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Religions - Page 88

  • Attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray : le Cardinal-Archevêque de Paris s’exprime

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    De Jean-Marie Guénois dans le « Figaro » :

    « INTERVIEW - Après l'attentat de Saint-Étienne-du-Rouvray, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, dit avoir «le cœur soulevé de voir tant de haine et de violence s'exprimer dans notre société». Il revient, pour Le Figaro, sur ce drame.

    Le FIGARO. - Que peut signifier, selon vous, le fait que ce soit des catholiques qui aient été visés?

    Mgr VINGT-TROIS. - Cela correspond malheureusement à des appels répétés des fanatiques de Daech pour attaquer de toutes les façons possibles ceux qu'ils considèrent comme des impies, voire des mécréants. Il est clair que la référence chrétienne, la foi au Christ et la vie de l'Église sont désignées comme une cible légitime. D'ailleurs, l'expression universelle d'effroi qui a saisi notre pays montre bien que tous, croyants ou non, ressentent que cette attaque touche au cœur de notre culture commune.

    Est-ce un drame isolé, une provocation ou un piège?

    Le piège auquel nous sommes exposés est justement de nous dresser les uns contre les autres.

    Tout cela n'est pas contradictoire. La stratégie du terrorisme diffus consiste justement à susciter des actes isolés et imprévisibles pour développer une psychose de peur et encourager les chocs entre les différentes composantes de notre société. Le piège auquel nous sommes exposés est justement de nous dresser les uns contre les autres et de nous tromper d'adversaire. Ces actes de violence ont justement pour but de faire prospérer la haine et de banaliser la violence. Les récents attentats, en France et en Allemagne, ont hélas montré combien des personnalités fragiles pouvaient être séduites par le vedettariat de l'horreur.

    Que dites-vous aux catholiques?

    N'oubliez pas les paroles du Christ: «Si mon Royaume était de ce monde, mes gardes auraient combattu pour que je ne sois pas livré.» Nous savons que notre foi en Dieu peut susciter l'incompréhension, le mépris, la haine et même la violence. Mais nous savons aussi que nous sommes disciples de celui qui a renoncé à exercer la puissance pour convaincre. Ne laissons pas la haine empoisonner nos cœurs.

    Que dites-vous aux musulmans?

    Ne laissez pas les extrémistes du califat pervertir le Dieu auquel vous voulez croire. Vous avez le droit d'être français et musulmans. Vous avez le droit de croire que Dieu n'est pas un monstre qui se repaît du sang des infidèles.

    Nous avons pu surmonter les périls par notre capacité et notre volonté de ­vivre une certaine solidarité nationale.

    Que dites-vous aux Français?

    Dans toutes les épreuves que notre pays a traversées, nous avons pu surmonter les périls par notre capacité et notre volonté de vivre une certaine solidarité nationale. Mais nous avons aussi montré notre capacité à transformer les désaccords en débats d'idées. Quand nous sommes menacés par un risque de fragmentation, nous devons être d'autant plus attentifs à exercer notre liberté démocratique dans le respect mutuel. La médiatisation de la haine par l'exhibition des polémiques gangrène notre pratique de la démocratie.

    Allez-vous demander au gouvernement des mesures de protection des églises?

    Nous sommes très reconnaissants aux pouvoirs publics et aux forces de sécurité d'y affecter des moyens. Mais il ne faut pas être dupe. C'est un mauvais procès de reprocher aux forces de sécurité de ne pas prévoir l'imprévisible. Ce serait leurrer nos concitoyens de leur laisser croire qu'il y a une protection sans faille devant le genre d'attaques que nous voyons se développer.

    Cet acte marque-t-il un tournant?

    Oui, je le pense. Nos références historiques de conflits armés sont des références classiques où des pays sont opposés les uns aux autres, où des armées se font face. Ce serait une grave erreur stratégique de croire que l'élément militaire de Daech joue un rôle comparable et constitue la seule cause des violences que nous connaissons. À supposer que Daech soit définitivement vaincu, il nous restera à faire face aux causes du terrorisme qui sont chez nous et pas seulement outre-mer. Depuis dix-huit mois, on a beaucoup fait référence aux valeurs républicaines, mais il faudrait encore que nous développions ce que nous voulons dire et quel prix nous sommes prêts à payer pour les défendre.

    Certains parlent de guerre de religions, les suivez-vous?

    L'Europe a malheureusement une expérience historique des guerres de religions. Les meilleurs historiens ont depuis longtemps montré que la thématique religieuse de ces guerres relayait opportunément des intérêts qui n'avaient rien de religieux. Il en est de même aujourd'hui. Je ne vois pas à quelle guerre de religions correspondrait l'extermination par les fanatiques de Daech de milliers de musulmans. S'il y a un enjeu religieux dans cette guerre, c'est de savoir si le Dieu auquel on se réfère veut la mort de l'homme ou sa vie. »

    Ref. Mgr Vingt-Trois: «Croyants ou non, nous ressentons que cette attaque touche au cœur de notre culture commune»

     JPSC

  • Le sacrifice du Matin

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    L’Etat islamique a revendiqué hier un nouvel acte de terrorisme en France : le P. Jacques Hamel, 86 ans,  a été égorgé dans l’église de Saint-Etienne du Rouvray (Seine maritime), au pied de l’autel où il terminait la célébration de sa messe matinale. Commentaire de l’abbé Guillaume de Tanoüarn sur son « metablog » :

    "Le Père Jacques Hamel était un prêtre sans histoire, mais prêtre de toutes ses fibres. Ainsi la victime a-t-elle été choisie. C'est le prêtre qui était visé par les deux terroristes et le prêtre célébrant le saint Sacrifice de la messe, disant, matinal, sa messe quotidienne. Il ne s'agissait pas de tuer du chrétien : la messe dominicale aurait été le moment approprié pour cela. Il s'agissait d'atteindre, de toucher le sacerdoce catholique, en faisant du prêtre la victime. Il y a eu, d'après Soeur Danielle, celle qui a prévenu les secours, une sorte d'antiliturgie monstrueuse. Après une sorte de prêche en arabe, les deux hommes ont fait mettre le prêtre à genoux avant de l'égorger. Au couteau. Soeur Danielle n'a pas pu regarder, elle s'est échappée.

    Qu'aurait-elle vu? L'un des deux jeunes avait dix neuf ans. Il habitait la commune. Ni son nom ni celui de son complice n'ont encore été donnés ce 26 juillet au soir. Nous n'avons que son prénom Adel et une initiale: K. Et pourtant les policiers locaux le connaissaient. Peut-être le Père Jacques aussi le connaissait-il... Et c'est parce qu'il le connaissait, dans une sorte de quête de l'intimité dans le crime, que ce terroriste sans nom l'a égorgé. Cette affaire en tout cas est avant tout une affaire locale. Syrie ou pas, cette petite messe du matin sent le terrorisme de proximité.

    Qu'est-ce que cet égorgement signifiait pour Adel K?

    Au bout de 2000 ans de christianisme, nous Occidentaux, nous ne comprenons pas ce geste parce que pour nous la Victime est toujours plus sainte que le bourreau. Lorsque Joseph de Maistre a écrit son Eloge du bourreau (après ses Eclaircissements sur les sacrifices) il avait conscience d'aller à l'encontre de l'idée reçue en christianisme qui est celle de la sainteté des victimes. Pourquoi les victimes sont-elles saintes ? Elles sont toutes, elles sont toujours des images du Christ crucifié. Mais le terroriste sans nom n'est pas un chrétien, il n'a pas reçu l'évangile, la bonne nouvelle de l'innocence des victimes.

    Adel K vient d'un monde a-chrétien, d'un monde encore moralement archaïque, où les victimes sont toujours coupables, ne serait-ce que parce qu'elles sont des victimes. Il a voulu montrer au Père Jacques sa culpabilité et la Puissance d'Allah. Allah ouakbar s'est-il écrié. Allah est le plus grand, il est vainqueur. Dans ce sacrifice de mécréant, qu'il a commandé (voyez la sourate 9 du Coran) et donc en quelque sorte commandité, dans ce sacrifice réalisé en son honneur, Allah désigne le vaincu, celui dont le sang coule sous le couteau. Ce crime, pour les musulmans radicaux, est une sorte d'ordalie. Un jugement de Dieu, qui déclare la non-violence chrétienne périmée et sonne l'heure de la violence sacrée, au nom de l'islam.

    L'islam (d'après les musulmans) est la dernière des religions, celle qui contient tout le message divin. Message simple : il n'y a pas d'autre Dieu qu'Allah et la terre est donnée aux soumis à Allah. Message efficace, qui produit immanquablement une dialectique par rapport à tout ce sur quoi il se surimpose, que ce soit les cultes non Bibliques, ceux du temps de l'ignorance, que ce soit le culte juif, que ce soit aussi le culte chrétien, qui ose faire de Dieu une victime en Jésus Christ... Pour le Coran, Jésus n'a pas été victime, il n'a pas été crucifié, Allah ne l'a pas permis. Il est le plus fort. D'ailleurs, les chrétiens ont tort de se victimiser. N'ont-ils pas donné le terrain (en 2000) sur lequel a été bâtie la mosquée salafiste de Saint Etienne du Rouvray? Bien fait pour eux! Ce sont des loosers! Des perdeurs professionnels, avec leur Dieu victime. Leur messe, sacrifice de la victime divine, est redevenue, grâce au jeune Adel K et au rituel qu'il a improvisé autour d'un couteau (il n'avait pas d'autre arme sur lui), un sacrifice "normal", le sacrifice des perdants.

    Je suis sûr que dans notre monde déchristianisé beaucoup sont justement de l'avis d'Adel K. Oui, les chrétiens nous emm. avec leur sacrifice. Comment peuvent-ils mettre Dieu du côté des victimes ?

    Eh bien ! Il me semble que le martyre du Père Jacques est une extraordinaire parabole sur l'histoire qui nous reste à vivre, sur la victoire programmée de ceux qui hurlent "Allah est le plus grand" et sur leur défaite finale. Ces gens confondent les martyrs et les tueurs. Mais leur "réalisme" est inhumain, il est monstrueux. L'Evangile apparaîtra plus que jamais comme la seule alternative à ce Pouvoir absolu des plus violents. "Heureux les doux car ils posséderont la terre". Le Père Jacques est mort sans un mot, mais il prophétise la victoire du Bien, par la médiation de la souffrance acceptée, le vrai sacrifice, le sacrifice du matin, celui qui annonce un jour nouveau pour l'humanité, enfin prête à reconnaître son incurable violence, et prête à s'en remettre au Christ qui la sauve d'elle-même."

    Ref. Le sacrifice du Matin

    Dans le « Notre Père », nous demandons que le Nom de Dieu soit sanctifié. Qu’il ne soit pas confondu avec les idéologies qui pervertissent la nature religieuse de l’homme. L’histoire nous montre à quel point aucune religion n’est à l’abri du risque de nourrir la fabrication des idoles. A fortiori lorsqu'elle n’a pas de lien direct avec le corpus de la Révélation.

    JPSC

  • Retour sur l’attentat de Nice : l’opinion de Rémi Brague, Prix 2012 de la Fondation Joseph Ratzinger

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    Revendiqué par l’État islamique, l’attentat de Nice nous oblige à désigner notre ennemi pour mieux le combattre. Sans haine. Le point de Samuel Pruvot avec le philosophe Rémi Brague, sur le site « Famille chrétienne » :

    « L’attentat de Nice nous rappelle que la France est en guerre. Pourquoi est-ce si difficile à admettre ?

    Depuis l’issue de la guerre dans laquelle Churchill faisait ainsi entrer son pays, l’Europe a connu soixante-dix ans de paix intérieure et de prospérité. Nous en avons pris l’habitude, nous considérons cela comme une chose qui nous est due, comme une évidence qui va de soi. La guerre, la famine, etc. : tout cela, c’est bon pour les autres. « Les gens heureux n’ont pas d’histoire », dit le proverbe. Mais ce n’est pas en s’imaginant sortis de l’Histoire qu’on va se rendre heureux.

    On nous a dit que nous étions en guerre. Mais personne n’a eu le courage de faire comme Churchill et de nous annoncer qu’il n’avait rien d’autre à nous offrir que du sang, de la sueur et des larmes.

    D’où vient cet effet de sidération qui s’est emparé des Français ?

    La sidération est justement ce que cherchent à produire les attentats, et les médias qui les passent en boucle les y aident, bien malgré eux. N’oublions pas que la violence est avant tout un moyen, et il faut se demander quelle fin elle poursuit. Cette fin est la mise en place, dans le monde entier, d’une législation qui serait une forme ou une autre de la charia et qui régirait la morale individuelle, les comportements dans la famille et l’économie, éventuellement le système politique.

    Nous sommes fascinés par les aspects spectaculaires des attentats, des décapitations que l’État islamique met en scène avec beaucoup de soin et de savoir-faire. Mais tout ceci nous détourne de la vraie question, qui est celle du but recherché. Ce but peut être atteint par d’autres moyens, plus discrets, mais au moins tout aussi efficaces, comme la culpabilisation de l’adversaire, la pression sociale, la propagande par répétition inlassable, toutes les formes de ruse.

    Que vous inspire le fait que nos dirigeants politiques peinent à désigner notre ennemi ?

    La peur de nommer l’ennemi est ancienne. Qui, avant la chute du mur, osait nommer le marxisme-léninisme, l’Union soviétique ? On préférait dire de façon vague « les idéologies ». Et les hommes d’Église n’étaient pas en reste dans cette stratégie d’évitement.

    Ce pluriel est un fumigène commode. Il sert encore aujourd’hui, quand on dit : « les religions ». De même, on préfère utiliser l’acronyme Daech, que ne comprennent que les arabisants, plutôt que « l’État islamique », pour éviter de nommer l’islam.

    Est-il vrai qu’il ne faut pas faire d’« amalgame » entre islam et islamisme ?

    La vraie ligne de séparation ne passe pas entre islam et islamisme. Il n’y a entre les deux qu’une différence de degré, non de nature. Ce qu’il faut vraiment et fermement distinguer, c’est d’une part l’islam, avec toutes ses nuances et ses intensités, et d’autre part les musulmans de chair et d’os. Le sens légitime du refus du fameux « amalgame », c’est de ne pas réduire ces personnes concrètes au système religieux qui domine leurs pays d’origine.

    Pour les chrétiens, le pardon des ennemis n’est-il pas devenu impossible ?

    Beaucoup de gens s’imaginent que le pardon des offenses, et même cette demande fantastiquement paradoxale du Christ qu’est l’amour des ennemis, signifierait le refus de voir que nous avons des ennemis.

    Hors de cette perspective chrétienne du pardon et de l’amour de l’ennemi, l’adversaire peut vite devenir l’équivalent du mal absolu : ce sont successivement les aristocrates (Robespierre), une classe qui s’oppose au progrès (Marx), des « insectes » (Lénine), une « race inférieure » (Hitler), ou, face au « parti de Dieu » (Coran V, 56), « les pires des animaux » (Coran VIII, 22).

    Un proverbe allemand dit : « L’homme le plus pieux ne peut pas vivre en paix si cela ne plaît pas à son méchant voisin. » Le pardon des ennemis n’est jamais contre-productif. Ce qu’il produit à coup sûr, c’est la conversion de notre propre cœur, le refus de se laisser entraîner dans la spirale de la vengeance, dans la montée aux extrêmes de la violence. Celui qui est prêt à pardonner se demandera d’abord si celui qui se dit et se veut son ennemi n’a pas, aussi, quelque raison de l’être. Il s’efforcera de se corriger, sans culpabilité. Et il combattra, car il faut combattre, et il le fera avec courage. Mais sans haine.

    Le pardon des ennemis n’est jamais contre-productif. Ce qu’il produit à coup sûr, c’est la conversion de notre propre cœur, le refus de se laisser entraîner dans la spirale de la vengeance, dans la montée aux extrêmes de la violence.

    La violence extrême des terroristes n’est-elle pas de nature à provoquer chez nous un sursaut citoyen ?

    La violence est pour eux un moyen. Les terroristes ne passent pas nécessairement à l’acte. Dans leur optique, il suffit d’une menace qui fera que l’adversaire se couchera sans combattre.

    Toutefois, utiliser la violence physique est peut-être une maladresse contre-productive, dans la mesure où elle peut en effet provoquer le sursaut de l’adversaire. Il serait plus habile de l’endormir par de belles paroles, ou de montrer sa force sans avoir à l’utiliser.

    Dans votre essai « L’Europe, la voie romaine », vous montrez que notre continent a des racines grecques et juives…

    J’ai essayé de montrer, plus exactement, que l’Europe avait suivi l’exemple des Romains, qui avaient eu le courage de se reconnaître, en matière de civilisation, inférieurs aux Grecs qu’ils venaient pourtant de battre et d’envahir, et de se mettre à leur école. D’où cette « voie romaine », au sens de « méthode », qu’évoque mon titre.

    L’Europe est secondaire par rapport aux deux sources de sa culture, la source grecque avec la philosophie (et la science qu’elle rend possible) et la source israélite, l’Ancien Testament avec ses commandements, et avec cette liaison entre le bien moral et Dieu.

    Les chrétiens sont secondaires par rapport aux juifs, un peu comme les Romains sont secondaires par rapport aux Grecs. Ce rapport à l’autre a permis à l’Europe de ne pas hésiter à aller chercher son bien en dehors d’elle-même : chez les Arabes, chez les Byzantins, chez les Chinois, etc.

    Chaque fois, on ne se demandait pas d’où venaient les inventions, mais si elles étaient utiles ; d’où venaient les idées, mais si elles étaient vraies ; d’où venaient les œuvres, mais si elles étaient belles.

    En quoi est-il nécessaire pour l’Europe de réactiver aujourd’hui son patrimoine génétique intellectuel pour résister durablement à la menace islamiste ?

    On peut effectivement souhaiter que l’Europe, comme vous le dites joliment, « réactive son patrimoine génétique », et travailler à cet effet. J’essaie de le faire dans la mesure de mes capacités.

    Et, de toute façon, il vaut mieux penser en termes de réactivation que de réaction. 

    Samuel Pruvot »

    Ref. Attentat de Nice – Rémi Brague :  « Il faut combattre, sans haine »

    JPSC

    A Lire également : brague-l-erreur-de-l-europe-est-de-penser-l-islam-sur-le-modele-du-christianisme

     

  • La Turquie a-t-elle sa place en Europe ?

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    Le contre-coup d’Etat en cours dans ce pays ramène la question sur le devant de la scène. Retour corrélatif sur le point  de vue de Joseph Ratzinger, futur Benoît XVI, exprimé en 2004, quelques mois avant son accession à la papauté :

    “L'Europe est un continent culturel et non pas géographique. C'est sa culture qui lui donne une identité commune. Les racines qui ont formé et permis la formation de ce continent sont celles du christianisme. [...] Dans ce sens, la Turquie a toujours représenté un autre continent au cours de l'histoire, en contraste permanent avec l'Europe. Il y a eu les guerres avec l'Empire byzantin, pensez aussi à la chute de Constantinople, aux guerres balkaniques et à la menace pour Vienne et l'Autriche... Je pense donc ceci:  identifier les deux continents serait une erreur. Il s'agirait d'une perte de richesse, de la disparition du culturel au profit de l'économie. La Turquie, qui se considère comme un État laïc, mais sur le fondement de l'islam, pourrait tenter de mettre en place un continent culturel avec des pays arabes voisins et devenir ainsi le protagoniste d'une culture possédant sa propre identité, mais en communion avec les grandes valeurs humanistes que nous tous devrions reconnaître. Cette idée ne s'oppose pas à des formes d'associations et de collaboration étroite et amicale avec l'Europe et permettrait l'émergence d'une force unie s'opposant à toute forme de fondamentalisme".  (interviewé par Sophie de Ravinel pour le Figaro Magazine, 13 août 2004).

    Et encore :    

    “Historiquement et culturellement, la Turquie partage très peu avec l’Europe et l’englober dans l'Union européenne serait donc une grande erreur. Il vaudrait mieux que la Turquie serve de pont entre l’Europe et le monde arabe ou forme avec ce dernier son propre continent culturel. L'Europe n’est pas un concept géographique mais culturel, qui s’est formé au cours de l’histoire, parfois conflictuelle, fondé sur la foi chrétienne. C’est un fait que l’Empire ottoman a toujours été en opposition à l’Europe. Bien que Kemal Atatürk ait bâti une Turquie laïque dans les années 20, elle reste le noyau de l’ancien Empire ottoman. Elle est donc très différente de l’Europe, qui est aussi un ensemble d’États laïcs, mais avec des bases chrétiennes, même si l’on tente injustement de le nier. Par conséquent, l’entrée de la Turquie dans l’UE serait antihistorique”. (Joseph Ratzinger dans un discours prononcé le 18 septembre 2004 devant les opérateurs pastoraux du diocèse de Velletri (près de Rome, en Italie), repris par le quotidien suisse catholique de Lugano “Il Giornale del Popolo”).

    JPSC

  • Pas de Vatican II pour l’Orthodoxie

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    Des commentateurs religieux du monde catholique ont annoncé abusivement le Concile orthodoxe réuni en Crète de 19 au 27 juin 2016 comme celui de l’aggiornamento de l’Orthodoxie. C’était aller un peu vite en besogne  pour deux raisons. La première est que les Eglises orientales n’éprouvent pas nécessairement, comme l’Eglise latine, la double fascination du Protestantisme et des Lumières de la modernité. La seconde tient à l’ecclésiologie même des chrétiens d’Orient marqués par le caractère autocéphale de leurs communautés religieuses : à commencer par la plus puissante d’entre elles, l’Eglise russe qui  en refusant (pour des motifs  peut-être aussi liés à la première raison) de prendre part à ce concile lui a ôté tout caractère « panorthodoxe ». Lu sur le site Orthodoxie cette confirmation officielle de l’échec (JPSC) :

    église russe.jpg

    « Au titre du protocole N°48 de sa session du 15 juillet 2016, le Saint-Synode de l’Église orthodoxe russe a pris la décision suivante au sujet du Concile de Crète :

    « Il a été décidé de :

    1. Reconnaître que le Concile qui a eu lieu en Crète et auquel ont participé les Primats et les évêques de dix des quinze Églises orthodoxes autocéphales, a constitué un événement important dans l’histoire du processus conciliaire dans l’Église orthodoxe, initié par la Première conférence panorthodoxe de Rhodes en 1961.
    2. Souligner que le fondement de la coopération panorthodoxe au cours de tout le processus conciliaire était constitué par le principe du consensus.
    3. Constater que l’accomplissement du Concile en l’absence d’accord de la part de plusieurs Églises orthodoxes autocéphales transgresse ledit principe, en conséquence de quoi le Concile qui a eu lieu en Crète ne peut être considéré comme panorthodoxe, et les documents qui y ont été adoptés [ne peuvent être considérés] comme exprimant le consensus panorthodoxe.
    4. Prendre note à ce sujet de la position du Saint-Synode du Patriarcat d’Antioche.
    5. Après réception des copies officiellement certifiées des documents approuvés par le Concile de Crète, confier à la Commission biblico-théologique, leur publication et leur étude, prenant également en compte de possibles réactions et remarques de Leurs Excellences les évêques, des institutions ecclésiastiques d’enseignement, des théologiens, clercs, moines et laïcs. À l’issue de leur étude sous tous les aspects, présenter les conclusions au Saint-Synode. »

    Ref. Décision du Saint-Synode de l’Église orthodoxe russe au sujet du Concile de Crète

  • Comprendre l'islam, seule voie d'avenir

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    Le site "Enjeux de l'étude du christianisme des origines" (Eecho) met en ligne une présentation de l'islam pour mieux le comprendre, en deux parties; c'est à lire et à découvrir absolument :

  • Football, religion, religiosité et superstition

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    neymar.jpg

    On n’aura jamais autant vu de tatouages religieux en Equipe de France. Chez Rémy Cabella, l’inscription « Dio vi salvi Regina » au bras gauche. Chez Antoine Griezmann, le Christ Rédempteur du Corcovado, un chapelet et la Vierge Marie. Chez Mathieu Debuchy, un chapelet, le Christ Rédempteur, des mains en prières enlaçant une croix. Sur le bras d’Olivier Giroud est inscrit en latin « Dominus Regit Me Et Nihil Mihi Deerit », extrait du psaume 23 : « le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien ». Pour Yohan Cabaye, le plus pieux, le nom « Jésus » en grandes lettres gothiques recouvre le bras, entrelacé d’un chapelet. Même le capricieux Florian Thauvin porte une croix autour du cou. Mais encore…

    Lu sur le site de « Nouvelles de France :

    « L’islam et le reste

    « L’islam est la première religion de Ligue 1 », dit Daniel Riolo en 2013 pour la sortie de son livre « Racaille Football Club ». Le journaliste y décrit comment un islam revendicatif se développe dans les équipes, avec des joueurs imposant nourriture halal, prières dans les vestiaires ou douches en caleçon. Réalité traduite en Equipe de France, comme l’épisode Knysna en 2010 l’avait montré : imposition du buffet halal et des rites musulmans, clans religieux. Fabien Barthez déclarait lui-même : « quand on rentre dans le vestiaire de l’Equipe de France, on se croirait dans une mosquée ». A l’affirmation identitaire se rajoute le prosélytisme, et parmi les musulmans les plus actifs se trouvent des convertis, blancs ou noirs, souvent à la suite d’un mariage ou sous l’influence de coéquipiers. Cette islamisation de la Ligue 1 rejoint un phénomène général en foot français de montée de l’islam radical, dénoncé en 2015 dans une note des renseignements intitulée « Le sport amateur vecteur de communautarisme et de radicalité ». 

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  • Chine: l'irréligion orientale

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    De Laurent de Capellis sur le site web du bimensuel « L’Homme Nouveau »:

    Chine-1.JPG« De retour de Chine, l'auteur dresse un portrait contrasté de ce vaste pays, de son évolution politique et sociale et de la place de la religion chrétienne dans une société entièrement contrôlée par le Parti communiste chinois. Le titre de son article fait référence à l'excellent livre du professeur Augusto Del Noce, L’irréligion occidentale (FAC, 1995), dans lequel l’auteur montre comment la société opulente occidentale est la réalisation d’un marxisme désenchanté qui a mis de côté la croyance révolutionnaire pour se cristalliser en esprit bourgeois à l’état pur. 

    Quand on arrive dans l’une de ces grandes mégapoles chinoises, ce qui frappe à première vue le visiteur, c’est la laideur de ces complexes urbains. En Chine, une ville de petite taille compte moins de 3 millions d’habitants, une ville moyenne comme Nankin ou Wuhan entre 3 et 10 millions d’habitants. Quant aux mégapoles que sont Pékin, Shangaï ou Shenzhen, elles comptent plus de dix millions d’habitants. Tout cela est le résultat de l’exode rural massif suscité par la révolution industrielle à marches forcées qu’a connu la Chine ces vingt dernières années. Nos barres de HLM font pâle figure à côté des alignement d’immeubles de plus de trente étages qui marquent les villes chinoises.

    Le paradoxe de la Chine, c’est ce mélange entre libéralisme économique et communisme. Si l’on dit que le communisme s’est finalement réalisé dans le matérialisme libéral occidental, on pourrait également dire que le communisme chinois a réussi à se réaliser dans cette nouvelle forme hybride. Loin de là le communisme frugal et les queues devant les magasins. Centres commerciaux qui ouvrent 7 jours sur 7 et quasiment 24 heures sur 24 dans les grandes villes, suractivité économique que rien ne semble arrêter : ni la nuit, ni le dimanche. Et pourtant le parti communiste est omniprésent, jusque dans les entreprises (publiques) où il assure une surveillance institutionnelle. Si l’on veut progresser dans l’entreprise, il est important de faire partie de ce club. Personne n’y croit vraiment mais si l’on veut se montrer citoyen et concerné par les autres, il est de bon ton de s’engager. C’est le geste citoyen en quelque sorte avec son côté ostensiblement pharisien. Nous visitons un temple accompagné par l’une de ces cadres d’entreprise. Elle est membre du parti, nous avoue être athée et ne croire qu’au progrès et à la science. Malgré tout, cela ne l’empêche pas de bruler de l’encens devant les autels et de formuler un vœu comme le veut l’usage : on ne sait jamais ! Athéisme et superstition font finalement bon ménage. On pourrait faire la même observation pour l’Occident quand on voit l’explosion de toutes les formes d’ésotérisme. Le communisme, à la manière du relativisme des droits de l’homme en Occident, est devenu une sorte d’idéologie très molle, perméable à tous les accommodements.

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  • JMJ : aller aux périphéries ?

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    Lu sur le site « Riposte catholique » :

    « Alors que 35 000 Français se préparent à partir pour les JMJ, une étude réalisée avec l’équipe nationale des JMJ Cracovie 2016 (Conférence des évêques de France), dresse leur portrait. 2574 jeunes ont rempli intégralement le questionnaire, du 25 au 27 mai 2016. Les questions portaient sur leurs motivations, mais aussi sur leur profil socio-démographique, leur appartenance  religieuse, leurs activités associatives ou militantes, leur perception de l’Église, etc.

    Dans l’ensemble les jeunes participants aux JMJ se disent proches ou relativement proches des positions de l’Eglise.

    C’est en matière de défense de la vie (contre l’avortement, l’euthanasie, la gestation pour autrui) que l’adhésion inconditionnelle (« très proche ») est la plus forte : plus de la moitié (52 %), auxquels s’ajoutent ceux qui sont « assez proches », dont l’accord est plus mesuré et sans doute conditionnel sur certains points ou sur certaines formulations mais globalement acquis. Soit au total 72 %. Ceux qui se sentent explicitement loin de ces positions représentent quand même un jeune sur quatre (24 %).

    En matière de questions sociales (la priorité aux plus pauvres et aux « périphéries ») la proximité aux positions de l’Église est encore plus importante qu’en matière de défense de la vie (85 %). Mais elle se répartit différemment : l’adhésion forte fait jeu égal (43 %) avec l’adhésion mesurée (42 %). Il y a manifestement matière à débat. En revanche on ne relève que très peu d’opposition explicite (6 %).

    Il est intéressant de rapprocher ces réponses sur le social en général de celles qui concernent la question des réfugiés et des migrants en particulier, sur laquelle le pape a pris des positions très claires, de manière spectaculaire. Tout le monde ne le suit pas sur ce terrain, ou pas aussi loin : le total des adhésions reste certes majoritaire (62 %), mais c’est le plus faible de tous les points abordés dans l’enquête. Et l’accord mesuré (« assez proche » : 37 %) est plus important que l’accord sans réserve (« très proche » : 25 %). Enfin, leur divergence est revendiquée par 23 % des jeunes, un sur quatre, tandis que 15% se réfugient dans la non-réponse.

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  • Quand la probable fermeture d'églises à Bruxelles fait l'objet d'une émission à la RTBF

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    La tension monte dans le diocèse de Bruxelles. De plus en plus de médias s'intéressent à la question des fermetures d'Eglises à Bruxelles.

    La RTBF consacrait une émission ce midi sur le sujet. (Le Forum de Midi)

    Mgr Kockerols, fidèle à lui-même, ne compte pas associer les laïcs à sa réflexion. Alors que seuls les responsables d'unités pastorales ont été consultés jusqu'à présent, il serait temps de tenir compte de l'avis des paroissiens impliqués dans le gestion des églises (chefs de chorales, catéchistes, fabriciens...).

    Ce problème ne peut être géré en catimini. Avant d'écrire sa lettre pastorale d'octobre sur le sujet pour annoncer ses décisions, il serait plus qu'utile que l'évêque de Bruxelles s'inspire des pratiques de concertation initiées par d'autres collègues évêques.

  • Chine : le pape François fait-il fausse route ?

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    cardinal-zen-hong-kong_article_large.jpgÀ 84 ans, le cardinal Zen Ze-kiun est un homme libre. Évêque émérite de Hongkong – un diocèse qu’il a dirigé de 2002 à 2009 –, il est devenu la « conscience » de cette ancienne colonie britannique retournée en 1997 sous le drapeau chinois.

    Originaire de Shanghai – une ville que ses parents ont fuie en 1948, juste avant la prise du pouvoir par les communistes –, il connaît parfaitement les réalités de l’Église en Chine. Et il ne s’est jamais privé de dénoncer les atteintes à la liberté religieuse mises en œuvre par le Parti communiste chinois.

    Très critique ces dernières années des négociations menées par le Saint-Siège avec Pékin, le cardinal irrite jusqu’à Rome. Lu sur le site de « Famille chrétienne » :

    « -Quelle est la portée du geste posé par Mgr Ma Daqin le 7 juillet 2012, à Shanghai, en quittant l’Association patriotique sous tutelle de l’Etat le jour de son ordination ?

    -Dans sa Lettre aux catholiques de Chine de 2007, le pape Benoît XVI a nettement dit que les principes qui sont à la base de l’Association patriotique sont inacceptables pour l’Église catholique.

    Afin de se tenir informé des réalités de l’Église de Chine, il avait mis sur pied au Vatican une « Commission Chine » réunissant différentes personnes – dont j’étais. Lors de nos rencontres, nous étions arrivés à la conclusion que, après des années de patience où nous avons attendu que l’Association patriotique change de l’intérieur, il était temps de dire clairement que cette instance était inacceptable pour les catholiques. Pour moi, Mgr Ma n’a donc fait qu’agir selon ce que le Saint-Siège demande.

    Malheureusement, quand Mgr Ma a agi comme il l’a fait en juillet 2012 à Shanghai, il n’a pas reçu de soutien explicite de la part du Saint-Siège. J’aurais aimé alors que le pape fasse une déclaration, par exemple, pour dire simplement qu’il était soucieux du sort de Mgr Ma. Le simple fait pour le pape de mentionner Mgr Ma aurait suffi pour que Pékin comprenne que le Saint-Siège était derrière lui.

    De ce fait, la portée du geste posé par Mgr Ma est, pour certains sur place, à Shanghai et en Chine, moins claire : le Vatican soutient-il vraiment ce genre d’initiative ? Alors que, lors des réunions de la Commission vaticane pour l’Église en Chine, nous avions été très clairs sur le fait que le temps de la tolérance était révolu.

    J’admire vraiment ce qui s’est passé à Shanghai. Le geste de Mgr Ma a pour moi une portée exemplaire, prophétique, et pourrait être le début d’un mouvement de fond pour l’Église en Chine.

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  • Brexit : comment retrouver l'Europe de Robert Schuman

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    Lu sur le site de « Famille chrétienne » cet extrait de Brexit Cahiers Libres ©Cahiers Libres

    brexit-1.jpgLe verdict est tombé. Malgré les derniers sondages annonçant le Remain gagnant, le Leave a emporté le scrutin : le Royaume-Uni va quitter l’Union européenne. Le vote est historique et il ne sera pas sans conséquence : les souverainistes des autres Etats européens se sentent pousser des ailes, tandis que les Écossais et les Irlandais du Nord, pro-européens, préparent leur « Exit » du Royaume des Windsor. L’ambiance politique est donc à la désunion, voire à la débandade.

    L’Union européenne est évidemment en crise, et ce n’est pas nouveau. Mais peut-on réellement parler de crise quand le peuple d’un Etat s’exprime ? Finalement, la Grande-Bretagne n’est-elle pas cohérente avec elle-même en quittant l’Union ? Robert Schuman était très réservé quant à l’entrée des Britanniques dans la Communauté européenne. Charles de Gaulle était carrément opposé, voyant là le « cheval de Troie » des Etats-Unis en Europe. Ces deux grands hommes n’avaient pas tort : nos amis d’outre-manche ont toujours été des collaborateurs compliqués, regardant davantage vers l’océan que vers le continent et freinant la construction européenne… Jacques Delors n’a pas caché qu’il était pour le Brexit, tout comme d’autres fédéralistes. 

    La question qui se pose maintenant est celle du renouveau des institutions européennes. Sans le frein anglais, les Etats du vieux continent seront-ils capables de réformer l’Union dans un sens plus démocratique et plus décentralisé ? C’est finalement la grande question qui nous est posée. L’Union européenne n’est malheureusement pas une organisation démocratique, et cela malgré un Parlement élu. Le peuple est totalement coupé des décisions de l’Union comme en témoigne une colossale législation ignorée de tous et l’image impopulaire de la Commission de Bruxelles. Une Union exclusivement économique avec une politique extérieure déléguée à l’OTAN. Nous sommes très loin du projet de Robert Schuman qui voulait une Europe politique avec des institutions en prise directe avec l’opinion publique. Le pire exemple est sans doute celui de la négociation des traités transatlantiques TAFTA et TISA…

    ► À lire aussi : Brexit : « l’Europe souffre de schizophrénie » 

    Avec une organisation aussi peu démocratique, aux pouvoirs pourtant énormes (plus de 80% de notre droit vient de l’UE !), on comprend que les peuples d’Europe aspirent à être entendus. Les leaders populistes l’ont très bien compris et leurs discours violents contre l’Union sont écoutés, comme en témoignent les récents succès de ces mouvements. 

    Pourtant, la réponse à cette profonde carence démocratique, qui impacte toute notre société et ne concerne pas seulement l’Union mais aussi nos Etats et nos régions, n’est pas dans le populisme agressif et peu réfléchis. Il est au contraire dans la quête d’une profonde régénération de nos démocraties, régénération qui ne peut se faire qu’en donnant du sens à nos démocraties. Robert Schuman l’avait bien compris : dans son livre Pour l’Europe, il ne se contente pas de présenter un projet d’Union d’Etats. Il part du principe que cette unité ne peut se faire que par des Etats démocratiques pour une organisation européenne elle-même démocratique. Mais pas n’importe qu’elle démocratie : une démocratie chrétienne ayant comme moteur le don de soi, la charité. L’histoire l’a démontré : la construction européenne s’est scellée autour de la réconciliation franco-allemande, les ennemis d’hier se pardonnant dans la vérité et bâtissant ensemble un grand projet les rendant solidaires. 

    La démocratie chrétienne est tout le contraire d’un populisme exclusif et violent accusant les autres de tous les maux et flattant la colère hantant les peuples en manque de représentation. Non, la démocratie chrétienne est « le sacrifice de chacun pour le bien de tous » comme le disait Frédéric Ozanam qui a fondé cette famille de pensée en 1848. Comprenez le mot « sacrifice » par don de chacun à l’image du Christ se donnant tout entier pour nous tous. Ce don mutuel se traduisant par l’alliance des citoyens pour le bien commun. 

    Il est grand temps de retrouver l’esprit de cette démocratie chrétienne qui a lancé la construction européenne dans le but de pérenniser la paix en Europe. L’avenir de notre pays et de notre continent en dépend. 

    Charles Vaugirard / Cahiers Libres »

    Cet article est paru initialement sur le blog Cahiers Libres, à découvrir ici.

    Ref. Brexit : comment retrouver l'Europe de Robert Schuman

    En Belgique l’appellation « démocratie chrétienne » est connotée comme une appartenance à la mouvance chrétienne de la gauche politique. Il ne peut évidemment être question ici de cette acception étroite mais, plus largement, de réconcilier les antagonismes sociétaux en puisant à la vraie source de toute paix.  «  Que votre cœur ne se trouble pas et ne s’alarme pas. Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix . Je ne vous la donne pas comme le monde la donne » dit Jésus (Jean, 14, 27) parlant de la seule véritable paix. C’est dans la paix du Christ (« pax Christi ») que la romanité et la germanité des temps barbares ont finalement trouvé le point focal qui donna naissance à la Chrétienté.

    JPSC