Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Débats - Page 5

  • Les tâches du prochain pape selon l'archevêque émérite de La Plata (Argentine)

    IMPRIMER

    De Mgr Héctor Agüer, archevêque émérite de La Plata (Argentine) sur Rorate Caeli :

    "Le nouveau pape" : Quelles seront les tâches du prochain pape ?

    24 août 2023

    Le Collège des Cardinaux a acquis une ampleur inhabituelle. Que de chemin parcouru depuis quelques élections pontificales, décidées par une poignée de membres de ce traditionnel protagoniste du temps fort de la vie ecclésiale ! L'histoire est plus qu'éloquente. Il n'est pas possible de s'attarder sur la recherche de modèles. Un seul exemple : au conclave de 1458, Enea Silvio Piccolomini, expert en vers latins, déjoua les plans d'un Français ambitieux et, sans le vouloir ni le chercher, fut lui-même élu : Pie II ; il y avait 18 cardinaux. Aujourd'hui, le nombre exorbitant de barrettes rouges ne permet pas de prévoir un nom comme futur successeur de Pierre. Plusieurs amis me demandent d'esquisser ce que devrait être le pontificat qui succèdera au languissant François, en tenant compte de la situation très grave de l'Église, maquillée par la propagande vaticane.

    Voici cette tentative. 

    Tout d'abord, il est nécessaire d'assurer la Vérité de l'authentique doctrine catholique, de surmonter les mythes progressistes qui la minent et que l'actuel Pontife élève au rang d'agenda. La lumière vient du Nouveau Testament, qui témoigne de l'œuvre apostolique que les Douze - et surtout saint Paul - ont transmise comme mandat à leurs successeurs immédiats, et qui conçoit l'organisation de l'Église, source du christianisme naissant.

    L'apôtre Paul recommande à son disciple Timothée : "Je te charge (diamartyromai) devant Dieu et devant le Christ Jésus, qui doit venir juger les vivants et les morts, par son épiphanie et par son Royaume : prêche la Parole de Dieu, exhorte avec ou sans occasion, discute, réprimande, exhorte, avec une patience inlassable et un enseignement plein de zèle. Car il viendra un temps où les hommes ne supporteront plus un sain enseignement, mais où, selon leur désir, ils se chercheront des maîtres pour flatter leurs oreilles, détourneront leur attention de la vérité et se convertiront aux mythes" (2 Tm 4,1-4). Saint Paul poursuit en exhortant, comme le fera l'Église tout au long des siècles : " Soyez vigilants en tout " ; c'est ce que faisait l'Inquisition face aux hérésies et aux schismes. Cette tâche alourdit le travail d'évangélisation, d'accomplissement du ministère (diakonia) à la perfection. L'un des arguments progressistes consiste à disqualifier cette entreprise comme si elle était contraire au christianisme. C'est la confrontation du Nouveau Testament avec la conception mondaine de l'Église, jusqu'à l'égarement de l'actuel Pontificat. Ce que le penseur danois Soren Kierkegaard écrivait dans son Journal en 1848 s'applique à ce cas : "Aujourd'hui, alors qu'il est question de réorganiser l'Église, on voit bien le peu de christianisme qu'il y a en elle". Le même auteur qualifie cette situation de "malheureuse illusion".

    Le nouveau pape devra orienter l'Église dans la direction indiquée par l'exhortation paulinienne ; c'est ce qu'a fait l'Épouse mystique du Christ dans ses meilleurs moments. Il est essentiel de défendre la Vérité de la doctrine, qui a été minée et négligée par le relativisme. Les approches progressistes ont laissé l'Église enfermée dans l'enceinte de la Raison pratique, dont le moralisme a remplacé la dimension contemplative propre à la Foi et à la proposition de la plénitude à laquelle tous les fidèles sont appelés, selon la vocation à la sainteté qui jaillit du Baptême.

    En même temps que la récupération doctrinale, il faut rechercher la restauration de la Liturgie qui, selon sa nature, doit être exacte, solennelle et belle. Cette devise se réfère particulièrement au rite romain, qui a été ruiné par l'improvisation qui abomine le caractère rituel du mystère liturgique. Le motu proprio Traditiones custodes de François impose arbitrairement le contraire de ce que Benoît XVI avait réorienté, et de l'esprit de liberté retrouvé selon le motu proprio Summorum Pontificum ; la récupération des dimensions mystiques et esthétiques du caractère sacramentel de la Liturgie est souhaitée. Les Rites orientaux sont également appelés à renforcer leurs traditions respectives, en surmontant la contagion de la désacralisation qui affecte directement le Rite romain.

    Les tâches susmentionnées ne peuvent être accomplies que grâce au zèle éclairé d'évêques et de prêtres dignement formés dans l'esprit de la grande Tradition catholique, que l'on trouve encore dans les décrets Christus Dominus et Presbyterorum Ordinis, du Concile Vatican II. L'histoire récente montre que l'imposition mondiale du progressisme a eu pour germe la corruption du séminaire traditionnel, rendu banal par une théologie déficiente, et une "ouverture" sous le charme d'un prétendu "aggiornamento". Le malentendu a pris forme sous le prétexte de l'évangélisation : au lieu de convertir le monde à la Vérité et à la Grâce du Christ, l'Église s'est convertie au monde, perdant ainsi son identité essentielle. C'est avec ces critères erronés que se sont formées plusieurs générations de prêtres. Ce processus de décadence doit être inversé. L'institution du Séminaire est encore valable ; à l'époque, des alternatives ont été essayées mais n'ont pas obtenu la solution attendue. La récupération du Séminaire n'implique pas une copie de ce qu'il était avant le bouleversement général. L'institution peut s'adapter, puisqu'elle n'est pas mauvaise en soi, à la nouvelle situation et aux nouveaux besoins. Ceux-ci doivent être reconnus avec sobriété et discrétion, en évitant une exposition qui permettrait à l'administration progressiste - qui ne disparaîtra pas immédiatement - d'activer ses ressources de proscription, jusqu'à ce que le nouveau pontificat soit pleinement établi. L'évêque doit être directement responsable du Séminaire, tout en s'assurant la collaboration de prêtres bien formés et prêts à assumer sincèrement l'orientation que l'évêque souhaite mettre en oeuvre dans le diocèse.

    Saint Jean-Paul II a légué à l'Église un vaste magistère sur la famille. Lorsqu'il a été prononcé et - en bonne partie - écrit, la "perspective de genre" n'avait pas encore atteint la proéminence culturelle qu'elle a acquise peu de temps après. Le pape Wojtyla présente la constitution naturelle et chrétienne de la réalité homme-femme, les enfants comme la chose la plus naturelle au monde, ce qui est et doit donc continuer à être. Benoît XVI ajoute une réflexion sur le concept métaphysique de la nature. Ce magistère abondant et profond doit être repris et projeté sur les nouveaux problèmes sociaux et culturels : la Famille fondée sur le mariage a été remplacée par le "couple", qui n'est nullement indissoluble et peut donc être modifié successivement. J'omets maintenant de parler de ce qu'on appelle à tort le "mariage homosexuel". Le mariage en tant que réalité de valeur civile a disparu ; le mariage sacramentel n'implique aucune fatigue pour ceux qui doivent le bénir, comme c'est leur devoir. Je ne crois pas que les fiancés catholiques soient conscients qu'ils sont appelés à être les ministres d'un sacrement qu'ils se donnent l'un à l'autre.

    La valeur de la vie humaine est étroitement liée à la question de la famille ; il s'agit d'un chapitre très important de la morale chrétienne. Le prochain pontificat devra faire face à une tâche plus que nécessaire : surmonter l'héritage négatif de l'"aggiornamento", couronné par le progressisme actuel. Il devra sauver la théologie morale du relativisme qui la tient en otage ; dans cette entreprise, il devra résoudre le drame d'Humanae Vitae. Cette encyclique, publiée le 25 juillet 1968, ne fut pas acceptée par de vastes secteurs de l'Église : plusieurs Conférences épiscopales se prononcèrent contre elle ; elles furent encouragées par l'unanimité du journalisme, qui incarnait "l'opinion publique". Une grande confusion est née parmi les fidèles, de sorte que beaucoup d'entre eux ont justifié la pratique de l'utilisation des moyens que l'encyclique de Paul VI déclarait objectivement immoraux. Rome devra reprendre les arguments de ce texte pour en démontrer la vérité, en tenant compte de l'accomplissement des dispositions d'Humanae vitae. La crise déclenchée par cette encyclique s'est prolongée dans le nouveau millénaire. Le malentendu a produit une situation analogue aux crises déclenchées par les questions dogmatiques au début du christianisme. Le prochain pontificat devra dénouer ce nœud. Le recours à l'intercession de la dénoueuse de nœuds est inévitable. Marie est en effet celle qui "défait les nœuds". Il y a quelque chose d'apocalyptique dans le drame d'Humane vitae.

    Le problème que je viens de traiter est un chapitre d'une question plus vaste : le rapport de l'Église avec le soi-disant "monde moderne", qui n'a pas été résolu par le Concile Vatican II, mais au contraire aggravé par lui, victime des illusions qui dissimulaient la diffusion d'une nouvelle gnose. Les doctrines de Karl Rahner et de Pierre Teilhard de Chardin ont monopolisé l'attention de la théologie catholique : la théorie rahnerienne du "chrétien anonyme" et l'évolutionnisme teilhardien, qui était lui-même une religion, ont eu une influence indéniable sur la pensée chrétienne du XXe siècle.

    En ce qui concerne la question des relations de l'Église avec le monde contemporain, il est opportun de rappeler que lors de la préparation de Vatican II, le "schéma 13" a pris de l'importance et a suscité des attentes, un antécédent qui allait devenir la constitution pastorale Gaudium et spes, un texte qui, avec la constitution dogmatique Lumen Gentium sur l'Église, a été le document le plus important du Concile. Un événement explique le ton avec lequel la question des relations entre l'Église et le monde a été conçue. Jean XXIII souhaitait la participation de représentants de l'Église orthodoxe russe en tant qu'observateurs des débats du Concile. Le cardinal Eugène Tisserant est chargé des négociations nécessaires pour assurer cette participation ; l'accord suivant est conclu : les orthodoxes seront présents à condition que le Concile s'abstienne de condamner le communisme. Deux prélats orthodoxes russes (probablement des espions du Kremlin) y participèrent effectivement. Cet épisode est éloquent pour montrer l'esprit dans lequel Vatican II a abordé les relations entre l'Église et le monde. Il faut y ajouter un optimisme naïf, inspiré dès le début par le pape Roncalli qui, dans son discours d'ouverture, a sévèrement fustigé les "prophètes de malheur". Bien sûr, c'était le "bon pape".

    Dans cette note, j'ai rassemblé quelques-uns des problèmes qui constituent des marécages dans lesquels l'Église s'enlise. Ce ne sont pas les seuls, mais ceux que je considère comme des priorités que la réalité actuelle imposera aux efforts du prochain Pontife. En bref, libérer l'Église de la peste mortelle du progressisme. 

  • Des pères synodaux très bergogliens

    IMPRIMER

    La rubrique actualité de FSSPX.NEWS publie trois articles consacrés au profil des participants au prochain synode personnellement nommés par le pape François :

  • Le conseiller du pape, le père Spadaro, blasphémateur et hérétique ?

    IMPRIMER

    D'Edward Pentin sur son blog :

    Le conseiller du pape, le père Antonio Spadaro, accusé de "blasphème hérétique".

    30 août 2023

    Le pape François s'entretient avec le père jésuite Antonio Spadaro.

    L'un des plus proches conseillers du pape François, le père jésuite Antonio Spadaro, a été accusé de "blasphème hérétique" après avoir dépeint le Seigneur comme un être humain imparfait ayant besoin d'être converti du "nationalisme" et de la "rigidité".

    Dans Il Fatto Quotidiano du 20 août, un quotidien italien de gauche très laïc, le père Spadaro s'est penché sur le récit évangélique de la foi d'une femme cananéenne et a conclu que Jésus avait été guéri et libéré "de la rigidité des éléments théologiques, politiques et culturels dominants à son époque".

    L'histoire, tirée de l'Évangile de Matthieu (15:21-28), concerne une femme de la région païenne de Canaan qui supplie Jésus de guérir sa fille possédée par un démon.

    Jésus refuse d'abord de l'aider, disant qu'il n'a été envoyé qu'aux brebis perdues d'Israël. Cependant, la femme persiste, suppliant Jésus et se comparant même aux chiens, qui sont autorisés à manger les miettes qui tombent de la table du maître. Jésus est finalement touché par sa foi et guérit sa fille.

    Les Pères de l'Église et la tradition ecclésiastique ont toujours interprété cette histoire comme un rappel puissant de l'importance de la foi. La femme n'a pas abandonné Jésus, même lorsqu'il semblait la rejeter. Elle a continué à croire qu'il pouvait aider sa fille et, à la fin, sa foi a été récompensée.

    Mais pour le père Spadaro, comme pour d'autres prédicateurs modernistes et hétérodoxes avant lui, Jésus a d'abord des préjugés et une vision d'exclusion dans l'histoire de l'Évangile, mais il est converti par la femme cananéenne, ce qui en fait une histoire de ce que l'on appelle aujourd'hui le cliché de "l'inclusion radicale".

    Cependant, le jésuite italien déforme encore plus l'histoire, réduisant Jésus à posséder de nombreux défauts humains, y compris la "rigidité" et le "nationalisme", qui se transforment ensuite en acceptation et en libération des "éléments théologiques, politiques et culturels dominants de son époque". La transformation du Seigneur, dit-il, est "le germe d'une révolution".

    La réflexion du père Spadaro est importante en raison de l'audace avec laquelle il attribue à Jésus de telles déficiences, sapant ainsi l'enseignement de l'Église sur la divinité du Christ, mais aussi en raison de la proximité du jésuite italien avec le pape et du fait qu'il est rédacteur en chef du périodique jésuite historiquement prestigieux La Civilta Cattolica.

    Voici ma traduction de son texte (souligné par moi), qui a été porté à l'attention du grand public par le site web italien MessainLatino :

    Graines de révolution. Jésus loue la grande foi d'une païenne

    Jésus se trouve à Gennèsaret, sur la rive droite du lac de Tibériade. Les gens du pays l'avaient reconnu et la nouvelle de sa présence s'était répandue dans toute la région, de bouche à oreille. Beaucoup lui apportaient des malades, qui étaient guéris. C'était une terre où les gens devaient l'accueillir et le comprendre. Son action est efficace. Mais le Maître ne s'arrête pas. Matthieu (15,21-28) - qui écrit pour les Juifs - nous dit qu'il se dirige vers le nord-ouest, la région de Tire et de Sidòne, c'est-à-dire vers la région phénicienne et donc païenne.

    Mais voici qu'on entend des cris. Ils viennent d'une femme. Elle est cananéenne, c'est-à-dire d'une région habitée par un peuple idolâtre qu'Israël regardait avec mépris et hostilité. Le récit affirme donc que Jésus et la femme étaient ennemis. La femme s'écrie : "Aie pitié de moi, Seigneur, fils de David ! Ma fille est très tourmentée par un démon". Le corps de cette femme, sa voix, éclatent comme sur le lieu d'une tragédie. Impossible pour Jésus de ne pas réagir au chaos qui interrompt brutalement le voyage.

    Au contraire, non. " Mais il ne lui adressa pas la parole, pas même un mot ", écrit laconiquement Matthieu.

    Jésus reste indifférent. Ses disciples s'approchent de lui et le supplient avec stupéfaction. La femme remue ceux qui, eux aussi, l'ont mal jugée ! Ses cris ont franchi la barrière de la haine. Mais Jésus s'en moque.

    "Renvoyez-la, car elle ne cesse de crier après nous !" Les siens le supplient, essayant d'utiliser discrètement l'excuse de son insistance et de la gêne que sa présence aurait causée au foyer [sic !] du Seigneur .

    Le silence est suivi de la réponse irritée et insensible de Jésus : "Je n'ai été envoyé qu'aux brebis perdues de la maison d'Israël". La dureté du Seigneur est inébranlable. Maintenant, même Jésus joue au théologien : la mission reçue de Dieu est limitée aux enfants d'Israël. Il n'y a donc rien à faire. La miséricorde n'est pas pour elle. Elle est exclue. Il n'y a pas de discussion possible.

    Mais la femme est têtue. Son espoir est désespéré, et elle brise non seulement toute supposée inimitié tribale, mais aussi l'opportunité, sa propre dignité. Elle se jette devant lui et le supplie : "Seigneur, aide-moi !" Elle l'appelle "Seigneur", c'est-à-dire qu'elle reconnaît son autorité et sa mission. Qu'est-ce que Jésus peut attendre d'autre ? Pourtant, il répond de manière moqueuse et irrespectueuse à cette pauvre femme : "Ce n'est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux chiens", c'est-à-dire aux chiens domestiques. Un manque d'attitude, de manière, d'humanité. Jésus apparaît comme aveuglé par le nationalisme et la rigueur théologique.

    N'importe qui d'autre aurait abandonné. Mais pas cette femme. Elle est déterminée : elle veut que sa fille soit guérie. Et elle saisit immédiatement la seule fissure laissée ouverte par les paroles de Jésus, où il avait parlé de chiens domestiques (et donc pas de chiens errants). Ils partagent en effet la maison de leurs maîtres. Alors, avec un geste que le désespoir rend astucieux, elle dit : "C'est vrai, Seigneur, et pourtant les chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres". Peu de mots, mais bien posés et de nature à bousculer la rigidité de Jésus, à le conformer, à le "convertir" à lui-même. En effet, sans hésiter, Jésus répond : "Femme, tu as une grande foi ! Ta demande est exaucée." Et dès cet instant, sa fille est guérie. Jésus, lui aussi, apparaît guéri et, à la fin, il se montre libre de la rigidité des éléments théologiques, politiques et culturels dominants de son époque.

    Que s'est-il donc passé ? En dehors de la terre d'Israël, Jésus a guéri la fille d'une femme païenne, méprisée parce qu'elle était cananéenne. Et ce n'est pas tout : il est d'accord avec elle et loue sa grande foi. Voilà le germe d'une révolution.

    ***

    MessaInLatino a résumé comme suit les descriptions profondément erronées et hérétiquement blasphématoires du Seigneur Jésus-Christ faites par le Père Spadaro :

    - indifférent à la souffrance ;
    - irritable et insensible ;
    - d'une dureté insondable ;
    - théologien impitoyable ;
    - moqueur et irrespectueux à l'égard de la pauvre mère ;
    - qui fait preuve d'un manque d'attitude, de manière et d'humanité ;
    - aveuglé par le nationalisme et le rigorisme théologique ;
    - rigide, confus et en manque de conversion ;
    - malade et prisonnier de la rigidité et des éléments théologiques, politiques et culturels dominants de son époque ;
    - glorificateur de la foi païenne.

    Voici l'homélie de saint Jean Chrysostome sur Jésus et la foi de la femme cananéenne.

    Voir également cet article utile de Nicholas LaBlanca dans lequel il démonte les interprétations modernistes et hétérodoxes similaires de ce récit évangélique.


    ***

    La foi d'une Cananéenne
    Matthieu 15 : 21-28 :

    21 Partant de là, Jésus se retira dans la région de Tyr et de Sidon.

    22 Voici qu’une Cananéenne, venue de ces territoires, disait en criant : « Prends pitié de moi, Seigneur, fils de David ! Ma fille est tourmentée par un démon. »

    23 Mais il ne lui répondit pas un mot. Les disciples s’approchèrent pour lui demander : « Renvoie-la, car elle nous poursuit de ses cris ! »

    24 Jésus répondit : « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël. »

    25 Mais elle vint se prosterner devant lui en disant : « Seigneur, viens à mon secours ! »

    26 Il répondit : « Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens. »

    27 Elle reprit : « Oui, Seigneur ; mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres. »

    28 Jésus répondit : « Femme, grande est ta foi, que tout se passe pour toi comme tu le veux ! » Et, à l’heure même, sa fille fut guérie.

  • Le pape et les catholiques américains : à qui s'en prend-il exactement ?

    IMPRIMER

    Lu sur The Pillar (JD Flynn) :

    29 août 2023

    Lorsqu'il s'est rendu au Portugal pour les Journées mondiales de la jeunesse ce mois-ci, le pape François a pris le temps de visiter une communauté jésuite, comme il a l'habitude de le faire lors de ses voyages internationaux, et de répondre aux questions de ses confrères jésuites. 

    Comme c'est devenu une pratique courante, ces questions et réponses ont été publiées dans La Civiltà Cattolica, une revue semi-officielle du Vatican. 

    La conversation comportait des sections assez substantielles et intéressantes.

    Mais au Portugal, où le pape François a prié sous un soleil de plomb avec quelque 30 000 pèlerins américains et leurs évêques, le souverain pontife a également pris le temps de leur jeter un peu d'ombre. 

    Un jésuite a demandé au pape ce qu'il pensait des Américains, "même des évêques", qui critiquaient son leadership. 

    Le pape a répondu qu'aux États-Unis, "la situation [ecclésiale] n'est pas facile".

    "Il y a une attitude réactionnaire très forte. Elle est organisée et façonne l'appartenance des gens, même sur le plan émotionnel".

    Le pape a averti les Américains que "l'indietrismo (le fait d'être tourné vers le passé) est inutile et que nous devons comprendre qu'il y a une évolution appropriée dans la compréhension des questions de foi et de morale".

    François a noté un "climat de fermeture" aux États-Unis, par lequel "on peut perdre la vraie tradition et se tourner vers les idéologies pour obtenir un soutien". En d'autres termes, l'idéologie remplace la foi, l'appartenance à un secteur de l'Église remplace l'appartenance à l'Église.

    Certains "groupes" américains, a-t-il dit, "si fermés, s'isolent".

    "Au lieu de vivre de la doctrine, de la vraie doctrine qui se développe toujours et porte du fruit, ils vivent d'idéologies. Quand on abandonne la doctrine dans la vie pour la remplacer par une idéologie, on a perdu, on a perdu comme à la guerre".

    Tout d'abord, je pense que le pontife devrait être félicité - en tant que pape, il a passé exactement six jours aux États-Unis et a réussi, apparemment, à tirer des conclusions très définitives sur au moins une partie des 60 millions de catholiques vivant aux États-Unis.

    Deuxièmement, je dois dire que je suis d'accord avec le pape. Je pense que certains idéologues vivent parmi nous, et je suis heureux que le pape l'ait reconnu.

    Mais voici le problème : je n'ai aucune idée de qui le pontife vise réellement. Et eux non plus.

    Plutôt que d'apporter une correction délibérée, définitive et directe aux tendances théologiques, culturelles ou pastorales de certains catholiques américains, le pape a jeté un regard latéral non spécifié sur - vous savez - "ces gens" là-bas, au cours d'une réunion à huis clos dont il savait que les comptes rendus seraient publiés.

    La plupart des gens pensent probablement qu'il s'agit des traditionalistes liturgiques - et la plupart des gens pensent probablement qu'il regroupe ces traditionalistes avec les politiciens "conservateurs" qui prônent la peine de mort ou la guerre nucléaire. 

    Mais je ne sais pas. 

    Lorsque le pape a condamné le fait de "regarder en arrière", aurait-il pu signifier que les évêques américains regardaient en arrière, avant l'Ordinatio sacerdotalis, et demandaient une discussion sur l'ordination sacerdotale des femmes lors du synode sur la synodalité ? 

    Lorsque le pape a déploré un "climat de fermeture" idéologique, aurait-il pu parler d'une série d'interdictions liturgiques non requises par Traditionis custodes ou tout autre texte du Magistère ? 

    Lorsque le pape a mis en garde contre un "retour en arrière" vers l'idéologie, parlait-il de Trente ou des années 1970 ? 

    Il ne l'a pas vraiment dit, n'est-ce pas ?

    Je ne suis pas un traditionaliste liturgique. Je vais à des messes Novus ordo offertes par des prêtres qui ne portent pas d'amict. Je prie comme un pentecôtiste latino-américain. J'aime davantage Dorothy Day que Fulton Sheen. Mes opinions politiques s'écartent largement du courant bipartisan dominant. Mais j'essaie d'être catholique et de respecter les enseignements de la foi et, pour cette raison, un bon nombre de personnes me qualifieraient de conservateur.   

    Le pape parle-t-il de personnes comme moi ? 

    Ou parle-t-il de mes amis qui vont à la messe traditionnelle en latin et qui sont des socialistes purs et durs, avec des politiques révolutionnaires qui me font un peu peur ? 

    Parle-t-il de la "campagne présidentielle" de Taylor Marshall ? Des partisans de Trump ? Parlons-nous des sédévacantistes ? LifeTeen ? De "ChurchMilitant" ? D'afficheurs de tweets extrêmement en ligne ? Des conférences de Steubenville ? De "l'esprit de Vatican II" ? Des personnes qui aiment un Agnus dei en latin de temps en temps ?

    Pense-t-il que ces groupes sont tous identiques ?

    Honnêtement, je ne sais pas. 

    S'il parle de moi et qu'il a une correction particulière à me donner, j'aimerais la recevoir.

    Je doute fort que le pape sache qui je suis. Mais s'il le sait, j'espère qu'il veut que je sois un saint. Et s'il pense que je fais fausse route, j'espère qu'il me le dira. 

    Cela faciliterait certainement les choses, n'est-ce pas ? 

    Mais le problème du commentaire du pontife est que, sauf spécificité, il ne servira à personne pour faire un examen de conscience. Il n'informera pas le ministère pastoral des évêques, ni ne conduira à un effort pour accueillir les brebis perdues. 

    Il ne convaincra pas, car nous supposerons tous que le pontife parle d'"autres personnes".

    Son commentaire sera une massue, placée dans une pièce remplie de personnes en désaccord les unes avec les autres, et utilisée sans discernement.

    "Je sais de qui le pape parle", dira chacun d'entre nous. "Il parle évidemment de vous."

  • Le pape ne devrait pas citer saint Vincent de Lérins à tort et à travers

    IMPRIMER

    Lors de son entretien avec les jésuites portugais à Lisbonne, le pape a, une nouvelle fois, invoqué l'autorité de saint Vincent de Lérins pour justifier sa conception évolutive de la doctrine. Mais l'enseignement de Vincent de Lérins va-t-il vraiment dans ce sens ?

    De Thomas G. Guarino sur First Things :

    Saint May 24 : St. Vincent of Lerins a former Military Man who became a  Monk and Writer in France

    LE PAPE FRANCOIS ET SAINT VINCENT DE LÉRINS

    16 août 2022

    Le pape François s'est souvent tourné vers saint Vincent de Lérins pour obtenir des éclaircissements théologiques. Plus récemment, lors d'un vol le 29 juillet 2022, François a déclaré que Vincent fournissait une règle "très claire et éclairante" pour un développement doctrinal approprié.

    La carrière théologique de saint Vincent a été quelque peu mouvementée. Alors que son œuvre maîtresse, le Commonitorium, était populaire lorsqu'elle a été redécouverte au XVIe siècle (après avoir été perdue pendant un millénaire) et qu'elle est restée populaire pendant plusieurs siècles par la suite, elle est progressivement tombée en disgrâce. Sur la base d'une phrase célèbre - "Nous tenons cette foi qui a été crue partout, toujours et par tous" (ubique, semper, et ab omnibus) - Vincent en est venu à être considéré comme un conservateur rigide, peu sensible à l'histoire.  

    Il s'agit là d'une lecture erronée de l'œuvre fondatrice de Vincent. Il est donc réconfortant de voir que le pape François ne s'est pas laissé piéger par l'interprétation erronée et largement répandue du Lérinien. Au contraire, le pape souligne précisément les aspects du raisonnement théologique de Vincent qui font de lui un auteur prémonitoire. En effet, le théologien de Lérins est l'un des rares auteurs chrétiens anciens à aborder la question de l'évolution doctrinale dans le temps, et il le fait de manière frontale.   

    Lorsque saint Vincent a rédigé le Commonitorium en 434, certains penseurs chrétiens de l'époque s'opposaient à l'utilisation par l'Église de termes tels que homoousios (consubstantiel) et Theotokos (Marie porteuse de Dieu) qui ne se trouvaient pas dans la Bible. Ils s'opposaient expressément à ces nouveaux termes qu'ils considéraient comme illégitimes. Mais Vincent a soutenu que les nouveaux termes étaient corrects parce que la doctrine chrétienne se développe nécessairement avec le temps, tout comme une graine devient une plante et un enfant devient un adulte. De la même manière, ces nouveaux mots aident à développer et à clarifier le sens de l'Ecriture. Vincent reconnaît que tout ce qui est nécessaire à la foi chrétienne peut être trouvé in nuce dans les Saintes Ecritures. Mais il insiste aussi sur une croissance graduelle et homogène dans le temps.    

    Notant que certains demanderont : " N'y a-t-il pas de progrès de la religion dans l'Église du Christ ? ", Vincent répond : " Il y a un très grand progrès ! ". Ce progrès, cependant, doit toujours être une avancée de la foi et non une déformation de celle-ci. La doctrine se développe de manière analogue à l'être humain. Bien qu'une personne subisse de nombreux changements de la jeunesse à la vieillesse, elle reste la même personne, la même nature. Il y a une croissance organique, architectonique, au fil du temps - tant chez les êtres humains que dans la doctrine chrétienne. 

    Mais ce progrès, affirme Vincent, doit être d'un certain type et d'une certaine forme, protégeant toujours les acquis doctrinaux antérieurs de la foi chrétienne. Un changement ne peut pas créer un sens différent. Au contraire, les formulations ultérieures doivent être "selon la même doctrine, le même sens et le même jugement" que les précédentes.  

    Plus loin dans le Commonitorium, Vincent fait valoir un point fréquemment cité par le pape François : "La doctrine chrétienne suit également cette loi du progrès. Elle se consolide au fil des années, se développe avec le temps, s'affine avec l'âge". Depuis son élection en 2013, le pape François a cité son passage préféré de saint Vincent à de nombreuses reprises, notamment dans l'encyclique Laudato Si'. C'est peut-être dans un discours de 2017 sur le catéchisme qu'il a fait les remarques les plus expansives. Le pape y affirme avec audace que la peine de mort est "en soi contraire à l'Évangile". Il cite saint Vincent pour défendre cette position, qui implique, selon le pape, de reconnaître l'engagement de l'Église en faveur de la dignité humaine inviolable. Il s'agit d'un "développement harmonieux de la doctrine".

    Le Pape François poursuit en parlant de la tradition d'une manière que le Lérinien approuverait, décrivant la tradition comme une "réalité vivante". Il invoque à nouveau l'"heureuse formulation" de Vincent selon laquelle la doctrine chrétienne est "consolidée par les années, élargie par le temps, [et] affinée par l'âge". Le pape a certainement raison de dire qu'il s'agit d'une phrase cruciale. Mais si je devais conseiller le pape, je l'encouragerais à tenir compte de l'ensemble du Commonitorium de saint Vincent, et pas seulement de la sélection qu'il cite à plusieurs reprises.

    Notez que Saint-Vincent ne parle jamais positivement des renversements. Pour Vincent, un revirement n'est pas un progrès dans la compréhension de la vérité par l'Église ; ce n'est pas un exemple d'un enseignement " élargi par le temps ". Au contraire, les revirements sont la marque des hérétiques. Les revirements indiqueraient que le monde entier incorporé au Christ Tête "aurait erré, aurait blasphémé, n'aurait pas su ce qu'il fallait croire". Lorsqu'il condamne les revirements, Vincent parle toujours de la tentative de renverser ou d'altérer les enseignements solennels des conciles œcuméniques. Le Lérinien est particulièrement hanté par les tentatives de renverser l'enseignement de Nicée, comme cela s'est produit au Concile d'Ariminum (Rimini, a.d. 359), qui, dans sa proposition de credo, a supprimé le mot crucial, homoousios. 

    J'invite également le Pape François à invoquer les garde-fous salutaires que Vincent érige pour assurer un développement adéquat. Si le pape François est séduit par l'expression de Vincent "dilatetur tempore" ("élargi par le temps"), le Lérinien utilise également l'expression suggestive "res amplificetur in se" ("la chose grandit en elle-même"). Selon le Lerinien, il existe deux types de changement : Un changement légitime, un profectus, est un progrès - une croissance homogène dans le temps - tel qu'un enfant devenant adulte. Un changement inapproprié est une déformation pernicieuse, appelée permutatio. Il s'agit d'un changement dans l'essence même de quelqu'un ou de quelque chose, comme un rosier qui se transforme en épines et en chardons. 

    Se référer à cette distinction pourrait aider le pape François à montrer comment un enseignement particulier représente un véritable profectus fidei. 

    Un autre garde-fou est l'affirmation vincentienne selon laquelle la croissance et le changement doivent se faire in eodem sensu eademque sententia, c'est-à-dire selon le même sens et le même jugement. Pour le moine de Lérins, toute croissance ou développement dans le temps doit préserver le sens substantiel des enseignements antérieurs. Par exemple, l'Église peut certainement évoluer dans sa compréhension de l'humanité et de la divinité de Jésus-Christ, mais elle ne peut jamais revenir sur la définition de Nicée. L'idem sensus ou "même sens" doit toujours être maintenu dans tout développement futur. Le pape François cite rarement, voire jamais, cette importante phrase vincentienne - mais tout appel au changement doit être démontré comme n'étant pas simplement une altération, ou même un renversement de l'enseignement antérieur, mais en fait in eodem sensu avec ce qui l'a précédé.

    Je conseillerais également au pape d'éviter de citer saint Vincent pour soutenir des revirements, comme dans le cas de son enseignement selon lequel la peine de mort est "en soi contraire à l'Évangile". La compréhension organique et linéaire du développement de Vincent n'inclut pas les renversements de positions antérieures. Saint Vincent place sa plus grande confiance dans le corps uni des évêques qui, ensemble, témoignent de la foi chrétienne dans le monde entier. Le théologien de Lérins soutiendrait probablement que les revirements, en particulier ceux qui concernent des positions de longue date, sont mieux sanctionnés par un concile œcuménique ou au moins par l'accord général de tout l'épiscopat - bien que le pape soit au premier plan, étant donné l'autorité de son Siège. 

    Tout au long de son œuvre, Vincent s'écrie avec saint Paul : "O Timothée, garde le dépôt, en évitant les nouveautés profanes" (1 Tim. 6:20). Dans son discours de 2017, le pape François affirme que le dépôt de la foi n'est pas "quelque chose de statique". Vincent conviendrait que le depositum est vivant et en croissance - mais il insisterait simultanément sur le fait que cette croissance doit être profondément liée à la tradition dogmatique antérieure de l'Église et en continuité avec elle. 

    Mgr Thomas G. Guarino est professeur émérite de théologie systématique à l'université de Seton Hall et l'auteur de Vincent de Lérins et le développement de la doctrine chrétienne.

  • Qui essaie vraiment de remplacer la doctrine par l'idéologie ?

    IMPRIMER

    De Carl E. Olson sur The Catholic World Report :

    Qui essaie vraiment de remplacer la doctrine par l'idéologie ?

    Le moment choisi par le pape François pour répondre aux questions des jésuites au Portugal est tout aussi remarquable que les clichés recyclés et désormais trop familiers sur ceux qui sont "rigides", "reviennent en arrière" et sont "superficiels".

    28 août 2023

    Le pape François, s'adressant récemment à un groupe de jésuites, a déclaré : "Quand on abandonne la doctrine dans la vie pour la remplacer par une idéologie, on a perdu, on a perdu comme à la guerre." Il a raison. Mais pas de la manière dont, apparemment, il pense.

    Le 5 août 2023, alors qu'il se trouvait au Portugal pour les Journées mondiales de la jeunesse, François a rencontré des jésuites au Colégio de São João de Brito. La séance de questions-réponses qu'il a eue avec eux a été publiée aujourd'hui dans la revue jésuite La Civiltà Cattolica par l'éditeur Antonio Spadaro, SJ, qui travaille depuis longtemps en étroite collaboration avec François. La longue conversation contient un certain nombre de remarques intéressantes, qui fournissent beaucoup d'os à ronger à la foule habituelle de prétendus catholiques - "Le pape François blâme les catholiques américains réactionnaires qui s'opposent à la réforme de l'Église" - et aux médias sans intérêt - "Le pape François blâme les conservateurs américains "rétrogrades", l'"attitude réactionnaire" de l'Église américaine".

    Le moment choisi pour cette interview est tout aussi remarquable que les clichés recyclés et désormais trop familiers sur ceux qui sont "rigides", "reviennent en arrière" et sont "superficiels". Bien que Spadaro ne soit pas très compétent en mathématiques ou en théologie, c'est un opérateur rusé qui a sans aucun doute les yeux rivés sur le prochain synode d'octobre à Rome. Et je soupçonne que cet article particulier est en quelque sorte destiné à fixer les évêques américains qui auraient la témérité de poser des questions difficiles sur le processus sans fin du Synode sur la synodalité.

    Trois sujets et points ressortent de cet entretien.

    Tout d'abord, en réponse à une question du plus jeune membre du groupe sur "notre formation en tant que jésuites au niveau affectif, sexuel, corporel", François remarque que "c'est une chose de se préparer au dialogue avec le monde - comme vous le faites avec le dialogue avec les mondes de l'art et de la culture - c'est une autre chose de se compromettre avec les choses du monde, avec la mondanité". C'est très vrai. Ensuite, après avoir évoqué le problème de la pornographie, il déclare : "Je n'ai pas peur de la société sexualisée" :

    "Je n'ai pas peur de la société sexualisée. Non, j'ai peur de la manière dont nous nous y rapportons. J'ai peur des critères mondains. Je préfère utiliser le terme "mondain" plutôt que "sexualisé", parce que ce terme englobe tout, par exemple l'envie de se promouvoir, l'envie de se distinguer ou, comme nous le disons en Argentine, de "grimper"."

    Il s'agit là d'une véritable intuition qui, une fois encore, s'inscrit dans le contexte de la formation des jésuites. Mais elle semble se perdre plus tard, lorsque François aborde le sujet de l'homosexualité en répondant à une question principale sur la tension entre la doctrine et ce qui est présenté comme des relations homosexuelles actives :

    "Il est clair qu'aujourd'hui la question de l'homosexualité est très forte, et la sensibilité à cet égard change en fonction des circonstances historiques. Mais ce que je n'aime pas du tout, en général, c'est que nous regardons le soi-disant "péché de la chair" avec une loupe, comme nous l'avons fait pendant si longtemps pour le sixième commandement. Si vous exploitez des travailleurs, si vous mentez ou trichez, cela n'a pas d'importance, et ce sont les péchés en dessous de la ceinture qui sont pris en compte."

    Tout d'abord, si la société dominante, les médias et le pouvoir en place nous répétaient sans cesse qu'exploiter les travailleurs et les spolier de leur salaire était une chose merveilleuse et même nécessaire, François aurait raison. Mais, bien sûr, ce n'est pas le cas. C'est en revanche le cas de l'homosexualité, du transgendérisme et d'un certain nombre d'autres actions immorales ou nuisibles, qui ne sont plus simplement tolérées - elles sont poussées, encouragées et prêchées avec une ferveur diabolique. Et ce, précisément parce que la révolution sexuelle n'est plus une révolution mais est devenue la culture dominante en Occident.

    En outre, les catholiques pratiquants de l'Occident sont continuellement agressés parce qu'ils s'opposent au déferlement de la dépravation sexuelle et à l'anthropologie profondément déformée qui la sous-tend. Ils reconnaissent que le péché sexuel est tout aussi injuste que le vol des travailleurs, mais qu'il est encore plus profondément personnel et destructeur. Il ne s'agit plus seulement d'adultère ou même d'actes homosexuels entre adultes consentants, mais de trafic sexuel, de pornographie enfantine, d'abus sexuels et de mutilation de jeunes corps. (Et, bien sûr, le fait que François lui-même encourage le travail d'hommes tels que James Martin, S.J., dont le prétendu travail pastoral est principalement de la propagande pro-"LGBTQ-alphabet", n'aide pas).

    Deuxièmement, un frère religieux récemment rentré d'une année sabbatique passée aux États-Unis a fait la remarque suivante : "J'ai vu beaucoup de gens, même des évêques, critiquer votre direction de l'Église". L'horreur, l'horreur ! Dites que ce n'est pas le cas ! Mais il aurait fallu que ce religieux ait connu les années 1970, 1980, 1990 quand il était courant, au point d'en être ennuyeux, que des intellectuels catholiques, des prêtres, des politiciens, des prêtres - dont de nombreux jésuites - et même des évêques critiquent, attaquent et rejettent ouvertement les papes Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI. La grande majorité d'entre eux étaient en colère parce que ces pontifes avaient maintenu l'enseignement de l'Église sur la morale sexuelle, les contraceptifs artificiels, le divorce et le remariage, l'ordination des femmes, et ainsi de suite.

    Il n'est pas nécessaire d'être d'accord avec les diverses critiques adressées au pape François pour savoir que beaucoup d'entre elles, si ce n'est la plupart, proviennent de la crainte qu'il ait semé la confusion ou même sapé l'enseignement de l'Église sur ces mêmes sujets. Bien sûr, certaines attaques traditionalistes - qui semblent dominer et biaiser le point de vue du pape sur le catholicisme aux États-Unis - sont scandaleuses, trempées dans les eaux acides de théories conspirationnistes risibles. Mais il y a beaucoup de bons catholiques qui expriment, depuis de nombreuses années, des préoccupations sobres et légitimes. Comme l'a fait remarquer Francis X. Maier la semaine dernière : "Les critiques ne sont pas toujours des ennemis. Certains parlent par amour, même lorsque leurs paroles sont enflammées".

    "Vous avez vu, dit François, qu'aux États-Unis la situation n'est pas facile : il y a une attitude réactionnaire très forte. Elle est organisée et façonne l'appartenance des gens, même sur le plan émotionnel." Il fait certainement référence aux catholiques traditionalistes, mais ses propos pourraient tout aussi bien s'appliquer aux catholiques "progressistes" des soixante dernières années, qui sont aussi réactionnaires et émotifs que les autres le sont. Il suffit de lire presque n'importe quel article du National Catholic Reporter sur, par exemple, l'ordination des femmes, pour se rendre compte du peu de respect qu'ils ont pour la doctrine, les enseignements de Vatican II et les déclarations catégoriques des papes précédents.

    "Je voudrais rappeler à ces personnes que l'indietrisme (le fait d'être tourné vers le passé) ne sert à rien...", dit François, toujours à l'intention des traditionalistes. Mais, comme l'a tweeté Stephen White :

    "Une source de fascination (et de frustration) est la façon dont les préoccupations des catholiques américains, qui ne veulent pas revenir à 1975, sont constamment traduites, ici et à Rome, en un désir de revenir à 1955."

    Enfin, et c'est le point le plus important, François déclare

    "... nous devons comprendre qu'il y a une évolution appropriée dans la compréhension des questions de foi et de morale tant que nous suivons les trois critères que Vincent de Lérins a déjà indiqués au cinquième siècle : la doctrine évolue ut annis consolidetur, dilatetur tempore, sublimetur aetate. En d'autres termes, la doctrine progresse également, s'étend et se consolide avec le temps et s'affermit, mais elle est toujours en progrès. Le changement se développe de la racine vers le haut, selon ces trois critères.

    Venons-en aux détails. Aujourd'hui, posséder des bombes atomiques est un péché ; la peine de mort est un péché. On ne peut pas l'employer, mais ce n'était pas le cas auparavant. Quant à l'esclavage, certains pontifes avant moi l'ont toléré, mais les choses sont différentes aujourd'hui. Alors on change, on change, mais avec les critères que je viens de mentionner."

    Il y a quelques années encore, le Catéchisme affirmait que "l'enseignement traditionnel de l'Église n'exclut pas le recours à la peine de mort..." (CEC 2267). Aujourd'hui, François déclare carrément que la peine de mort est un péché. Cela nous rappelle l'observation de Chesterton dans Orthodoxie :

    La controverse moderne a pris l'habitude imbécile de dire que telle ou telle croyance peut être défendue à une époque et ne peut l'être à une autre. Certains dogmes étaient crédibles au 12e siècle, mais ne le sont plus au 20e. Autant dire qu'une certaine philosophie peut être crue le lundi, mais qu'elle ne peut pas l'être le mardi.

    François a raison de parler de "changement", mais il a tort de qualifier ce changement de "développement". Ni Vincent de Lérins ni John Henry Newman n'ont cru ou enseigné que quelque chose pouvait être moralement droit et prudent à un moment donné et se transformer ensuite en quelque chose de moralement mauvais et pécheur. Une telle transformation n'est certainement pas un "progrès", un terme utilisé à plusieurs reprises par François.

    Ce qui nous ramène au synode qui approche à grands pas. Quelles que soient les motivations de François, il est évident que Spadaro - qui a récemment écrit sur la façon dont Jésus a été "guéri" de "la rigidité des éléments théologiques, politiques et culturels dominants de son époque" - et d'autres ont l'intention d'essayer de changer la doctrine de l'Église. Après tout, si "pendant deux millénaires, l'Église catholique a enseigné que la peine de mort pouvait être une punition légitime pour des crimes odieux" et que maintenant cela peut être complètement changé et considéré comme un "péché", pourquoi ne pas renverser l'enseignement de l'Église sur la sexualité, le mariage, et plus encore, au nom de "l'inclusion radicale" ? 1975, nous voilà !

    Et pourtant, ironiquement, je reprends espoir dans la remarque de François : "Quand on abandonne la doctrine dans la vie pour la remplacer par une idéologie, on a perdu, on a perdu comme à la guerre."

  • Les interviews du Pape : slogans figés et confusion assurée

    IMPRIMER

    De Stefano Fontana sur la Nuova Bussola Quotidiana :

    Les interviews du Pape : slogans figés, confusion assurée

    Indietrisme*, cléricalisme et ambiguïtés persistantes sur l'inclusion des homosexuels et des transsexuels : c'est le scénario habituel mis en scène également dans l'interview de François avec les jésuites portugais.

    29_08_2023

    Lors de son voyage à Lisbonne pour les Journées Mondiales de la Jeunesse, François a également rencontré, comme il en a l'habitude, ses confrères jésuites, répondant à leurs questions. Le texte de cet entretien est maintenant publié par La Civiltà Cattolica.

    On espère toujours qu'un enseignement important et clair ressortira de ces rencontres, même si le langage utilisé est plutôt informel, comme dans un dialogue entre amis. Mais ce n'est souvent pas le cas pour deux raisons principales. La première est que François poursuit sa propre ligne de pensée et ne se laisse pas le moins du monde interpeller par les questions soulevées. Non pas que ses frères jésuites, en tant que jésuites, posent des questions embarrassantes, mais ils soulèvent des problèmes qui sont immédiatement traités selon les schémas de pensée habituels et avec l'abus des mêmes mots : indiétrisme, cléricalisme, etc.

    La deuxième raison est que François émet des jugements généraux sur des situations très complexes. On comprend qu'on ne peut pas écrire des romans dans une brève interview, mais c'est précisément pour cette raison qu'il faut faire preuve d'une certaine prudence. Par exemple, le Pape exprime ici un jugement très dur et absolument schématique sur le clergé et les catholiques américains, les accusant sommairement d'indiétrisme idéologique : "il y a une attitude réactionnaire très forte, organisée, qui structure une appartenance également affective. Je veux rappeler à ces gens que l'indiétrisme ne sert à rien".

    On a l'impression que dans chaque entretien avec ses frères jésuites, mais on pourrait aussi dire dans chaque entretien tout court, les réponses de François sont standardisées, qu'elles appartiennent à un répertoire conceptuel et linguistique fixe et qu'elles ne connaissent pas d'évolution réelle. Cette fois encore, comme par le passé, François cite Vincent de Lérins à propos de l'évolution du dogme, mais il le cite à demi-mot, citant les mots qui indiquent un progrès mais jamais ceux qui indiquent une continuité parfaite, à savoir "par tous, toujours et partout". Bien que de nombreux experts le lui aient fait remarquer, par exemple le père Nicola Bux, il ne se laisse pas décourager.

    Cette approximation, qui anime les jugements hâtifs et injustes, s'est également manifestée dans ce dialogue avec ses frères jésuites du Portugal sur un sujet concernant la Doctrine sociale de l'Église. Répondant à une question sur l'inclusion des homosexuels et des transsexuels dans l'Église (pouvait-elle manquer ?...), François a fait cette remarque : "Mais ce que je n'aime pas du tout, en général, c'est qu'on regarde à la loupe ce qu'on appelle le "péché de la chair", comme on l'a fait pendant si longtemps à propos du sixième commandement. Si vous exploitez des travailleurs, si vous mentez ou trichez, cela n'a pas d'importance, et ce sont les péchés au-dessous de la ceinture qui comptent".

    Cette affirmation est lacunaire à bien des égards. Tout d'abord, elle exprime un jugement en trois mots et le résultat d'une impression personnelle sur une question très importante et complexe. Elle juge des époques entières de l'histoire, de nombreux prêtres dans les confessionnaux, des éducateurs et des parents par le biais d'un jugement tranchant et peu attrayant. Deuxièmement, il s'agit sans aucun doute d'un jugement erroné, car il ne tient pas compte de la grande attention que la Doctrine sociale de l'Église, la morale catholique et les manuels pour les confesseurs ont accordée à ce que l'on appelle les "péchés sociaux".

    Le catéchisme cite l'escroquerie au juste salaire comme une action qui appelle la vengeance de Dieu. Dans Rerum novarum, Léon XIII a placé au centre de l'action de l'Église ceux qui sont "seuls et sans défense, à la merci de la cupidité des maîtres et d'une concurrence effrénée". Ce jugement de François ne tient pas compte de "ce grand mouvement de défense de la personne humaine", mentionné dans le Centesimus annus (n° 3) de Jean-Paul II, qui a œuvré pour une société plus juste.

    Certes, dans le passé, l'attention portée aux péchés "de chair" était beaucoup plus vive qu'aujourd'hui, où - comme le révèlent de nombreux confesseurs - plus personne ne se confesse pour des actes contraires au sixième commandement. Mais il ne manquait certainement pas d'examens de conscience pour les actes d'injustice sociale et d'exploitation, ni d'actes de réparation pour ces péchés, ni d'interventions publiques de charité, comme l'attestent les saints sociaux et leurs œuvres de charité. En effet, Rerum novarum se terminait par un hymne à la charité. Et combien de générations de prêtres et de laïcs cette encyclique a-t-elle inspirées et guidées ?

    Après tout, si aujourd'hui plus personne ne se confesse pour le sixième commandement, peut-être que tout le monde se confesse pour le septième ? Cette étrange intervention de François semble oublier qu'il n'y a finalement qu'une seule vertu, et que le respect de la dignité de son propre corps et de celui d'autrui permet également de respecter le travailleur ou le pauvre. Le sixième commandement n'est pas quelque chose de privé, mais a de larges répercussions sur la vie sociale et politique, car c'est de la culture des passions débridées que naissent tous les maux de la société. Lors du colloque de Lisbonne, François a beaucoup parlé de l'inclusion des homosexuels et des transsexuels. Nous ne voudrions pas qu'il ait manqué ce lien entre le respect du corps et la justice, entre le sixième et le septième commandement.

    * L'indiétrisme consisterait à vouloir revenir en arrière.

  • Quand le pape fait l'éloge de la Russie impériale au grand dam de l'archevêque de Kiev

    IMPRIMER

    De Sandro Magister sur Settimo Cielo (traduction de diakonos.be):

    Le pape fait l'éloge de la Russie impériale. L'Église ukrainienne lui demande de se rétracter

    28 août 2023

    Ce vendredi 25 août après-midi, le Pape François s’est connecté à Saint-Pétersbourg à l’occasion de la Xè rencontre nationale des jeunes catholiques de Russie et leur a adressé en espagnol ce message vidéo, diffusé le jour suivant par la salle de presse du Vatican, également en version italienne :

    > “Queridos jóvenes, queridas jóvenes: que la paz…”

    Le thème du message du Pape était le même que celui des JMJ de Lisbonne. « Marie se leva et s’en alla en hâte (Luc 1, 39) », avec ces seules paroles susceptibles d’être associées à la guerre déchaînée par la Russie contre l’Ukraine :

    « Je vous souhaite à vous, jeunes Russes, la vocation d’être artisans de paix au milieu de tant de conflits, au milieu de tant de polarisations de toute part, qui affligent notre monde. Je vous invite à être des semeurs, à répandre des graines de réconciliation, de petites graines qui en cet hiver de guerre ne germeront pas pour le moment sur la terre glacée mais qui fleuriront dans un printemps futur ».

    Mais ensuite, avant la bénédiction finale, François, s’est lancé dans une déclaration improvisée en italien, qui n’a pas été publiée par la salle de presse du Vatican mais par le site « Il Sismografo », et que l’on peut écouter dans cette vidéo toujours disponible en ligne :

    « N’oubliez pas votre héritage. Vous êtes héritiers de la grande Russie : la grande Russie des saints, des rois, la grande Russie de Pierre le Grand, de Catherine II, cet empire russe grand, cultivé, de tant de culture, de tant d’humanité. Ne renoncez jamais à cet héritage. Vous êtes les héritiers de la grande Mère Russie, allez de l’avant. Et merci. Merci pour votre façon d’être, pour votre façon d’être Russes ».

    Naturellement, ces déclarations ont eu un grand écho à travers le monde, notamment dans cet article de Francis X. Rocca dans « The Wall Street Journal » :

    > Pope Francis Praises Historical Russian Imperialism Amid War in Ukraine

    Mais surtout, cet éloge sans retenue de la Russe impériale de la part du Pape a incité l’archevêque majeur de l’Église grecque catholique ukrainienne à publier le soir du lundi 28 août la déclaration suivante que nous reproduisons intégralement ici :

    *

    Déclaration de sa béatitude Sviatoslav Shevchuk concernant les déclarations du pontife romain pendant la rencontre avec la jeunesse Russe

    C’est avec grande douleur et inquiétude que nous avons eu connaissance des paroles, attribuées, au Saint-Père François, prononcées pendant la rencontre à distance avec la jeunesse catholique russe, qui s’est déroulée le 25 août dernier en vidéoconférence à Saint-Pétersbourg.

    Nous présumons que les déclarations de Sa Sainteté aient été prononcées de manière spontanée, sans la prétention de donner une analyse historique, et encore moins avec l’intention de soutenir les ambitions impérialistes de la Russie. Malgré cela, nous partageons la grande douleur suscitée par ses observations dans le chef des évêques, du clergé, des moines et des fidèles non seulement de notre Église, mais également d’autres confessions chrétiennes, ainsi que de représentants d’autres confessions religieuses. Dans le même temps, nous partageons également la grande déception de la société civile ukrainienne à la suite de ces déclarations.

    Les déclarations sur la « grande Russie de Pierre I, de Catherine II, de cet empire grand et illuminé, de grande culture et de grande humanité » font référence au pire exemple de l’impérialiste et du nationalisme extrême russe.

    Nous craignons que ces déclarations soient comprises par certains comme un encouragement envers ce nationalisme impérialiste qui est la véritable cause de la guerre en Ukraine. Une guerre que chaque jour sème la mort et la destruction dans notre peuple.

    Les exemples employés par Sa Sainteté ne correspondent en réalité pas à son magistère sur la paix. Au contraire, le Saint-Père a toujours dénoncé toutes les formes d’impérialisme dans le monde d’aujourd’hui et il a mis en garde contre le danger du nationalisme extrême, en soulignant que ce sont bien eux la cause de « la troisième guerre mondiale par morceaux ».

    En tant qu’Église, nous tenons à signaler que, dans le contexte de l’agression de la Russie contre l’Ukraine, de telles expressions inspirent les ambitions néocoloniales du pays agresseur au lieu de dénoncer et de condamner cette manière d’ « être Russes ».

    Afin d’éviter que les déclarations et les intentions du Saint-Père ne soient manipulées, nous attendons de la part du Saint-Siège une explication de la situation.

    L’Église grecque catholique ukrainienne unie à toute la société civile en Ukraine condamne l’idéologie du « monde russe » et toute la façon criminelle d’ « être Russes ». Nous espérons que notre voix sera entendue par le Saint-Père.

    Dans quelques jours, les évêques de notre Église se réuniront à Rome pour célébrer le Synode annuel de l’Église grecque catholique ukrainienne. Nous aurons en outre l’occasion de rencontrer Sa Sainteté et de lui présenter personnellement les doutes et la douleur du peuple ukrainien, confiant en sa sollicitude paternelle envers notre peuple.

  • Les opinions d'un pape qui divise et stigmatise

    IMPRIMER

    D'Hannah Brockhaus sur CNA :

    Le pape François déplore que "l'idéologie remplace la foi" chez certains catholiques américains

    Le Saint-Père a déclaré que la situation aux États-Unis n'est pas facile en raison d'une "attitude réactionnaire très forte", qui "est organisée et façonne la façon dont les gens appartiennent, même émotionnellement".

    28 août 2023

    Lors d'une conversation avec des jésuites au Portugal au début du mois d'août, le pape François a parlé d'un "climat de fermeture" aux États-Unis, qui, selon lui, remplace parfois la foi par l'idéologie.

    "Vous dites que vous avez ressenti un climat de fermeture [aux États-Unis]", a déclaré le pape en réponse à une question d'un frère jésuite. "Oui, ce climat peut être ressenti dans certaines situations. Et là, on peut perdre la vraie tradition et se tourner vers des idéologies pour se soutenir. En d'autres termes, l'idéologie remplace la foi, l'appartenance à un secteur de l'Église remplace l'appartenance à l'Église".

    Les commentaires du pape François ont été formulés lors d’une rencontre avec les jésuites le 5 août au Colégio de São João de Brito, une école primaire et secondaire dirigée par les jésuites à Lisbonne, au Portugal. Une traduction anglaise de la conversation privée de François avec des membres de la Compagnie de Jésus a été publiée le 28 août par la revue jésuite La Civiltà Cattolica. (voir ICI , ICI, ICI et ICI)

    Il a dit que la situation aux États-Unis n’est pas facile en raison d’une « attitude réactionnaire très forte », qui « est organisée et façonne la façon dont les gens appartiennent, même émotionnellement ».

    Et il a fait référence à ce qu’il appelle en italien « indietrismo », qui se traduit en anglais par « backwardness » ou « looking back ».

    Cette attitude, a-t-il noté, « est inutile, et nous devons comprendre qu’il y a une évolution appropriée dans la compréhension des questions de foi et de morale tant que nous suivons les trois critères que Vincent de Lérins a déjà indiqué au Ve siècle : La doctrine évolue « ut annis consolidetur, dilatetur tempore, sublimetur aetate. »

    « En d’autres termes, la doctrine progresse, se développe et se consolide avec le temps et devient plus ferme, mais progresse toujours », a-t-il expliqué.

    St. Vincent de Lérins était un moine chrétien du 5ème siècle. À l’époque contemporaine, il est considéré comme la première autorité de l’Église sur la théologie de la tradition et le développement de la doctrine, bien qu’il y ait des interprétations divergentes de sa pensée.

    La citation de Vincent de Lérins par le Pape dans sa conversation avec les jésuites au Portugal provient de l’ouvrage théologique du moine, le Commonitorium, dans lequel se trouve l’une de ses déclarations les plus connues, connue sous le nom de canon vincentien : « En outre, dans l’Église catholique elle-même, il faut prendre toutes les précautions possibles pour conserver cette foi qui a été partout, toujours, par tous ».

    Le pape François a fait référence à Vincent de Lérins sur le développement de la doctrine dans le passé, y compris dans une conversation avec les jésuites au Canada en juillet 2022. (voir ICI)

    Au Portugal, le Pape a dit que certaines personnes « se retirent » des critères d’évolution doctrinale de Vincent de Lérins. Ce sont les gens qu’il appelle « indietristi ».

    « Quand vous reculez, vous formez quelque chose de fermé, déconnecté des racines de l’Église et vous perdez la sève de la révélation. Si vous ne changez pas vers le haut, vous reculez, puis vous adoptez des critères de changement autres que ceux que notre foi donne pour la croissance et le changement », a-t-il dit.

    François a dit que les effets de ce retard sur la morale « sont dévastateurs ».

    « Les problèmes que les moralistes doivent examiner aujourd’hui sont très graves, et pour y faire face, ils doivent prendre le risque d’apporter des changements, mais dans la direction que je disais », a-t-il dit.

    Synodalité

    Interrogé par un autre jésuite sur ses plus grandes joies en ce moment, le pape François a indiqué la première des deux assemblées mensuelles du synode sur la synodalité, qui aura lieu en octobre. Sa joie, a-t-il dit, est présente malgré quelques imperfections dans la façon dont le synode est géré.

    « La joie que j’éprouve le plus aujourd’hui vient de la préparation du synode, même si parfois je constate, dans certaines parties, qu’il y a des lacunes dans la façon dont il est conduit », a-t-il dit.

    « La joie de voir surgir de petits groupes paroissiaux, de petits groupes ecclésiaux, de très belles réflexions et il y a une grande effervescence », a-t-il ajouté, affirmant également qu’il n’a pas inventé l’idée d’un synode.

    « C’est Paul VI, à la fin du Concile, qui s’est rendu compte que l’Église catholique avait perdu le sens de la synodalité. « La partie orientale de l’Église le maintient », a déclaré le pape.

    Il a rappelé son rôle de rapporteur général adjoint au Synode des évêques de 2001 sur les évêques.

    « Au moment où je préparais les choses pour le vote sur ce qui venait des groupes, le cardinal en charge du synode m’a dit : « Non, ne mettez pas ça, enlevez ça. » Bref, ils voulaient un synode avec censure, une censure curiale qui bloquait les choses », a noté Francis.

    Le Pape a dit que, bien qu’il y ait des imperfections sur le chemin de la synodalité depuis que saint Paul VI a établi le Synode des évêques en 1965, « au cours des dix dernières années, nous avons poursuivi les progrès, jusqu’à ce que nous atteignions, je pense, une expression mûre de ce qu’est la synodalité ».

    « La synodalité ne consiste pas à aller chercher des votes, comme le ferait un parti politique », a-t-il souligné. « Il ne s’agit pas de préférences, d’appartenance à tel ou tel parti. Dans un synode, la figure principale est l’Esprit Saint. Il est le protagoniste. Vous devez donc laisser l’Esprit diriger les choses. Laissez-le s’exprimer comme il l’a fait le matin de la Pentecôte. Je pense que c’est la voie la plus forte. »

    Conseils aux jésuites

    Au cours de la conversation, le pape François a également donné des conseils aux jésuites sur la façon de vivre leur vocation, y compris l’exhortation à éviter la mondanité.

    « La mondanité spirituelle est un écueil souvent récurrent. « C’est une chose de se préparer au dialogue avec le monde, comme on le fait avec les mondes de l’art et de la culture, c’en est une autre de se compromettre avec les choses du monde, avec la mondanité », a-t-il déclaré.

    Quand il s’agit de protéger contre la mondanité, ainsi que de vivre chastement, le Pape a souligné l’importance de faire un examen quotidien de la conscience, comme recommandé par le fondateur de la Compagnie de Jésus.

    « Aujourd’hui, le grave problème concerne les refuges cachés de l’égoïsme, qui impliquent souvent la sexualité, mais aussi d’autres questions. Que faire? Je trouve de l’aide dans l’examen de conscience, comme l’a demandé saint Ignace », a déclaré François, notant qu’Ignace de Loyola a très rarement dispensé de cette obligation pour les membres de la Compagnie de Jésus.

    « Son but est de voir ce qui se passe en vous. Et il y a des personnes consacrées qui ont le cœur exposé aux quatre vents, avec leurs fenêtres ouvertes, leurs portes ouvertes. Bref, ils n’ont aucune cohérence interne. »

    François a dit que la prière est également très importante : « Avec la prière, le jésuite avance, craignant de rien, car il sait que le Seigneur l’inspirera en temps voulu sur ce qu’il doit faire. »

    « Quand un jésuite ne prie pas, il devient un jésuite desséché. Au Portugal, on pourrait dire qu’il est devenu un « baccalà », une morue séchée et salée », a-t-il déclaré, faisant référence au célèbre plat de Lisbonne.

  • Le pape salue le travail d'un groupe catholique LGBT

    IMPRIMER

    De 7MARGENS :

    Le pape salue le travail d'un groupe catholique LGBT

    26 août 2023

    Un groupe catholique LGBTIQ+ en Australie, appelé Acceptance, a rejoint la liste des groupes pro-LGBT qui ont reçu des éloges du pape François. La lettre, délivrée par une religieuse ayant un passé de dissidence et de censure par le Vatican, a suscité la controverse, rapporte le site Catolin.

    Pour commémorer le 50e anniversaire d'Acceptance, le pape François a envoyé une "note manuscrite" au groupe. La religieuse qui a transmis le message, Sœur Jeannine Gramick, a rapporté que le Pape a transmis "de joyeuses salutations en ce moment d'anniversaire". Sœur Jeannine Gramick a ajouté que François priait pour que les membres du groupe de défense des LGBT "tombent plus amoureux de notre Seigneur Jésus-Christ".

    Bien que le texte intégral de la lettre n'ait pas été rendu public, le groupe Acceptance a remercié le pape pour son "message chaleureux et encourageant" et pour son soutien dans la poursuite de sa mission, qui consiste à offrir un ministère d'accueil aux catholiques LGBTIQ+, en affirmant leur dignité et leur foi.

    L'ancien coordinateur national du groupe, le père Claude Mostowik, a salué ce qu'il a qualifié de validation et de soutien par François d'un espace inclusif pour la communauté LGBTIQ+ au sein du catholicisme. "Cette étape importante nous incite à poursuivre notre action, à favoriser la compréhension et à promouvoir le dialogue entre les personnes de foi LGBTIQ+ et l'Église".

    Angela Han, coordinatrice du groupe Acceptance à Perth, a déclaré que le message du pape reflétait "l'accueil, l'inclusion, la compassion et l'acceptation", affirmant le rôle important joué par Acceptance dans le soutien aux personnes LGBTIQ+ au cours des cinq dernières décennies.

    Basée en Australie, Acceptance se décrit comme un espace totalement inclusif pour les catholiques LGBTIQ+ et leurs familles. Malgré l'absence de références aux enseignements catholiques sur la moralité et la chasteté, note M. Catolin, le groupe cherche à célébrer "l'amour de Dieu" et à promouvoir l'inclusion qui, selon lui, est une exigence de Dieu.

  • Le Synode des peurs : un air de schisme dans l'Église de François ?

    IMPRIMER

    De Nico Spuntoni sur il Giornale :

    Le Synode des peurs : un air de schisme dans l'Église de François ?

    27 août 2023

    Le feu vert possible au diaconat féminin, aux bénédictions arc-en-ciel et aux prêtres mariés renforce les résistances internes à l'assemblée d'octobre.

    Plus le début de la première session de la 16e Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques, qui se tiendra du 4 au 29 octobre 2023, approche, plus les tensions dans l'Église augmentent. L'Instrumentum Laboris présenté en juin dernier est un agrégat de questions qui inclut celles relatives aux sujets les plus brûlants du débat ecclésial : divorcés remariés, prêtres mariés, diaconat féminin, bénédiction des couples de même sexe.

    Résistance

    Le prochain Synode est le fruit d'un long processus qui a d'abord intégré les résultats des consultations dans les diocèses du monde entier dans un document de travail pour l'étape continentale. À la lecture de ce texte, le cardinal George Pell avait lancé un cri d'alarme dramatique sur le chemin synodal parcouru jusqu'à présent, le qualifiant de "cauchemar toxique" pour l'Église catholique. Cette dénonciation, publiée au début de l'année par le prestigieux magazine britannique The Spectator, a été le dernier acte public du cardinal australien avant sa mort, provoquée par une crise cardiaque au bloc opératoire le 10 janvier.

    Mais Mgr Pell n'était pas le seul à s'inquiéter de l'issue du synode sur la synodalité. En effet, à un peu plus d'un mois de l'assemblée, d'autres prélats ont commencé à exprimer des craintes sur ce qui pourrait se passer dans l'Église après l'assemblée. Le cardinal Raymond Leo Burke, l'un des auteurs des cinq dubia sans réponse sur Amoris Laetitia, a rédigé la préface d'un livre intitulé Synodal Process : a Pandora's Box dans lequel Julio Loredo et José Antonio Ureta ont résumé les points critiques du synode sous la forme de 100 questions et 100 réponses. Dans sa contribution, le cardinal américain parle d'une "situation très grave dans l'Église aujourd'hui" qui "inquiète à juste titre tout catholique consciencieux et toute personne de bonne volonté". Pour Burke, "la synodalité et son adjectif, synodal, sont devenus des slogans derrière lesquels se cache une révolution visant à changer radicalement la conception que l'Église a d'elle-même, conformément à une idéologie contemporaine qui nie une grande partie de ce que l'Église a toujours enseigné et pratiqué". Le cardinal a publiquement exprimé sa crainte d'un Synode sur la synodalité prêt à suivre les traces de la voie synodale allemande et donc capable de provoquer "la même confusion, les mêmes erreurs et la même division dans l'Église universelle".

    Un évêque "contre"

    Dans une lettre adressée aux fidèles de son diocèse, l'évêque de Tyler, l'Américain Joseph Edward Strickland, s'est élevé contre les éventuels changements que le Synode pourrait apporter. Le prélat, qui a fait l'objet d'une visite apostolique ordonnée par le Saint-Siège et qui a pris des positions très critiques à l'égard de la ligne du pontificat actuel, a rappelé les enseignements que l'Église a toujours maintenus sur le mariage, l'eucharistie et la sexualité et a affirmé que "dans les semaines et les mois à venir, beaucoup de ces vérités seront examinées dans le contexte du Synode sur la synodalité". L'invitation de Mgr Strickland est de "s'en tenir à ces vérités et de se méfier de toute tentative de présenter une alternative à l'Évangile de Jésus-Christ, ou de promouvoir une foi qui parle de dialogue et de fraternité, en cherchant à supprimer la paternité de Dieu".

    L'évêque du diocèse texan s'est d'ailleurs montré convaincu qu'à l'issue des travaux du synode, un conflit interne pourrait se créer, conduisant certains à qualifier de schismatiques "ceux qui ne sont pas d'accord avec les changements proposés". L'appel de Strickland est un véritable appel à la résistance : "Soyez assurés, cependant, écrit le prélat à ses fidèles, qu'aucun de ceux qui restent fermement sur le chemin de notre foi catholique n'est schismatique", sachant que "cela ne signifie pas abandonner l'Eglise si nous nous opposons à ces changements proposés".

    La question des prêtres mariés

    La préface de Burke et la lettre de Strickland font référence à un schisme provoqué par le synode. Il s'agit là d'un scénario dramatique, qui a également failli se produire dans le cadre du Synode allemand. La crainte de ceux qui s'opposent à ces changements est que l'ordre du jour de l'assemblée, fortement souhaité par la majorité de l'épiscopat allemand, puisse contaminer le synode universel, comme les questions posées dans l'Instrumentum Laboris semblent le suggérer.

    Mais qu'est-ce qui pourrait changer après le synode ? Le texte aborde également les sujets brûlants des prêtres mariés, du diaconat féminin et des mesures à l'égard des couples homosexuels. La liste des participants ayant le droit de vote - parmi lesquels beaucoup ont déjà exprimé publiquement leur soutien à des changements sur ces questions - suggère qu'en octobre 2024, le document final pourrait complètement remodeler le visage de l'Église.

    Après le Synode pour l'Amazonie, François a décidé de ne pas approuver la proposition d'ordonner des hommes mariés en Amazonie, ce qui aurait ouvert une première brèche dans la défense de l'obligation du célibat sacerdotal. Pourtant, l'Instrumentum Laboris de ce nouveau Synode parle d'"ouvrir une réflexion sur la possibilité d'accès au sacerdoce pour les hommes mariés". La Querida Amazonia qui n'avait pas suivi cette ouverture était intervenue après le tollé provoqué par le livre Dal profondo del nostro cuore (Du fond de notre cœur), publié par Cantagalli et écrit par le cardinal Robert Sarah pour réitérer le non à l'ordination d'hommes mariés, avec une contribution de Joseph Ratzinger. Mais la mort de Benoît XVI, qui considérait le célibat sacerdotal comme indispensable, pourrait faciliter l'ouverture à l'ordination de prêtres mariés. Face à une probable position ouverte des pères synodaux, François serait-il prêt à remettre en cause l'Ordinatio Sacerdotalis de son saint prédécesseur, Jean-Paul II ?

    Diaconat féminin et bénédiction arc-en-ciel

    Un autre point sensible en raison des réactions qu'il pourrait susciter est celui qui concerne le diaconat féminin. L'Instrumentum Laboris précise : "La plupart des Assemblées continentales et les synthèses de nombreuses Conférences épiscopales demandent que la question de l'accès des femmes au diaconat soit à nouveau examinée. Est-il possible de l'envisager et de quelle manière ? C'est précisément à la fin du Synode sur l'Amazonie susmentionné que François a mis en place une commission ad hoc présidée par le cardinal Giuseppe Petrocchi et qui a pris la place d'une précédente commission également créée par lui mais dont les conclusions ne lui plaisaient pas ("le résultat n'est pas grand", a-t-il dit). Cette première commission était dirigée par le secrétaire puis préfet de la congrégation - aujourd'hui dicastère - pour la doctrine de la foi, le cardinal Luis Francisco Ladaria Ferrer. Aujourd'hui, le jésuite espagnol, théologiquement considéré comme un modéré, a pris sa retraite et a été remplacé à la tête de l'ancien Saint-Office par le progressiste Víctor Manuel Fernández, un homme très proche de François. Si, au cours de la première décennie de ce pontificat, tant sous la direction de Gerhard Ludwig Müller que de Luis Francisco Ladaria Ferrer, le dicastère qui fut celui de Joseph Ratzinger a rejeté les demandes les plus révolutionnaires, s'opposant à l'agenda du chemin synodal allemand et produisant le fameux responsum de 2021 qui fermait les portes à la bénédiction des couples homosexuels, l'arrivée de l'ancien archevêque de La Plata devrait changer la donne, comme l'a précisé le pape dans la lettre qu'il lui a adressée pour sa nomination. Il est difficile d'imaginer Fernández comme un gardien de l'orthodoxie, selon l'expression bien connue attribuée au préfet.

    En effet, le théologien argentin, en plus d'avoir été un protagoniste en coulisses de la rédaction de l'exhortation apostolique post-synodale Amoris laetitia qui a ouvert la communion aux divorcés remariés, ne cache pas ses convictions rupturistes sur les sujets brûlants que nous verrons au Synode : il a défini l'ordination des hommes mariés comme une " hypothèse possible ", il s'est ouvert aux couples arc-en-ciel en disant que si " une bénédiction est donnée de manière à ne pas provoquer cette confusion, elle devra être analysée et confirmée ", il n'a pas fermé les portes au diaconat féminin.

    Si les participants au Synode des évêques - parmi lesquels se trouvent également des laïcs à la demande de François - votent un document qui donne le feu vert à ces trois questions, ce n'est certainement pas l'ancien Saint-Office qui soulèvera des objections. Or, cela ne facilite pas la situation, mais au contraire la complique, car cela risque de faire souffler plus fort sur Rome le vent d'un schisme. Que fera François ? Le Pape a dit qu'il n'avait pas peur d'un schisme, mais c'était une déclaration faite à un moment où ce scénario dramatique n'était pas aussi réaliste qu'il pourrait apparaître à la fin du prochain Synode.

  • La publication de Laudato Si bis : une nouvelle intéressante qui dit quelque chose de ce pontificat

    IMPRIMER

    D'Andrea Gagliarducci sur Monday Vatican :

    Le Pape François et la deuxième partie de Laudato Si

    28 août 2023

    La semaine dernière, le pape François a annoncé à la surprise générale qu'il rédigeait une deuxième partie de Laudato Si' afin de l'actualiser. Par la suite, le Bureau de presse du Saint-Siège a précisé qu'il s'agissait d'une nouvelle mise à jour environnementale sur les problèmes. C'est une nouvelle intéressante parce qu'elle dit quelque chose de ce pontificat.

    Tout d'abord, elle témoigne du pragmatisme du pape François. Il est bien connu que le pape a écrit Laudato Si pour répondre à un besoin et à une demande qui ont surgi surtout dans la sphère politique, et il l'a fait rapidement pour que cette encyclique soit prête pour la COP 25 à Paris. Il ne s'agissait pas seulement d'une question d'attention aux questions environnementales. Si l'on se souvient, Benoît XVI a été appelé "le pape vert" précisément en raison de sa conscience écologique. La Saison de la création, qui débute le 1er septembre, est née d'une idée du patriarche de Constantinople, Bartholomée Ier, et a été rapidement acceptée dans le monde catholique avec Jean-Paul II.

    Il suffit de parcourir la Doctrine sociale de l'Église, le recueil publié au milieu des années 1990, pour se rendre compte que l'attention portée par l'Église catholique à la création et à la protection de la création n'est pas nouvelle. En effet, elle a toujours fait partie de la doctrine sociale dans le contexte de ce que Paul VI a défini comme le "développement humain intégral".

    Cependant, la question actuelle est différente. Une encyclique peut-elle être définie uniquement sur une situation contingente ou un thème spécifique ? L'environnement peut-il faire l'objet d'un document papal qui ne considère pas le développement humain intégral ? Non, il ne le peut pas. Laudato Si n'est pas une encyclique écologique mais une encyclique qui cherche à considérer la Doctrine sociale dans son ensemble. C'est l'approche de l'écologie humaine intégrale. Ce n'est pas une approche nouvelle puisqu'elle a été menée pour la première fois sous les pontificats précédents.

    Alors, une encyclique centrée sur le sujet était-elle nécessaire ? Elle était utile car elle permettait au Saint-Siège d'entrer dans le débat, à tel point que l'encyclique a circulé parmi les fonctionnaires de l'ONU avant la visite du pape François en 2015. En bref, il s'agissait d'une nécessité pratique, d'un désir de répondre à un défi sous les projecteurs de l'opinion publique.

    Ce pragmatisme du pape François a cependant ses limites. Répondant à un défi contingent, l'encyclique est d'emblée apparue comme présentant des limites structurelles. Si l'on met de côté les questions de doctrine sociale de l'Église, les données utilisées sont en effet des données qui ne seront plus valables dans quelques années. Le récit des objectifs de développement durable des Nations unies est entré dans l'Église.

    Cependant, les Nations unies modifient les objectifs de développement durable tous les ans, car ils reposent précisément sur des décisions politiques et des données relatives à la situation actuelle. De plus, ils sont parfois influencés par l'idéologie. C'est ce que le pape François dénonce comme une colonisation idéologique. Il y a donc le paradoxe d'un pape qui s'attaque à la colonisation idéologique mais qui utilise en même temps certains récits de colonisation idéologique comme authentiques et valides.

    Un pragmatisme presque cynique permet à l'Église d'être au centre du débat, mais l'empêche d'être vraiment "différente" dans la discussion. Après Laudato Si, les diocèses et les structures ecclésiastiques, entre autres, se sont empressés de manifester leur attention à la création. La démonstration est pratique : on ne cesse de parler de diocèses ou d'églises locales qui ne lancent aucun projet sans impact sur l'environnement, installent des panneaux solaires et se consacrent aux énergies renouvelables, soulignant la nécessité de cesser d'utiliser les combustibles fossiles. S'agit-il de l'écologie intégrale dont parle la doctrine sociale, ou seulement d'une petite partie pratique, à évaluer avec les critères du discernement ?

    Nous arrivons ici au deuxième fait : le pape François est pragmatique et utilise son magistère pour répondre aux défis de l'ici et du maintenant. L'Église sortante, après tout, est une Église hôpital de campagne, c'est-à-dire une Église qui répond aux problèmes quand ils se posent et comme ils se posent. C'est une Église en état d'urgence. Cependant, la crise ne permet pas de planifier l'avenir.

    La vraie question est de savoir si nous faisons face à une telle urgence simplement parce qu'il s'agit d'une urgence ou parce que la planification de l'avenir semble trop compliquée à gérer. Le pape François a établi que les réalités sont plus importantes que les idées dans Evangelii Gaudium, et Laudato Si est un exemple pratique de cette hypothèse.

    Le problème est cependant qu'une encyclique doit avoir une valeur universelle. Il est vrai que les papes, dans le passé, ont utilisé des encycliques pour répondre à des situations concrètes. Pie XII a écrit trois encycliques sur la persécution des chrétiens en Chine, et deux consacrées au problème du cardinal Mindszenty en Hongrie. Il s'agissait d'encycliques qui contenaient de vives protestations mais qui, relues aujourd'hui, s'inscrivent dans un principe universel de liberté de l'Église. En somme, une vision du monde conférait à ces encycliques, nées en réponse à des situations concrètes, une validité universelle.

    Mais écrire une deuxième partie de Laudato Si, c'est admettre que Laudato Si était une encyclique qui ne répondait qu'au temps présent, qui ne donnait pas une vision du monde valable aussi pour l'avenir. Peut-être qu'une fois que l'on aura lu Laudato Si bis, toutes ces craintes seront dissipées. Mais pour l'instant, il reste crucial que le pape ait écrit une encyclique incomplète et que son achèvement ne fasse que la relier à aujourd'hui sans en donner une vision universelle.

    Qu'on se le dise sans malentendu : Le pape François a sa vision universelle des choses et probablement un projet précis pour l'Église. Mais ce projet est précisément de regarder la réalité concrète et d'être là où en est le monde aujourd'hui. Le but est d'offrir une perspective, pas d'évangéliser.

    D'où les phrases décontextualisées, les expressions imagées qui restent cependant génériques et ne semblent pas avoir d'explication concrète (comme les "purismes angéliques" ou le "totalitarisme du relatif", ou les "éthiques sans bonté", jusqu'au "rétrogradisme" actuel), et une décision générale de ne jamais répondre directement aux questions dans lesquelles une position claire doit être prise, comme en témoignent les nombreuses conférences de presse dans l'avion.

    Cependant, le Pape a une vision précise du gouvernement, une façon encore plus grossière de prendre des décisions, et une capacité à entrer dans les situations avec une jambe droite pour que sa perspective soit la seule à être suivie. Le pape François veut un modèle d'Église à son image. Il veut que ce modèle soit compris. Pour cela, il a aussi besoin d'un vote de sympathie. C'est ainsi que ce clin d'œil au monde séculier conduit à des documents comme Laudato Si, ou ce qui pourrait en être la suite. C'est peut-être ainsi que l'Église peut avoir un impact sur le monde. Mais il y a aussi le risque inverse, à savoir que, n'ayant rien de nouveau à dire, l'Église soit condamnée à l'insignifiance.

    La publication de Laudato Si bis clarifiera laquelle de ces deux voies sera empruntée.