De Joseph Junker sur "Speculooz" :
Charlie Hebdo : Révulsion et Espérance
J’ai été révulsé par l’odieux assassinat de journalistes de Charlie Hebdo et de deux policiers qui a eu lieu ce matin en Paris, la ville-lumière, qui m’est chère. Par cet acte barbare de tuer des innocents, des policiers; par cette atroce exécution de sang-froid un homme au sol, par cet ignoble crime de s’octroyer le droit de tuer son semblable au prétexte qu’on n’a pas su supporter sa parole. Consterné. Atterré. Affligé.
Mais je n’étais pas au bout de mes peines de cette longue journée !
Car j’ai été révulsé ensuite par les tweets complaisants envers cet acte immonde qu’on a pu lire ici et là sur la toile.
Tout comme j’ai été écoeuré des nombreux autres tweets que j’ai lus reprochant aux médias d’inciter à la haine en diffusant le simple fait du cri « le prophète est vengé ».
J’ai détesté la récupération, les généralisations foireuses, les déclarations à l’emporte-pièce, les annonces de guerre civile et autres appels aux armes qui ont émaillé cette journée.
Mais au moins autant que cela, j’ai été outré entendre qu’un militant FN manqua de peu de se faire rouer de coups par des manifestants d’un avis différent – j’imagine venus là pour défendre la liberté d’expression – et imaginer Voltaire se retourner une deuxième fois dans sa tombe la même journée.
J’ai détesté le ton presque jubilatoire de Cassandres de supermarché qui semblaient se féliciter de la justesse de leurs intuitions et d’avoir prédit l’arrivée de ce jour funeste.
Mais au moins autant que cela j’ai détesté l’attitude d’autruche délirante d’une certaine gauche, refusant jusqu’à l’évidence d’accepter de voir dans ce drame la conséquence de l’échec patent de cinquante années de doctrine relativiste, de multiculturalisme bon marché, de clientélisme, de terrorisme intellectuel et d’aveuglement culturel, préférant noyer cet événement sous des analyses ampoulées et émotives et le « padamalgam ». J’ai haï cette impression que en découla, l’espace d’un instant, que 12 hommes sont morts pour rien.
Presque autant d’ailleurs que j’ai détesté la manière dont un caricaturiste belge sur les ondes de la RTBF sanctifie d’un même souffle l’humanisme des provocations de Charlie Hebdo et rejette comme intentionnellement haineuses et fantasmagoriques celles d’un auteur qui n’appartient pas à son propre système de pensée (lequel auteur avait eu l’heur de prédire sans s’en réjouir la possibilité d’un drame tel que celui qui nous consterne aujourd’hui).
