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  • L'Église anglicane d'Angleterre vote en faveur de la bénédiction des unions entre personnes de même sexe

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    De Harriet Sherwood sur The Guardian :

    L'Église d'Angleterre vote en faveur de la bénédiction des unions entre personnes de même sexe

    L'adoption de la motion au Synode général représente un changement profond dans la position de l'Église (anglicane) sur l'homosexualité.

    9 février 2023

    Les prêtres de l'Église d'Angleterre seront autorisés à bénir les mariages civils de couples de même sexe, ce qui constitue un changement profond de la position de l'Église (anglicane) sur l'homosexualité, après un vote historique de son organe directeur.

    Les premières bénédictions de couples homosexuels pourraient avoir lieu cet été. Les églises individuelles seront encouragées à indiquer clairement si elles offriront des bénédictions afin d'éviter toute confusion et déception.

    Après un débat passionné de plus de huit heures, l'assemblée nationale de l'Église, le Synode général, a voté par 250 voix contre 181 en faveur d'une proposition des évêques visant à mettre fin à des années de divisions et de désaccords douloureux sur la sexualité.

    Mais les discours chargés d'émotion des partisans d'une égalité totale pour les chrétiens LGBTQ+ et de ceux qui soutiennent que l'enseignement biblique traditionnel sur le mariage et la sexualité doit être maintenu ont montré que le débat est appelé à se poursuivre.

    Le synode a également convenu que l'Église s'excusera pour le mal qu'elle a causé aux personnes LGBTQ+. Il s'est félicité de la révision prochaine de l'interdiction faite au clergé de contracter des mariages civils entre personnes de même sexe et de la règle du célibat pour le clergé dans les relations homosexuelles.

    Les conservateurs ont réussi de justesse à amender la motion afin de déclarer que la doctrine de l'Église sur le mariage - à savoir qu'il s'agit d'une union entre un homme et une femme - reste inchangée. Bien que les progressistes aient été consternés par cet amendement, il a peut-être encouragé certains traditionalistes à voter en faveur de la motion principale.

    Justin Welby, l'archevêque de Canterbury, et Stephen Cottrell, l'archevêque de York, ont déclaré qu'ils espéraient que la décision marquerait un "nouveau départ" pour l'Église d'Angleterre : "La route a été longue pour arriver à ce point".

    Les archevêques ont déclaré : "Pour la première fois, l'Eglise d'Angleterre accueillera publiquement, sans réserve et avec joie les couples de même sexe dans l'église. "L'Église continue d'avoir de profondes divergences sur ces questions qui touchent au cœur de notre identité humaine. En tant qu'archevêques, nous nous engageons à respecter la conscience de ceux pour qui cela va trop loin et à veiller à ce qu'ils aient toutes les assurances dont ils ont besoin afin de maintenir l'unité de l'Eglise alors que cette conversation se poursuit."

    Sarah Mullally, l'évêque de Londres, qui a dirigé le débat, a déclaré : "C'est un moment d'espoir pour l'Eglise." Mais, a-t-elle ajouté, "je sais que ce que nous avons proposé pour aller de l'avant ne va pas assez loin pour beaucoup, mais trop loin pour d'autres".

    Steven Croft, l'évêque d'Oxford, qui soutient l'égalité du mariage, a déclaré que le vote était une "étape significative et historique". Il a déclaré : "Les couples de même sexe deviendront beaucoup plus visibles et leurs relations seront célébrées publiquement, ce qui, je pense, continuera à faire évoluer les attitudes au sein de la vie de l'Église."

    L'amendement sur la doctrine du mariage est "important pour rassurer ceux qui sont plus conservateurs", a-t-il ajouté, mais il n'empêchera pas l'Église de "revenir sur cette question [du mariage homosexuel]" à l'avenir.

    Les militants des droits des homosexuels ont été frustrés de voir que leur demande de soumettre une proposition d'égalité de mariage au synode dans les deux ans a été rejetée par 52% contre 45%.

    Jayne Ozanne, l'un des principaux défenseurs de l'égalité LGBTQ+ au sein de l'Église, a déclaré qu'autoriser les bénédictions pour les couples de même sexe constituait un "petit pas en avant". Elle a ajouté : "Je suis profondément déçue par la façon dont les conservateurs ont constamment cherché à saper ceux d'entre nous qui ont cherché à évoluer vers une Eglise qui pourrait embrasser une pluralité de points de vue sur la sexualité."

    Nigel Pietroni, président de la Campagne pour l'égalité du mariage dans l'Église d'Angleterre, a déclaré que la décision "n'est pas à la hauteur de ce que nous croyons être le seul résultat de l'inclusion radicale - l'égalité du mariage pour tous", mais que c'était "un petit pas en avant".

    Peter Tatchell, militant des droits des homosexuels, a déclaré : "L'offre de bénédictions aux partenaires de même sexe est une insulte. Chaque homme et femme hétérosexuel en Angleterre a le droit de se marier dans son église paroissiale, mais pas les couples LGBTQ+. C'est de la discrimination et la discrimination n'est pas une valeur chrétienne."

    De l'autre côté de l'argument, le Conseil évangélique de l'Église d'Angleterre s'est dit "profondément attristé" par la décision, qu'il considère comme engageant l'Église dans une voie qui rejette "notre compréhension historique et biblique du sexe et du mariage". Le vote n'a "rien réglé et n'a servi qu'à approfondir les divisions", a déclaré l'association.

    L'association Global South Fellowship of Anglican Churches a déclaré que cette décision soulevait la question de "l'aptitude de l'archevêque de Canterbury à diriger ce qui reste une communion mondiale largement orthodoxe".

    Le débat synodal a été complexe sur le plan de la procédure, avec plus de deux douzaines d'amendements à la motion des évêques. Certains visaient à retarder les projets, arguant qu'il fallait plus de temps pour examiner les questions, malgré plusieurs années de consultations sur la sexualité. Tous les amendements sauf un ont été rejetés, parfois de justesse, ou retirés.

  • Synode sur la synodalité à Prague : des voix discordantes

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    De Courtney Mares sur Catholic News Agency :

    Les catholiques européens débattent du résultat final de l'assemblée du Synode sur la synodalité à Prague

    9 février 2023

    Les catholiques européens ont débattu jeudi matin du contenu d'un document final qui influencera les discussions du Synode des évêques au Vatican à l'automne.

    Lors de la dernière journée de discours publics à Prague le 9 février, il a été demandé aux 200 délégués de l'Assemblée continentale européenne si le document final de l'assemblée - rédigé par un comité de six membres - était fidèle à ce qui avait été discuté lors des trois jours précédents de l'assemblée.

    L'évêque ukrainien Oleksandr Yazlovetskiy, évêque auxiliaire latin de Kiev, a été l'un des premiers à prendre la parole, soulevant une objection à l'utilisation répétée du terme LGBTQ sur "une page sur deux" dans le document, suggérant plutôt qu'il serait préférable de couvrir le sujet dans un seul paragraphe.

    L'archevêque Stanisław Gądecki s'est opposé à l'utilisation de l'expression "conservateur et libéral" pour décrire l'Église, suggérant plutôt de préciser si certaines déclarations sont en accord ou en désaccord avec l'Évangile. Le prélat polonais a ajouté que le document ne communique pas la position de l'Eglise dans ses références aux personnes "LGBT".

    L'évêque Georg Bätzing, président de la conférence épiscopale allemande, a déclaré que l'Église ne se trouve pas encore dans une "nouvelle Pentecôte" comme le prétend le document.

    L'archevêque Felix Gmür de Bâle, en Suisse, a noté que certaines parties du texte semblaient "trop vagues" et pourraient être plus claires, notamment en soulignant les points de tension.

    S'exprimant en français, allemand, italien, polonais et anglais, les délégués ont fait des suggestions sur la façon dont le texte pourrait être amélioré.

    L'évêque Brian McGee a déclaré que la délégation écossaise a été surprise de voir comment le document "présentait plusieurs fois l'étiquetage ou la caractérisation de divers groupes dans une seule phrase". "Nous ne sommes pas du tout opposés à cette inclusion, mais nous pensons qu'elle pourrait être traitée de manière plus sensible", a-t-il déclaré.

    L'archevêque Eamon Martin a déclaré que "nous étions un peu gênés" parce que "la voix des pauvres" n'était pas plus importante dans le document, malgré les contributions pendant l'assemblée de Caritas International et d'autres organisations caritatives catholiques. "J'aimerais simplement que le cri des pauvres, le cri de la Terre et le cri de la paix soient un peu plus mis en avant", a-t-il déclaré.

    L'évêque Aliaksandr Yasheuskiy, auxiliaire de Minsk, en Biélorussie, a recommandé que le texte soit clarifié pour noter que les commentaires sur l'ordination des hommes mariés et l'ordination des femmes ne reflétaient pas l'opinion commune de l'assemblée.

    Si la majorité des intervenants qui ont choisi de donner leur avis sur le texte étaient des évêques, plusieurs femmes se sont également adressées à l'assemblée. Anna Diouf, une jeune femme représentant l'Observatoire de l'intolérance et de la discrimination envers les chrétiens en Europe, a demandé comment le texte pouvait souligner le rôle important des femmes dans l'Église sans mentionner la Sainte Vierge Marie.

    En raison des contraintes de temps, les délégués n'ont pas pu lire et réfléchir sur le document final avant d'entrer dans le débat. Au lieu de cela, le Père Jan Nowotnik a lu à haute voix le projet de document qui résume et synthétise les contributions offertes par les catholiques de tout le continent au cours des trois derniers jours.

    La sécularisation, les abus cléricaux, les tensions autour de la liturgie et le dialogue œcuménique figurent parmi les nombreux thèmes mis en avant dans le projet de document encore non publié, qui cherche à fournir une perspective européenne sur une Église synodale.

    Le texte mentionne que l'ordination des femmes au diaconat a été évoquée comme une possibilité lors de l'assemblée et ajoute : "D'autre part, il existe en Europe un net clivage sur l'ordination des femmes au sacerdoce, non seulement entre l'Est et l'Ouest, mais aussi au sein des différents pays occidentaux."

    Le document mentionne également que de nombreux délégués européens ont exprimé leur crainte que le Synode sur la synodalité n'entraîne une "dilution" de la doctrine catholique. "Certains ont souligné que dans un processus comme celui-ci, il y avait un risque de se soumettre à l'esprit du monde. Ces craintes ont également été exprimées au cours de notre réunion, l'inquiétude concernant une éventuelle dilution de la doctrine ou l'utilisation d'expressions sociologiques dans les groupes de travail a été soulignée", indique le document.

    Il n'y a pas eu de vote sur le texte final de la première moitié de l'assemblée. Les organisateurs de l'assemblée ont plutôt demandé si quelqu'un avait des objections à ce que le projet de texte soit rendu public. Le cardinal Jean-Claude Hollerich a assuré les délégués que leurs commentaires et suggestions lors du débat de la matinée seront pris en compte dans la formation du projet final.

    À partir du 10 février, les évêques européens se réuniront en privé pendant trois jours à Prague pour la seconde moitié de l'assemblée afin de réviser collectivement le document, d'écouter les discours du président de la conférence épiscopale de chaque pays et de produire leur propre second document final pour le processus continental du synode.

    L'assemblée de Prague est l'une des sept assemblées continentales du synode qui se tiendront à travers le monde en février et mars. Mgr Hollerich a indiqué que lui-même et le cardinal Mario Grech se rendront aux assemblées continentales de Beyrouth, Bangkok et Bogota, en Colombie, dans les semaines à venir.

    Courtney Mares est correspondante à Rome pour la Catholic News Agency. Diplômée de l'Université de Harvard, elle a effectué des reportages dans des bureaux de presse sur trois continents et a reçu la bourse Gardner pour son travail avec les réfugiés nord-coréens.

  • Syrie, une triple tragédie : le tremblement de terre, la guerre et les sanctions scandaleuses

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    De Nicola Scopeliti sur la Nuova Bussola Quotidiana :

    Syrie, une triple tragédie : le tremblement de terre, la guerre et les sanctions scandaleuses

    10-02-2023

    "La situation était déjà très difficile en raison d'un conflit qui dure maintenant depuis douze ans. Les gens sont désespérés", explique à la Nuova Bussola la soeur Siba al Khoury d'Alep. De nombreuses régions touchées par le tremblement de terre sont sous le contrôle des rebelles et donc inaccessibles. Et puis il y a les sanctions occidentales : "Les sanctions sont inhumaines", déclare le père Francesco Patton, Custode de Terre Sainte. "et je trouve scandaleux qu'en un moment aussi tragique, nous soyons incapables de lever ou de suspendre les sanctions. Des gens meurent en Syrie". 

    "La situation était déjà très difficile en raison d'un conflit qui dure maintenant depuis douze ans. De nombreuses maisons avaient déjà été détruites par la guerre. Aujourd'hui, avec le violent tremblement de terre du 6 février, de nombreux autres bâtiments se sont effondrés ou ont subi de nouveaux dégâts importants. Les gens sont désespérés. Ils demandent de l'aide, mais sur leur visage, en plus de tant de souffrance, il y a de l'abattement et du désespoir. Lorsque nous parlons aux gens, nous entendons la question suivante : pourquoi cette terrible tragédie nous est-elle à nouveau arrivée ? Il est difficile de répondre, mais, en tant que sœurs, en plus de l'aide matérielle, nous avons également le devoir d'offrir une aide psychologique et spirituelle. Le Seigneur nous donnera la force d'affronter aussi cette grave situation". S'adressant à La Nuova Bussola Quotidiana, Sœur Siba al Khoury, une religieuse des Sœurs enseignantes de Sainte Dorothée-Filles des Sacrés Cœurs de Vicence, qui vit à Alep. "Nous étions au lit quand nous avons senti la secousse du tremblement de terre. Nous sommes immédiatement descendus dans la rue et sommes restés sur la route pendant plus de quatre heures, jusqu'à ce que les autorités nous donnent la permission de rentrer, pour récupérer nos affaires les plus essentielles". Leur maison a été endommagée et l'administrateur apostolique, le père Raimondo Girgis o.f.m., les a emmenées avec d'autres religieuses dans les locaux du vicariat.

    De nombreux bâtiments se sont effondrés à cause de la forte secousse. D'autres, jugés dangereuses en raison des dégâts, sont en cours de démolition. "De nombreux Syriens qui se sont retrouvés sans abri abandonnent leur pays et cherchent refuge ici, à Alep. Des églises ont été ouvertes pour accueillir les personnes déplacées", explique Sœur Siba. Mais aussi des jardins d'enfants et des écoles. De même, les couvents accueillent de nombreuses familles. De nombreuses personnes ont passé les nuits dans des lieux de culte. Il fait très froid et nous sommes occupés, avec d'autres volontaires, à apporter de la nourriture et des couvertures". Elle poursuit : "Il y a un besoin d'assistance médicale, en particulier pour les personnes âgées, les femmes et les enfants". À Alep, comme dans le reste de la Syrie, il y a tant de pauvreté causée par l'embargo et les sanctions internationales. Et maintenant, il y a la difficulté de recevoir des aides. L'électricité est fournie en hoquet, pendant quelques heures par jour, poursuit Sœur Siba. Les hôpitaux sont peu nombreux, et malheureusement, il y a tant de "blessés". Les gens errent dans les rues, confus et cherchant de l'aide. Ils ont peur de rentrer chez eux. Ils vivent des heures d'angoisse car ils ne savent pas s'il y aura d'autres secousses, peut-être de forte intensité comme le prédisent les "experts".

    À Alep, il y a l'hôpital catholique Saint-Louis qui fournit des soins médicaux gratuits aux Syriens les plus pauvres et les plus vulnérables. Il a reçu la visite du cardinal Mario Zennari, nonce apostolique. "Sa présence parmi nous est un signe fort de la proximité du pape et nous sommes particulièrement émus", déclare le père Bahjat Karakach, curé de la paroisse latine, "Le cardinal a également pu voir de près les destructions causées par le tremblement de terre". Un vrai drame". En Syrie, entre autres, 90 % de la population se trouvent en dessous du seuil de subsistance, et cette énorme catastrophe a rendu la population encore plus pauvre. Il est plus que jamais nécessaire que l'aide internationale atteigne la population épuisée. Malheureusement, il y a tellement d'accrocs. Difficultés d'acheminement des marchandises, difficultés d'acheminement des produits de première nécessité dans les endroits touchés par le tremblement de terre. "À Alep, poursuit Sœur Siba, les gens continuent de creuser avec leurs mains à la recherche de survivants. Dans la partie orientale de la ville, la plus bombardée pendant la guerre, de nombreux bâtiments étaient déjà précaires, maintenant avec les répliques, beaucoup se sont effondrés".

    Une partie des zones touchées par ce tremblement de terre est sous le contrôle des rebelles opposés au régime de Bashar al Assad, d'autres zones sont sous le contrôle du gouvernement d'Assad. Outre les difficultés causées par le conflit, toujours en cours, les routes, endommagées par le tremblement de terre, sont aussi partiellement inutilisables en raison des chutes de neige de ces derniers jours. Les équipes de secours peinent à atteindre les localités, notamment dans les territoires du nord-ouest de la Syrie, où opère le groupe djihadiste "Hayat Tahrir al Sham" (HTS), dirigé par Mohammad al Jolani et défini par les Nations unies comme un mouvement terroriste.

    Les sanctions sont inhumaines", a déclaré le père Francesco Patton, Custode de Terre Sainte, la Custodie est en effet présente en Syrie avec les communautés de la vallée de l'Oronte, d'Alep et de Lattaquié, "et je trouve scandaleux qu'en un moment aussi tragique, nous soyons incapables de lever ou de suspendre les sanctions". Des gens meurent en Syrie. L'aide qui arrive provient de pays islamiques, comme l'Égypte, l'Iran, l'Algérie... L'Occident loupe à nouveau le train". Le père Patton poursuit en soulignant qu'il semble que la plupart des aides internationales "aillent à la Turquie et que la Syrie soit coupée du circuit international précisément à cause des sanctions décidées par les États-Unis et l'Union européenne".

    Il convient également de noter que la première secousse et l'essaim sismique qui a suivi ont également été ressentis en Israël. Mercredi, une secousse sismique de magnitude 3,3 a été ressentie à environ 20 kilomètres au sud-est de la ville d'Ariel, en Cisjordanie, comme l'a enregistré le Service géologique israélien. Il s'agit de la dernière d'une série de secousses de gravité variable qui ont frappé la région ces derniers jours.

  • L’Église est bien malade, mais les remèdes proposés ne sont pas au niveau

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    Une tribune parue dans La Croix :

    « L’Église catholique et ses médecins imaginaires »

    7/2/2023

    Pour le frère Jean-Thomas de Beauregard o.p., l’Église est bien malade, mais les remèdes proposés ne seraient pas au niveau, car « fabriqués à une autre époque où les problèmes étaient tout différents ».

    Le catholicisme occidental est malade : la pratique religieuse en chute libre, les vocations sacerdotales au plus bas, l’accumulation d’affaires d’abus sexuels et spirituels, et la perte de confiance dans les autorités ecclésiastiques… Si le malade est loin d’être imaginaire, l’abondance de médecins à son chevet relève de la comédie de Molière : « C’est le rein ! », s’exclame tel sociologue ; « Mais non, c’est l’estomac ! », rétorque telle religieuse ; « Vous n’y pensez pas, c’est le poumon ! », conclut un théologien tout étonné et flatté qu’on s’intéresse à lui.

    Autour du malade, les médecins de tout poil s’agitent, dans l’indifférence de la foule pour qui le malade est déjà mort, enterré, et surtout oublié, depuis longtemps. Le peuple de Dieu, quant à lui, réduit à peau de chagrin, détourne les yeux, entre indignation et incrédulité devant cette lamentable pantomime.

    Prédire une saignée

    Le malade n’est pas imaginaire, mais les médecins qui lui prescrivent une saignée ressemblent assez aux Diafoirus père et fils de la pièce : ils ont l’âge avancé du père, souvent, la science incertaine du fils, plus encore, et l’inefficacité de l’un comme de l’autre. S’il y a d’ailleurs un miracle scientifique en la matière, c’est de constater que dans et autour du cadavre de l’Église, les fossiles se reproduisent.

    Le bataillon des médecins patentés tient de la farce : des théologiens qui se veulent subversifs mais ne sont que subventionnés par l’institution chantent le vieux refrain du progressisme en imitant les derniers marxistes ou ultralibéraux : « Si nos remèdes ne guérissent pas encore, c’est qu’il faut doubler la dose » ; des religieux de congrégations qui n’ont pas accueilli une vocation depuis trente ans claironnent leurs recettes infaillibles pour retrouver une vie religieuse authentique et des effectifs pléthoriques ; des sociologues ou historiens qui assortissent un diagnostic souvent correct de remèdes hors de leur champ de compétence. La liste des remèdes prescrits vaut la peine d’être examinée.

    Des femmes ordonnées ?

    L’ordination des hommes mariés ou bien des femmes pour relancer les vocations ? Un regard même superficiel sur l’état du protestantisme libéral suffit à en dénoncer l’inanité, comme d’ailleurs pour l’alignement de la foi ou de la morale sur les idées du monde contemporain.

    Plus de femmes et de laïcs dans le gouvernement de l’Église ? Le pape François y exhorte. C’est en effet mieux fondé. Mais l’effet de cette évolution souhaitable sera limité, comme l’illustre la situation des paroisses – où les femmes et les laïcs tiennent le manche – et celle des congrégations féminines – où les abus spirituels et les problèmes de gouvernance existent aussi.

    Plus de démocratie dans la gouvernance ? Oui, bien sûr. L’autorité a besoin d’être éclairée. Mais gare à la manipulation des processus démocratiques par des minorités agissantes, comme on le voit dans le chemin synodal allemand.

    Indécence

    Il y a d’ailleurs quelque indécence à instrumentaliser le drame terrible vécu par tant de victimes d’abus pour refourguer une marchandise périmée fabriquée à une autre époque où les problèmes étaient tout différents. Le médecin qui prétend guérir toutes les maladies de tous les temps avec le même remède se dénonce comme charlatan. En réalité, on ressort le même vieil agenda idéologique en l’habillant des oripeaux de l’urgence et de la compassion. Un rideau de fumée pour mieux camoufler l’abandon de la substance de la foi et de la morale.

    Si la maladie de l’Église se nomme cléricalisme, c’est au sens large que Julien Benda donnait à ce terme lorsqu’il parlait de « trahison des clercs » pour qualifier l’attitude des élites françaises avant et pendant la Deuxième Guerre. Le résultat, c’était la collaboration avec le mal absolu. Prêtres, laïcs, hommes, femmes, théologiens ou sociologues, le cléricalisme est la chose du monde la mieux partagée. Et la trahison des clercs est le dénominateur commun de toutes les crises.

    Une communauté unie par la foi

    Dans l’Évangile, on parle d’une femme hémorroïsse « qui avait beaucoup souffert du fait de nombreux médecins et avait dépensé tout son avoir sans aucun profit, mais allait plutôt de mal en pis » (Mc 5, 25). L’Église est cette femme-là. Le seul qui peut la guérir est Jésus lui-même. Et les remèdes sont connus, efficaces parce qu’ils viennent de Dieu et non pas de l’expertise humaine gonflée au vent de l’époque : les sacrements, l’Écriture sainte, la prière, et la conversion personnelle. Et le courage des décideurs. Sans cela, les ajustements institutionnels, s’il y en a de légitimes, sont voués à l’échec.

    L’Église est une communauté unie par la foi en vue de la sainteté. Toute maladie grave qui l’atteint porte donc sur la foi et la sainteté. Les médecins qui ne croient plus à la gravité du péché ni à la puissance de la grâce, encore moins à un Jugement au terme duquel deux issues sont réellement possibles – le Ciel et l’Enfer –, se rendent incapables de comprendre l’importance de la sanction, de la pénitence et de la conversion.

    L’Église en est là. Mère Teresa avait tout compris, qui répondait à un journaliste qui l’interrogeait sur ce qu’il fallait changer : « Vous, et moi. » Le reste est de la mauvaise littérature et de la mauvaise médecine.

  • Mgr Léonard : "Les enseignements fondamentaux de l'Église sont actuellement menacés"

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    De Solène Tadié sur le National Catholic Register :

    Archevêque belge : Les enseignements fondamentaux de l'Église sont actuellement menacés

    À l'occasion de la sortie de son livre autobiographique retraçant les 50 dernières années de l'histoire de l'Église, Mgr André-Joseph Léonard, archevêque retraité, évoque les grands défis de notre temps.

    Archbishop André-Joseph Léonard
    9 février 2023

    Mgr André-Joseph Léonard, archevêque émérite de Bruxelles-Malines et ancien primat de Belgique, vient de publier un livre qui ne passera sans doute pas inaperçu dans le monde catholique.

    L'Eglise dans tous ses états : 50 ans de débats autour de la foi" se présente comme un récit autobiographique à travers lequel son auteur livre une analyse sans concession des événements qui se sont déroulés dans l'Église au cours des cinq dernières décennies - des dérives théologiques et pastorales qui ont marqué l'après-Vatican II aux débats actuels autour du Synode sur la synodalité et des différents scandales d'abus sexuels qui ont surgi au cours de ces années. 

    Né en 1940 et ordonné prêtre en 1964, Mgr Léonard a été nommé évêque de Namur en 1991, puis archevêque de l'archidiocèse de Bruxelles-Malines en 2010. Il a pris sa retraite en 2015. 

    Ses opinions réputées orthodoxes sur les questions de foi et son franc-parler lui ont souvent valu les foudres de la presse belge. En 2013, des militantes féministes du groupe Femen l'ont pris pour cible lors d'une conférence pour avoir assimilé l'homosexualité à un "blocage du développement psychologique normal" dans une interview de 2007. Les images de l'archevêque en prière silencieuse tout en étant copieusement arrosé par les manifestantes Femen aux seins nus sont devenues virales.

    Auteur d'une trentaine de livres traduits en plusieurs langues, cet éminent philosophe et théologien a également été membre de la Commission théologique internationale de 1987 à 1991, ce qui l'a conduit à de nombreuses rencontres avec son président de l'époque, le cardinal Joseph Ratzinger - le futur pape Benoît XVI. Il a également été chargé de la rédaction de l'encyclique Fides et Ratio (Foi et Raison) de Jean-Paul II en 1998. 

    Dans cet entretien avec le Register, il livre son diagnostic personnel sur les maux qui frappent aujourd'hui l'Église et le monde chrétien, revient sur certains des événements qui ont marqué sa vie d'ecclésiastique et évoque l'héritage des papes Jean-Paul II et Benoît XVI. 

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  • Euthanasie : Quand la société nous dit qu’il faut « oser la liberté », de quelle liberté parle-t-on ?

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    Éric Vermeer est interviewé sur aleteia.org :

    Euthanasie en Belgique : « Oser la liberté, mais de quelle liberté parle-t-on ? »

    9/2/23

    Infirmier spécialisé en soins palliatifs, psychothérapeute et enseignant éthicien, Éric Veermer présente aux lecteurs d’Aleteia l’histoire et la pratique de l’euthanasie en Belgique, qui ne cesse de se banaliser. Il dénonce en particulier les pressions sur la conscience des soignants, les préoccupations financières et le manque de formation des médecins aux soins palliatifs.

    Présentée par le président Emmanuel Macron comme un « modèle », l’euthanasie est légale en Belgique depuis 2002. Prévue pour encadrer des situations exceptionnelles, le nombre d’euthanasies a explosé. Non seulement, les dérives se multiplient dans l’interprétation de la loi, mais son champ d’application n’a cessé de s’élargir. Les mentalités évoluent : dans les esprits, l’euthanasie n’est plus seulement un droit, elle est présentée aux médecins comme un devoir, aux dépens de la liberté réelle des patients et de leur famille, quand on prend soin de l’écouter réellement, comme l’explique Éric Veermer.

    Aleteia : En 2002, la Belgique a adopté une loi dépénalisant l’euthanasie dans certaines situations. Quel était l’objectif de cette nouvelle législation ?

    Éric Vermeer : L’objectif était de combattre les euthanasies clandestines. Aujourd’hui, une étude du British Medical Journal révèle que près de 50% des euthanasies se pratiquent encore de manière clandestine, ce qu’a confirmé le président de la Commission d’évaluation lui-même. Comment en est-on arrivé là ? L’argument médiatique, chargé de pathos, était le suivant : devant la souffrance inextricable, la seule manière de mourir dignement est de se faire euthanasier. Cela s’inscrit dans une société qui doit faire face à une augmentation de pathologies lourdes, pas seulement le cancer, mais aussi les maladies d’Alzheimer, les maladies cardiovasculaires, les AVC, les maladies neuromusculaires. 

    Lire la suite sur aleteia.org

  • « Tu seras une femme, mon fils ! »

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    De Xavier Patier sur aleteia.org :

    La transidentité, une angoisse fabriquée de toute pièce

    8/2/23

    Chaque époque cultive son propre malheur, en s’inventant des peurs dominatrices. Aujourd’hui, observe l’écrivain Xavier Patier, on enseigne aux enfants que c’est à eux de décider qui ils sont, parce qu’ils ne sont personne.

    À lire la presse, nous ne trouvons pas davantage de mensonge, de violence et de trahisons dans la société d’aujourd’hui qu’il n’y en avait dans les sociétés d’autrefois, quand tout allait tellement mieux, paraît-il, dans une France tellement plus chrétienne. Quand nous acceptons de regarder l’Histoire en face, nous n’en finissons jamais de découvrir combien peu de choses ont changé dans la misère de notre condition. Ni combien chaque époque emploie d’ingéniosité à cultiver des formes inédites de son propre malheur. 

    La France a toujours été un royaume divisé. Mais chaque génération a souffert d’un mal qu’elle trouvait plus terrifiant que les précédents, car elle en faisait sa propre expérience. Nous avons toujours assez de recul pour examiner le mal qui frappait les anciens, jamais assez pour comprendre celui qui nous arrive. Il entre ainsi dans la définition du mal d’être toujours nouveau en apparence, alors qu’il est toujours vieux en réalité. Le péché est vieux comme le monde, mais chaque scandale est une monstrueuse surprise. Un désespoir déjà ressenti dans le passé n’est plus exactement un désespoir, puisque nous y avons survécu, tandis qu’un scandale d’aujourd’hui apparaît sans espoir.

    On invente des folies

    Aujourd’hui donc, nous frissonnons quand nous regardons ce qu’est devenue l’éducation de nos enfants. Les programmes scolaires, le ton désespéré sur lequel les manuels décrivent le monde, leur morale sinistre, tout ce fatras constitue une toile de fond qui nous fait plonger dans des univers sombres, des abîmes de glaces qui ne fondent jamais. Nous n’avions jamais vu une si savante tristesse, ni un si triste savoir. Ce n’est plus le bonheur qui est une idée neuve en Europe, c’est la honte.

    La confiance est devenue un tabou. Les écoles de la République et les réseaux sociaux (…) ne cessent d’enseigner à nos enfants qu’il faut vivre chacun pour soi.

    Tout est mis au service d’une peur dominatrice. La confiance est devenue un tabou. Les écoles de la République et les réseaux sociaux — médias incontrôlés qui plus encore que les écoles donnent le ton de notre univers intime —, ne cessent d’enseigner à nos enfants qu’il faut vivre chacun pour soi : la solitude est la seule perspective. Il ne faut compter sur personne, ni ici-bas, ni dans les cieux. Et comme si cette solitude avait besoin d’être encore prouvée, on invente des folies, comme la fameuse « transidentité ».

    Priver les enfants de leur identité

    La théorie du genre est porteuse de mort, au sens littéral. À vouloir priver nos enfants de leur identité, la nouvelle doxa éducative les conduit au suicide. Une maladie nouvelle est apparue : la « dysphorie de genre », angoisse des adolescents de ne pas se reconnaître dans leur sexe de naissance, angoisse fabriquée de toutes pièces, qui conduit à des démarches pour changer de genre, et souvent conduit aussi à la mort. Le nombre des suicides d’adolescents augmente sous le regard impuissant des pouvoirs publics. Le lobby LGBT a du sang sur les mains. La puberté est un moment assez difficile pour qu’on n’accable pas les personnes de malaises fabriqués. Mais c’est ce que fait de plus en plus l’école dans les pays européens. Elle explique aux enfants que c’est à eux de décider qui ils sont, parce qu’ils ne sont personne. « Tu seras une femme, mon fils ! » est l’injonction de ces nouveaux Rudyard Kipling qui livrent les enfants désarmés à un monde féroce. Ce n’est même pas drôle. 

    Cette folie aura une fin, comme l’esclavage et comme le travail des enfants dans les mines. Mais ce n’est pas une raison pour attendre sans rien dire que ce scandale se passe, une fois qu’une génération aura été perdue. Il nous faut nommer les criminels et les combattre. L’espérance ne doit pas se taire.

  • "Là où nous assaillent cent raisons de désespérer, nous trouvons auprès de Jésus ressuscité mille raisons d’espérer plus que jamais" (Mgr Léonard)

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    De didoc.be :

    L'Eglise dans tous ses états - broché - André Léonard, Livre tous les  livres à la Fnac

    L'Eglise dans tous ses états

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    Mgr Léonard, qui passe sa retraite en France, vient de publier un nouveau livre : L’Eglise dans tous ses états. Cinquante ans de débats autour de la foi, Artège, Perpignan-Paris 2023. L’ancien évêque de Namur et archevêque de Malines-Bruxelles y évoque à grands traits sa propre vie de prêtre, de professeur et d’évêque, entrelacée avec l’histoire récente de l’Eglise, depuis le concile jusqu’à nos jours. Nous livrons ici quelques extraits choisis des pages de conclusion du livre. (intertitres de didoc)

    A toutes les périodes de l’histoire, l’humanité a maintes fois pensé qu’elle vivait des temps particulièrement troublés. Il ne faut donc pas juger trop vite que notre époque est exceptionnellement dramatique. Néanmoins, peut-être n’est-ce pas sans raison que nous sommes tentés d’estimer que l’urgence du temps présent est spécialement grave.

    Les difficultés du temps présent

    Jamais la planète Terre n’a été aussi malmenée par l’homme. Or nous n’en avons qu’une, à transmettre en bon état à la génération suivante. Jamais les sources mêmes de la vie humaine n’ont été autant menacées qu’elles le sont aujourd’hui par la contraception, la stérilisation fréquente, qu’elle soit volontaire ou imposée, par l’avortement banalisé. Même l’art de soigner la vie humaine et, si possible, de la guérir quand elle est amoindrie ou blessée, est devenu aussi, en certaines régions du monde, l’art de la supprimer, en toute impunité.

    Jamais, du moins en Occident, la famille, cellule fondamentale de la société, n’a été à ce point sapée juridiquement et culturellement par des législations irresponsables, rendant le divorce accessible en un tournemain et mettant sur le même pied que le mariage des unions qui ne peuvent en aucun cas mériter ce nom. (…)

    Pendant ce temps-là, des millions d’hommes et de femmes, des jeunes en particulier, se laissent asservir par l’alcool, la drogue et la pornographie, trois marchés scandaleusement plantureux, savamment organisés par des marchands d’illusion. (…)

    Même la quête de spiritualité, en soi louable, se fourvoie trop souvent dans des mystiques vaporeuses, n’ayant d’autre ambition que de dissoudre la splendeur personnelle de l’âme humaine dans un divin brumeux. (…)

    Même les Eglises chrétiennes ont souvent perdu leur âme en Occident. Le sel s’est affadi et l’on ne voit plus par quelle recette on pourrait lui rendre sa saveur. On a ouvert tant de portes et de fenêtres, par souci d’une ouverture en soi appréciable, mais sans discernement authentique, que le parfum de l’Evangile s’est tout simplement dissipé. La sainte Tradition des Apôtres de Jésus a été dilapidée au profit d’idéologies sans avenir. En beaucoup de pays (il y a heureusement des exceptions !), la liturgie s’est aplatie au point que nombre d’assemblées, au gré de dérisoires fantaisies de clercs ou de laïcs, se célèbrent elles-mêmes et ritualisent leur propre médiocrité plutôt que la gloire de Dieu et du Christ ressuscité. Selon le mot terrible de Jésus, les perles ont été jetées aux pourceaux (cf. Mt 7, 6) et des chrétiens abusés piétinent sans le savoir les trésors pour lesquels les martyrs ont versé leur sang.

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  • Séisme : la Syrie oubliée

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    De  Cyriac Zeller sur le site de Famille Chrétienne :

    « On oublie la Syrie ! » : le cri du cœur d’un humanitaire après le séisme en Turquie

    8/02/2023

    Où êtes-vous actuellement ?

    Je suis à Alep où je suis arrivé le 7 février au soir depuis Beyrouth. J’ai fait le trajet en camion avec une cargaison de 5200 couvertures chaudes. Suite au tremblement de terre, des milliers de personnes se sont retrouvées sans toit alors qu’il fait -3 degrés ici. Il n’y a ni électricité ni chauffage. Les couvertures figurent parmi les besoins premiers qui nous ont été remontés sur place. Elles vont permettre aux habitants de ne pas mourir de froid dans la nuit. Il y a bien évidemment de nombreux autres besoins.

    Dans quelle situation sont actuellement les habitants d’Alep ?

    Beaucoup ont trouvé refuge où ils le pouvaient… Certains ont perdu leur maison qui s’est effondrée. Pour d’autres, elle est inhabitable car il y a de grosses craquelures, des murs effondrées et le bâtiment menace de s’effondrer. Beaucoup d’immeubles se sont effondrés bien après le tremblement de terre. Il y a eu un certain nombre de répliques aussi ! Un grand nombre de Syriens se sont réfugiés dans les églises et les salles paroissiales, mais également dans leurs voitures car ils ont peur, ils s’éloignent des immeubles.

    Quelle est la situation de la communauté chrétienne à Alep ?

    C’est une communauté qui est très fragile mais qui a su s’organiser. A Alep, il y avait 150 000 chrétiens avant la guerre, aujourd’hui, ils sont à peu près 30 000… Ils se sont pourtant parfaitement organisés en accueillant tous ceux qui ont perdu leur domicile. Hier, j’étais dans l’église chaldéenne qui était pleine, dans l’église orthodoxe il y avait 1500 personnes et chez les franciscains de Terre-Sainte il y avait 2000 personnes.

    L’aide est-elle suffisante dans le pays ?

    Au contraire, il y a très peu d’aide extérieure ! La Syrie est un pays qui est sous sanctions internationales, il faut le rappeler. Ici, le tremblement de terre est une crise dans la crise. Même avant le séisme, la Syrie vivait un drame humanitaire. Il n’y a quasiment plus d’électricité et 96% de la population vit sous le seuil de pauvreté ! Alep était déjà une ville en grande partie détruite… En plus de cela, acheminer de l’aide jusqu’ici est compliqué. Moi-même, depuis le Liban j’ai eu du mal à venir avec mon camion. Pour l’instant l’aide internationale se concentre sur la Turquie où a eu lieu l’épicentre du tremblement de terre mais on oublie la Syrie.

    Les populations ne peuvent donc compter que sur elles-mêmes ?

    Heureusement, les communautés locales se sont habituées pendant la guerre à accueillir des déplacés, à faire de l’aide d’urgence. Elles se sont mobilisées très vite. A Alep, les habitants ont été extrêmement réactifs.

    Dans une ville comme Alep, peut-on chiffrer l’ampleur des dégâts ?

    C’est compliqué car il y a des chiffres officiels qui ne sont pas encore tout à fait au point… On parle d’une cinquantaine d’immeubles qui se sont effondrés mais en réalité, il y en a sans doute deux fois plus. Sur le nombre de morts et de blessés, il n’y a pas encore de chiffres officiels… Il y a encore de nombreuses personnes qui sont disparues. Les Nations Unies ont annoncé plus de 2600 morts en Syrie mais je ne suis pas encore en mesure de donner des chiffres à Alep.

    Qu’est-ce que l’Œuvre d’Orient a mis en place pour venir en aide aux Syriens ?

    Un fond d’urgence a été créé pour venir en aide aux populations touchées par le séisme. Actuellement, nous sommes vraiment à cheval entre l’aide d’urgence, c’est-à-dire continuer de soutenir ces gens en leur donnant des repas chauds, des couvertures, du lait en poudre, des couches pour les enfants mais on va rapidement faire évaluer les dégâts dans les maisons pour faire en sorte de pouvoir réparer ce qui est réparable. L’objectif est de faire sortir les habitants de l’état d’urgence et les faire rentrer dans leurs maisons. Nous faisons appel à la générosité des Français car les besoins sont extrêmement importants !

    Lire également : Patriarches et chefs d'Eglise : après le tremblement de terre, plus de sanctions et d'embargo contre le peuple syrien

  • Vermeer, un peintre catholique

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    A l'occasion d'une exposition qui se tient à Amsterdam rassemblant (presque) toutes les oeuvres de Vermeer, on peut relire l'article que Massimo Introvigne avait consacré à cet artiste capital dans la Nuova Bussola Quotidiana lors d'une exposition organisée à Rome; merci à E.W. pour sa traduction :

    Vermeer le catholique

    (...) Vermeer se convertit au catholicisme en 1653, alors qu’il n’a que 21 ans, peu avant d’épouser une jeune femme catholique. A partir de ce moment, il déménage du quartier catholique, surnommé « le coin des papistes », de sa ville natale, Delft, et pratiquera la religion catholique pour tout le reste de sa vie, malgré les vexations et les interdits auxquels celle-ci est soumise dans les Pays-Bas calvinistes à cette époque. Il appelle l’aînée de ses onze enfants Marie et son fils aîné Ignace, en l’honneur de Saint Ignace de Loyola (1491-1556).

    L’histoire de l’art ayant été écrite, elle aussi, avec de nombreux préjugés anticatholiques, même si l’on a prétendu que la conversion de Vermeer avait été superficielle, et motivée par le simple désir de plaire à son épouse et à sa belle-famille, bien plus aisée que la sienne. Certaines de ces interprétation se retrouvent dans le roman précité et dans le film « La jeune fille à la perle ». Mais il s’agissait de théories désormais dépassées. Actuellement, les spécialistes de Vermeer reconnaissent qu’il a été un catholique fidèle, et même enthousiaste.

    A la controverse sur la foi catholique de Vermeer vient se rattacher celle qui porte sur l’un des tableaux exposés à Rome : Sainte Praxède. Si cette peinture s’avère authentique, comme les organisateurs de l’exposition de Rome l’affirment sans réserve, il s’agirait du plus ancien Vermeer connu. Et, chose unique dans le cas de Vermeer, ce serait une copie d’un original de l’italien Felice Ficherelli (1605-1660). A Rome, le tableau de Ficherelli et celui de Vermeer sont exposés en vis-à-vis, ce qui permet d’apprécier la supériorité de la « copie ». De plus, dans les mains de la Sainte qui recueillent le précieux sang des martyrs à l’aide d’une éponge, Vermeer a ajouté un crucifix – symbole contesté par les protestants – et a modifié le visage du personnage, qui, selon le catalogue de l’exposition romaine, serait celui de l’épouse du peintre. Il s’agirait donc d’une célébration de la conversion de l’artiste au catholicisme, et d’un hommage à son épouse.  

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  • "L’islamisme est bel et bien un islam" (Rémi Brague)

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    Du Figaro (Alexandre Devecchio) via le site "Pour une école libre au Québec" :

    Rémi Brague : « l’islamisme est bel et bien “un islam” »

    7 février 2023

    Rémi Brague est membre de l’institut de France, normalien, agrégé de philosophie et professeur émérite de philosophie à l’université Panthéon-Sorbonne. À l’occasion de la sortie de son ouvrage le plus récent, Sur l’islam, Le Figaro s’est entretenu avec le professeur Brague.

    — La plupart du temps, le débat contemporain sur l’islam distingue islam et islamisme, comme si beaucoup d’observateurs ou de chercheurs s’interdisaient de procéder à l’examen critique des textes. Votre livre, au contraire, scrute les textes et refuse d’établir une frontière entre islam et islamisme. Pourquoi ce choix ?

    Rémi BRAGUE. — « Islamisme » était au XIXe siècle une façon anodine de désigner ce que nous appelons maintenant « islam ». C’était un « -isme » de plus à côté du judaïsme, du christianisme, et même de l’hindouisme, mot qui n’a aucun sens pour un hindou. « Islam » est un meilleur mot, parce que c’est celui que les musulmans utilisent, à la différence, par exemple, de « mahométisme », qui est choquant pour eux. Pour moi, ce que nous appelons maintenant « islamisme » n’est pas « l’islam », tout l’islam. Le français a la chance d’avoir deux articles, défini et indéfini. Je dis donc, en revanche, que l’islamisme est bel et bien « un islam ». Et un islam que je n’ai aucune raison de rejeter au-dehors. Qui serais-je, d’ailleurs, pour me permettre de l’exclure ? Ses partisans se considèrent eux-mêmes comme de bons musulmans, voire comme de meilleurs musulmans que les autres, qu’ils accusent d’une tiédeur capitularde. Et leur islam ressemble beaucoup à celui que pratiquait Mahomet lui-même, tel que nous le présente la biographie la plus ancienne que nous possédons de lui. C’est en tout cas ce que les gens du prétendu « État islamique en Irak et en Syrie » (Daech) ne manquaient pas de rétorquer aux critiques qui leur venaient d’al-Azhar et d’ailleurs. Il fallait donc regarder du plus près possible les textes faisant autorité auxquels se sont référés les musulmans à travers les siècles.

    — Vous avez choisi d’ouvrir votre livre par un chapitre consacré au terme « islamophobie ». En quoi ce terme alimente-t-il la confusion ?

    — Je dois bien avouer m’être un peu « lâché » dans ledit chapitre inaugural, voire m’y être soulagé. L’usage répétitif du mot « islamophobie » a en effet le don de m’exaspérer. Il permet de tout mélanger, alors que les philosophes aiment distinguer : confondre la religion avec ceux qui la professent, confondre le système dogmatique et juridique de cette religion avec la civilisation qu’il a marquée, voire dominée, mettre dans le même sac (en l’occurrence une poubelle) le racisme bête (si j’ose ce pléonasme) envers les immigrés et l’étude historico-critique des textes sacrés sur lesquels repose la religion, etc. Il interdit tout dialogue, puisqu’une « phobie » est toujours une forme de dérangement mental, et l’on ne perd pas son temps à discuter avec un aliéné. Enfin, le brandir comme une arme, ce que l’on fait le plus souvent, témoigne d’une mentalité paternaliste, quasiment néocolonialiste. On sous-entend que les musulmans seraient trop bêtes ou trop « princesse au petit pois » pour accepter un regard ne serait-ce qu’un peu distant sur leur religion.

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  • RDC : La septimana horribilis de Félix Tshisekedi

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    Et il la doit, comme l’explique Hubert Leclercq dans « la Libre Afrique », au jeu du pape régnant qui a remis en selle celui de la hiérarchie catholique congolaise, le chef de l’Etat et sa cour suivant sur la touche, comme l’avait déjà bien observé le politologue Jean-Claude Mputu :

    Felix  et le pape AP23031601848507.jpg

    « Après la visite papale, il n’est pas parvenu à mobiliser les chefs d’État de l’EAC, samedi, à Bujumbura.

    Sale semaine ! Le président Félix Tshisekedi avait pointé depuis quelques semaines les dates du 31 janvier au 3 février dans son agenda. Pas question de voyager à ces dates-là. Il avait rendez-vous à Kinshasa avec le pape François. La première visite d’un Souverain pontife en République démocratique du Congo depuis 37 ans, quand le pays s’appelait encore Zaïre. Jean-Paul II est venu deux fois chez le Maréchal Mobutu. “La première fois, c’était le 2 mai 1980”, se souvient Marie-Joseph, jeune sexagénaire de Limete, un des quartiers de Kinshasa sur la route de l’aéroport international de N’djili. Elle se souvient de “l’accueil exceptionnel reçu par le pape dès sa descente d’avion. C’était son premier voyage en Afrique. Il était venu directement chez nous. Tout Kinshasa voulait le voir. Le Maréchal (Mobutu, NdlR) était venu en personne pour l’accueillir”. Cinq ans plus tard, en décembre 1985, ces deux-là se retrouvaient une nouvelle fois à Kinshasa.

    Trente-sept ans plus tard, le pape François débarquait au pays de Félix Tshisekedi. Pour le chef de l’État congolais, mal élu, qui s’est recroquevillé sur son ethnie pour diriger le pays, qui s’est acheté une majorité politique à coups de billets verts, qui s’est fâché avec les grandes Églises catholique et protestante en imposant contre leur gré son président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) et qui est affaibli par les mouvements rebelles qui entament largement son autorité et sa capacité à gouverner le pays, ce voyage était le moment de fédérer, de lancer un mouvement de réconciliation et, simultanément, sa campagne pour la présidentielle de décembre prochain.

    Message papal sans ambiguïté

    Mais, dès son arrivée à Kinshasa, le pape a donné le ton et montré qu’il n’était pas venu pour tresser des couronnes de laurier sur la tête de ses hôtes. Après avoir condamné l’exploitation des richesses par des mains étrangères qui empêchent tout développement du pays et plongent des millions de Congolais dans la misère et la violence, le pape a pointé du doigt les lacunes et les responsabilités du régime dans cette situation. Corruption, repli ethnique, copinage,…“On sait que le Vatican connaît exactement la situation de ce pays”, explique un diplomate. “Il dispose du meilleur réseau d’information de ce pays. Son maillage est demeuré excellent. Il fallait voir ce qu’il allait en faire. Le Vatican, c’est aussi une diplomatie très fine. En ce sens, le message du pape est un vrai séisme pour le pouvoir congolais. L’Église catholique joue gros dans ce pays où elle doit compter au moins 40 millions de fidèles”. Du bout des lèvres, un autre diplomate ose le terme “marché” dans une “guerre des cultes face aux églises du réveil qui gagnent chaque semaine en influence”.

    L’armée burundaise compte ses morts au Sud-Kivu

    Le pape s’est rangé du côté du peupleIl a aussi remis en selle les évêques congolais qui avaient perdu un peu de leur lustre et qui avaient dû aussi freiner leurs ardeurs ces derniers mois pour ne pas créer de tensions excessives pour ce déplacement papal”, nous expliquait fin de semaine dernière Jean-Claude Mputu, politologue et chercheur congolais. Le cardinal Fridolin Ambongo n’a pas tardé à prendre la balle au bond, y allant de sa critique contre les errements du pouvoir, mais aussi vis-à-vis du processus électoral en cours.

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