Du pape François sur le site du New York Times :
Le pape François : Une crise révèle ce que nous avons dans le cœur
Pour sortir de cette pandémie mieux que nous n'y sommes entrés, nous devons nous laisser toucher par la douleur des autres.
26 novembre 2020
Au cours de cette dernière année de changement, mon esprit et mon cœur ont débordé de gens. Des gens auxquels je pense et pour lesquels je prie, et avec lesquels je pleure parfois, des gens avec des noms et des visages, des gens qui sont morts sans avoir dit au revoir à ceux qu'ils aimaient, des familles en difficulté, et même qui ont faim, parce qu'il n'y a pas de travail.
Parfois, quand on pense globalement, on peut être paralysé : il y a tant de lieux de conflits apparemment incessants ; il y a tant de souffrances et de besoins. Je trouve qu'il est utile de se concentrer sur des situations concrètes : Vous voyez des visages qui cherchent la vie et l'amour dans la réalité de chaque personne, de chaque peuple. Vous voyez l'espoir inscrit dans l'histoire de chaque nation, glorieux parce que c'est une histoire de lutte quotidienne, de vies brisées dans le sacrifice de soi. Ainsi, plutôt que de vous submerger, elle vous invite à réfléchir et à répondre avec espoir.
Ce sont des moments de la vie qui peuvent être mûrs pour le changement et la conversion. Chacun de nous a connu son propre "arrêt", ou si ce n'est pas encore le cas, ce sera le cas un jour : maladie, échec d'un mariage ou d'une entreprise, grande déception ou trahison. Comme dans l'arrêt Covid-19, ces moments génèrent une tension, une crise qui révèle ce que nous avons dans le cœur.
Dans chaque "Covid" personnel, pour ainsi dire, dans chaque "arrêt", ce qui est révélé est ce qui doit changer : notre manque de liberté interne, les idoles que nous avons servies, les idéologies que nous avons essayé de vivre, les relations que nous avons négligées.
Lorsque je suis tombé très malade à l'âge de 21 ans, j'ai fait ma première expérience de la limite, de la douleur et de la solitude. Cela a changé ma façon de voir la vie. Pendant des mois, je ne savais pas qui j'étais ni si j'allais vivre ou mourir. Les médecins ne savaient pas non plus si j'allais m'en sortir. Je me souviens avoir serré ma mère dans mes bras et lui avoir dit : "Dis-moi juste si je vais mourir". J'étais en deuxième année de formation à la prêtrise au séminaire diocésain de Buenos Aires.
Je me souviens de la date : le 13 août 1957. Un préfet m'a emmené à l'hôpital et s'est rendu compte que ma grippe n'était pas le genre de grippe que l'on traite avec de l'aspirine. Ils m'ont tout de suite retiré un litre et demi d'eau des poumons et je suis resté là, luttant pour ma vie. Le mois de novembre suivant, ils m'ont opéré pour m'enlever le lobe supérieur droit d'un des poumons. J'ai une idée de ce que ressentent les personnes atteintes de Covid-19 lorsqu'elles luttent pour respirer avec un respirateur.