CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME DE L'ONU : L'EUGÉNISME LIBÉRAL EN QUESTION
08 avril 2020
Le Rapporteur spécial sur les droits des personnes handicapées a présenté son rapport annuel lors de la dernière session du Conseil des droits de l’homme, interrompue prématurément le 13 mars en raison de l’éruption du coronavirus. Elle y prend courageusement position contre « l’eugénisme libéral ». Christophe Foltzenlogel, juriste à l’European Centre for Law and Justice, revient sur les avancées de ce rapport sans langue de bois.
Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies basé à Genève compte quantité d’experts et de comités chargés de contrôler le respect des États de leurs obligations internationales au titre des traités qu’ils ont signés. Ils leur adressent ainsi fréquemment des observations, recommandations ou directives. Comme nous avons déjà eu l’occasion de le dénoncer, nombre de ces rapporteurs et comités abusent de leur fonction pour imposer aux États de « nouveaux droits » qu’ils ne se sont jamais engagés à respecter. Tel n’est pas le cas de ce rapport, qui se concentre sur le respect des États de leurs obligations conventionnelles[1].
Outre les propos habituels des Rapporteurs pour appeler les États à agir, à lutter contre les préjugés et à être plus inclusifs, le Rapporteur, Catalina Devandas-Aguilar, pose une réflexion de bon sens sur le handicap. Selon elle, on cherche toujours ou trop souvent à « réparer » ou prévenir le handicap. Des efforts immenses sont mis en œuvre pour tenter de guérir des handicaps, sans parvenir à un résultat approprié pour les personnes handicapées elles-mêmes, alors que des investissements plus concrets et plus simples pour faciliter la vie et atténuer certaines difficultés seraient beaucoup plus utiles et pertinents. « Du point de vue des défenseurs des droits des personnes handicapées, le handicap s’inscrit dans la continuité de l’expérience humaine. La question n’est pas tant de prévenir ou de soigner le handicap que de veiller à ce que toutes les personnes handicapées jouissent des mêmes droits et des mêmes possibilités que le reste de la population[2]. »
Plus généralement, le rapport se concentre sur les discriminations subies par les personnes handicapées en utilisant le néologisme de « capacitisme ». Construit sur le mot « capacité », il appréhende la discrimination envers les personnes handicapées qui vaudraient moins car elles n’ont pas les mêmes capacités que les personnes non-handicapées.
Ce rapport contient surtout deux apports importants et positifs : la dénonciation de l’eugénisme libéral et de l’euthanasie des personnes handicapées. Ces réflexions font écho à des situations françaises et européennes sur lesquelles l’ECLJ est activement engagé.