Lue sur le site « Benoît et moi », cette méditation de Joseph Ratzinger (24.08.1986) publiée en italien sur l'Osservatore Romano du 18/12/2015 (Extrait de « Le omelie di Pentling, Città del Vaticano », Libreria Editrice Vaticana, 2015) :
« En ce temps-là, Jésus traversait villes et villages, enseignant, tandis qu'il faisait route vers Jérusalem».
« Il ne l'a pas fait seulement alors: il le fait encore aujourd'hui. Aujourd'hui encore, il est avec nous tous en chemin vers Jérusalem, c'est-à-dire en chemin vers la cité nouvelle qui n'a plus besoin de temple, puisqu'il habite parmi nous, vers la cité nouvelle dans laquelle Dieu sera tout en tous, et ainsi nous serons tous l'un dans l'autre et l'un à l'autre. Lui, en réalité, ne s'est pas éloigné de l'histoire, mais il l'accompagne, de sorte qu'il nous accompagne vers cette Jérusalem, la cité vraie et définitive: et c'est pour cela, que l'autre chose est aussi possible, c'est-à-dire qu'il continue à traverser villes et villages, pour enseigner: même ici, à Pentling. Même ici, il est parmi nous et nous enseigne. Il est présent de diverses manières. Il est présent dans le mystère de l'Eucharistie, qui nous est toujours ouvert. Il est présent dans les sacrements. Il est présent à travers son Saint Evangile. Et puis aussi, du le mur de l'église, de la croix, il pose son regard sur le chemin quotidien de chacun de nous, il nous regarde et nous enseigne.
Prêtons attention à l'Évangile d'aujourd'hui pour mieux comprendre ce qu'il nous dit, ce qu'il veut nous enseigner (1). Il y a un homme qui aimerait beaucoup savoir quel sera l'issue ultime de l'histoire. Il lui demande s'ils seront peu ou nombreux, ceux qui à la fin seront sauvés. La réponse de Jésus est à la fois un reproche et un encouragement: «Efforcez-vous». Cela signifie que ce n'est pas à nous qu'il revient de nous demander comment l'histoire va finir; que nous ne devrions pas chercher à nous ériger nous-mêmes en juge universel, comme si nous regardions les cartes de Dieu pour tenter de comprendre la logique de ce monde et de nos propres vies. Chaque fois que nous faisons cela, chaque fois que nous prétendons résoudre et donner par nous-mêmes un jugement sur l'ensemble de l'histoire et de nos vies, nous nous égarons. Les hommes qui veulent faire cela finissent par vivre dans l'amertume, dans la colère et même dans l'inimitié envers Dieu, et cela parce qu'il est vrai que depuis la petite et partielle perspective de notre vie, nous ne pouvons pas voir et comprendre le tout.
C'est ce que Dieu dit à Job: «Cesse de vouloir être le juge universel! Ce faisant, tu ne feras que t'égarer». Quand nous commençons à vouloir dire à Dieu s'il devrait permettre Auschwitz ou non, s'il a été juste en ceci ou cela, nous choisissons une perspective que nous ne connaissons pas et à la fin, nous ne pouvons être que malheureux et confus. La tâche qui nous est donnée est une autre: ne pas élucubrer, mais vivre! Telle est la réponse de Jésus: vivre dans la confiance, autrement dit, porter notre vie devant lui et, autant que nous le pouvons, aider les autres à porter la leur, tout comme ils nous aident à porter la nôtre. Et, conformément à la lecture que nous venons d'entendre, reconnaître précisément dans ce qui nous arrive de plus incompréhensible qu'il nous traite comme des fils et des filles, que précisément dans ce que nous ne comprenons pas, il est celui qui nous aime. Si nous faisons cela, si nous cessons de vouloir juger, et si nous marchons, nous avançons, nous nous efforçons, alors nous acquérons le juste regard envers lui.