la diversité des sensibilités et des parcours des vocations des séminaristes.

    Monseigneur Rey a également évoqué ses projets à venir, notamment à Paris.

    Il prévoit de continuer, comme il l’a déjà fait, à s’investir dans l’accompagnement d’initiatives missionnaires, avec notamment la mise en réseau d’influenceurs et d’incubateurs de projets pastoraux. Cette initiative s’inscrit dans la volonté de donner un nouvel élan à l’engagement chrétien dans un monde de plus en plus sécularisé et, en même temps, dans un contexte où les attentes spirituelles de transcendance, de sacré et d’intériorité sont fortes, particulièrement chez les jeunes :

     « Le nombre croissant de jeunes catéchumènes et de nouvelles générations de convertis témoigne de cette quête de spiritualité, de transcendance et de sacralité qui traverse notre société. » a-t-il affirmé.  Et de poursuivre : « De même, l’Église doit vraiment s’investir et augmenter sa présence active et missionnaire sur les réseaux sociaux, inspirée de l’exemple éloquent de Monseigneur Baron, évêque américain de Winona-Rochester ».

    Ce réseau aura pour vocation de connecter des initiatives missionnaires portées par une nouvelle génération de croyants, dans un espace d’incubation spirituelle pour de nouvelles vocations et initiatives : « Une démarche essentielle pour insuffler un vent de renouveau dans la manière dont les chrétiens vivent et partagent leur foi au quotidien », précise l’évêque.

    Interrogé sur sa participation au pèlerinage de Chartres, Monseigneur Rey, tout en restant très attentif au témoignage et au rayonnement de ce pèlerinage porté par des milliers de pèlerins, a déclaré qu’en fonction de ses disponibilités, comme il l’avait déjà fait en 2022, il verra s’il peut y participer en lien avec Monseigneur Christory, évêque de Chartres.

  • Quand les talibans sévissent à Bruxelles

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    L' "Opinion" de Jean de Codt, magistrat, publiée dans la Libre de ce 4 février 2024 : 

    Les talibans sont-ils parmi nous ?

    La relégation de la sculpture de Victor Rousseau n'est pas un fait isolé. Un messianisme terrestre veut réaliser, de force si nécessaire, un paradis, celui d'une société bienveillante et égalitaire, vivant sur une terre immaculée. Mais qui est le juge de ce qui est pur ?

    Voici un quart de siècle, la communauté internationale apprenait avec effarement la destruction, à la dynamite et à la pelleteuse, de trois statues géantes, datées du VIe siècle de notre ère, situées à Bamyan en Afghanistan. Représentant le prince Siddharta Gautama, dit "l'Éveillé" ou "Bouddha", ces œuvres monumentales, héritées de la période préislamique, n'étaient plus en phase avec la société théocratique recherchée par les "talibans", ou étudiants en théologie, qui avaient pris le pouvoir à Kaboul.

    Depuis l'antique Égypte

    C'est une expérience humaine éternelle : l'heure est rarement à la transmission. La tentation est plutôt d'affirmer notre supériorité en effaçant des héritages jugés encombrants. Un autre exemple peut être trouvé dans la haute Antiquité égyptienne : d'un règne à l'autre, les autorités ordonnaient le martèlement des cartouches contenant le nom des pharaons dont la présence dans l'espace public était devenue inopportune.

    Rien de nouveau sous le soleil. Il y a quelques jours, la presse nous apprenait, sur un ton dont la neutralité cachait mal la stupéfaction, la décision du gouvernement bruxellois, pourtant en affaires courantes, de ranger au magasin des accessoires l'œuvre monumentale du sculpteur belge Victor Rousseau, intitulée 'La maturité', qui embellit depuis cent ans un square du centre de Bruxelles. Le reproche adressé par ces sévères censeurs aux six personnages sculptés dans le marbre de Carrare, est également de n'être plus en phase avec la société actuelle. Du moins est-ce la justification avancée par l'exécutif bruxellois qui, quoique sortant et bientôt sorti, se sent habité par l'urgence de prendre position sur ce que doit être notre "vivre-ensemble". Il définit celui-ci comme étant fondé sur le rejet de toute vision patriarcale des rapports sociaux et familiaux.

    Assurément, comparaison n'est pas raison. Le chef-dœuvre de Victor Rousseau, grand prix de Rome en 1911, ne sera pas mis en pièces, mais seulement déplacé au square Gutenberg, à proximité du quartier européen. Il faut croire que l'air qu'on y respire est différent, moins intolérant à l'obsolescence des œuvres d'art. La statue ne quittera donc pas, si on comprend bien, l'espace public. On nous le promet du moins, et on assure même que ce sera pour son bien, car elle sera restaurée.

    Valeurs désuètes

    Ce qui inquiète, c'est l'affirmation de l'exécutif affirmant qu'il y va d'une œuvre dont l'iconographie et les valeurs sont "désuètes ". On pourrait se demander d'abord, de quel droit et avec quelle légitimité une autorité politique ou administrative pourrait déclasser une œuvre d'art au nom de sa prétendue désuétude. Sommes-nous obligés de partager ce verdict ?

    Aurions-nous perdu le droit de penser ? Le droit d'aimer ? Est-il criminel de considérer que la famille traditionnelle n'est pas une structure frappée de caducité, même si ceux qui la rejettent font plus de bruit que ceux, nombreux encore, qui s'y tiennent ?

    On aimerait bien, ensuite, savoir jusquoù ira la condamnation de l'art en tant que témoin et interprète de l'époque où il a surgi. Victor Rousseau est issu dune humble lignée de tailleurs de pierre. Repéré par Joseph Poelaert, il a travaillé sous sa direction au chantier du palais de justice de Bruxelles. Voilà bien un monument qui "n'est plus en phase" avec la justice actuelle. Son architecture et sa décoration sculptée renvoient à d'anciens héritages gréco-romains, imbibés de stéréotypes figés sur la famille et le pouvoir masculin. Va-t-on, pour autant, vouer aux gémonies la phénoménale colonnade de la place Poelaert ? Il est vrai que l'énormité de la bâtisse oppose, aux velléités de la déplacer, une pesanteur insurmontable.

    "Le sculpteur de l'âme"

    On a dit de Victor Rousseau qu'il était "le sculpteur de l'âme". Il faisait plus qu'habiller les formes. Il donnait un souffle de vie à la matière. Sa sculpture est marquée par le rythme et le mouvement. Elle puise son inspiration dans la représentation du corps féminin dont l'artiste dévoile la sensualité avec retenue. Est-il possible que cette grâce ne soit plus en phase avec notre temps ? Je ne peux y croire.

    Peut-être y a-t-il une autre explication. Notre temps semble traversé par une sorte de messianisme terrestre. Il s'agit de réaliser, de force si nécessaire, un paradis, celui d'une société bienveillante et égalitaire, vivant sur une terre immaculée. Pour y arriver, ce courant de pensée met en place une police de la pensée, une inquisition qui cherche à purger notre passé historique et culturel de ses impuretés. Mais qui est le juge de ce qui est pur ?

    La relégation de la sculpture de Victor Rousseau n'est pas un fait divers, isolé, et insignifiant. Elle s'inscrit dans un mouvement profond de déconstruction du passé et de rétrécissement de l'avenir. On déboulonne les statues. Godefroid de Bouillon est toujours là, place Royale, mais il ne perd rien pour attendre.

    À la tête de mon lit

    Lorsque j'étais enfant, mon père avait accroché à la tête de mon lit un petit cadre contenant une phrase calligraphiée. Je l'ai lue si souvent quelle s'est gravée dans ma mémoire : "Garder sa raison au milieu des fous, sa foi au milieu des superstitions, sa dignité au milieu des caractères amoindris et son indépendance parmi les moutons de Panurge, c'est, de tous les miracles, le plus rare, le plus beau et aussi le plus difficile à accomplir."

    Si l'on veut que la liberté fleurisse encore sur notre terre, il est temps de se retrousser les manches et de prendre quelques bonnes résolutions. En voici trois : arrêtons de penser comme tout le monde c'est-à-dire de penser comme ceux qui ne pensent pas ; retrouvons la fierté de ce que nous sommes et de ce que notre civilisation a apporté au monde ; créons enfin un syndicat de la liberté d'expression afin de voler au secours de tous ceux que la culture de l'annulation s''emploie à culpabiliser et à réduire au silence.

  • L'édition revue et largement complétée des "Habits neufs du terrorisme intellectuel" vient de paraître

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    Des propos recueiillis par Christophe Geffroy sur le site de la Nef (février 2025) :

    Les habits neufs du terrorisme intellectuel | Jean Sévillia | Perrin

    Les habits neufs du terrorisme intellectuel : entretien avec Jean Sévillia

    Jean Sévillia, journaliste, essayiste et historien, est chroniqueur au Figaro Magazine, il nous offre ici une édition largement revue de son best-seller de 2000, la moitié de l’ouvrage étant inédite.

    La Nef – Qu’est-ce que le « terrorisme intellectuel » et quelle en est l’origine ? Comment reliez-vous ce phénomène à celui du « politiquement correct » ?
    Jean Sévillia – Il s’agit d’un mécanisme qui s’est mis en place dans l’immédiat après-guerre, quand le parti communiste occupait une position hégémonique dans le monde intellectuel. Il consistait à classer dans le camp du Bien, au prix de mensonges, d’omissions et d’amalgames, tous ceux qui avaient combattu l’occupant pendant la guerre, et a contrario de placer dans le camp du Mal tous ceux qui avaient collaboré avec les nazis, que ce soit vrai ou non. Cette vision manichéenne a permis de ranger le communisme dans les valeurs positives et l’anticommunisme dans les négatives. Par la suite, l’idéologie dominante a changé. Après le stalinisme, dans les années 1960, on est passé au tiers-mondisme avec le culte de Mao ou Fidel Castro ; dans les années 1970 au déconstructivisme façon pensée 68 ; dans les années 1980 à l’antiracisme et à l’antifascisme (en l’absence de fascisme) ; dans les années 90 au droit-de-l’hommisme, etc. À chaque fois, les opposants étaient caricaturés, diabolisés et rangés dans le camp du Mal par les représentants du prétendu camp du Bien. Le terrorisme intellectuel est la mise en œuvre du politiquement correct du moment par une minorité qui exerce une véritable dictature dans le domaine des idées.

    Le « terrorisme intellectuel » est-il le fait de la seule gauche ?
    Dans l’absolu, non. Il se trouve qu’en France, pour un certain nombre de raisons historiques et sociologiques, les secteurs de la société qui contribuent à forger les mentalités et les représentations des citoyens sont massivement orientés à gauche : l’Éducation nationale, la presse écrite et le système médiatique (plus des deux tiers des journalistes votent à gauche et même très à gauche), l’Université, le monde de la recherche scientifique, les grandes institutions culturelles, le milieu associatif. En face, la droite institutionnelle ne s’est jamais vraiment intéressée au débat d’idées, partant du principe qu’il vaut mieux abandonner la culture à la gauche, comme on donne un os à ronger à son chien, pour mieux se concentrer sur la gestion économique du pays et la géopolitique. Fatale erreur qui a laissé libre cours à une succession de vagues idéologiques qui ont imprégné la société en profondeur. J’ajoute que la droite populiste ne se signale pas spécialement par son appétit pour le débat intellectuel. Par conséquent, si la droite a participé au terrorisme intellectuel, c’est passivement, en n’apportant pas de réponse de fond aux idées fausses, en ignorant les enjeux concrets qui existent derrière les questions intellectuelles.

    Comment le « terrorisme intellectuel » a-t-il évolué entre 2000, année de la première édition de votre livre, et aujourd’hui ? Quels sont ses nouveaux avatars et que disent-ils de notre époque ?
    Sur le plan idéologique, nous avons assisté à une forte accentuation des questions dites sociétales dans le sens d’un bouleversement des repères anthropologiques traditionnels (mariage pour tous, PMA, transition de genre, etc.), et à l’apparition, au sein de la nébuleuse du wokisme, d’un courant explicitement racialiste et communautaire (l’islamo-gauchisme). Pour le reste, la dominante idéologique n’a pas varié. Ce qui est nouveau, c’est la démultiplication des moyens de communication (naissance des chaînes d’information en continu, développement du tout écran et notamment du téléphone mobile que tout le monde a sur soi et qui est à la fois un poste de radio, un téléviseur et un ordinateur connecté à Internet). Nouveauté également, l’invention, au début des années 2000, des réseaux sociaux, devenus depuis un phénomène massif. Autant de canaux qui, aspect positif, sont des moyens d’expression pour la pensée libérée du politiquement correct, mais aussi, versant négatif, autant de portes d’entrée du terrorisme intellectuel. Les réseaux sociaux, par ailleurs, qui cultivent la polémique et la petite phrase qui feront du buzz mais qui peuvent aussi déboucher sur des procès car nous assistons à une judiciarisation croissante du débat d’idées, ne sont guère une école de formation des esprits. Dès lors qu’ils existent, il faut les utiliser, mais à bon escient, sans jamais en être prisonnier.

    Voyez-vous un signe d’espoir ?
    Oui, parce que des brèches ont été ouvertes, depuis une quinzaine d’années, dans la citadelle du politiquement correct, et que les plus anciens combattants ont été rejoints par une jeune génération brillante. C’est un progrès, mais cela ne signifie pas que la bataille est gagnée.

    Propos recueillis par Christophe Geffroy

    Jean Sévillia, Les habits neufs du terrorisme intellectuel, préface de Mathieu Bock-Côté, Perrin, 2025, 414 pages, 23 €.