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Foi - Page 353

  • France : Le rapport Sauvé fait-il peser une menace sur l’Église ?

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    Purgatif ou boîte de Pandore ?  Lu sur le site web du mensuel « La Nef » ce jeudi 7 octobre :

    "Ce Rapport, a-t-on dit, allait constituer une « bombe » pour l’Église catholique.

    boite-pandore.jpgLes faits dénoncés sont déjà connus du public depuis plusieurs années. La nouveauté, c’est le diagnostic de leur ampleur, en France, et la publication de nombreux témoignages saisissants. Nouvelle, aussi, est la révélation de l’action prédatrice de nombreux laïques, comme aussi la mise en perspective des crimes de cette nature commis dans l’Église et dans le cadre d’autres institutions

    Il faut saluer le courage de l’épiscopat pour avoir décidé la mise en œuvre de cette enquête. Certes, en retard sur d’autres épiscopats, il ne pouvait pas ne pas prendre cette décision. Cependant, ce n’est pas parce que l’on est acculé à un choix que se trouve exclue la possibilité de l’affronter avec courage. Ce courage, l’épiscopat l’a eu, pour garantir le plus d’objectivité possible à l’enquête.

    Ce Rapport présente-t-il un danger pour l’Église catholique ? Assurément, la nausée qu’il provoque est de nature à détourner d’elle de nombreuses personnes, abattues par tant de vice et d’hypocrisie cléricale, tant d’exploitation révoltante du sacré et de la dignité sacerdotale auprès des faibles.

    Pour être des plus crue, la lumière projetée par ce Rapport n’en est pas moins salutaire. Non pour porter au misérabilisme collectif ; ni pour porter les catholiques, comme certains clercs s’empressent de le faire, à dire stupidement qu’ils « ont honte de leur Église », mais pour prendre l’exacte mesure d’un mal, s’en instruire utilement et s’en corriger, comme nous y porte l’expérience de chacune de nos chutes.

    Nos chutes. Cette relation à la responsabilité de chacun est importante. L’Église, en effet, est une institution. Mais elle n’est pas une institution comme une autre. Elle est un corps « mystique », c’est-à-dire caché, le Corps mystique du Christ, en lequel s’opère une intercommunication de tous ses membres. Le bien fait par chacun contribue à l’élévation de tous, tandis que le mal opéré affecte l’ensemble.

    Le danger du Rapport est de faire perdre précisément de vue aux catholiques eux-mêmes la nature de leur Église, et que ses organes, ses institutions, n’épuisent pas, loin s’en faut, tout son être. Le danger est d’imposer à leurs yeux l’image d’une institution sociale parmi d’autres, dont les désordres prétendument « systémiques » appellent des remèdes de même nature que ceux qui affectent toutes les autres.

    L’inclination sera forte dès lors, ici ou là, après un tel état des lieux, de dresser des diagnostics focalisés sur la gestion de la sexualité et de ses frustrations, et de proposer conséquemment des solutions sociales supposément réformatrices propres à les vaincre : le mariage des prêtres, l’introduction du sacerdoce des femmes, l’abolition du secret de la confession sacramentelle. C’est la pente suivie par l’épiscopat et la frange dominante du catholicisme allemand, jusqu’à l’hérésie incluse, par l’effondrement de l’ecclésiologie croyante dans le sociologisme naturaliste et mondain.

    Cette pente, et la tentation réelle qui l’accompagne, est importante à observer. Elle révèle que s’il existe ou a existé un immense désordre moral chez de nombreux clercs ou laïques dans le domaine de la sexualité, un autre désordre, autrement plus grave et plus profond est en arrière-plan, doctrinal celui-là, qui peut faire tourner le diagnostic opéré sur la prédation pédophile à la ruine de l’Église tout entière.

    Elle manifeste aussi la réalité du concours, voire de la connivence entre ces deux désordres : celui de la dépravation sexuelle et celui de la dépravation théologique, l’une servant finalement l’autre et tous deux concourant de fait aux mêmes fins.

    Ces observations, me semble-t-il, sont de nature à alerter la conscience droite des fidèles. La pourriture qui accompagne la marche difficile de l’église en ce monde n’est pas chose nouvelle. Celle qui nous est à présent signalée appelle, non pas une échappée dans un sociologisme destructeur, commandé par les impératifs des idéologies à la mode, sous couvert de bons sentiments et de compassion pour les victimes, mais un redressement théologal puissant, l’exigence d’un regard de foi plus aigu, plus pur, plus exigeant, fondé sur la prière, le sacrifice, la réparation.

    Au fond, comme tout scandale crucifiant, celui qui est aujourd’hui jeté en pâture au monde met chacun de nous devant ce choix : être davantage chrétien, ou cesser tout à fait de l’être.

    Patrick Poydenot "

    Ref.  Le rapport Sauvé fait-il peser une menace sur l’Église ?

    JPSC

  • Un catéchisme pour adultes

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    L'abbé Guillaume de Tanoüarn se lance dans la rédaction d'un catéchisme pour adultes :

    De quoi parle le catéchisme ?

    J'entreprends de rédiger un  catéchisme pour adultes sur ce blog. Pourquoi une telle ambition ? Parce qu'il manque, sur le marché, un catéchisme qui soit vraiment pour adultes mais qui reste simple d'approche. Le Catéchisme de l'Eglise Catholique est parfait quand on cherche une référence. Mais il est trop long pour servir de livre d'étude.  Le résumé qui en a été fait reste à mon avis trop intellectuel ; c'est encore un catéchisme très théologique et qui commence par la liturgie, ce qui ne me semble pas très simple. La foi n'est pas la théologie. La liturgie, comme je l'ai expliqué dans mon dernier livre, nous entraîne dans une véritable initiation de tout l'être au Mystère du Christ. Le catéchisme qui doit être clair, est avant tout le manuel qui explique à l'impétrant comment  participer au plan de salut de l'humanité, apporté par le Christ. La réponse est simple et en trois temps : le catéchisme enseigne ce qu'il faut croire, ce qu'il faut faire et les moyens à notre disposition pour croire et pour faire, que l'on nomme les sacrements.

    Prenons ces trois points l'un après l'autre : la foi d'abord, cette grande méconnue.

    C'est par la foi, non par la raison, que l'on participe au mystère du Christ. Qu'est-ce que la foi ? Ni une philosophie, ni une idéologie, ni même une théologie, nous venons de le dire. La foi dit saint Paul aux Hébreux est "la substance de ce que l'on espère". 

    Nous avons tous une espérance, ou alors on se flingue. Nous avons tous en nous l'idée que la vie est supérieure à la mort et qu'elle doit triompher. La question qui se pose est : où mettons-nous notre espérance ? En nous-même ? Dans notre courage physique ? Dans notre intelligence ? Dans notre volonté indéfectible de prendre la vie comme elle vient ? Tout cela peut nous induire à l'espérance, mais nous savons tous que face à ces forces dont nous sommes si fiers, la mort aura toujours le dernier mot. Faut-il se résigner à dire avec Heidegger que "l'homme est un être pour la mort " ? Notre vie serait une sorte de monstrueuse exception, une parenthèse vite refermée, un emballement sans lendemain de la logique biologique qui nous gouvernerait seule ? Ce pessimisme, s'imposant à la réalisation merveilleuse qu'est l'animal humain, est difficile à croire.

    Nous avons tous obscurément une autre espérance et nous en vivons : l'espérance que la science prolongera indéfiniment notre durée de vie... L'espérance qu'au dernier moment la vie l'emportera sur la mort d'une manière que Dieu connaît. La foi est universelle, comme l'espérance qu'elle nous représente. Ce qui fait de nous des chrétiens en devenir, c'est que nous pensons que seul le Christ peut nous sauver, c'est-à-dire faire triompher la vie en nous. Il est le seul dont on puisse dire ce qu'affirme l'évangéliste saint Jean dans le prologue de son Evangile : "En lui était la vie et la vie était la lumière des hommes". "Il est le premier né d''une multitude de frères" dit saint Paul de son côté, le premier des ressuscités et donc celui en qui et par qui nous pourrons ressusciter à notre tour par la foi en lui.

    Notre foi dans le Christ ne vient pas d'une démonstration rationnelle. Elle est la foi dans un Mystère, la résurrection, et elle est elle-même un mystère; quelque chose de caché à nos yeux, quelque chose que nous ne pouvons pas atteindre par un mouvement réflexe du type : "Je crois que je crois". Je crois ! Rien à voir avec "Je crois que". Je suis prêt au nom de ma foi à rendre compte de mon espérance. Maladroitement peut-être mais avec conviction. Les lambeaux de vérité que j'ai atteint, je suis prêt à les défendre comme si ma vie en dépendait. Parce que ma vie en dépend.

    Ce qu'il faut croire? La foi est si précieuse dans son contenu qu'elle a immédiatement fait l'objet de résumés que l'on nomme aujourd'hui kerugmata, proclamations. Le plus ancien de ces kérygmes nous est livré par saint Paul à la fin de la première Epître aux Corinthiens, vingt ans après la passion et la résurrection du Christ. Nous utiliserons, nous, le Credo de Nicée-Constantinople (324-385) qui présente une sorte de résumé de la foi chrétienne et nous le commenterons mot à mot..

    Deuxième point : Ce qu'il faut faire, Dieu a donné dix commandements à Moïse, il ne revient pas sur sa loi. Il n'y a pas abrogation. Mais dans l'Evangile, le Christ donne deux commandements,  le second étant dit semblable au premier : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout ton esprit". Et le second commandement : "Tu aimeras ton prochain comme toi-même"(Matthieu22, 39). Comme dit saint Paul : "L'amour est l'accomplissement du précepte" (Romains 13, 10). Sans amour, on n'accomplit pas les commandements de Dieu.

    Troisième point : quels sont les moyens que Dieu met à notre disposition pour que nous rentrions dans son plan de salut. Ce sont les sept sacrements, à commencer par le baptême. 

    Nous reviendrons sur ces deux points mais nous commençons tout de suite le commentaire du Credo.

  • Comment se mettre à l’école de la Tradition aujourd’hui ? Une leçon venue de Norvège

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    Un article de Sandro Magister, vaticaniste à L’Espresso, en traduction française sur Diakonos.be :

    Comment se mettre à l’école de la Tradition aujourd’hui. Une leçon de Norvège 

    Au cours de sa discussion à bâtons rompus du 13 septembre avec les jésuites de Slovaquie, le pape François en a dit des vertes et des pas mûres. Et entre autres, il a pointé du doigt “le mal de l’Église en ce moment” comme étant “l’idéologie du retour en arrière”. 

    Le Pape n’a pas employé le mot “tradition”. Mais c’est là que selon lui se niche la “perversion” de la “rigidité”. Il suffit de voir le titre moqueur, “Traditionis custodes”, du motu proprio par lequel, le 16 juillet dernier, il a décidé de décréter la fin de la messe dans l’ancien rite romain, en s’adressant aux évêques en tant que “gardiens de la tradition” pour leur imposer des règles qui font voler cette même tradition en éclats. 

    Mais en pratique, son motu proprio n’a pas eu l’effet qu’il escomptait. La plus grande partie des évêques ont laissé les choses en l’état, surtout en France et aux États-Unis, les deux pays dans lesquels la célébration dans l’ancien rite est la plus répandue. Beaucoup restent attachés à l’idée de tradition telle qu’elle a été théorisée et vécue par Benoît XVI selon laquelle, dans l’Eglise, l’ancien et le nouveau peuvent et doivent “s’enrichir l’un l’autre”. 

    Mais si un évêque devait prendre au sérieux le qualificatif de “traditionis custos” dont François l’a affublé, quelle leçon positive pourrait-il en tirer ? 

    Un évêque s’est prêté à cet exercice et en a parlé pour la première fois le 15 septembre dans la revue catholique progressiste anglaise “The Tablet” et ensuite sur son blog coramfratribus.com. Avec l’autorisation de ces deux médias, Settimo Cielo reproduit ci-dessous en plusieurs langues le texte intégral. 

    Cet évêque se nomme Erik Varden (photo). C’est un Norvégien de 47 ans, converti au catholicisme dans son jeune âge, il a étudié la théologie et la philosophie à Cambridge, s’est fait moine cistercien de la stricte observance, trappiste, et il a été abbé, en Angleterre, de l’Abbaye de Mount Saint Bernard dans le Leicestershire. Il a également étudié à Rome à l’Institut pontifical oriental et a enseigné quelques années à l’Athénée pontifical Saint-Anselme. Le Pape François l’a nommé évêque de Trondheim et il a reçu le 3 octobre 2020 l’ordination sacrée dans la cathédrale de la ville, la première depuis la réforme protestante. Sur une population de 700.000 personnes, disséminées sur un vaste territoire, il y a 16.000 catholiques, principalement des immigrés issus de nombreux pays du monde, comme dans une terre de mission. 

    Mgr Varden est également musicien et amateur de chant grégorien. Lors de la Vigile pascale de 2011, c’est lui qui a chanté l’Exultet dans la basilique Saint-Pierre de Rome. Il a publié en 2018 chez Bloomsbury un livre dont le titre laisse déjà entrevoir la référence à la tradition : “Shattering of Loneliness. On Christian Remembrance”. 

    Voici à présent sa docte et original lecture de la tradition, avec notamment des références étonnantes au patriarche Isaac, à Jean-Baptiste Montini, archevêque de Milan, et surtout à Pontien et Hippolyte, le premier pape à s’être démis dans l’histoire et son opposant, l’un novateur et l’autre traditionnaliste, réconciliés dans le martyre et la sainteté. 

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  • Requiem pour Bernard Tapie : parmi les mille facettes du personnage, il y avait celle du "croyant".

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    Tapie 870x489_maxnewsspecial410919.jpgComme chez François Mitterrand et bien d’autres vedettes du théâtre d’ombres que constitue cette vie passagère, la dimension religieuse n’était pas absente dans le répertoire de Bernard Tapie. Jusqu’à quel point? C’est le secret intime entre Dieu et chaque créature humaine. Sur le site « aleteia » de ce jour, Lauriane Vofo Kana écrit :

    « Bernard Tapie est mort ce dimanche 3 octobre des suites d'un cancer de l'estomac et de l'œsophage. Parmi les milles facettes du personnage, il y avait celle du "croyant". Vers la fin de sa vie, l'homme d'affaires avait évoqué à plusieurs reprises la foi qui l'animait.

    Homme d’affaires, acteur ou encore ministre, les vies de Bernard Tapie ont été nombreuses. C’est entouré des siens qu’il est décédé ce dimanche 3 octobre à Paris, à l’âge de 78 ans. Bernard Tapie n’avait pas caché son combat contre le cancer de l’estomac et de l’œsophage. Dès l’annonce, en septembre 2017, il avait voulu apparaître déterminé dans l’épreuve qui le mettait face à la mort. Une mort que le « croyant » ne vivait pas comme une fatalité : « La mort c’est l’épisode ultime de la vie. Celui qui a peur de la mort a peur de la vie », confiait-il sur France 2.

    « Ça m’est tombé dessus »

    Durant ses quatre années de lutte contre la maladie, Bernard Tapie s’est livré à des confidences sur son parcours de fils d’ouvrier, sa vie de président de l’Olympique de Marseille ou encore de patron de presse. Quelques fois, il s’est aussi attardé sur la foi qui l’animait : « Je veux rester ce que j’ai toujours été face à la religion, un pratiquant monolithique, convaincu que c’est la loi du cœur ».

    Invité sur le plateau de BFMTV à l’hiver 2020, l’habitué des coups d’éclat était revenu pudiquement sur les origines de sa foi. « Ça ne m’est pas tombé dessus parce que mes parents me l’ont inculquée ! Ça m’est tombé dessus parce que je jouais au violon le dimanche matin dans une église et qu’un jour, je n’ai pas joué du violon comme les autres fois. » Dans ses mémoires [Bernard Tapie, leçons de vie, de mort et d’amour, Ndlr], écrits par Franz-Olivier Giesbert, on découvre un homme qui se met à « genoux » pour prier chaque matin. Même dans les moments de difficulté, cette habitude ne l’aurait pas quitté.

    Tous les soirs à 18 heures lorsqu’il était en prison, il avait un rite avec Dominique, sa femme. […] Ils priaient l’un et l’autre et ils faisaient comme s’ils se tenaient la main, et ça l’aidait à passer la nuit et à repartir pour la journée.

    Mis en cause dans le match truqué Marseille-Valenciennes en 1993, Bernard Tapie est condamné à huit mois de prison en 1995. Un proche de l’ancien homme d’affaires assure même que tout le temps de sa détention le businessman Tapie serait resté attaché à la prière : « Tous les soirs à 18h lorsqu’il était en prison. Il avait un rite avec Dominique sa femme. […] Ils priaient l’un et l’autre et ils faisaient comme s’ils se tenaient la main, et ça l’aidait à passer la nuit et à repartir pour la journée. »

    Une messe en mémoire de Bernard Tapie sera célébrée ce mercredi en l’église Saint-Germain-des-Prés, à Paris, à 11h.

    Mais c’est à Marseille, sa ville de cœur, que ses obsèques auront lieu vendredi à la Major, cathédrale Sainte-Marie-Majeure. Elles seront présidées par l’archevêque de Marseille, Mgr Jean-Marc Aveline, à 11h.

    Lire aussi :Le credo de Bernard Tapie sur le plateau de BFMTV

    Lire aussi :L’inattendu témoignage de foi de Bernard Tapie

    Ref. Bernard Tapie, la foi lui était « tombé dessus »

    « Anima vagula blandula », la foi n’aurait-elle pas encore dit son dernier mot dans l’Europe apostate ?

    JPSC

  • Mais où sont les neiges d’antan ? à la recherche d’une littérature catholique disparue

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    "Le XXème siècle: un âge d’or des écrivains catholiques ? A la fin du XIXe et au début du XXe siècle, la France connaît une période d’effervescence religieuse, perceptible dans le monde de l’art et de la pensée. Alors que triomphent la séparation des Églises et de l’État, la laïcisation de la société, bien des intellectuels adhèrent à la foi catholique. Qui sont ces hommes ? Quel est leur parcours ? Comment l’Église réagit-elle à ce phénomène ? Comment l’écrivain voit-il son propre rôle après sa conversion ? Et, au fond, l’écrivain catholique ne se pense-t-il pas tout autant nécessaire que le prêtre, pour la conversion des âmes ? L’émission Au risque de l’histoire propose de percevoir le XXe siècle comme un âge d’or des écrivains catholiques. Pour éclairer cette question, Christophe Dickès reçoit les historiens Frédéric Gugelot et Claire Daudin". Diffusé sur KTO, dans la série "Au risque de l'histoire".

    Cliquer sur ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=KM_XoFKsVOY

    JPSC

  • Nouvelle abbaye traditionnelle en France : La charité, seule vraie grandeur

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    Fondé par l’abbaye du Barroux en 2002, le monastère Sainte-Marie de la Garde a été érigé en abbaye au printemps dernier. La bénédiction abbatiale du nouveau Père Abbé a eu lieu le 24 juin 2021. Entretien avec ce dernier lu sur le site web du mensuel « La Nef » :

    La Nef – Vous venez d’être érigé en abbaye et vous-même avez reçu la bénédiction abbatiale récemment : qu’est-ce qu’un tel événement dans la vie d’une communauté comme la vôtre ?
    abbaye image (1).jpgTRP Dom Marc Guillot
    – Notre monastère bénédictin de Sainte-Marie de la Garde a été élevé à la dignité d’abbaye. Cela signifie qu’une grâce toute particulière et un certain honneur enveloppent désormais ce lieu. À ce privilège insigne, la communauté doit cependant répondre par la vraie grandeur. Or, comme le Christ nous l’a enseigné, il n’y a en ce monde qu’une seule vraie grandeur : celle de la charité. Certes, le rang d’abbaye nous établit, nous fonde, nous enracine sur cette terre agenaise afin qu’en émane un certain éclat sur l’Église et sur le monde. Mais à quelle fin et pour quel but ? En saint Jean, Jésus donne la réponse : afin que nous portions le seul fruit qui demeurera ici-bas et dans l’éternité bienheureuse, le fruit de la charité. Cette charité, elle est dans le Christ Jésus, et c’est en Lui, dans une communion toujours plus profonde et passionnée avec Lui, que nous la trouverons. En outre, cette charité, il faut également que nous soyons capables de la laisser transparaître et de la dispenser auprès de tous ceux qui viennent nous visiter. Ce témoignage-là est incontournable.

    Le 24 juin dernier, il y a eu aussi – en quelque sorte – la naissance d’un abbé. Bien vite après l’élection, les mots bien connus de Jésus ont fait irruption en ma mémoire : à travers le choix des frères, « c’est Moi qui t’ai choisi ». Je me suis alors immédiatement senti poussé à mettre sur les lèvres du Seigneur des paroles comme celles-ci : souviens-toi toujours que nul ne s’arroge cet honneur, mais on y est appelé par Dieu seul, par ma pure miséricorde. Tout abbé que tu es dé­sormais, tu apprendras l’obéissance par ce que tu souffriras ; rendu un peu moins imparfait chaque jour si tu es fidèle à ma grâce, tu deviendras pour ta communauté un petit instrument entre mes mains, afin que vous cheminiez tous ensemble et joyeusement, afin que vous pénétriez un jour par-delà le rideau, là où Moi, Jésus, je suis entré pour vous en avant-coureur. Et que vous me rejoigniez dans le sein du Père de toute gloire !

    Quels sont désormais vos liens avec l’abbaye-mère du Barroux ? Et quelles sont maintenant les différences entre les deux abbayes ?
    Désormais, Sainte-Marie de la Garde jouit d’une complète autonomie. Les conditions pour cela étaient les suivantes : que la vie régulière puisse être menée en conformité avec nos Constitutions ; que l’emplacement du monastère et ses bâtiments soit adaptés pour mener notre vie bénédictine ; que l’espérance fondée de vocations sérieuses et de leur formation de manière convenable soit bien réelle ; que la communauté subvienne à ses besoins économiques. Au fil des ans, le Seigneur a bâti la communauté, l’a faite mûrir afin qu’elle puisse aujourd’hui voler de ses propres ailes. Ceci dit, il restera bien évidemment un lien familial très fort entre nos deux maisons. Nous avons tous Dom Gérard comme fondateur, nous vivons selon les mêmes Constitutions et nous restons attachés à un unique coutumier monastique. Par ailleurs, les échanges de services continueront : je pense en particulier à l’entraide dans le domaine de la formation philosophique et théologique des frères appelés au sacerdoce.
    Mais, à votre question, je crois qu’il y a une réponse plus profonde et dès lors plus cruciale à donner. L’autonomie véritable, qu’est-ce donc ? C’est être désormais plus ancrés dans l’esprit de saint Benoît de façon à ce qu’il imprègne peu à peu toute notre existence ; c’est être avec cette soif au cœur que le Père soit en nous et que nous soyons en Lui ; c’est être des frères qui, à travers les joies et les croix, les offenses et les pardons, se trouvent de plus en plus accomplis dans l’unité : c’est être une communauté pour laquelle, « ne préférer absolument rien au Christ » équivaut à cette liberté de livrer sa vie pour nos frères devenus, en quelque manière, nos amis.

    Cette indépendance change-t-elle quelque chose à votre identité, vos charismes ?
    Comme je vous le disais à l’instant, nous demeurons avec les mêmes Constitutions. Nous envisagerions même de créer une Congrégation rassemblant nos maisons ; mais ce projet ne dépend pas uniquement de nous.
    Quant aux charismes, à l’esprit de nos deux abbayes, souvenez-vous de cette parole de sagesse des anciens : « la reine fait la ruche ». Nous bénéficions effectivement de la même vie, de la même Règle, des mêmes usages, et pourtant, chaque monastère a son faciès propre. Comment en serait-il autrement puisque nous constituons, chacun pour notre part, une vraie famille. Ceci posé, du Barroux et de la Garde, c’est tout un ! Certes, ici ou là-bas, la pluviométrie n’est pas la même ; le tempérament et la personnalité des deux abbés en charge non plus ; les richesses naturelles et surnaturelles s’expriment en nos deux communautés de façon différente, et pourtant – nos amis et visiteurs en témoignent constamment : « De Sainte-Madeleine et de Sainte-Marie, c’est tout un ! »

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  • La "place dans le monde" d'une Eglise devenue insignifiante...

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    Alors que le pape François et le cardinal De Kesel évoquent la place de l’Eglise dans le monde et, ô merveille, se sont retrouvés en totale convergence de vue, il n'est sans doute pas inutile d'évaluer la situation réelle dans laquelle se trouve l’Église catholique aujourd’hui :

    "... une Église sans importance, avec une forte tendance à la disparition. Une étude récente menée en Allemagne a conclu que seuls 12 % de la population, y compris les catholiques, pensent que la religion a une quelconque importance dans la société. C’est-à-dire que 88% ne se soucient pas de savoir si l’Église existe ou non. Et si les scandales de ces dernières années se poursuivent, il ne sera pas étrange qu’ils préfèrent directement qu’elle n’existe pas. Certes, les pourcentages seront différents dans le sud de l’Europe, aux États-Unis et en Amérique latine – la réserve imaginaire de l’Église -, mais de combien ? 20% ? 25% ? La réponse est oui, au mieux.

    J’ai tiré ces données d’une vidéo du père Santiago Martín, que je recommande vivement de regarder. Et ce prêtre, qui n’est pas un traditionaliste, conclut : « La nouvelle Église a échoué ». En effet, si après le Concile Vatican II, l’Église, déjà en recul, a adopté la stratégie de s’adapter au monde pour rester au centre de l’attention et ne pas perdre les fidèles, cette stratégie s’est révélée être une erreur effrayante qui nous a conduits à la situation actuelle d’extinction.

    Et il n’y a pas besoin d’études sociologiques ou d’enquêtes coûteuses menées par des consultants internationaux. Il suffit de visiter les églises le dimanche – imaginons en semaine – pour comprendre qu’elles sont vides. La même chose se produit en Europe et en Argentine. Les quelques personnes qui y allaient encore avant la pandémie ont déjà cessé de le faire à cause de la mauvaise gestion par les évêques des quarantaines décrétées par les gouvernements. Un lecteur a commenté l’article précédent du blog en ces termes :  » Dans la paroisse que je fréquente, hier, dimanche, à la messe, il n’y avait que sept personnes plus deux de la chorale, le prêtre s’est presque mis à pleurer. Et il a toutes les raisons de le faire, car n’importe quelle secte, parmi celles qui prolifèrent là-bas, a beaucoup plus de consensus ». Et cela ne se passe pas seulement en Argentine. C’est une situation que l’on peut observer dans le monde entier. (...)" (source)

  • Galicie (Ukraine) : l'Eglise gréco-catholique a repris des couleurs

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    Entre ombres et lumières...

    De Thomas Laffitte sur le site du Courrier d'Europe Centrale :

    En Ukraine occidentale, la vigueur retrouvée de l’Église gréco-catholique

    Interdite durant l’Union soviétique, l’Église uniate a très vite réinvesti la Galicie, son territoire d’origine. À Lviv, capitale de la région et véritable bastion uniate, une pratique traditionaliste de la religion côtoie une vision plus ouverte et progressiste.

    Article publié en coopération avec la Heinrich-Böll-Stiftung Paris, France.

    Les habitants du quartier de Riasne, dans la banlieue de Lviv, sont généralement tous d’accord pour dire que leur quartier a bien peu changé depuis sa construction dans les années 1970. Les routes et les trottoirs ont reçu bien peu d’attention, beaucoup moins que les aires de jeux pour enfants, joliment rénovées. S’il en est, le plus gros changement concerne sans aucun doute les églises.

    L’époque où les Soviétiques s’en servaient comme entrepôts paraît déjà loin, tant elles ont maintenant fière allure. Depuis ses églises rutilantes, la paroisse locale a même commencé à investir l’espace public. En plus des icônes que l’on trouve régulièrement ici et là, plusieurs crucifix monumentaux ont été plantés un peu partout dans le quartier.

    Allègrement décorée de fleurs, l’une de ces croix se dresse juste à côté de l’épicerie locale. Une dame âgée sort du magasin avec ses sacs en plastique et s’en va. Soudain, en passant à côté de la croix, elle pose ses sacs, se signe, et repart. Quelques instants plus tard, une mère emmène son fils devant le monument, où elle lui apprend à réaliser un signe de croix. Un spectacle des plus courant dans une ville où les habitants ont souvent l’habitude de se signer à la vue d’un édifice religieux – à pied, depuis le bus, ou même parfois au volant.

    (...)

    En entrant dans l’un des immeubles du quartier, une véritable petite chapelle nous accueille dans le hall d’entrée. La statue de la vierge, flanquée de deux petits anges et surmontée d’un crucifix, le tout illuminé par un système d’éclairage élaboré, invite le visiteur à se signer. Puis en montant, à chaque étage, on trouve une icône entourée de fleurs, représentant tantôt le Christ, tantôt la Vierge.

    « Gloire à Jésus-Christ » annonce Olga en ouvrant sa porte, comme il est parfois d’usage de se saluer en Galicie. Au quatrième étage de son immeuble, cette dame d’une soixantaine d’années nous reçoit dans son salon inondé de statuettes de la Vierge Marie ou de Jésus Christ. Une décoration peu étonnante venant de cette historique du quartier, qui a supervisé la construction de la petite chapelle dans l’entrée. Une fierté que le prêtre local lui a même fait l’honneur de bénir. « Avant les cérémonies de Pâques, le prêtre fait le tour des crucifix du quartier. A chaque fois il tient une petite cérémonie. Il y a quelques années, le prêtre est même venu dans notre hall pour l’inaugurer ! » raconte-elle fièrement.

    Le prêtre en question, le père Basil Kovpak, n’en est pas à son premier coup d’éclat. Son église, encerclée par une profusion de statues et de croix, accueille tant de fidèles que la messe est diffusée sur des haut-parleurs pour ceux restés assis dehors. Cet adepte de la doctrine traditionaliste de Marcel Lefebvre, archevêque de France excommunié en 1988, a lui-même été excommunié en 2007. Malgré tout, son succès ne se dément pas, bien au contraire. La pandémie a même été l’occasion de diffuser tous les jours des messes en direct sur internet.

    Olga fait partie de ses fidèles. Depuis la mort de son fils il y a une quinzaine d’années, elle est devenue très religieuse. « C’est moi qui ai eu l’idée de transformer le hall d’entrée. Depuis, d’autres riverains m’ont imité. » Quant aux voisins, elles assurent qu’ils l’ont en majorité soutenu dans son projet. « Tout le monde était d’accord et tout le monde a participé au financement. Sauf une voisine, qui est orthodoxe. Elle n’en voulait pas et n’a pas contribué » précise-t-elle.

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  • N'être ni papophobe ni papolâtre

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    De Jean Duchesne sur Aleteia.org :

    Ni papophobe, ni papolâtre !

    Il est aussi vain d’encenser que de débiner le pape du moment : ce n’est pas sa personnalité qui fait de lui le premier et indispensable serviteur du centrage de la foi et de l’unité des chrétiens.

    Le pape, quel qu’il soit, suscite des sentiments souvent passionnés. Il a ses thuriféraires et ses détracteurs. La plupart (y compris nombre d’incroyants) voudraient qu’il bénisse ce qu’ils pensent, désirent ou font, et ils ne sont pas toujours exaucés. Les autres (dont de soi-disant catholiques) se déclarent indifférents à tout ce qu’il peut raconter, mais s’énervent que sa parole ait tant d’audience, surtout lorsque, même sans viser nommément personne, elle critique leurs idées, leurs desseins ou leurs actes. Quelles leçons tirer de ces paradoxes ?

  • Philo à Bruxelles : 19 octobre "Péchés capitaux : théologie, philosophie et psychologie"

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  • Déchristianisation : faut-il suivre Madame Delsol ?

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    Du site de l'Homme Nouveau ("Au quotidien" n°257) :

    La découverte de Mme Delsol…

    Au quotidien n°257 : la découverte de Mme Delsol…

    S’appuyant sur un récent sondage – un sondage ! – la philosophe Chantal Delsol invite les chrétiens, dans une Tribune libre parue dans le Figaro (28 septembre 2021) à prendre acte de leur statut de minoritaires.

    Un seuil symbolique a été franchi : désormais plus de la moitié de la population française se dit incroyante. C’est même l’ensemble du Vieux Continent et sans doute l’Occident tout entier qui est en train de voir s’effacer la religion de ses pères.

    Le mouvement dont l’ampleur éclate aujourd’hui sous nos yeux a commencé il y a bien longtemps, sans doute avec les philosophes du XVIIIe siècle et même avant. Le judéo-christianisme porte en lui le doute, parce qu’il porte l’idée de vérité. Aussi avance-t-il dans l’histoire habité par sa propre mise en cause.

    Cependant il faut distinguer le christianisme et la chrétienté. Le christianisme ne semble pas du tout en voie d’extinction. Il se déploie, notamment sous la forme de branches du protestantisme, dans de larges zones d’Amérique latine ou d’Asie. C’est en Occident qu’il s’efface.

    Mais la chrétienté traduit bien autre chose : le christianisme comme civilisation, comme pouvoir sur les mœurs et les lois des pays. On peut dire que la chrétienté en tant que telle a disparu de nos territoires depuis les années 1960 ou les lois sur l’IVG. Depuis lors, ce ne sont plus les dogmes religieux qui déterminent ce que la morale interdit ou permet, ce sont des comités d’éthique composés d’une multitude de courants divers. La chrétienté aura duré seize siècles, depuis la fin du IVe siècle. C’est aujourd’hui qu’elle se rompt.

    D’où l’angoisse, voire l’affolement, de certains chrétiens d’aujourd’hui. Ayant perdu le pouvoir sur la société, ils se pensent dès lors perdus tout à fait, comme si leur existence même était liée à leur hégémonie. Ils vont devenir, ils sont déjà devenus une minorité, et ils ne savent pas ce que c’est. Il leur faudrait aller prendre des leçons chez les juifs ou chez les protestants. Je ne suis pas sûre que nos clercs aient bien compris ce nouveau statut de minorité, qui impose la modestie et une attitude de vérité - car on ne pardonne rien aux minorités, et tout leur est porté à charge.

    Chantal Delsol veut nous convaincre de la fin de la chrétienté. C’est d’ailleurs le titre de son prochain livre à paraître et l’on peut dire que le sondage sur les croyances des Français tombe à pic. Mais on n’a pas attendu la docte philosophe pour se rendre compte que la France ne vivait plus en chrétienté. Faut-il s’y résoudre ? Chantal Delsol le pense et veut nous en persuader. Cependant, il est frappant de constater que cette philosophe chrétienne est surtout moderne. Elle voit tout sous l'angle du rapport de forces, et singulièrement sous le signe du « pouvoir ». Elle définit ainsi la chrétienté « comme pouvoir sur les mœurs et les lois des pays ». Elle insiste plus loin sur les chrétiens désemparés et sur la cause de leur désarroi : « Ayant perdu le pouvoir sur la société, ils se pensent dès lors perdus tout à fait ». Ce n’est pas parce que les chrétiens ont perdu le « pouvoir » qu’ils acceptent cette défaite. Un mot manque ici, crucial, vital : vérité. Minoritaires ou pas, les chrétiens en question pensent qu’ils doivent transmettre la vérité qu’est le Christ et que cette vérité trouve forcément une traduction sociale et politique comme l'absence du Christ en conduit à une autre. Dès lors il n’y a que deux alternatives, soit être un chrétien intégré dans un système qui s’est entièrement construit contre la vérité du Christ, soit travailler de toutes ses forces à répandre cette même vérité.

  • Liturgie : A propos du motu proprio « Traditionis custodes » dégradant la forme extraordinaire du missel romain: une question de sémantique

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    « Comment nommer ce missel mis à l’index (tiens…) par le pape François ? La question est-elle superflue ou byzantine ?

    missale-romanum-1962-grand-format.jpgNous ne le croyons pas un instant. Nommer les choses est de la plus haute importance, les Écritures en témoignent à de nombreuses reprises. Le nom c’est l’être et comme le disait Camus : mal nommer les choses c’est ajouter du malheur au monde. Comment donc faut-il nommer ce missel qui est au centre de la question religieuse depuis plus de cinquante ans ? Missel tridentin, de saint Pie V, de saint Jean XXIII, ancien missel, missel traditionnel, missel grégorien, missel en latin, missel de 1962… Écartons immédiatement les appellations de forme ordinaire et extraordinaire que le pape François a biffé de sa plume même s’il serait instructif de revenir sur ce sujet spécifique d’une double forme du rit romain.

    Plus que de missel, il convient de parler de messe et plus largement de liturgie. Quel que soit le respect que l’on porte et que l’on doive à l’objet que le prêtre embrasse, le missel n’est jamais qu’un support alors que la messe est la réalité sacramentelle. On pourrait se passer du livre, pas des prières qu’il renferme (j’ai souvenir d’un chanoine pyrénéen aveugle qui célébrait par cœur la messe votive à la sainte Vierge et nombreux sont les témoignages de prêtres qui ont célébré mentalement dans les camps de tous les totalitarismes dont la modernité est profuse). Quant à la liturgie, elle recouvre des réalités plus vastes puisqu’elle englobe dans une même cohérence cultuelle non seulement la messe, mais encore l’Office divin, les autres sacrements, les sacramentaux et qu’elle va jusqu’à façonner la civilisation.

    C’est donc globalement de liturgie dont nous parlons tous, le pape comme nous autres ; et au fond de cette question s’affrontent deux approches liturgiques.

    Deux approches divergentes de la liturgie.

    L’une, héritière du mouvement liturgique qui inspira la réforme demandée par le concile Vatican II, menée à bien par ses principaux théoriciens, est visible partout. Cette conception liturgique fait du rit un enjeu pastoral. La liturgie est le rassemblement de la communauté qui prie ensemble, fait mémoire et célèbre. Partant de l’idée neuve que la liturgie doit être accessible immédiatement, elle doit faire ressentir l’appartenance à une communauté, elle doit répondre aux attentes concrètes des situations de vie incarnée des participants, elle fait cercle. Pour parvenir à ses fins, elle doit donc user des artifices des modes du temps. Elle assume d’être du monde et de s’en inspirer pour mieux toucher les hommes de ce temps. Tout ceci est demandé textuellement par le concile Vatican II dans Sacrosanctum concilium : révision des livres liturgiques en faisant appel à des experts (n°25) ; promotion de la participation active en favorisant acclamations, actions, gestes et attitudes corporelles (n°30) ; simplicité, brièveté, suppression des répétitions, rites adaptés à la capacité de compréhension des fidèles (n°34) ; utilité de la langue du pays dans toute la liturgie (n°36) ; adaptation des rites à la diversité des assemblées, des régions, des peuples… (n° 38) ; efficacité pastorale (n°40) ; adaptations des rites aux nécessités de notre temps (n°62)… Pour respecter ces principes il est donc nécessaire de réviser continuellement, d’adapter et de dater. Cette compréhension de la liturgie est par nature progressiste et vouée à d’incessantes évolutions puisqu’elle veut répondre aux attentes des hommes du jour.

    L’autre approche, traditionnelle en ce sens que c’est celle constante et ininterrompue de l’Église jusqu’à aujourd’hui compris (même si c’est de manière limitée et restreinte depuis 1969) comprend la liturgie comme le culte public que l’Église rend à Dieu par diverses expressions, artifices et moyens (sens, objets, temps, espace…) car tout vient de Dieu et que tout est pour Dieu. La liturgie c’est la manière concrète pour les hommes de répondre à la première table du décalogue et à la première demande du Pater. Elle est verticale car elle relie le Ciel et la terre, hiérarchique comme toute la création, orientée vers notre source et notre fin. La liturgie c’est la « joie de Dieu » (Alcuin), c’est la lumière du monde ; comment prétendre aménager la lumière ? Comment vouloir l’adapter ? Je ne peux m’empêcher de songer à cette réflexion de Sylvain Tesson sur un sujet pas si éloigné de notre réflexion : « Il fallait que les hommes fussent drôles pour s’imaginer qu’un paysage eût besoin qu’on l’aménageât. D’autres parlaient d’augmenter la réalité. Un jour peut-être s’occuperaient-ils d’éclairer le soleil ? (Sylvain Tesson, Sur les chemins noirs, 2016, Gallimard). La liturgie n’est pas une invention, une création, elle ne nous appartient pas et ne peut être le fruit de notre créativité. Elle n’est pas le fruit d’une volonté mais un héritage. La liturgie est l’expression de la foi catholique, elle s’est longuement sédimentée, sans autre but précis que de rendre gloire à Dieu ; elle est l’aboutissement de 2000 ans de christianisme non sans quelques apports du culte de l’ancienne alliance. Si la codification et la normalisation ont connu des étapes importantes (la Réforme Grégorienne ou le concile de Trente par exemple), le rit ancien est le fruit de la longue et lente maturation spirituelle de tous ceux qui nous ont précédés et avec qui nous sommes en relation par la communion des saints. La liturgie par essence se méfie de la nouveauté et des idées personnelles. La liturgie qui englobe tous les mystères de notre foi et qui rend Dieu présent (par la réunion des baptisés en son nom, par sa Parole et plus encore dans l’Eucharistie), n’est que lentement pénétrable bien qu’elle soit immédiatement aimable. La liturgie, en cachant, possède la paradoxale particularité de désigner : c’est entre autre tout l’usage liturgique des voiles qui attirent l’attention sur ce qu’ils dissimulent par la majesté, la délicatesse et la beauté dont ils usent ; on pourrait en dire autant de la langue sacrée et de l’orientation. Il faut accepter humblement et patiemment cette difficulté à saisir certains aspects des rites, c’est la condition d’un enthousiasme inlassable, d’un émerveillement sans cesse renouvelé et d’un progrès spirituel véritable. De même qu’on ne devient pas saint Jean de La Croix ou sainte Catherine de Sienne un petit matin en laçant ses souliers, on ne peut approcher les réalités insondables que renferme l’écrin liturgique d’un coup de baguette magique ou par une invention de l’équipe d’animation pastorale.

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