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Histoire - Page 74

  • Répondre à la "cancel culture" par la transmission et l'enracinement

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    De Véronique Jacquier sur le site de France Catholique :

    «  Répondre par la transmission et l’enracinement  »

    26 juillet 2021

    L’historien Jean-Christian Petitfils fustige une «  cancel culture  » qui se répand jusque dans l’Université et rappelle l’importance de la transmission et de l’enracinement. Entretien.

    Quel regard l’historien que vous êtes porte-t-il sur la «  cancel culture  » ?

    Jean-Christian Petitfils : Initiée en France après la mort tragique de George Floyd en mai 2020 par des associations antiracistes ou des groupuscules de «  défense noire africaine  », la campagne passionnelle et outrancière destinée à abattre les statues, à débaptiser les lycées, les places et les rues portant le nom de grands hommes de notre Histoire, soupçonnés d’esclavagisme ou de colonialisme, est au cœur de cette «  culture de l’effacement  » qui se répand dans le monde occidental.

    Dans ce délire idéologique, où le souci de la vérité historique ne pèse pour rien, on ne sait trop lesquels sont le plus à blâmer, indigénistes, ultra-féministes, militants antiracistes et décoloniaux, islamo-gauchistes, qui ne rêvent que de déconstruire l’histoire de notre pays, ou les hommes politiques et les édiles tétanisés qui mettent genou à terre et se prêtent complaisamment aux injonctions terroristes des discours antiblancs.

    Y a-t-il des statues qu’il serait légitime de déboulonner ?

    Sans doute a-t-on exalté par le passé des individus qui ne le méritaient guère. Le mieux dans ce cas est de condamner leurs statues à l’oubli plutôt que d’agir «  à chaud  » sous l’injonction des manipulateurs. Sinon, où arrêter le curseur ? Quelles victimes choisir ? Jeanne d’Arc, récupérée par l’extrême droite ? Jean-Baptiste Colbert, pour avoir ordonné la rédaction du Code noir ? Louis XIV, pour l’avoir signé ? Voltaire, pour son antijudaïsme enragé ? Napoléon, pour avoir rétabli en 1802 l’esclavage en Guadeloupe et à Saint-Domingue ? Le maréchal Bugeaud, partisan et acteur de la «  terre brûlée  » en Algérie ? Le colonialiste Jules Ferry pour son mépris des «  races inférieures  » ? Charles de Gaulle, qualifié intensément «  d’esclavagiste  » et dont des statues ont été vandalisées ?

    Quels sont les précédents dans l’histoire ?

    Ces précédents, très nombreux, semblent constitutifs de l’histoire de l’humanité. Certains pharaons n’ont-ils pas fait marteler les effigies et les cartouches de leurs prédécesseurs ? Les chrétiens n’ont-ils pas détruit, pour la bonne cause disaient-ils, les idoles païennes, sans se soucier de la culture des peuples indigènes ?

    Faut-il rappeler aussi la grande crise iconoclaste de l’empire romain d’Orient, à partir de Léon III l’Isaurien (VIIIe siècle), qui, interprétant strictement l’interdit biblique de toute image divine, ordonna la destruction massive des icônes du Christ et de la Vierge. Cette crise dura plus d’un siècle.

    La fureur iconoclaste reprit – avec quelle âpre intensité ! – dans l’Europe du XVIe siècle au moment de la Réforme. La déprédation de l’art statuaire catholique s’accompagna de nombreux massacres. Durant les guerres de Religion, le mouvement s’intensifia en France, chaque camp cherchant à éliminer l’autre par la pierre renversée et le sang versé.

    Sous la Révolution, l’abbé Grégoire créa un mot pour dénoncer le phénomène : «  le vandalisme  ». Par fanatisme idéologique, haine de la religion ou de la monarchie, on détruisit des églises, des chapelles, on incendia des châteaux, on abattit des statues de rois, de princes, d’évêques, on vida jusqu’aux tombeaux royaux de Saint-Denis… «  Du passé faisons table rase  », clamera plus tard l’Internationale.

    Plus près de nous, le monde garde en mémoire les sinistres exactions de la Révolution culturelle chinoise, la destruction en 2001 des bouddhas de Bâmiyân en Afghanistan ou la démolition en 2012 des mausolées de Tombouctou au Mali. Personne, en revanche, ne pleure le déboulonnage des statues des dictateurs : Hitler, Staline, Mao, Ceausescu, Saddam Hussein… Heureusement.

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  • Les tentations totalitaires au cœur des sociétés occidentales

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    D'Anne-Laure Debaecker sur le site "Pour une école librte au Québec" :

    Culte du progrès, croyance au sens de l'histoire, volonté de transformation : tentations totalitaires au cœur des sociétés occidentales

    26 juillet 2021

    Ryszard Legutko a vécu une partie de son existence dans la Pologne communiste. Professeur de philosophie et éditeur d’une revue clandestine, il a expérimenté le fonctionnement d’un régime totalitaire dans ses aspects les plus concrets. Après la chute du mur et le retour de la liberté, il fut stupéfait de voir les ex-communistes s’adapter bien mieux que les anciens dissidents à la démocratie libérale et aux affaires. Il voulut comprendre les raisons de cette étonnante compatibilité.

    En étudiant dans les détails les évolutions récentes de la démocratie libérale, il a découvert qu’elle partage en fait de nombreux traits inquiétants avec le communisme. Culte du « progrès », certitude qu’il existe un « sens de l’Histoire », volonté de transformer la société en luttant contre les adversaires de « l’émancipation et de l’égalité », soumission du suffrage populaire à des instances élitaires non élues, et aboutissement dans les deux cas, derrière le discours de la tolérance, à l’incapacité à tolérer aucune opinion contraire.

    À l’heure où, dans les démocraties occidentales, nombre d’électeurs sentent qu’ils ne sont plus vraiment maîtres de leurs choix politiques et qu’ils doivent même censurer leurs propres opinions, cet ouvrage permet, en remontant le fil des changements récents, d’identifier clairement les erreurs commises et les solutions pour les réparer.

    Professeur de philosophie, ancien ministre de l’Éducation en Pologne et député européen, il a répondu ci-dessous aux questions d’Anne-Laure Debaecker de Valeurs Actuelles.

    Anne-Laure Debaecker. — Votre étude porte sur un sujet peu abordé : les similitudes entre les régimes démocratiques et communistes. Qu’est-ce qui vous a poussé à entreprendre cette enquête ?

    Ryszard Antoni Legutko. — Plusieurs choses m’y ont poussé. La première impulsion était une observation selon laquelle les anciens communistes, après l’effondrement du régime, se sont non seulement transformés du jour au lendemain en démocrates libéraux exemplaires, mais ils ont aussi été accueillis comme des partenaires et amis fiables par les démocrates libéraux, alors que les conservateurs des partis postcommunistes étaient considérés de façon assez hostile.

    Puis, lorsque je me suis engagé dans la politique européenne, j’ai découvert à ma grande consternation que le pluralisme politique était une imposture. Le pouvoir est entre les mains d’un courant politique résolument de gauche et les soi-disant partis conservateurs ne sont plus conservateurs et ont accepté l’ordre du jour de gauche. Pour donner un exemple, le mariage homosexuel a été introduit par les socialistes en France, par les conservateurs en Grande-Bretagne et par les chrétiens-démocrates en Allemagne. Il y a une hégémonie politique et idéologique et quiconque s’oppose au courant dominant est ostracisé, intimidé et parfois puni par la loi. Nous voyons l’émergence de la censure et le politiquement correct est en train de devenir féroce. Il ne s’agit pas seulement du fanatisme de groupes marginaux, mais de la position officielle du courant dominant, c’est-à-dire un large spectre allant de la gauche à la soi-disant droite. Ce politiquement correct n’aurait pas émergé dans un environnement social véritablement diversifié.

    — Certains pourraient vous rétorquer qu’il n’y a pas de comparaison possible entre un régime autoritaire et liberticide tel que le communisme et le régime démocratique, garant des libertés…

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  • Le pontificat du pape François marque la fin définitive des formes cultuelles catholiques héritées de l'empire romain

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    De Vincent Petit (*) sur le site "Front Populaire" :

    La liturgie selon le pape François : la fin de l’Empire romain ?

    OPINION. La récente décision du pape de restreindre la possibilité de célébrer la messe selon les missels antérieurs à Vatican II, en opposition avec la volonté de son prédécesseur, marque le déclin des formes cultuelles catholiques et un tournant civilisationnel.
    La liturgie selon le pape François : la fin de l’Empire romain ?

    22 juillet 2021

    Le pape François a promulgué le 16 juillet 2021 lemotu proprio (le mot désigne une décision prise directement par le pape) Traditionis Custodes (« gardiens de la tradition »), qui abroge celui qu’avait édité Benoît XVI le 7 juillet 2007 intitulé Summorum Pontificum cura(« la sollicitude des Souverains Pontifes »). La symétrie inverse des textes et des méthodes est frappante, puisque les deux textes qui concernent le même objet sont accompagnés d’une lettre aux évêques expliquant la démarche du pape.

    La décision de Benoît XVI consistait à favoriser l’usage du rite traditionnel dit de saint Pie V — ses partisans emploient aussi volontiers la référence à saint Jean XXIII, puisqu’ils utilisent les livres liturgiques révisés pour la dernière fois en 1962, et pour montrer qu’ils ne sont pas nécessairement hostiles aux décisions du concile Vatican II —, aux livres liturgiques édités sous le pontificat de Paul VI, après le concile. Les deux façons de célébrer la messe procédaient donc d’un même rite romain sous deux formes légitimes, la forme ordinaire (celle de Paul VI) et la forme extraordinaire (celle de Jean XXIII). Une forme extraordinaire remarquable par l’emploi du latin et du grec dans l’ordo missae (la partie invariable de la messe), l’orientation du célébrant dos aux fidèles (puisque tous sont tournés vers l’est) et la communion à la bouche et non à la main.

    Le processus de réhabilitation de la forme traditionnelle, entamé par Jean Paul II s’accompagnait d’une critique généralement féroce des pratiques liturgiques post-conciliaires. Au-delà d’un objectif circonstanciel, celui de vider le schisme lefebvriste de sa substance et de ses forces vives, le principal résultat recherché par Jean-Paul II et surtout Benoît XVI visait à ramener la forme ordinaire à davantage de sacralité en la confrontant à tradition liturgique de l’Église romaine. Summorum pontificum avançait surtout la garantie pour les fidèles « attachés à la tradition liturgique antérieure » de faire droit à leurs revendications face aux curés et même aux évêques qui étaient tenus de leur proposer des solutions : soit en permettant aux prêtres de célébrer sous les deux formes, soit en faisant appel à des communautés de prêtres ou de religieux spécialisées qui relèvent de la commission pontificale Ecclesia Dei, comme la Fraternité sacerdotale Saint-Pierre, l’Institut du Christ Roi Souverain Prêtre, l’Institut du Bon-Pasteur…

    L’Église du pape François : entité unitaire et mondialisée

    Quant à elle, la décision du pape François, motivée avant tout par un souci d’unité et de communion de l’Église, annule donc ces dispositions et définit les livres liturgiques édités par Paul VI et révisés par Jean-Paul II « comme la seule expression de la lex orandi du rite romain ». Il le fait logiquement en liant la réforme de la liturgie aux décisions conciliaires — en citant les constitutions Sacrosanctum Concilium (sur la liturgie) et Lumen gentium (sur l’Église) — alors que Benoît XVI s’était attaché à distinguer une temporalité liturgique autonome. L’obligation de la langue vernaculaire (mais s’agit-il pour autant de la langue nationale ?) dans la proclamation des lectures est soulignée, alors même que c’est surtout l’ordo missae, en particulier le canon, en latin et à voix basse, qui importe surtout aux traditionalistes.

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  • Michel Onfray: «La messe en latin, un patrimoine liturgique»

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    L’écrivain et philosophe Michel Onfray, bien qu’athée, voit dans l’Église catholique et ses rites le pouls de notre civilisation. Sur le site web « Figarovox », il explique pourquoi la décision du pape François de restreindre la messe en latin le consterne :

    Onfray XVM758ecdae-e7dc-11eb-b533-6f01ee28fb44.jpg« Je suis athée, on le sait, mais la vie de l’Église catholique m’intéresse parce qu’elle donne le pouls de notre civilisation judéo-chrétienne bien mal en point. Car si Dieu n’est pas de mon monde, mon monde est celui qu’a rendu possible le Dieu des chrétiens. Quoi qu’en disent ceux qui pensent que la France commence avec la Déclaration des droits de l’homme, ce qui est aussi stupide que de croire que la Russie est née en octobre 1917, le christianisme a façonné une civilisation qui est la mienne et dont j’estime que je peux l’aimer et la défendre sans battre ma coulpe, sans avoir à demander pardon pour ses fautes, sans attendre une rédemption après confession, contrition et agenouillement. C’est fou comme ceux qui répugnent au christianisme en disant qu’il n’a pas eu lieu s’en trouvent imprégnés comme de rhum le baba que l’on sait!

    Benoît XVI fut un pape philosophe formé à l’herméneutique et à la phénoménologie allemande. Il a également lu les auteurs catholiques français dans le texte. Son Jésus de Nazareth (2012) s’inscrit dans l’histoire de l’idéalisme allemand, notamment de l’hégélianisme qu’on dit de droite pour le distinguer de celui qui, dit de gauche, conduit au jeune Marx.

    Le pape François n’est pas de ce niveau théologique, loin s’en faut. Mais il ne manque pas de la rouerie jésuitique qui fait que, venant de la Compagnie de Jésus, il choisit pour nom de souverain pontife celui qui se trouve le plus à l’opposé des intrigues et des antichambres du pouvoir où les jésuites aiment à se trouver, à savoir celui de François d’Assise. Jorge Mario Bergoglio, chimiste de formation, vient du péronisme ; Joseph Ratzinger, théologien de formation, de l’antinazisme.

    À mes yeux, l’acte majeur du pape Benoît XVI a été le discours de Ratisbonne où, le 12 septembre 2006, dans l’université allemande où il a été professeur, il a fait son travail de pape en estimant que le christianisme et l’islam entretiennent par les textes une relation antinomique, notamment sur l’articulation entre foi et raison, mais également sur la question de la violence en général et sur celle du djihad en particulier. Je dis par les textes car c’était ici son souci, il présentait en effet l’exégèse personnelle d’un dialogue situé au début du XV siècle entre l’empereur Byzantin Manuel II Paléologue et un érudit persan. L’invitation à réfléchir sur cette question fut prise pour une insulte planétaire faite à l’islam…

    L’acte majeur du pape François est, toujours selon moi, de s’être fait photographier devant un crucifix sur lequel Jésus porte le gilet de sauvetage orange des migrants. C’est ici l’icône triomphante de Vatican II qui congédie tout sacré et toute transcendance au profit d’une moraline tartinée de façon planétaire comme une gourmandise de scout.

    C’est selon cette logique qu’il faut comprendre la décision du pape François d’abroger, disons-le dans un terme profane, la décision prise par Benoit XVI de permettre la messe en latin, dite messe Tridentine, pour ceux qui le souhaitent. Dans Summorum pontificum, Benoît XVI libéralisait la messe dite de Pie V. Dans Traditionis custodes, François efface cette libéralité. Benoît XVI voulait dépasser le schisme avec les traditionalistes, François va le restaurer en prétextant bien sûr, jésuite un jour, jésuite toujours, qu’il entend de cette façon réunir ce qu’il sépare. Les vocations chutent avec Vatican II. Mais les religieux qui conservent le rite latin ne connaissent pas la désaffection,mieux, ils remplissent les séminaires. Le pape François préfère les églises vides avec ses thèses que pleines avec celles de Benoît XVI.

    Séparer n’est-ce pas la fonction dévolue… au diable? L’étymologie témoigne. Si j’avais la foi catholique, je ne pourrais m’empêcher de penser à l’Épître de Jean qui dit: «Tout esprit qui divise Jésus-Christ n’est point de Dieu ; et c’est là l’Antéchrist, dont vous avez entendu dire qu’il doit venir ; et il est déjà maintenant dans le monde.» (I.4:3).

    Ce qui se joue dans cette affaire, c’est la suite de Vatican II, autrement dit l’abolition du sacré et de la transcendance. La laïcisation du rite réduit à une liturgie dont La vie est un long fleuve tranquille a montré toute la puissance avec son curé cool qui joue de la guitare et chante bêtassement «Jésus, Jé-é-é-é-sus, reviens». On peut préférer le chant grégorien sans être pour autant un nostalgique de Vichy…

    Or le génie du christianisme, les différents conciles sur la possibilité ou non de figurer le christ témoignent, a été de rendre possible une civilisation de l’allégorie, de la symbolique,de la métaphore. Le génie juif se trouve dans l’herméneutique,celui du christianisme dans l’explication des paraboles. Les juifs inventent l’herméneutique pour les plus savants, les rabbins lecteurs de la kabbale ;les chrétiens élaborent l’herméneutique populaire, pour les fidèles à qui l’on raconte des histoires à déchiffrer avec l’histoire sainte. Notre civilisation de l’image, de la raison explicative, de la philosophie séparée de la théologie, procède de ce monde-là.

    La messe en latin est le patrimoine du temps généalogique de notre civilisation. Elle hérite historiquement et spirituellement d’un long lignage sacré de rituels, de célébrations, de prières, le tout cristallisé dans une forme qui offre un spectacle total - un Gesamtkunstwerk,pour utiliser un mot qui relève de l’esthétique romantique allemande.

    Pour ceux qui croient en Dieu, la messe en latin est à la messe du Long fleuve tranquille, celle que semble affectionner le pape François, ce qu’est la basilique romaine contemporaine de saint Augustin à une salle polyvalente dans une barre d’immeubles à Aubervilliers: on y chercherait en vain le sacré et la transcendance. Quelle spiritualité dans ces cas-là?

    Disons-le de façon énigmatique, le pape François fait bien ce pour quoi il est là où il se trouve… Ajoutons d’une façon tout aussi énigmatique, mais pas tant que ça, qu’on se demande pourquoi nous vivons dans une époque avec deux papes. »

    Ref.Michel Onfray: «La messe en latin, un patrimoine liturgique»

     Pas si énigmatique que cela, lorsqu'on repense aux « prophéties » sociologiques du philosophe Auguste Comte…

    JPSC

  • Quand triomphe "l'esprit bourgeois"

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    De Bernard Dumont sur le site de la Revue Catholica :

    Numéro 152 : Le triomphe de l’esprit bourgeois

    11 Juil 2021

    Pour l’Encyclopaedia Universalis, la modernité « n’est ni un concept sociologique, ni un concept politique, ni proprement un concept historique. C’est un mode de civilisation caractéristique, qui s’oppose au mode de la tradition, c’est-à-dire à toutes les autres cultures antérieures ou traditionnelles »[1]. C’est pourquoi la modernité fait l’objet d’expressions multiples, éventuellement contraires (par exemple, l’omnipotence de l’État et l’anarchisme, austérité socialiste et société de consommation, nationalisme et internationalisme) mais fondamentalement associées entre elles par cette négation initiale. Et cette conception n’est pas une abstraction avançant toute seule dans le temps. Elle est portée historiquement par une avant-garde d’intellectuels, de groupes d’influence, de grands chevaliers d’industrie, de managers, de politiciens exerçant une fonction motrice, avec l’acquiescement progressif des masses qu’elle réussit à faire entrer dans son jeu.

    Si l’on pense spontanément au rôle joué par les philosophes des Lumières, on ne peut oublier la classe sociale dans laquelle Marx a vu l’activateur de l’évolution historique conduisant, par contradictions ultérieures, à l’émancipation totale de l’humanité, en l’espèce, la bourgeoisie, au sens économique du terme. Dans une première partie (« Bourgeois et prolétaires »), le Manifeste communiste (1847), suivant sa logique matérialiste, présente la catégorie sociale des marchands et l’ascension de sa puissance liée à la maîtrise des affaires et, plus encore, de la technique. Il décrit sa progressive appropriation du pouvoir politique, dans des termes qui aujourd’hui ne manquent pas de sel : « Le gouvernement moderne n’est qu’un comité qui gère les affaires communes de la classe bourgeoise tout entière. » Mais c’est surtout le long éloge de cette classe qui retient l’attention : « La bourgeoisie a dépouillé de leur auréole toutes les activités qui passaient jusque-là pour vénérables et qu’on considérait avec un saint respect. Le médecin, le juriste, le prêtre, le poète, le savant, elle en a fait des salariés à ses gages. » « La bourgeoisie ne peut exister sans révolutionner constamment les instruments de production, ce qui veut dire les rapports de production, c’est-à-dire l’ensemble des rapports sociaux. » Elle a secoué la « rouille » de l’économie traditionnelle, elle a créé des « merveilles » plus splendides que les Pyramides, et finalement dominé la planète entière. « Tout ce qui avait solidité et permanence s’en va en fumée, tout ce qui était sacré est profané, et les hommes sont forcés enfin d’envisager leurs conditions d’existence et leurs rapports réciproques avec des yeux désabusés. » Marx annonce la disparition des cultures nationales, et ce que l’on n’appelait pas encore la mondialisation, dans la pure logique de ce triomphe de la matière[2].

    Et pourtant, selon le Manifeste, « les conditions bourgeoises de production et d’échange, le régime bourgeois de la propriété, la société bourgeoise moderne […] ressemblent au magicien qui ne sait plus dominer les puissances infernales qu’il a évoquées ». Après avoir joué son rôle destructeur de la société traditionnelle, la bourgeoisie est donc censée entrer en crise fatale, au profit de la révolution prolétarienne qu’elle. aura suscitée. Obnubilé par sa conception millénariste (quoique matérialiste) de la révolution – sa prophétie du « royaume de la liberté » – Marx n’a pas entrevu la possibilité que celle-ci « s’ossifie » un jour comme la société traditionnelle dont il proclamait la déchéance.

    Avant de poursuivre, remarquons que dans la conception de Marx, c’est l’activité technique des acteurs économiques et son évolution qui sont mises en évidence, mais l’esprit qui les inspire est exclu de. la considération, puisqu’il est censé n’être que l’image inversée de leur conduite matérielle[3]. Or la bourgeoisie, avant même la possession des richesses matérielles et leur désir, par une manière de concevoir la vie, un état d’esprit commun à tous ceux qui se pensent et se comportent comme l’avant-garde de la modernité, laquelle aspire, comme on l’a dit, à rompre avec tout ce qui peut évoquer la tradition. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il est plus judicieux de parler d’esprit bourgeois, ou encore de bourgeoisisme, disposition qui peut se rencontrer non seulement chez les éléments moteurs du système économique moderne et ses très riches bénéficiaires, mais aussi dans des couches nettement moins à l’aise de la société, mais partageant en fait les mêmes désirs ; et de même, aussi bien dans les partis de la droite conservatrice qu’au sein du socialisme révolutionnaire. Par ailleurs, et pour cette même raison, il faudrait se garder de confondre bourgeoisie et classes moyennes, justement parce que celles-ci sont loin d’avoir toujours partagé l’ensemble des aspirations « bourgeoisistes », même si une lente érosion a tendu toujours plus à les voir s’aligner sur les « nouvelles valeurs » en matière d’hyper-consommation, de situations familiales « libérées », d’athéisme pratique.

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  • Il y a 80 ans : les trois sermons courageux de Mgr von Galen, le cardinal antinazi

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    D'Elisabeth Caillemer sur le site de Famille Chrétienne :

    Les trois sermons courageux de Mgr von Galen, l'évêque antinazi

    Les trois sermons courageux de Mgr von Galen, l'évêque antinazi
    U.BILD-AKG IMAGES

    C’est une idée tenace, propagée par une pièce de théâtre, Le Vicaire, sortie en 1963, puis adaptée quarante ans plus tard au cinéma par Costa Gavras (1). L’Église catholique aurait dit « amen » au régime nazi. Parmi d’autres, le parcours du cardinal allemand Clemens August von Galen témoigne pourtant du contraire. Le New York Times ne lui décernait-il pas d’ailleurs, en 1942, le titre d’« opposant le plus obstiné au programme national-socialiste antichrétien » ? Et c’est pour cette même raison que celui qu’on surnommait le « Lion de Münster » fut mis au rang des bienheureux le 9 octobre 2005 par le pape Benoît XVI saluant un défenseur « des droits de Dieu, de l’Église et de l’homme, que le régime nazi violait de façon grave et systématique, au nom d’une aberrante idéologie néopaïenne ». Une vie édifiante qui, si elle contribue quand même à rétablir l’honneur de l’Allemagne et de l’Église catholique, nous offre également un « modèle de foi profonde et intrépide », pour reprendre les termes de Benoît XVI. Un exemple rattaché aux trois sermons mémorables prononcés par le prélat à l'été 1941.

    Premiers écrits contre le néopaganisme

    Clemens August von Galen naît en 1878 au sein d’une famille aristocrate westphalienne catholique pour qui « la noblesse n’a d’existence et de justification que par sa vocation au service du Bien Public, comme clef de voûte d’une société cohérente et tournée vers Dieu ». Il est le onzième de treize enfants. Son père est député du Zentrum (le parti catholique) au Parlement impérial allemand, et son arbre généalogique est parsemé d’hommes d’Église. La foi catholique constitue l’ADN des von Galen. « Les premières années de Clemens August furent le moment de sa vie où se fixa la vision de son existence, avec un point de fuite unique, irremplaçable, évident : le Ciel et son Christ », écrit Jérôme Fehrenbach. Entouré de parents très pieux, pensionnaire chez les Jésuites, il décide de consacrer sa vie à Dieu et est ordonné prêtre en 1904.

    Après avoir exercé son ministère à Berlin il est nommé à Münster en 1929. « Il sait que dans cette Allemagne secouée par la Grande Guerre, l’identité chrétienne est en jeu », écrit Fehrenbach. Dans un opuscule paru en 1932, Le Fléau du laïcisme, le curé de Münster dénonce la déchristianisation de la société, terreau d’un néopaganisme qu’il voit poindre. Il est l’un des premiers à dénoncer la politique du parti nazi qui commence à séduire l’Allemagne, catholiques compris, attirés par l’anticommunisme d’Hitler« Je crains, écrit-il, que des catholiques égarés par l’apparence du bien et du bon, contaminés par une opinion publique fondamentalement antichrétienne, et plus encore non-catholique, ne soient victimes d’erreurs fatales. »

    Il s’oppose à l’extermination des personnes handicapées

    En 1933, Clemens August est sacré évêque. Sa devise, « Nec laudibus, nic timore » (« Ne se laisser influencer ni par la peur, ni par la flatterie ») sera sa ligne de conduite. Sa voix contestataire s’élève à proportion de la progression de l’idéologie nazie. En 1934, il signe courageusement la préface d’un livre attaquant Le mythe du XXIe siècled’Alfred Rosenberg, un des théoriciens du IIIe Reich. Un condensé de cette préface est lu dans toutes les églises du diocèse. Von Galen se pose publiquement en combattant du nazisme. Face à sa détermination, le ministre des Cultes renoncera même à supprimer les croix dans les établissements scolaires. Convoqué à Rome par le pape Pie XI, il participe à la rédaction de l’encyclique Mit Brennender Sorge destinée à « éveiller les réflexions de ceux qui ont déjà commencé à se laisser prendre aux appâts et aux menaces des adversaires du Christ et de son Évangile ». À son retour, il reprend son apostolat devant une foule de plus en plus nombreuse à venir l’écouter prêcher et parmi laquelle, il le sait pertinemment, se mêlent des membres de la Gestapo qu’il n’hésite pas qualifier d’« ennemis du peuple ».

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  • L'Eglise en procès; des historiens répondent

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    De Jean-Pierre Bédéï sur Hérodote.net :

    L’Église en procès

    La réponse des historiens

    7 juillet 2021

    L'Histoire bimillénaire de l'Église est régulièrement l'objet de controverses et de polémiques sans grand rapport avec les faits. Sous la direction de Jean Sévillia, des historiens se sont attachés à rétablir un certain nombre de vérités dans un ouvrage, L'Église en procès (Texto Tallandier), qui face à une « persistante légende noire » n'entend pas pour autant légitimer « la bienveillante légende dorée qui dissimule les faiblesses, les fautes et parfois, malheureusement, les crimes commis par les hommes d'Église. »

    En dix-huit chapitres, autant d'historiens tentent de relever ce pari d'une vision équilibrée, depuis les preuves de l'existence de Jésus jusqu'au scandale des prêtres pédophiles. Les croisades, l'Inquisition, les guerres de religion, l’épopée des Conquistadors, la colonisation, l'antisémitisme, l'argent du Vatican, les confrontations entre le pouvoir politique et le pouvoir religieux, tels sont les autres principaux thèmes abordés.

    De ce kaléidoscope à travers les siècles, on retiendra l'excellent chapitre d'Olivier Hanne intitulé « une papauté avide de pouvoir ? » L'auteur y retrace de manière fort instructive les relations conflictuelles entre la papauté et les différents souverains. Si Pépin le Bref se montra "un auxiliaire zélé de l'Église", en revanche, sous le règne de Charlemagne « la mise sous tutelle de l'Église fut sans précédent, et la soumission du clergé totale, jusqu'à pousser le roi à définir la mission du pape sur terre. »

    L'Église réagit grâce à un vaste mouvement rénovateur, la « réforme grégorienne » dont Grégoire VII (1073-1085) fut le grand artisan qui s'opposa à ce que les évêques tiennent leur autorité du pouvoir monarchique. « Ainsi bien avant la séparation de 1905, le principe de l'autonomie des pouvoirs séculier et spirituel était acquis, et ce en raison de l'insistance de la papauté », observe l'auteur.

    Et quand le pape Boniface VIII (1294-1303) crut qu'en tant que seul représentant du Christ, il pouvait juger les rois, Philippe le Bel « le fit déclarer hérétique et schismatique par une assemblée de prélats français. » Ainsi, déjà au Moyen-Age, émergeaient les prémisses de la laïcité.

    Dans le chapitre sur les Croisades, Martin Aurell, rappelle à juste titre que « la croisade est un pèlerinage pénitentiel vers la Terre sainte, mais en armes. » et « qu’il n’est pas tant une guerre sainte » qu’une « guerre sanctifiante » puisque le pape Urbain II assurait aux expéditionnaires qu’ils seraient lavés de leurs péchés et qu’ils gagneraient la vie éternelle.

    Avec la croisade -cette appellation n’existait pas à l’époque-, « l’idée puis la notion même d’indulgence plénière apparaît en Occident », observe l’auteur. La croisade devait même accélérer la Parousie (le retour du Christ), grâce à la libération des Lieux saints appelés à revenir sous domination chrétienne après leur occupation « par la seule violence d’un islam conquérant ».

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  • Quand Hitler s'évertuait à détruire l'Eglise catholique de Pologne

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    De Filip Mazurczak sur le Catholic World Report :

    The Polish Catholic Church under German Occupation: The Reichsgau Wartheland,  1939-1945 (English Edition) eBook: Huener, Jonathan: Amazon.fr

    Un récit puissant de l'effort d'Hitler pour détruire l'Église catholique polonaise

    L'ouvrage de Jonathan Huener, The Polish Catholic Church Under German Occupation, démontre de manière convaincante que les affirmations selon lesquelles le Troisième Reich était en bons termes avec l'Église catholique ne sont que des fantasmes à caractère idéologique.

    7 juillet 2021

    La nouvelle étude de Jonathan Huener, The Polish Catholic Church Under German Occupation : The Reichsgau Wartheland, 1939-1945 est un ajout précieux à la discussion sur la relation entre le nazisme et le christianisme. L'impact du livre est parfois limité par le fait que son auteur se plie à certains aspects du politiquement correct qui domine dans le monde universitaire d'aujourd'hui. Néanmoins, il s'agit d'un compte rendu puissant de la manière dont l'Allemagne nazie a mené une politique impitoyable de dommages corporels et matériels immenses pour le catholicisme polonais dans le Warthegau, les territoires de l'ouest de la Pologne qui ont été directement annexés par le Troisième Reich, sans toutefois parvenir à éteindre la foi de nombreux catholiques, laïcs et clercs, qui y vivaient.

    Le "Gau modèle

    Après que l'Allemagne nazie eut envahi la Pologne le 1er septembre 1939, précipitant ainsi le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, elle divisa le pays en plusieurs unités administratives. La majeure partie du centre, du sud et - après l'invasion de l'Union soviétique par l'Allemagne nazie en 1941 (faisant ainsi passer sous sa juridiction des régions qui étaient sous occupation soviétique depuis 1939) - du sud-est de la Pologne devint le Gouvernement général, un territoire colonial, gouverné par Hans Frank. Frank, qui était l'avocat personnel d'Hitler, sadique et corrompu (le GG était surnommé Gangster Gau), a effrontément fait du château de Wawel à Cracovie, résidence des monarques polonais depuis des siècles et sanctuaire de la nation polonaise cher au cœur de chaque Polonais, sa maison.

    Pendant ce temps, les régions restantes du nord et de l'ouest de la Pologne d'avant-guerre, sur lesquelles les Allemands prétendaient avoir des droits historiques, furent transformées en Gaus, ou unités administratives du Troisième Reich. Les politiques de germanisation y sont les plus brutales. Parmi eux se trouve le Reichsgau Wartheland ou Warthegau, qui comprend la majeure partie de la Grande Pologne et les régions de Lodz.

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  • Les Martyrs de Gorcum (Gorinchem) (9 juillet)

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    De La Porte Latine :

    Les Martyrs de Gorcum

    8 juillet 2021
    Représentation des Martyrs de Gorcum. Peinture de Cesare Fracassini (1838-1868) exposée au Vatican.

    Dix neuf religieux furent victimes en Hollande des protestants « Gueux de mer », plus cruels encore que les Turcs infidèles.

    Ces saints martyrs sont fêtés le 9 juillet.

    Depuis 1566 la révolte des Gueux embrase les Pays-Bas. Menée par Guillaume le Taciturne, prince d’Orange, celle-ci mêle l’expansion du protestantisme et une opposition politique au roi d’Espagne. Le 1er avril 1572, des protestants partisans du prince d’Orange chassés d’Angleterre débarquent en Hollande dans le port de Brielle. Ce fut le début du soulèvement des provinces calvinistes du Nord au cours de laquelle les Gueux s’illustrèrent par d’innombrables horreurs et cruautés. Dès le 26 juin 1572, Les Gueux de mer encerclent la ville de Gorcum[1]. Les assiégés répondent de leur mieux ; mais la disproportion des forces est trop évidente, la citadelle n’est guère en état d’opposer une longue résistance. Le gouverneur propose de rendre la ville ; le chef des Gueux accepte les conditions de la capitulation : Marin s’engage à ne faire aucun mal à ceux qui sont réfugiés dans la citadelle, soit laïques, soit ecclésiastiques, et à les renvoyer tous libres. Seuls les biens qui s’y trouvent deviendraient la propriété des vainqueurs. Pendant ce temps, les ecclésiastiques et les religieux, qui s’attendent à tout, se confessent les uns aux autres ou entendent les confessions des laïques. Le curé Nicolas Poppel a apporté avec lui les saintes hosties afin de les dérober aux insultes habituelles des hérétiques. Presque tous les réfugiés viennent pieusement recevoir la communion de sa main, semblables à ces premiers chrétiens qui, dans la nuit des prisons, se nourrissaient une dernière fois du pain des forts avant de comparaître dans les amphithéâtres.

    Torturés à Gorcum pour l’unique vraie foi

    Une fois entré avec toute sa troupe, Marin fait réunir dans une salle supérieure toutes les personnes qu’il trouve dans la forteresse et les calvinistes fanatiques se jetent sur les captifs comme des bêtes féroces. Dix-sept prêtres, séculiers et réguliers, ainsi que deux frères lais,[2] sont injuriés, menacés et atrocement torturés. Ils demeurèrent ainsi dix jours et dix nuits à la merci de la soldatesque de la citadelle. C’était surtout le soir qu’ils avaient à souffrir ; l’habitude était si bien prise de venir les injurier et les torturer après le dîner, qu’il semble que la digestion eût été impossible sans cet aimable passe-temps. Quand une partie de ces bourreaux était rassasiée ou plutôt fatiguée, une autre bande prenait la place et recommençait de plus belle.

    Ils appuyèrent également le pistolet sur la poitrine de Nicolas Poppel : « Ton trésor ou la vie ! » lui criaient-ils. Ensuite, leur avarice cédant pour un instant à leur passion de sectaires. « Livre-nous au moins les dieux que tu as fabriqués à la messe : on dit que tu en portes une provision sur toi. Est-ce vrai ? Toi qui as si souvent déblatéré contre nous dans la chaire de ton église, que penses-tu maintenant, en face de ce pistolet, de toutes les sottises que tu débitais aux imbéciles ? » — « Je crois », répondit Nicolas Poppel, « à tout ce que croit et enseigne l’Eglise catholique, apostolique et romaine, et en particulier à la présence réelle de mon Dieu sous les espèces sacramentelles. Si vous voyez là une raison de me tuer, tuez-moi : je serai heureux de mourir à la suite de la confession de foi que vous venez d’exiger ». Mais son sacrifice n’était pas encore consommé ; Dieu, qui voulait ajouter à ses mérites, retint le coup prêt à partir, et le soldat n’osa pas tirer.

    Amenés dans la féroce ville de Brielle

    Au milieu de la nuit du 5 au 6 juillet, les saints confesseurs de la foi se voient éveillés en sursaut, dépouillés de tous leurs vêtements qui ont quelque valeur et jetés dans une grande barque. La nuit est fraîche. En entrant dans la barque, le curé Léonard Wichel reconnait au gouvernail un de ses paroissiens nommé Roch, auquel il avait donné jadis des témoignages particuliers de sa sollicitude : « Eh quoi ! » lui dit-il, « Roch, c’est donc toi qui nous mènes à la mort ? » Le marin baissa la tête et répondit : « Hélas ! » monsieur le curé, « je ne suis pas le maître ! » Le curé n’ajouta aucune observation. Les saints Martyrs, en quittant Gorcum, étaient au nombre de dix-neuf. Il y eut des défections parmi eux, mais les lâches furent exactement remplacés et, par une permission spéciale de la Providence, ce nombre de dix-neuf se maintint complet jusqu’à la consommation du sacrifice.

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  • Le cardinal secrétaire d'État du Vatican a exhorté le Vieux Continent à redécouvrir ses racines chrétiennes

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    De Catholic News Agency :

    Cardinal Parolin : l'Europe a besoin de la foi en Dieu alors qu'elle lutte contre "l'hiver démographique".

    5 juil. 2021

    Le cardinal Pietro Parolin a déclaré dimanche que l'Europe a besoin de la foi en Dieu alors qu'elle est aux prises avec un "hiver démographique".

    Prêchant lors de la messe dans la cathédrale de Strasbourg en France le 4 juillet, le secrétaire d'État du Vatican a exhorté le continent à redécouvrir ses racines chrétiennes. "L'Europe a besoin d'espoir si elle veut mettre fin à l'hiver démographique, qui n'est pas d'abord le résultat d'une crise économique ou sociale, mais de l'affaiblissement de l'espérance et du sens authentique de la vie et de l'existence", a-t-il déclaré. Il a poursuivi : "L'Europe a besoin de la foi en Dieu, qui est Père ; elle a besoin de la confiance dans ses potentialités, notamment spirituelles."

    Ses commentaires font suite à un discours du pape François en mai soulignant le faible taux de natalité de nombreux pays européens. Mgr Parolin célébrait une messe marquant les 1 300 ans de la mort de sainte Odile, patronne de l'Alsace, une région du nord-est de la France bordant l'Allemagne et la Suisse.

    En plus d'être le légat du pape à la célébration de cet anniversaire, le cardinal italien a ordonné Mgr Gilles Reithinger, ancien supérieur général de la Société des Missions étrangères de Paris, comme évêque auxiliaire de l'archidiocèse de Strasbourg.

    Dans son homélie, M. Parolin a souligné l'importance de la charité dans le renouvellement de l'Europe. "L'Europe a besoin de charité, pour mettre au centre de ses préoccupations ceux qui survivent en marge, dans la pauvreté ou dans l'exclusion, et pour gérer le phénomène migratoire avec sagesse et clairvoyance, afin de rendre possible une véritable intégration, qui devienne une source d'opportunités et de fraternité, et écarte le risque de séparations et de douloureux malentendus, spectres d'une culture qui nie que tous les êtres humains sont frères et sœurs, fratelli tutti", a-t-il déclaré, citant le titre de l'encyclique du pape François pour 2020.

    Le cardinal de 66 ans avait initialement prévu de se rendre à Strasbourg l'année dernière, mais il a été contraint d'annuler des voyages en juin et en novembre en raison de la pandémie de coronavirus. Il avait l'intention de visiter la ville située à la frontière franco-allemande pour marquer le 50e anniversaire de la présence du Saint-Siège en tant qu'observateur permanent au Conseil de l'Europe, une organisation de défense des droits de l'homme basée à Strasbourg.

    Il a commencé sa visite de deux jours par une réunion sur le thème de l'Europe. Dans une allocution, il a déclaré que le Saint-Siège avait manifesté "un intérêt fort et vif pour les travaux des institutions européennes" depuis leur création. Il a rappelé la visite de François à Strasbourg en 2014, au cours de laquelle le pape s'était adressé à la fois au Conseil de l'Europe et au Parlement européen, qui siège également dans la ville. "L'Europe est particulièrement chère au pape François, non seulement en raison de ses origines familiales, mais aussi en raison de son rôle central dans l'histoire de l'humanité", a déclaré Mgr Parolin, faisant référence à l'ascendance italienne du pape argentin. "Il souhaite que l'Europe puisse redécouvrir ses racines chrétiennes, en partant de ce chemin de fraternité, qui a sans aucun doute inspiré et animé les Pères fondateurs de l'Europe moderne, en commençant précisément par Robert Schuman", a déclaré le cardinal, mettant en avant l'homme d'État français déclaré "vénérable" par le pape le mois dernier.

    Parolin a déclaré que dans une Europe pluraliste, la tâche de l'Église était d'"élever l'homme" non seulement dans son corps, "mais aussi dans son âme et son esprit." "Sans le respect de l'homme dans sa dignité naturelle et surnaturelle d'être à l'image et à la ressemblance de Dieu, son Seigneur et Créateur, la société ne sera jamais meilleure", a-t-il dit.

  • Témoignage : du goulag à la liberté

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    De Christophe Geffroy sur le site de La Nef :

    Du goulag à la liberté

    Vient de paraître : « Des miradors à la liberté. Un Français-Russe toujours  en résistance » de Nikita Krivochéine (Life éditions) - Orthodoxie.com

    Né à Paris en 1934 dans une famille de la noblesse ayant fui le communisme, Nikita Krivochéine, en 1948, rejoint l’URSS avec ses parents qui pensent retrouver une Russie apaisée, ce qui lui vaudra de connaître le goulag avant de pouvoir revenir en France en 1971. Il raconte cela dans un livre poignant (1).

    La Nef – Vous avez eu un parcours inimaginable, naissance en France, puis départ pour l’URSS où vous connaîtrez le goulag et retour en France : pourriez-vous nous le résumer ?

    Nikita Krivochéine – Le Ciel a été clément, généreux : j’ai pu rentrer en France, m’y bien réintégrer, y faire revenir mes parents, fonder un foyer. Parmi les jeunes émigrés emmenés en URSS après la guerre, ceux qui ont eu cette chance se comptent sur les doigts d’une main. Il m’a été donné de voir de Paris l’effondrement du régime communiste, et cela sans que le sang soit versé ! Une grande vague de règlements de comptes meurtriers était plus que probable. Nous avons survécu en URSS corporellement ainsi que dans notre foi, notre vision. Mais combien de « rapatriés » ont préféré se faire « couleur muraille », se dépersonnaliser pour survivre. Mon retour en France a été et reste un très grand bonheur !

    Pourquoi vos parents sont-ils retournés avec vous en URSS en 1948, alors que le totalitarisme du communisme soviétique était manifeste ?

    Il avait, dans l’après-guerre immédiat, cessé d’être claironné et manifeste. À partir de 1943 Staline constatant que les Russes ne sont pas très chauds pour se faire tuer par la Wehrmacht au « nom du communisme, avenir radieux de toute l’humanité », change de disque et se met à invoquer « la grande Russie », ses militaires, sa culture, rouvre les églises. Il change d’hymne national et renonce à la devise « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! », fait renaître le corps des officiers. Pour, dès 1946, revenir à la répression de l’Église. Il lance en 1949 une très importante vague d’arrestations (dont celle de mon père). Mais pendant la guerre l’illusion d’un renoncement au communisme a fonctionné.

    Lire la suite sur le site de La Nef

    (1) Nikita Krivochéine, Des miradors à la liberté. Un Français-Russe toujours en résistance, Life Éditions, 2021, 192 pages, 22 €.

  • Une brève histoire des catholiques traditionnalistes...

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    ... est retracée par Yves Chiron sur le site de la Nef :

    Brève histoire des traditionalistes

    L’histoire du traditionalisme ne commence pas avec le concile Vatican II. On pourrait remonter à la célèbre exhortation du pape saint Pie X dans la Lettre apostolique condamnant le Sillon, en 1910 : « Les vrais amis du peuple ne sont ni révolutionnaires ni novateurs mais traditionalistes. » Mais depuis le concile Vatican II, le traditionalisme a pris des visages nouveaux et très diversifiés.

    Le terme lui-même est contestable. La dénomination « catholique traditionaliste » est presque un pléonasme, tant il est vrai que tout catholique cohérent doit se reconnaître héritier de la Tradition. Le concile Vatican II (1962-1965), dans la constitution Dei Verbum, a rappelé que par la Tradition reçue des Apôtres « l’Église perpétue dans sa doctrine, sa vie et son culte et elle transmet à chaque génération, tout ce qu’elle est elle-même, tout ce qu’elle croit ».

    Lire la suite sur le site de La Nef