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Europe - Page 37

  • Comment la Russie raconte son "opération spéciale"

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    De Vatican News :

    Analyse : comment la Russie raconte son "opération spéciale"

    Entretien avec Carole Grimaud-Potter, professeure de la géopolitique de la Russie à l’université de Montpellier, et fondatrice du centre de réflexion CREER.

    Entretien réalisé par Claire Riobé - Cité du Vatican

    Si l’Ukraine est assiégée, la société russe est verrouillée. C’est une autre forme de guerre, celle de l'information, à laquelle se livre le Kremlin depuis quelques semaines, au sein de son territoire. Le pouvoir russe, qui a patiemment élaboré une version alternative du conflit en cours, présente ce dernier comme une «opération militaire spéciale» menée pour rétablir la sécurité nationale. Autre discours véhiculé par Moscou : la supposée présence de néofascistes au sein du régime ukrainien, qui auraient effectué un génocide contre les russophones du pays.

    La censure mise en place par le Kremlin étouffe les médias libres de Russie et limite l'accès de la population aux réseaux sociaux occidentaux, tels que Facebook, Twitter, Instagram ou encore What’s App. Le début du conflit a également sonné le glas de deux piliers de l'intégrité journalistique russe, la radio Ekho Moskvy (l'Echo de Moscou) et la chaîne de télévision Dojd (La pluie) qui ont fermé leurs portes une semaine après le blocage de leur site Internet.

    Comment le pouvoir russe construit-t-il son narratif de la guerre en Ukraine ? Quelles conséquences ce nouveau récit véhiculé par les médias d'Etat a-t-il sur la population ? Carole Grimaud-Potter est professeure de la géopolitique de la Russie à l’université de Montpellier et fondatrice du centre de réflexion CREER sur la Russie post-soviétique. Elle analyse la version du conflit en Ukraine livrée par le pouvoir russe, et les moyens mis en œuvre par le Kremlin pour la diffuser.

    Entretien avec Carole Grimaud-Potter

  • Ukraine : le pape en a-t-il dit assez ?

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    De Massimo Introvigne sur Bitter Winter :

    Le pape François et l'Ukraine : En a-t-il dit assez ?

    16/03/2022

    Dimanche dernier, le pape a enfin utilisé le mot "agression", mais toujours sans nommer la Russie. Pour certains, c'est trop peu, trop tard. Pourquoi est-il si prudent ?

    *Traduction d'un éditorial publié dans le quotidien italien Il Mattino le 15 mars 2022.

    Dimanche dernier, le 13 mars, le pape François est allé au-delà de ses précédentes déclarations sur l'Ukraine, qui se contentaient d'appeler à la paix et de condamner la guerre. Il a mentionné explicitement une "agression armée inacceptable" et la "barbarie" des bombardements qui visent "les enfants, les innocents et les civils sans défense." Il a également condamné ceux qui "profanent le nom de Dieu" pour justifier la guerre.

    Andrea Tornielli, qui n'est pas seulement un observateur de longue date du Vatican mais qui occupe une position officielle en tant que directeur éditorial du Dicastère de la Communication du Saint-Siège, a expliqué que la référence, non explicite mais claire, était précisément au patriarche de l'Église orthodoxe russe, Kirill, qui, le 6 mars, avait béni l'invasion en la présentant comme une "guerre métaphysique" contre l'Occident corrompu qui autorise les défilés des Gay Pride.

    Ce n'est peut-être pas un hasard si, dimanche, le Saint-Siège a rompu le silence qu'il gardait depuis plusieurs jours sur la mesure très grave prise par un fidèle allié de Moscou, le Nicaragua. Le président Ortega avait expulsé le nonce apostolique Sommertag après que les escadrons du régime l'eurent menacé et même battu. M. Sommertag a longtemps critiqué la situation des droits de l'homme au Nicaragua, mais les tensions internationales ont certainement joué un rôle dans son expulsion, condamnée comme "sans précédent" et "incompréhensible" par le Vatican. Le président Ortega est tellement pro-Poutine que son visage orne même les pièces de monnaie d'une unité de l'Ossétie du Sud, l'une des pseudo-républiques créées par les Russes en territoire géorgien, parallèlement à celles qu'ils ont établies en Ukraine.

    Dimanche également, le Saint-Siège a laissé filtrer la nouvelle selon laquelle une nouvelle rencontre entre le pape et Kirill, que les médias russes ne cessent de donner comme prévue pour cet été, sera probablement annulée.

    Un certain nombre d'observateurs italiens ont noté et célébré ces développements comme un tournant dans la position du pape François sur la guerre en Ukraine. Peut-être le pape lui-même, en observant les réactions vingt-quatre heures plus tard, a-t-il été surpris de constater qu'en Ukraine même, dans une grande partie de l'Europe de l'Est et aux États-Unis, la perception était différente de celle de l'Italie et que sa position était encore classée dans la plupart des cas dans la catégorie "trop peu, trop tard". Que manque-t-il dans les propos du pape François ?

    Il n'y a pas de condamnation explicite de la Russie et de Poutine. La vieille règle catholique "on mentionne le péché mais jamais le pécheur" est très bien pour les confessions mais moins appropriée lorsqu'un État attaque et bombarde un autre État. C'est bien de condamner l'agression et les bombes, objectent les critiques, mais si vous ne nommez pas l'agresseur et ne mentionnez pas qui lance les bombes, le discours reste quelque peu suspendu au milieu.

    Pour sa part, le cardinal secrétaire d'État Parolin a rappelé que la "résistance armée face à l'agression" est légitime selon la morale catholique, se distançant du pacifisme absolu répandu dans certains milieux catholiques. Mais il a également affirmé qu'"après la chute du mur de Berlin, nous n'avons pas été capables de construire un nouveau système de coexistence entre les nations qui aille au-delà des alliances militaires ou des convenances économiques." Il a peut-être raison, mais il le fait au mauvais moment, car ses propos semblent en quelque sorte critiquer l'OTAN et l'Union européenne et ouvrir une brèche par laquelle peuvent passer les prétextes d'agression russes.

    Des voix se sont fait entendre parmi les évêques catholiques qui semblent soutenir davantage ceux qui brandissent les drapeaux de la paix, en évitant soigneusement de nommer et de condamner les agresseurs, que ceux qui brandissent les drapeaux des agressés qui résistent, c'est-à-dire les drapeaux de l'Ukraine.

    Pourquoi le Pape et le Saint-Siège se comportent-ils de la sorte ? Certes, parmi les évêques, et parmi les prêtres, religieuses et laïcs catholiques, il y a les nostalgiques d'un vieux gauchisme anti-américain et les admirateurs de la "revolución" à la sauce cubaine, vénézuélienne ou nicaraguayenne, qui se range aujourd'hui du côté de Poutine.

    Cependant, dans les hautes sphères du Vatican, la motivation est différente. Après un moment de plus grande distance dans les années où le pape à Rome était polonais - les catholiques polonais et les orthodoxes russes n'ont jamais été les meilleurs amis -, un professeur allemand comme Benoît XVI et un jésuite argentin comme François ont beaucoup investi dans la reconstruction d'une relation, d'abord diplomatique, puis même amicale, avec le patriarche Kirill et son Église. Rome a même mis à profit, en impliquant Poutine lui-même, des causes communes : la défense des communautés chrétiennes du Moyen-Orient menacées de disparition, la protestation contre l'idéologie du genre et une hostilité commune au mariage homosexuel.

    Il est vrai que François est moins sensible à ces questions que ne l'était Ratzinger, et que Kirill en a offert une version de plus en plus caricaturale, justifiant comme une prétendue défense des chrétiens menacés par l'État islamique tous les bombardements de Poutine et les méfaits d'Assad en Syrie, et plus récemment utilisant la critique de la Gay Pride pour justifier l'agression contre l'Ukraine comme une guerre sainte contre la corruption occidentale. Mais François, qui a hérité de son passé péroniste argentin une critique des États-Unis de type tiers-mondiste, est à d'autres égards plus enclin à comprendre l'anti-américanisme de Poutine et Kirill que ne l'était le pro-américain Ratzinger.

    De Benoît XVI à François, les efforts du Vatican pour renouer avec l'Église orthodoxe de Moscou ont été immenses. Kirill, pour sa part, a accompagné ces efforts au prix de la perte des orthodoxes conservateurs radicaux pour qui les papes de Rome sont des hérétiques à qui il ne faut pas parler. On peut comprendre que le Saint-Siège hésite à abandonner cet énorme investissement avant même qu'il ait porté ses fruits, condamnant Kirill et Poutine, qui ressemblent de plus en plus à une seule et même personne, non seulement implicitement mais en les appelant par leur nom.

    Il y a un parallèle ici avec l'investissement de François sur la Chine, Xi Jinping, et l'Église catholique "patriotique" fidèle au régime de Pékin, autrefois considérée comme schismatique et excommuniée et maintenant accueillie de nouveau, avec l'accord que le Vatican a signé en 2018. Même cet accord n'a pas rapporté de dividendes jusqu'à présent. Le Saint-Siège est patient, mais il s'est également retrouvé bâillonné lorsque le reste du monde libre a condamné la Chine pour sa répression à Hong Kong et le génocide des Ouïghours au Xinjiang.

    Il y a, bien sûr, des points de rupture. Un bombardement ou une attaque sur Kiev faisant des milliers de victimes civiles obligerait probablement Francis à citer des noms. Mais jusqu'à présent, la réticence à abandonner un investissement de plus de dix ans dans Kirill continue d'agir comme un frein.

    Depuis la parution de cet article, le mercredi 16 mars, il y a eu un entretien en video-conférence entre le pape et le patriarche Kirill dont on trouvera le compte-rendu ICI. Durant cet entretien, le patriarche russe s'est abstenu de prononcer une seule fois le mot "guerre".

  • "Rien ne justifie la décision de l'autocrate Poutine d'engager l'Ukraine dans une troisième guerre" (cardinal Müller)

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    Du cardinal Müller sur kath.net/news :

    Guerre contre le peuple ukrainien : "Une seule personne qui prend une mauvaise décision peut détruire de nombreuses valeurs".

    15 mars 2022

    "Rien ne justifie la décision de l'autocrate Poutine d'engager l'Ukraine dans une troisième guerre visant à l'asservissement total de ce peuple quel qu'en soit le prix" - Éloge de la Pologne ! - Commentaire invité du cardinal Gerhard Müller

    Vatican (kath.net/pl) "Un seul homme qui prend une mauvaise décision peut détruire beaucoup de valeurs" (Koh 9,16.18). Cette parole du livre de l'Ecclésiaste vient à l'esprit lorsque l'on pense à l'absence de scrupules de dictateurs qui, en tant que personne unique et par décision solitaire, ont déclenché des catastrophes, comme par exemple Hitler avec son invasion de la Pologne lors de la IIe Guerre mondiale. Guerre mondiale. Et rien de ce qui peut être dit sur les tensions de la Russie avec l'OTAN, les Etats-Unis ou l'"Occident" ne justifie la décision de l'autocrate du Kremlin de lancer une troisième guerre contre l'Ukraine, qui vise à soumettre totalement ce peuple, quel qu'en soit le prix en termes de destruction de vies humaines et de dévastation des valeurs culturelles et des infrastructures.

    C'est précisément parce que les "Grands Russes" moscovites, les "Petits Russes" ukrainiens et les "Biélorusses" de Minsk sont liés par leurs racines historiques, qu'il est interdit de prendre Caïn comme modèle pour tuer son frère Abel. Les juifs et les chrétiens savent que Dieu est le créateur et le père de tous les hommes. En conséquence, tous les hommes, s'ils croient vraiment en Dieu, se respectent en tant que frères et sœurs.

    La grande majorité des Russes et des Ukrainiens professent le christianisme de type orthodoxe depuis plus de 1000 ans. Ils se réfèrent à l'événement historique du baptême de la Rus' de Kiev le 28 juillet 988 et cela signifie que ceux qui croient au Christ, le fils de Dieu, sont devenus des enfants et des amis de Dieu. C'est pourquoi l'apôtre dit aux baptisés : "Mettez vos membres au service de Dieu comme des armes de justice". (Rm 6, 13). Aucun responsable qui reconnaît la loi morale naturelle que Dieu a inscrite dans notre conscience et qui confesse publiquement son attachement à Jésus-Christ, le Sauveur du monde, ne pourra donc remettre en question le refus de la guerre comme moyen légitime de la politique. "Ce qui s'oppose à la vie, comme toute forme de meurtre, de génocide, tout ce qui porte atteinte à l'inviolabilité de la personne humaine... et d'autres actes honteux sont une décomposition de la culture humaine, avilissent bien plus ceux qui commettent l'injustice que ceux qui la subissent. En même temps, ils sont au plus haut point contraires à l'honneur du Créateur". (Vatican II, Constitution pastorale "L'Église dans le monde de ce temps" Gaudium et spes 27).

    Face à la différence éthique entre l'agresseur et la victime de l'agression, les évêques allemands ont souligné le principe de la "juste défense", justifiant ainsi explicitement la livraison d'armes occidentales à l'Ukraine envahie. Mais il est également du devoir des évêques, en tant que serviteurs de la parole du Christ, de ne pas laisser le défi s'arrêter au niveau militaire et politique.

    Il a toujours été faux de "bénir" les armes, même si elles servent à la défense, car elles provoquent la mort et la souffrance, ce qui est contraire à la volonté de salut de Dieu. En effet, les armes de défense ne sont qu'un mal inévitable qui peut certes repousser des attaques injustes, mais qui ne peut pas produire le bien supérieur de la paix et de la réconciliation des hommes et des peuples. Seul Dieu peut le faire, c'est pourquoi nous l'implorons avec ferveur dans nos prières. Les évêques n'appartiennent pas à l'entourage de certains hommes politiques, pour qui un accompagnement moral et religieux de leurs décisions est trop bienvenu à des fins de propagande. En cette heure, il est du devoir de tous les évêques et prêtres d'appeler les croyants à prier pour la paix, afin que Dieu éveille le cœur des puissants au discernement et la conscience des profiteurs de guerre au repentir et à la conversion. L'Église, en tant que communauté de foi, d'espérance et d'amour, ne combat pas avec des armes militaires qui tuent et blessent, "contre des hommes de chair et de sang". Les croyants en Christ combattent avec les "armes spirituelles", à savoir "la justice, l'Évangile de paix, le bouclier de la foi, le casque du salut, l'épée de l'Esprit, c'est-à-dire la Parole de Dieu contre les puissances et les autorités, contre les dirigeants mondiaux de ces ténèbres et de cette méchanceté" (cf. Éphésiens 6, 10-20).

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  • La conversion de la Russie

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    Du Père Simon Noêl osb sur son blog :

    La Conversion de la Russie

    L'actualité nous incite à reparler de Fatima. Rappelons d'abord ces paroles de notre Mère du Ciel le 13 juillet 1917 : Le Saint-Père me consacrera la Russie, qui se convertira et un temps de paix sera donné au monde. Saint Jean-Paul II a fait en 1984 une consécration du monde à la Sainte Vierge et celle-ci a été faite aussi dans l'univers entier par les évêques. Une question demeure discutée : a-t-il fait une mention implicite de la Russie dans sa manière de s'exprimer ? En tout cas, en 1989, le mur de Berlin cesse d'exister, et deux ans plus tard l'URSS s'effondre. Est-ce là une première réponse du ciel ? Il me semble que oui.

    Mais avec seulement ses 2% de pratique religieuse mensuelle, avec son taux d'avortements plus élevé qu'en occident, avec maintenant son attitude belliqueuse et sa guerre fratricide, on peut affirmer que la Russie ne s'est pas encore convertie. Il faut donc continuer à prier pour la conversion de la Russie et la paix universelle, promises par Notre-Dame.

    Une prophétie privée doit avoir les mêmes caractéristiques qu'une prophétie biblique. Elle peut avoir plusieurs sens et elle peut de même se réactualiser à plusieurs reprises dans l'histoire. Nous avons tant prié, dans ma jeunesse, pour la conversion de la Russie communiste athée. Mais, notons-le, ce que la Sainte Vierge a demandé, ce n'est pas la conversion d'un système idéologique abstrait, mais la conversion d'un pays. Et de ce fait sa demande redevient actuelle.

    Les évêques catholiques latins ukrainiens ont récemment demandé au pape de consacrer la Russie et l’Ukraine au Cœur Immaculé de Marie. C'est un signe providentiel. Ce n'est pas l'OTAN qui sauvera l'Ukraine, mais une intervention céleste. Qui sait ? Certes cette guerre fratricide entre chrétiens est horrible et on ne peut que la désapprouver et soutenir tous les efforts diplomatiques pour y mettre fin. Mais la Providence permet le mal pour qu'en sorte du bien. La situation peut devenir tellement apocalyptique et insoutenable, car le danger d'un recours aux armes nucléaires et une extension du conflit sont possibles. Dans ce cas il n'y aura plus que la solution surnaturelle : une consécration de la Russie faite dans toute l’Église au Cœur Immaculé de Notre-Dame. La Russie redeviendra alors un pays vraiment chrétien et le miracle de la paix mondiale et un nouveau départ pour l'évangélisation seront possibles. Telle est notre espérance, ouverte par le message de Fatima.

    Mais pourquoi une consécration de la Russie et de l'Ukraine ? Tout simplement parce que Kiev est le berceau de la Russie chrétienne, avec le baptême de Saint Vladimir. L’État dont il était le monarque s'appelait la Rus, et son baptême concernera aussi bien l'histoire de l'Ukraine que celle de la Grande Russie. Russes et Ukrainiens sont frères et sont appelés à l'amour des ennemis et au pardon et la réalisation de cette « utopie » sera un miracle applaudi par toutes les nations du monde. Relisons ce que Soljénitsine a écrit sur les relations entre Russes et Ukrainiens.

    Et l'avenir de l’œcuménisme dans tout cela ? C'est le secret de Dieu. Pourquoi ne pas espérer aussi comme fruit de notre prière, l'unité rétablie entre tous les chrétiens, unité comme Dieu la voudra et quand Dieu la voudra, selon les propos pleins d'espérance et de foi de l'abbé Couturier ? Dans la ligne du dernier concile, pourquoi ne pas envisager un rétablissement formel de l'unité et de la communion sacramentelle entre Rome et Moscou, l’Église russe gardant sa liturgie et ses traditions spirituelles propres, qui sont un trésor indéniable que nous pouvons nous aussi découvrir.

    Un dernier point. Fatima est une révélation privée, devant laquelle tous sont libres d'adhérer ou non. On ne peut avoir de certitude absolue en ce qui concerne les apparitions. Mais quand on sait la prudence consommée de l’Église face à ces phénomènes, le fait que ceux de Fatima aient été, après des années d'examen minutieux, reconnus comme d'origine surnaturelle, le fait que quatre papes successifs se soient rendus en pèlerinage à la Cova da Iria, nous donne une certitude morale très haute en ce qui concerne la véracité de la prophétie reçue alors par les trois petits bergers.

    Quoi qu'il en soit la parole de Notre-Seigneur quant à elle demeure infaillible : Demandez et vous recevrez.

    Note : Nous avions écrit cet article le 14 mars. La nouvelle est tombée ce 15 mars. Le Saint-Père consacrera l'Ukraine et la Russie le 25 mars prochain. Deo gratias et Mariae.

  • La 'guerre sainte' du patriarche Kirill, ancien espion du KGB

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    Un entretien avec Antoine Nivière, professeur à l’Université de Lorraine, spécialiste de l’histoire culturelle et religieuse russe sur le "Journal Chrétien" (Anne-Sylvie Sprenger) :

    Ukraine: la guerre sainte du patriarche Kirill, ancien espion du KGB

    Entre un passé d’espion pour le KGB à Genève, de la contrebande de cigarettes avec l’Irak et son chalet en Suisse, qui est Kirill de Moscou, le patriarche de l’Église orthodoxe russe, qui soutient Poutine dans sa guerre en Ukraine?

    Alors que le monde entier tournait ses regards vers le patriarche Kirill de Moscou, l’invoquant de faire entendre raison au président Poutine, le chef de l’Église orthodoxe russe a délivré, dimanche dernier, un sermon glaçant, ne laissant plus aucun doute quant à sa position personnelle. Mais que sait-on de ce personnage aussi influent que mystérieux, dont les propos bellicistes ont choqué jusque dans ses rangs? Entretien avec Antoine Nivière, professeur à l’Université de Lorraine, spécialiste de l’histoire culturelle et religieuse russe.

    Comment décryptez-vous l’attitude du patriarche Kirill depuis le début de l’invasion russe en Ukraine?

    Celle-ci est dans la lignée d’une longue tradition du patriarcat de Moscou, qui manifeste des liens étroits avec les autorités, autrefois de l’Union soviétique et aujourd’hui du régime du président Poutine. Malgré les affirmations qu’il s’agit d’une Russie nouvelle, le patriarche Kirill est resté dans le prolongement de l’URSS et de ses services secrets, dont il est lui-même issu.

    Tout comme Poutine, le chef de l’Église orthodoxe russe vient du KGB?

    Tout à fait. Quand les archives du KGB ont été brièvement accessibles à une commission d’enquête parlementaire de la Douma au début des années 1990, celui qui n’était alors que l’archevêque Kirill (Goundiaev) y apparaissait sous le nom de code «Mikhailov» en tant qu’agent recruté par le KGB au sein du clergé du patriarcat de Moscou. Et cela notamment en raison de ses fonctions comme représentant du patriarcat auprès du Conseil œcuménique des Églises (COE) à Genève. Cela avait été publié dans la presse russe de l’époque.

    On serait donc toujours dans une forme d’union sacrée entre l’État et l’Église?

    On est dans une double union. Premièrement, il y a cette tradition de soumission de la hiérarchie de l’Église orthodoxe au pouvoir politique, qui remonte jusqu’au Moyen Âge, mais qui a été renforcé à l’époque soviétique par un contrôle absolu et une utilisation de l’Église au profit des intérêts politiques de l’URSS, notamment sur la scène internationale à partir de la Seconde Guerre mondiale.

    Mais il y a une deuxième tradition, presque millénaire, qui est celle d’un nationalisme centré sur l’orthodoxie. Poutine a beaucoup joué là-dessus. Après la disparition de l’idéologie marxiste de l’époque soviétique, il fallait remplacer ce vide, ce vacuum, et la religion a été rapidement perçue comme un élément d’identification national fort qui permettait de se distinguer de l’Occident.

    « Kyrill a été recruté comme espion du KGB, notamment en raison de son rôle au COE à Genève »

    ANTOINE NIVIÈRE, SPÉCIALISTE DE L’HISTOIRE CULTURELLE ET RELIGIEUSE RUSSE

    C’est donc ainsi qu’il faut comprendre l’ homélie du 6 mars, où le patriarche évoquait la notion de guerre sainte?

    Absolument. À l’instar de Poutine, le patriarche Kirill a fait sienne la théorie du choc des civilisations. Cela fait plusieurs années qu’il se fait le propagateur de ce qu’il appelle le «monde russe», soit un monde orthodoxe et nationaliste, mettant en avant les valeurs traditionnelles et s’opposant à l’Occident, perçu comme perverti, décadent et moralement dégénéré. D’où notamment sa grande diatribe sur les gay prides, qui relèveraient d’un plan des Occidentaux pour détruire la société russe. Pour lui, la responsabilité de ce conflit incombe aux Occidentaux, qui souhaitent imposer ce genre de comportements.

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  • Les conservateurs pro-Poutine sont victimes d'une erreur culturelle

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    Des propos recueillis par Nico Spuntoni sur la nuova Bussola Quotidiana :

    Les conservateurs pro-Poutine sont victimes d'une erreur culturelle

    14-03-2022

    L'historien britannique Tim Stanley, chroniqueur au Telegraph, explique à la NBQ pourquoi l'idée d'une Russie post-soviétique comme rempart chrétien contre un Occident sécularisé n'a jamais été vraie : "Poutine a essayé de restaurer la Russie telle qu'elle était vers 1900". Mais en même temps, il est faux de penser que l'Ukraine se bat au nom de la démocratie : "La vérité est qu'ils se battent pour leurs maisons, leurs terres et leurs familles".

    "Qu'est-il arrivé à la tradition ? History, Belonging and the Future of the West", publié en 2021 par Bloomsbury, est un texte qui mérite d'être lu pour s'orienter dans le monde du conservatisme mondial qui se remet de l'effet de la pandémie et de la gueule de bois Brexit-Trump. Son auteur Tim Stanley, historien et chroniqueur au "Telegraph", de confession catholique, s'est également attardé - avec un regard critique - sur la restauration de Poutine qui a également impliqué directement l'Église orthodoxe russe.

    L'image d'une Russie post-soviétique et post-eltsinienne comme rempart du christianisme face à un Occident de plus en plus sécularisé a eu un certain succès dans le monde conservateur. Mais, est-ce encore acceptable après l'éclatement de la crise ukrainienne ? En réalité, pour Tim Stanley, cela n'a jamais été vrai et il explique ses raisons dans cet entretien avec la Nuova Bussola Quotidiana.

    Lorsque vous avez parlé de la symphonie de l'Eglise et de l'Etat en Russie, vous avez écrit : "lorsque la foi et la nation deviennent synonymes, il y a un risque que la foi devienne un label d'identité plutôt qu'un système de croyance vécu". Craignez-vous que cela ne devienne la motivation idéale pour une offensive militaire en Ukraine ?

    Il y a deux points de vue sur la foi et l'invasion. L'une consiste à dire que Poutine, contraint d'agir en raison de la menace d'expansion de l'OTAN, est le défenseur de la civilisation orthodoxe, qu'il prend des mesures pour unir un peuple divisé et pour tenir tête au sécularisme occidental agressif. Je ne sais pas combien de Russes pensent réellement cela, car il est difficile de distinguer la propagande du Kremlin du sentiment populaire. L'autre opinion est que les actions de Poutine sont l'antithèse même du christianisme : violence, intimidation, massacre des innocents. Nous assistons donc à un conflit classique entre la foi en tant qu'identité ethnique/politique et la foi en tant qu'ensemble de croyances spirituelles qui devraient réellement transcender l'ethnicité. Ce dilemme est partout. À un certain niveau, je suis moi aussi nationaliste : j'aime mon pays et je veux le voir gagner, et je veux protéger son caractère chrétien distinctif contre les civilisations concurrentes. D'un autre côté, ma foi est universelle : lorsqu'une partie de l'église humaine souffre, qu'il s'agisse d'orthodoxes à Kharkiv ou de musulmans à Alep, tout le corps hurle de douleur.

    Vous avez lancé un appel aux conservateurs il y a plus d'un an : ne tombez pas dans le piège de penser que Poutine mène une contre-révolution culturelle. Pensez-vous que la fascination des conservateurs pour Poutine survivra à cette guerre ?

    Presque personne en Occident, à droite ou à gauche, n'a déclaré que l'invasion de Poutine était moralement légitime. Tucker Carlson et quelques-uns de la droite américaine disent que "ce n'est pas notre affaire", sans doute parce qu'ils s'arrachent la loyauté de l'électeur moyen de Trump - mais ce faisant, ils se trompent en réalité sur Trump. Il prétend avoir menacé de bombarder Moscou si Poutine l'envahissait et dit maintenant que l'Otan est trop mou. Je pense que la réputation de Poutine en a pris un coup terrible. En revanche, j'ai été fasciné de constater comment ma propre mère a réagi émotionnellement aux réfugiés ukrainiens. "Ils sont tellement religieux", dit-elle avec approbation, "et ils aiment leurs grands-mères". Ce n'est pas une guerre Est contre Ouest, c'est presque une guerre civile entre communautés chrétiennes.

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  • Saint-Siège : désigner l’agresseur sans pour autant mentionner la Russie

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    De Loup Besmond de Senneville sur le site du journal la Croix :

    « Au nom de Dieu, je vous le demande : arrêtez ce massacre ! », supplie le pape François

    Analyse

    Le pape François a lancé, dimanche 13 mars, un vibrant appel en faveur de la paix en Ukraine. En dénonçant ceux qui « profanent le nom de Dieu » en défendant la violence, il a aussi répondu indirectement au patriarche Kirill de Moscou.

    13/03/2022

    Depuis plusieurs semaines, rarement le pape a semblé à la fois aussi ému et ferme, à la fenêtre de la place Saint-Pierre, que ce dimanche 13 mars. À l’occasion de son Angélus dominical, le pape François a lancé un appel vibrant pour la paix en Ukraine« Au nom de Dieu, je vous demande : arrêtez ce massacre ! », a-t-il supplié.

    Avant de faire prier la foule, réunie devant la basilique, le pape a « imploré » la fin de la guerre, faisant part de sa « douleur ». « Devant la barbarie et le meurtre des enfants, des innocents et des civils désarmés, il n’y a aucune raison stratégique qui tienne. Il faut arrêter l’inacceptable attaque armée, avant qu’elle ne réduise les villes à des cimetières », a-t-il tonné, après avoir évoqué la situation de Marioupol, dont l’hôpital pédiatrique a été bombardé par l’armée russe, mercredi 9 mars. « Marioupol est devenue une ville martyre de la guerre épouvantable qui dévaste l’Ukraine », a déploré François.

    Le pape a également réclamé que la communauté internationale concentre ses efforts sur les « négociations » et l’ouverture de « couloirs humanitaires effectifs et sécurisés ». Il a aussi exhorté à accueillir les réfugiés« dans lesquels le Christ est présent ».

    Celui qui soutient la violence profane le nom de Dieu

    Car François a aussi appelé à une réaction spirituelle de la part des catholiques, demandant aux paroisses et communautés religieuses de prier davantage « pour la paix »« Dieu est seulement le Dieu de la paix, pas le Dieu de la guerre. Celui qui soutient la violence en profane le nom », a martelé le pape, avant d’appeler les 25 000 fidèles présents sur la place à prier en silence.

    Ces mots sur le Dieu de la paix peuvent être interprétés comme la réponse du pape à ceux qui, côté russe, défendent ce conflit comme une forme de guerre sainte. Dans une homélie très remarquée, dimanche 6 mars, le patriarche de Moscou, Kirill, avait placé le conflit en Ukraine sur le plan « métaphysique » de l’affrontement entre la « loi de Dieu » et le « péché ». Dimanche 27 février, il avait déjà fustigé ceux qui luttent – qualifiés de « forces du mal » – contre l’unité historique de la Russie et de l’Ukraine.

    Cet appel du pape constitue, de fait, une réponse aux critiques, exprimées ces dernières heures, accusant le pape de ne pas désigner assez clairement les responsabilités de la Russie, ou de ne pas dénoncer explicitement le soutien du patriarche Kirill à Vladimir Poutine. C’est notamment le cas de Mgr Stanislav Szyrokoradiuk, l’évêque catholique d’Odessa, qui a souhaité dimanche 13 mars, dans un entretien accordé à la télévision italienne TG7, que le pape aille plus loin dans ses propos.

    Si François a bien affirmé, dimanche 6 mars, qu’il s’agissait là d’une « guerre » et pas d’une « opération militaire spéciale », contredisant ainsi la rhétorique russe, le pape n’a en effet jamais désigné Moscou comme « agresseur ». Nourrissant ainsi l’impression d’une forme de « neutralité » du Saint-Siège dans le conflit.

    Équilibre délicat

    En réalité, la diplomatie vaticane tente de tenir un équilibre délicat. Les diplomates du Palais apostolique considèrent en effet qu’une condamnation explicite de la Russie pourrait clairement mettre en danger les 350 000 catholiques russes. « Il y a quatre évêques en Russie, tous avec la nationalité russe, avance une source au Vatican. Donc cela pousse le pape à ce positionnement. Par ailleurs, il est évident que sa personnalité est telle qu’il veut toujours laisser des portes ouvertes pour dialoguer. C’est le cas avec la Russie. Jean-Paul II aurait sans doute été beaucoup plus explicite : mais c’était une autre époque, et le pape était alors polonais. »

    Dans les faits, il est rarissime que le Saint-Siège se prononce expressément contre un belligérant dans un conflit en cours. « Nous ne prenons jamais un pays frontalement », confirme un diplomate. Un positionnement qui nourrit des critiques récurrentes : c’est le cas aujourd’hui avec la Russie, ce fut le cas en 2021 dans le délicat dossier de la reprise en main de Hong Kong par la Chine.

    Prière, négociations et couloirs humanitaires

    Concernant l’Ukraine et la Russie, cet appel du pape – le plus fort depuis le début des hostilités entre la Russie et l’Ukraine, le 24 février dernier – s’ajoute aux nombreuses initiatives prises par le Vatican ces derniers jours, pour plaider en faveur de la paix.

    Au fil des heures, l’appel à la prière, à la négociation entre les belligérants et le plaidoyer en faveur de l’ouverture de couloirs humanitaires pour permettre aux civils de fuir l’Ukraine sont devenus trois points centraux de la diplomatie vaticane. François, ainsi que le cardinal Pietro Parolin, le secrétaire d’État du Saint-Siège, ont également mentionné à plusieurs reprises l’ouverture du Vatican à prendre part à une médiation entre l’Ukraine et la Russie.

    L’Osservatore Romano, quant à lui, consacre depuis le début du conflit sa une quotidienne à la guerre. Le journal officiel du Vatican pointe ainsi très clairement du doigt les conséquences dramatiques des bombardements et des attaques opérés par l’armée russe. Une manière pour le Saint-Siège de désigner l’agresseur sans pour autant que le pape mentionne la Russie. Un équilibre délicat.

    Lire aussi : « Agression russe ». Le journal du Pape brise le tabou

  • Crise en Ukraine : les évêques de Belgique invitent à une intense solidarité

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    Communiqué de presse :

    Crise en Ukraine : les évêques invitent à une intense solidarité

    11 mars 2022

    Les évêques de Belgique sont profondément marqués par le vécu des Ukrainiens, ils invitent les chrétiens à exprimer de différentes manières, leur solidarité avec le peuple Ukrainien.

    D’abord, par le biais de Caritas, ONG mandatée par les évêques. Cela permet à la fois une professionnalisation de l’aide et une structure financière sûre. Caritas est membre du Consortium 12-12.

    Soutien par Caritas

    Le personnel et les volontaires de Caritas Ukraine fournissent diverses formes d’aide humanitaire. Ils fournissent de la nourriture et de l’aide médicale, organisent des secours psychologiques et mettent en place des « abris » où les victimes peuvent obtenir une protection.

    Les dons sont les bienvenus au BE88 0000 0000 4141 avec la référence « 4150 Ukraine ». Info : www.caritasinternational.be. Les dons donnent lieu à déduction fiscale.

    Premier accueil des réfugiés

    Les évêques recommandent aussi de se joindre aux initiatives publiques qui organisent le premier accueil de réfugiés. Les autorités fédérales ont lancé le site www.info-ukraine.be, dont l’objectif est de centraliser toutes les informations utiles sur la situation en Ukraine et son impact sur notre pays, et les indications pour accueillir. Un numéro d’information est également prévu : 02/488 88 88.

    Toutes les familles qui le peuvent sont invitées à accueillir, en particulier des mamans avec enfants, des personnes plus âgées, qui ont fui leur pays. Les communautés religieuses et les paroisses sont invitées à en faire autant. Elles pourront aussi mettre à la disposition des lieux de rencontre, pour les repas ou autres, ou contribuer à fournir repas et boissons aux réfugiés qui attendent d’être accueillis.

    Prière

    Les évêques invitent enfin à une prière intense pour la Paix.  Le Cardinal Jozef De Kesel, le Nonce Apostolique, Mgr Franco Coppola, et Mgr Hlib Lonchyna, administrateur apostolique pour l’Éparchie, concélébreront une messe trilingue pour la Paix, ce dimanche 13 mars à 17H à la cathédrale des Saints Michel et Gudule, en présence de membres de la Communauté ukrainienne. De chorales ukrainiennes rehausseront la liturgie.

    Les évêques remercient tous ceux et celles qui se sont déjà rendus disponibles pour les aides nécessaires.

    SIPI – Bruxelles, vendredi 11 mars 2022

  • "Cette guerre n’est pas celle de la Russie, mais celle de Poutine"

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    Des propos recueillis par Arthur Parzysz sur le site de la RTBF :

    GUERRE EN UKRAINE

    Philo : "C’est face au sentiment de déchéance de la puissance soviétique que réagit Poutine"

    12 mars 2022

    Comment penser l’Europe en temps de guerre ? Comment cette utopie, née du second conflit mondial, réagit-elle face aux actions d’une puissance russe frustrée ? Tous les deux réunis au Théâtre du Vaudeville dans le cadre des "Matins Philos" le philosophe Pascal Chabot et l’ancien haut fonctionnaire à la Commission européenne Christophe de La Rochefordière éclairent le conflit en Ukraine de leurs lumières philosophiques. Interview croisée, en sortie de scène.

    Les citations de Hannah Arendt "Les hommes normaux ne savent pas que tout est possible" et "une crise rend caduque tous les schémas de pensée" raisonnent avec cette actualité. Dans ce contexte de guerre, c’est aussi à une transformation complète de nos cadres habituels de pensée qu’on assiste .

    Christophe de La Rochefordière : La question de savoir si c’est une transformation complète reste à voir. Certains cadres de pensée vont rester, voire être renforcés. C’est le cas de la construction d’une alliance comme l’OTAN, par exemple. Macron avait dit qu’elle était en état de mort cérébrale, on voit bien que ce n’est pas le cas. Dans ce conflit, elle se coordonne et parle d’une seule voix, que ce soit sur le refus d’intervenir face à la terreur nucléaire ou sur la question de zone d’exclusion aérienne, réclamée par le Président Zelensky. Ce que dit Hannah Arendt, c’est que dans une crise, il faut tout remettre à plat. Si l’on continue de réfléchir à partir des cadres habituels, on risque de passer à côté de l’essentiel. On l’a vu avec Nord-Stream II. On a réagi à la suite de la realpolitik pratiquée auparavant, qui consistait à acheter du gaz russe alors que c’était une dictature. À ce niveau-là, je crois qu’il y aura des réajustements très radicaux. Et pas seulement au niveau économique, sur le plan militaire aussi. Les Allemands, par exemple, sont en train de réinvestir dans leur armée et ils ont créé un fonds spécial pour ça. On voit que les choses bougent assez vite. Mais ça ne veut pas dire que les anciens cadres sont complètement caducs pour autant.

    Pascal Chabot : Ordinairement, on distribue les événements de notre vie entre ce qui est probable et improbable. Quand elle dit que "les hommes normaux ne savent pas que tout est possible", Hannah Arendt signale que l’invraisemblable peut parfois se réaliser. Ce sont alors nos cadres mentaux qui sont remis en cause, nos habitudes de pensée qui vacillent et doivent se réinventer. Au niveau européen, ce qui change comme cadre mental avec cette guerre, c’est d’abord notre rapport à la paix, considérée comme un acquis. Voyant la guerre à nos portes, la puissance n’est plus un tabou et la force a été réinvoquée. Plus fondamentalement, on assiste à un retour du tragique, ce à quoi nous n’étions pas spécialement préparés. Mais le malheur avec ce tragique, c’est qu’on réapprend très vite à le voir…

    Face à quelqu’un comme Poutine, on n’a jamais d’autre choix que de tout essayer jusqu’à la dernière minute de matière diplomatique.

    Récemment, le chef d’état-major de l’armée française, Thierry Burkhard a expliqué qu’il y avait eu des divergences d’analyse entre France et les États-Unis sur les risques d’attaque russe. L’Europe a-t-elle été aveugle ?

    PC : La raison en est d’abord que la voie première est toujours la voie diplomatique. C’est là que l’Europe excelle. Il peut toutefois y avoir des phénomènes d’aveuglement, ou du moins de relativisation. Ces phénomènes traduisent un désir de ne pas croire ni réfléchir à des risques avant qu’ils ne surviennent. Ceci peut s’expliquer. Un des biais habituels est d’espérer que le pire ne se réalise pas, ce qui pousse à le minimiser. Un autre est de supposer la rationalité des acteurs impliqués, ce qui conduit à moins examiner les scénarios irrationnels, voire suicidaires. Or ici, c’est le pire et l’irrationnel qui prévalent.

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  • "Cette guerre a quelque chose de démoniaque" (le nonce apostolique en Ukraine)

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    De Vatican News :

    Le nonce apostolique en Ukraine: «cette guerre a quelque chose de démoniaque»

    Dans une interview à l'Aide à l'Église en Détresse, Mgr Visvaldas Kulbokas revient sur la situation à Kiev, la solidarité de la population et le drame de la guerre. En voici des extraits.

    D'origine lituanienne, Mgr Visvaldas Kulbokas est nonce apostolique en Ukraine depuis 2021. Il répond aux questions de Maria Lozano, responsable du service de presse de l'Aide à l'Église en Détresse (AED).

    Quelle est la situation actuelle à Kiev ?

    Depuis le 24 février, tous les jours, toutes les nuits, il y a des attaques de missiles dans diverses parties de la ville. À la nonciature, nous ne sommes pas dans une zone très centrale et jusqu’à présent, nous n’avons pas vu les bombardements de très près. Des combats corps à corps oui, nous les avons vus de plus près, pas dernièrement, mais il y a quelques jours. Mais il est très probable que tout va empirer dans les heures à venir. Dans d’autres villes comme Kharkiv, même les quartiers résidentiels ont été gravement touchés... Aujourd’hui, personne en Ukraine ne peut se sentir en sécurité. À quoi ressembleront les prochaines heures, les prochains jours ? Personne ne le sait.

    À certains égards, Kiev connaît encore une certaine tranquillité par rapport à d’autres villes : Irpin, qui est dans la banlieue de Kiev, ou Kharkiv, Tchernihiv ou Marioupol... Kiev a toujours un lien avec le monde extérieur, mais la crise humanitaire est très forte ici et dans d’autres villes d’Ukraine. Je porte cette préoccupation dans mon cœur et il n’est pas toujours possible d’apporter de l’aide. Parfois, même des agences comme Caritas ou la Croix-Rouge, ou même celles du gouvernement, ne sont pas en mesure de faire quoi que ce soit.

    Quelque chose a-t-il changé à Kiev depuis les premiers jours du conflit ?

    Quand la guerre a commencé, nous avions moins de capacité organisationnelle. Je parle non seulement pour moi-même, mais aussi pour ces organisations. Maintenant, il y a une bien meilleure préparation. Il semble que les forces militaires russes s’approchent du centre-ville, de sorte que ces derniers jours, les organisations humanitaires ont été encore plus actives. Caritas, la Croix-Rouge, les organisations paroissiales – non seulement les catholiques, mais aussi les orthodoxes et les musulmans font de même – essaient de voir qui sont les personnes les plus en difficulté et redistribuent de la nourriture, essaient d’évacuer ceux et celles qui sont dans les situations les plus difficiles, peut-être d’endroits où ils n’ont pas d’électricité ou de chauffage.

    Comment est l’approvisionnement ? Avez-vous de la nourriture et des boissons, de l’eau ? Y a-t-il des problèmes d’approvisionnement partout ou seulement dans certains secteurs ?

    À la nonciature, nous avons préparé des provisions avant le début de la guerre parce qu’on la percevait comme très probable. Je sais personnellement que certaines familles n’y croyaient pas et la guerre les a surpris sans provisions suffisantes pour plus de deux ou trois jours. Dieu merci, ces derniers jours, une certaine aide a réussi à atteindre Kiev. En outre, il existe des organisations telles que Caritas ou des groupes de volontaires qui apportent de la nourriture des villes voisines, sachant que Kiev est soumise à une attaque militaire plus soutenue. C’est toujours gratuit. La solidarité est totale. Il est difficile de savoir dans quelle situation se trouvent toutes les familles et combien de jours elles peuvent endurer, mais il est certain que la crise humanitaire est très intense.

    Comment décririez-vous l’état d’esprit des gens, leurs sentiments ? Les gens qui sont restés à Kiev ont-ils très peur ?

    Bien sûr. Je ne peux pas parler au nom de toute la population, mais je peux parler des gens que je vois personnellement : les prêtres, les bénévoles ou les collaborateurs de la nonciature. Il y a beaucoup d’inquiétude, mais vous pourriez décrire l’état d’esprit comme «vaillant». Nous sentons que nous devons faire face à cette tragédie ensemble, nous entraider et prier beaucoup. Je vois beaucoup d’optimisme. Malgré les grandes tragédies, je vois de l’optimisme chez beaucoup de gens, en particulier chez les prêtres et les religieux. Cependant, je ne pense pas que l’on trouvera le même optimisme chez les patients qui ont besoin d’un traitement ou chez les femmes qui accouchent ou avec des nouveau-nés.

    Diriez-vous que ce conflit a un aspect religieux ?

    Cette guerre a plusieurs motivations et certains prétendent y voir un certain élément religieux. Pour moi c’est complètement incorrect. Si nous regardons les Ukrainiens, par exemple, nous avons le Conseil des Églises et des organisations religieuses d’Ukraine, qui est très uni en ce moment, qui est proche du peuple et dont les membres se soutiennent mutuellement. Cela ne veut pas dire que toutes les difficultés ont disparu, car il est très clair que certains malentendus interreligieux ont joué un rôle dans le passé. Seulement, je considère qu’il est impossible d’utiliser cet argument pour motiver une guerre, car lorsqu’il y a des difficultés dans les relations interreligieuses, elles doivent être résolues d’une autre manière. Je remarque, surpris, que les difficultés que j’avais vues auparavant en Ukraine ont été considérablement réduites à l’heure actuelle. Le moment de la tragédie a donc uni le peuple ukrainien. Cela ne veut pas dire qu’il restera uni par la suite, mais c’est déjà un signe très positif.

    L’AED a annoncé une aide de 1,3 million d’euros pour les diocèses qui en ont le plus besoin, notamment pour soutenir le travail des prêtres et des religieux. À votre avis, quelle est l’importance de cette aide ?

    Toute aide qui vient sera grandement appréciée. À l’avenir, il est difficile de savoir exactement quels seront les besoins, mais de nombreuses structures sont endommagées. Donc, même au niveau structurel et organisationnel, il y aura beaucoup à faire parce que l’humilité, l’abandon total à Dieu, la solidarité et l’amour. Parce que dans tous les cas si nous sommes proches les uns des autres, si nous sommes proches de Dieu, si nous sommes fidèles, Lui-même prendra soin de nous. C’est pourquoi même dans cette guerre – qui n’est pas une invention purement humaine, mais qui a quelque chose du Malin, du diable, car toute violence en a – nous ne pouvons vaincre le mal que tous ensemble, le monde entier, avec le jeûne, avec la prière, avec beaucoup d’humilité et d’amour.

  • La première femme présidente de la Hongrie est contre l'avortement et en faveur de la famille

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    De pledgetimes.com :

    La nouvelle présidente de la Hongrie, Katalin Novák : "Les politiques pro-famille sont un investissement dans l'avenir"| Photo : Twitter/Play

    Contre l'avortement et en faveur de la famille : rencontrez la première femme présidente de la Hongrie

    11 mars 2022

    Par 137 voix contre 51 au Parlement hongrois, Katalin Novák, 44 ans, a été élue présidente du pays, devenant ainsi la première femme à occuper ce poste. Mariée et mère de trois enfants, Mme Novak est membre de Fides, le parti conservateur du Premier ministre Viktor Orbán, et a été ministre de la famille, de la jeunesse et des affaires étrangères de Hongrie.

    Elle est connue pour ses positions pro-vie et pro-famille, ayant donné des conférences sur les politiques mises en œuvre sous le gouvernement Orbán qui ont eu un impact sur la vie des couples avec enfants.

    "Les politiques pro-famille ne sont pas une dépense, mais un investissement dans l'avenir", a-t-il déclaré dans une interview de 2018. "Avoir des enfants est le moyen viable de survivre en tant que société", a déclaré Katalin, ajoutant que ce n'est que centré sur les intérêts de la famille que l'on peut former une nation forte.

    Dans une autre interview en décembre dernier, Novák a rejeté les accusations selon lesquelles il n'était qu'une simple marionnette pour accroître le pouvoir d'Orbán. "Ceux qui disent que je ne serais qu'une marionnette à ce poste dégradent non pas moi personnellement, mais les femmes en général. Ils ne peuvent pas supposer qu'une femme puisse être un fonctionnaire souverain capable de prendre des décisions autonomes", a-t-il déclaré.

    Dans son discours inaugural, Katalin Novák a renforcé le rôle de la femme dans son rôle.

    "Nous, les femmes, élevons les enfants, soignons les malades, cuisinons, sommes à deux endroits à la fois si nécessaire, gagnons de l'argent, enseignons, gagnons des prix Nobel et nettoyons les fenêtres. Nous connaissons le pouvoir des mots, mais nous savons aussi nous taire et écouter quand il le faut, en défendant nos familles avec plus de courage que les hommes si le danger menace", a déclaré la nouvelle chef d'État, également la plus jeune de l'histoire du pays.

    "C'est parce que je suis une femme, et non malgré cela, que je veux être une bonne présidente de la Hongrie", a-t-elle ajouté.

    Diplômée en économie de l'université Corvinus et en droit de l'université de Szeged, y compris des études à l'université de Paris Nanterre, Mme Novák parle français, anglais et allemand et travaille au ministère des affaires étrangères depuis 2001, se spécialisant dans l'Union européenne. Elle a récemment condamné l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

  • D'après Jean-François Colosimo, Vladimir Poutine serait en train de perdre

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    D'Europe1 :

    Jean-François Colosimo, théologien, éditeur et essayiste, répond aux questions de Sonia Mabrouk au sujet de la guerre en Ukraine, de la stratégie de Vladimir Poutine, des sanctions contre la Russie et de la résistance des Ukrainiens.