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Doctrine - Page 3

  • Une interview de 2012 nous éclaire sur l'orientation du nouveau pape

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    De

    Le passé contre-culturel du pape Léon XIV et ses indices pour l'avenir

    Comment une interview de 2012 a conduit à la première controverse du nouveau pontificat.

    Depuis l'élection du cardinal Robert Francis Prevost par le conclave papal le 8 mai, nombreux sont ceux qui guettent avec attention les indices permettant de savoir si le pape Léon XIV suivra ou non la voie tracée par son défunt prédécesseur. Les observateurs ont noté son choix d'un nom papal traditionnel et sa décision de porter la cape rouge, appelée mozzetta, lors de sa première apparition sur la loggia de la basilique Saint-Pierre – deux signes de contraste avec le pape François, un pape non conformiste. 

    Pourtant, l’un des éléments de preuve les plus discutés n’est pas une décision du nouveau pape, mais quelque chose qu’il a dit il y a plus de dix ans, lorsqu’un collègue et moi l’avons enregistré.

    J'ai rencontré le futur pape Léon XIV en octobre 2012, au lendemain de la clôture du synode sur la Nouvelle Évangélisation. Ce synode, caractéristique du pontificat de Benoît XVI, était axé sur le défi de la diffusion et du maintien de la foi dans les sociétés occidentales de plus en plus postchrétiennes. L'essentiel de ses discours a été résumé par le cardinal Donald Wuerl de Washington, qui a déploré qu'un « tsunami de laïcité » submerge l'Église. 

    À cette époque, avant les restrictions imposées par le pape François, les discours des participants aux synodes à huis clos étaient régulièrement rendus publics. L'un des discours les plus marquants et les plus provocateurs fut celui du père Robert Prevost, prieur général de l'Ordre de Saint-Augustin, qui expliqua comment les médias occidentaux promouvaient ce qu'il qualifiait de « choix de vie antichrétiens » – notamment l'avortement, l'euthanasie et le mariage homosexuel – et comment l'Église catholique pouvait y répondre.

    À cette époque, je dirigeais le bureau romain du Catholic News Service, une filiale de la Conférence des évêques catholiques des États-Unis, et nous couvrions le synode en profondeur. J'ai écrit à l'ordre du Père Prévost pour lui demander si je pouvais l'interviewer, et il a immédiatement accepté. Alors, avec mon collègue du CNS, Robert Duncan, je suis allé le voir à son bureau, à quelques mètres de la place Saint-Pierre.

    Le futur pape était courtois, quoique un peu réservé, si je me souviens bien, mais il s'animait lorsqu'il évoquait le grand saint dont les œuvres sont le fondement de son ordre religieux. J'ai interviewé le père Prévost en vidéo,  abordant plusieurs sujets, notamment les leçons que saint Augustin offre, notamment dans ses Confessions , pour évangéliser une société très individualiste.

    Nous avons également enregistré le Père Prevost lisant le texte de son intervention au synode, que mon collègue Robert a transformé en une vidéo en deux parties, illustrée d'exemples de la culture médiatique très occidentale que le futur pape critiquait. Vous pouvez visionner la vidéo ici .

    Le Père Prévost a réagi favorablement lorsque je lui ai envoyé les résultats de notre rencontre. « Merci beaucoup ! J’ai apprécié les présentations vidéo et j’ai envoyé les liens à différents endroits », a-t-il écrit.

    Je n'ai pas revu le Père Prévost pendant plus de dix ans, période durant laquelle il acheva son mandat à la tête de son ordre et retourna au Pérou, son ancien champ de mission, pour servir comme évêque de Chiclayo. Lorsque le pape François le nomma à la tête du Dicastère des évêques en 2023, faisant de lui son principal conseiller pour le choix des dirigeants de l'Église dans le monde, j'ai été quelque peu surpris. Le contenu de son discours au synode de 2012 ne contredisait pas, à proprement parler, l'enseignement du pape François, mais son ton contre-culturel contrastait avec l'approche conciliante du pape argentin envers la culture laïque.

    Lors d’une réception organisée par l’ambassade des États-Unis près le Saint-Siège, j’ai rencontré le préfet de l’époque et je lui ai rappelé notre rencontre et son discours au synode. 

    « Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis lors », a-t-il déclaré, d’une voix agréable mais quelque peu énigmatique.

    Le jour du consistoire de 2023, lorsqu'il est devenu cardinal Prévost, mon ancien collègue Robert lui a demandé si ses vues avaient changé sur les questions controversées qu'il avait abordées dans son discours au synode de 2012. 

    Le futur pape a répondu : « Le pape François a clairement indiqué qu'il ne voulait pas que des personnes soient exclues simplement en raison de leurs choix, qu'il s'agisse de mode de vie, de travail, de tenue vestimentaire, ou autre. La doctrine n'a pas changé, et personne n'a encore dit : « Nous attendons ce genre de changement. » Mais nous cherchons à être plus accueillants et plus ouverts, et à dire que tout le monde est le bienvenu dans l'Église. »

    Dans sa première homélie en tant que pontife, s'adressant aux cardinaux dans la chapelle Sixtine au lendemain de son élection, le pape Léon XIV a fait écho à ses précédentes remarques sur l'hostilité de la culture laïque au christianisme : « Aujourd'hui encore, il existe de nombreux contextes où la foi chrétienne est considérée comme absurde, réservée aux faibles et aux inintelligents. Des contextes où d'autres sécurités sont privilégiées, comme la technologie, l'argent, le succès, le pouvoir ou le plaisir. » 

    Cependant, lors d'une nouvelle rencontre avec les cardinaux le 10 mai, le nouveau pape a déclaré son intention de suivre l'exemple du pape François dans plusieurs domaines, notamment son « dialogue courageux et confiant avec le monde contemporain dans ses diverses composantes et réalités ».

    Le discours du pape Léon XIV de 2012, enregistré sur bande sonore, est devenu le point de départ de la première controverse de son pontificat. Les militants LGBTQ espèrent que ce discours ne reflète pas la vision du nouveau pape. La manière dont il traitera cette question, ou choisira de l'ignorer, sera un nouvel indice de sa volonté de diriger.

  • Léon XIV : une approche nuancée et équilibrée ?

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    Peut être une image de texte

    Lu sur facebook (Joseph Sin) :

    Tendances progressistes :

    Proximité avec l’héritage de François : Prevost partage plusieurs priorités du pape François, notamment un fort engagement envers la justice sociale, l’attention aux pauvres, aux migrants et aux populations marginalisées. Son expérience missionnaire au Pérou, où il a travaillé auprès de communautés pauvres, et ses déclarations sur le rôle de l’évêque comme pasteur proche du peuple, humble et non isolé, s’inscrivent dans une vision pastorale ouverte, souvent associée au progressisme catholique.

    Soutien à certaines réformes : Il a appuyé des évolutions sous François, comme la possibilité pour les catholiques divorcés et remariés civilement de recevoir la communion, une position considérée comme progressiste dans l’Église.
    Inclusivité dans les processus : En tant que préfet du Dicastère pour les évêques, il a supervisé l’inclusion de trois femmes dans le processus de sélection des évêques, une réforme significative de François visant à diversifier les voix dans la gouvernance de l’Église.

    Synodalité et communion : Prevost met l’accent sur la communion, la participation et la mission, des thèmes centraux du Synode promu par François, qui favorise une Église plus collaborative et moins centralisée.

    Tendances conservatrices :

    Réserves sur les questions LGBTQ+ : Contrairement à François, qui a ouvert la voie à des gestes d’accueil (comme Fiducia Supplicans autorisant des bénédictions non liturgiques pour les couples de même sexe), Prevost a exprimé des réserves. En 2012, il critiquait la culture occidentale pour sa « sympathie » envers le « mode de vie homosexuel » et les « familles alternatives » avec des partenaires de même sexe, suggérant une position plus traditionnelle sur les questions doctrinales et morales. Il a toutefois nuancé son soutien à Fiducia Supplicans en insistant sur l’autonomie des conférences épiscopales pour interpréter ces directives localement, ce qui reflète une approche prudente.

    Attachement à la doctrine : Son parcours, marqué par une formation en droit canonique et son rôle dans la sélection des évêques, montre un respect pour l’unité de l’Église et l’autorité de la doctrine. Sa devise épiscopale, « In Illo uno unum » (« un seul en un seul Christ »), inspirée de saint Augustin, souligne l’unité et la fidélité à la tradition.

    Gestion des abus : Bien qu’il ait été critiqué pour sa gestion de cas d’abus sexuels (notamment au Pérou et dans l’ordre augustinien), ses défenseurs affirment qu’il a suivi les procédures canoniques et a contribué à établir des lignes directrices pour protéger les mineurs, ce qui peut être vu comme une approche rigoureuse et conservatrice des règles ecclésiastiques.

    Un profil centriste et pastoral :Prevost est souvent décrit comme un « modéré » ou un « centriste », cherchant à concilier les polarisations au sein de l’Église. Son rôle au Pérou, où il a agi comme une figure d’apaisement entre des factions épiscopales divisées (libérationnistes et conservateurs proches de l’Opus Dei), témoigne de sa capacité à naviguer entre des courants opposés.Discrétion et écoute : Connu pour sa discrétion médiatique, son sens de l’écoute et sa maîtrise des dossiers, il évite les postures idéologiques tranchées, préférant une approche pragmatique et pastorale.

    Influence de François : Sa nomination par François à des postes clés (préfet du Dicastère pour les évêques, cardinal, puis cardinal-évêque d’Albano) indique une confiance dans sa capacité à poursuivre une vision d’Église ouverte mais ancrée dans la tradition. Cependant, des observateurs notent qu’il ne partageait pas toujours les vues de François, suggérant une certaine indépendance.

    Perception publique et politique :

    Sur X : Certains posts sur X le qualifient de « plutôt conservateur » en raison de ses positions doctrinales, tout en notant sa proximité avec François sur les questions sociales comme les migrants.Critiques : Sa nationalité américaine pourrait être perçue comme un frein par certains cardinaux, en raison d’un tabou historique contre un pape des États-Unis, et ses positions modérées pourraient ne pas satisfaire les factions les plus polarisées (ultraconservateurs ou ultraprogressistes).

    Conclusion :
    Robert Francis Prevost, en tant que pape Léon XIV, incarne un profil centriste avec des accents progressistes sur les questions sociales (migrants, pauvres, synodalité) et conservateurs sur les questions doctrinales (morale, unité de l’Église). Il n’est ni un progressiste audacieux comme François sur certains aspects, ni un conservateur rigide. Son pontificat pourrait chercher à maintenir l’équilibre, en poursuivant l’héritage pastoral de François tout en renforçant l’unité doctrinale, dans un contexte où l’Église fait face à des divisions internes et des attentes divergentes."
  • Léon XIV : un "recentreur" ?

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    De l'abbé Claude Barthe sur Res Novae :

    Élection rapide de Robert Francis Prévost qui devient Léon XIV. Et après ?

    Pour l’Académie française, on parlerait d’« élection de maréchal » : le deuxième jour du conclave, au quatrième vote, Robert Francis Prévost vient d’obtenir la majorité absolue, plus vite que le cardinal Ratzinger en 2005 et que le cardinal Bergoglio en 2013.

    Né en 1955 à Chicago, religieux de l’ordre des augustins, juriste très compétent, ayant une longue expérience pastorale au Pérou où il deviendra évêque de Chiclayo, il fut appelé par le pape François à devenir Préfet du Dicastère des Évêques en 2023.

    Tous les commentateurs vont maintenant se demander s’il sera un fidèle continuateur du pape François. On peut répondre oui et non. Oui, car il appartient à ce que Benoît XVI, distinguant les deux interprétations possibles selon lui de Vatican II, avait qualifié d’« herméneutique de la rupture », ou que l’on nommerait en termes de politique politicienne, forcément approximatifs en ce qui concerne les choses d’Église, de centre gauche (l’« herméneutique de la réforme dans la continuité », celle de Jean-Paul II et Benoît XVI, étant quelque chose comme le centre droit de l’univers conciliaire). Grand ami du cardinal Blase Cupich, l’archevêque de Chicago, faiseur des évêques bergogliens depuis deux ans, porté avant le conclave par les progressistes les plus décidés (ainsi Andrea Grillo, fougueux militant anti-liturgie traditionnelle, ne pouvait pas s’empêcher de se féliciter hautement de son élection à venir avant l’ouverture du conclave).

    Non, car sa personnalité est vraiment très différente de celle de son prédécesseur. Homme sage, pondéré, qui écoute attentivement ses interlocuteurs et collaborateurs, il se présente, y compris par les vêtements à l’ancienne qu’il a revêtus pour apparaître à la loggia de Saint-Pierre, comme un recentreur, un progressiste modéré. Léon XIV sera également différent de François, que le vent synodal continue à souffler ou non, car il ne pourra pas gouverner seul. Certains « poids lourds » du Sacré-Collège de François, qui étaient avec lui sur la ligne de départ du conclave, comme les cardinaux Parolin, Secrétaire d’État de François, Pizaballa, le patriarche latin de Jérusalem, Zuppi, archevêque de Bologne et Président de la Conférence des Évêques, pourraient former avec d’autres une sorte de gouvernement fort qui pourrait bien s’imposer pour faire face aux grandes turbulences à prévoir dans l’Église et dans le monde. Certes ces hommes sont tout le contraire de conservateurs, même si Pizaballa leur est compatible, mais ce sont des réalistes.

    Qui plus est, l’avancée comme irréversible, depuis Vatican II, de la liberté religieuse appliquée à l’intérieur de l’Église a produit une sorte d’anglicanisation du catholicisme. Désormais chaque catholique, théologien ou fidèle de la base, peut « bricoler » lui-même son Credo et sa morale. Et cette fragmentation, inévitable dans la mesure où la règle de foi a été en quelque sorte mise entre parenthèses – pour le dire rapidement, il y a eu remplacement de l’exercice du magistère ordinaire par celui du magistère pastoral ou authentique –, est d’ailleurs théorisée par ces jésuites, penseurs d’un post-catholicisme, que sont le franco-allemand Theobald et l’influent italien Spadaro.

    Le P. Christoph Theobald, professeur émérite du Centre Sèvres, à Paris, prône « une vision polyédrique » de la Communion des Églises (par exemple dans l’ouvrage collectif dirigé par Angelo Maffeis, Una Chiesa « Esperta in Umanità ». Paolo VI interprete del Vaticano II, Studium, 2019). Dans la même veine, le P. Antonio Spadaro, ancien directeur de La Civiltà Cattolica, a publié le 4 mai, dans un article de La Repubblica, un article intitulé « Le véritable défi n’est pas l’unité mais la diversité », affirmant que « l’Église future sera plurielle ». Puisque « les différences sont une caractéristique de la société globale et une condition structurelle », l’Église, comme n’importe laquelle réalité collective, ne peut plus « s’exprimer de manière uniforme et monocorde », car cela signifierait ignorer cette transformation. Très symptomatiquement il remplace l’unité de l’Église par sa cohésion, prix de son intégration dans l’univers mental de la démocratie moderne : « La cohésion ne peut être cherchée dans l’uniformité, mais dans la capacité d’accueillir et d’harmoniser la multiplicité. » C’est d’ailleurs un des thèmes favoris de Matteo Zuppi.

    Le P. Spadaro défend assurément la « liberté » du Chemin synodal allemand, mais aussi, paradoxalement, comme le cardinal Zuppi, celle des traditionalistes ! Il ne voit pas d’inconvénient à ce que l’on tienne à la liturgie d’avant et au catéchisme d’avant, et fait remarquer que le pape François a donné aux prêtres de la FSSPX la faculté de confesser validement, de même qu’archevêque de Buenos Aires, il avait donné aux prêtres lefebvristes la possibilité d’avoir une présence catholique légale en Argentine.

    Si on fait l’hypothèse que le nouveau pontificat va tenter de diriger tant bien que mal le navire au milieu d’un archipel d’îles et de récifs, ceux du sacerdoce d’hommes mariés, du diaconat féminin, des revendications des chrétiens LGBT, et aussi des catholiques qui s’en tiennent à la doctrine d’avant le concile, on se perd en interrogations et conjectures.

    Alberto Melloni, le chef de file de l’École de Bologne, qui a largement dirigé une monumentale Histoire de Vatican II (à laquelle a d’ailleurs participé le cardinal Tagle) aime à dire que le concile de Trente est toujours présent en arrière-fond dans les conclaves depuis Vatican II. Comme une mauvaise conscience, dirons-nous pour notre part. Dans le conclave qui vient de s’achever, Trente était plus ou moins représenté par le groupe de conservateurs (20 cardinaux ?), d’un poids numérique bien faible après le rouleau-compresseur qu’a représenté pour cette tendance le pontificat de François, mais d’une présence morale significative. Notamment, les déclarations du cardinal Müller sur ce qu’est le rôle du pape, à savoir confirmer ses frères dans la foi, restent comme une borne. Le fait que les cardinaux Burke et Sarah soient connus comme des défenseurs de la liturgique traditionnelle, de même.

    On peut imaginer que ce pontificat, par-delà l’enthousiasme des débuts, notamment tout simplement parce que la Curie et les évêques vont respirer et ne plus sentir peser sur eux l’autoritarisme tatillon du précédent, va se heurter à des difficultés insurmontables. Qui seront des difficultés doctrinales. Il restera à ces témoins épiscopaux et cardinalices, dont on peut espérer en vertu de l’espérance chrétienne qu’ils seront de plus en plus nombreux, de se montrer, le Christ et sa Mère aidant, à la hauteur de ces temps de crise dramatique, laquelle a été accrue par un pontificat qui a promulgué des documents tels que la déclaration Fiducia supplicans et l’exhortation Amoris lætitia (qui, dans son n. 301 dit que dans certains cas des époux adultères connaissant la norme morale peuvent être dans la grâce divine). Ces Successeurs des Apôtres auront à s’opposer prophétiquement à l’enseignement d’hétérodoxies de tous ordres qui subsistent et pourront émerger. Et ils auront à presser le pape de confesser la foi et de confirmer ses frères.

  • La « synodalité », un enjeu majeur – et inquiétant – du futur pontificat

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    De Jeanne Smits sur Réinformation.TV :

    Conclave : la « synodalité », enjeu majeur – et inquiétant – du futur pontificat

    Un enjeu du futur pontificat semble être passé un peu sous les radars dans les multiples conjectures sur les papabile et les priorités des cardinaux électeurs : celui de la « synodalité ». Pourtant, un mois avant de mourir, le pape François avait annoncé un nouveau « chemin d’accompagnement » vers la mise en œuvre des décisions prises au terme des deux synodes sur la synodalité en octobre dernier : une Assemblée ecclésiale doit clore trois ans de « processus de réception » en octobre 2028. Le conclave n’interrompt pas le processus…

    Le cardinal Mario Grech, secrétaire général du Synode, a envoyé une lettre en ce sens aux évêques latins et orientaux à la mi-mars, en insistant bien sur ce point : le Document final du synode « fait partie du Magistère ordinaire du Successeur de Pierre », comme cela été précisé par le pape François aussitôt après son adoption. Autrement dit, il engage l’obéissance et les « Eglises locales et les groupements d’Eglises » doivent le mettre en œuvre à travers des processus de « discernement et de décision ».

    On peut dire que ces trois nouvelles années de focalisation sur une « synodalité » qui reste à définir avec précision, mais dont le Document dessine en quelque sorte la praxis, sont comme le testament, la feuille de route laissée par le pape François à son successeur, non sans la précaution d’avoir mis en place un collège cardinalice à 80 % nommé par lui et dont bien des membres ont affirmé leur sensibilité au thème. A l’heure d’écrire, on peut penser qu’une part non négligeable des cardinaux soutient, peut-être sans en percevoir tous les ressorts, cette tentative de révolutionner l’Eglise à travers un glissement vers un fonctionnement démocratique discret dans la forme mais possible dans les faits sous forme de « coresponsabilité différenciée », plus à l’écoute de « la base » investie à ce titre de nouveaux pouvoirs, même si c’est selon des modalités diverses d’une Eglise locale à l’autre.

    Le moindre paradoxe n’est pas que cette réforme aura été préparée par un pape particulièrement autoritaire et anti-« synodal » !

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  • « Le Saint-Esprit vous dira-t-il qu’il s’est trompé depuis vingt siècles ? » : le cri du cardinal Joseph Zen contre la déviation synodale

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    De kath.net/news :

    Cardinal Zen : « Le Saint-Esprit vous dira-t-il qu’il s’est trompé depuis vingt siècles ? »

    6 mai 2025

    Le cri du cardinal Joseph Zen/Hong Kong contre la déviation synodale

    Vatican (kath.net/Silere non possum) Le cardinal Joseph Zen Ze-kiun a parlé avec des mots clairs et directs lors des congrégations générales préparatoires au conclave dans la nouvelle salle du synode. Il a fourni une analyse précise mais claire de la direction que le processus synodal a prise sous le pontificat du pape François. Dans une contribution remarquablement ouverte et profonde, le cardinal a souligné la nécessité de regarder vers le passé afin de trouver la voie à suivre – sans succomber à la tentation de s’adapter à « l’esprit du monde ».

    Sans s'attarder sur les cas (inexplicablement tolérés) du cardinal McCarrick, du père Rupnik ou d'autres clercs condamnés par la justice séculière, nous ne pouvons ignorer une tentative malavisée : s'adapter à l'esprit du monde au lieu de le combattre résolument. Cette accusation est grave, mais la réalité paraît évidente si l'on considère le sort des récents synodes des évêques, notamment dans l'histoire encore inachevée du synode sur la synodalité.

    Zen a commencé son discours en rappelant la valeur authentique et traditionnelle des synodes – ou conciles, comme il l’a précisé – instruments par lesquels l’Esprit Saint a toujours garanti la continuité de la tradition sacrée dans l’Église. Concernant le Motu Proprio Apostolica Sollicitudo du Pape Paul VI. Le cardinal a reconnu l'intention initiale de maintenir une certaine continuité avec le Concile Vatican II en pratiquant la collégialité épiscopale comme un soutien faisant autorité au Pape. Il a rappelé les fruits de cette époque : Evangelii nuntiandi, Catechesi tradendae, Sacramentum caritatis, Verbum Domini. Mais, a-t-il poursuivi, l’approche a fondamentalement changé sous le pape François. Avec la Constitution apostolique Episcopalis communio, « quatre fois plus longue » que le document de Paul VI, le Pape a aboli les normes précédentes et a profondément modifié les membres, les objectifs et les procédures du Synode. « Mais le récent synode est même allé au-delà d’Episcopalis communio », a averti le cardinal.

    Zen s’est concentré particulièrement sur les objectifs changeants du Synode. Il a souligné que l’accent était passé de la préservation de la foi et de la discipline ecclésiastique exclusivement à « l’évangélisation du monde d’aujourd’hui », comme le prévoit la nouvelle constitution. Il a cité can. 342 du Code de Droit Canonique, qui définit le Synode comme le lieu de consultation et d'assistance du Pape dans l'obéissance à l'enseignement et aux coutumes de l'Église. Mais maintenant, se plaignait-il, tout était question de « changement ». Les synodes présidés par le pape François ont été synonymes de changement, de changement et de changement. Nous l'avons vu au Synode sur la famille (communion pour les divorcés remariés), au Synode sur la jeunesse (où la confusion était encouragée), au Synode sur l'Amazonie (viri probati et attaque contre le célibat sacerdotal). Et maintenant, au Synode sur la synodalité : morale sexuelle, LGBTQ, structure du pouvoir, diaconat des femmes, autonomie doctrinale des conférences épiscopales, Église synodale…

    Le cardinal a également critiqué les méthodes utilisées, notamment la soi-disant « conversation spirituelle », qu’il a décrite comme une méthode jésuite canadienne, plus adaptée à apaiser les esprits qu’à un véritable discernement. Attendez-vous à des surprises de la part de l'Esprit ? Le Saint-Esprit vous dira-t-il qu'il s'est trompé pendant vingt siècles et qu'il vous dit seulement maintenant la vérité ? Concernant l’état actuel du Synode sur la synodalité, il a noté que bien qu’il ait commencé en 2021 et semble s’être terminé, il est en fait toujours en cours – sans aucune clarté quant à savoir qui a rédigé le document final et comment les changements proposés ont été évalués. « Néanmoins, cette pratique a été acceptée par le Pape et présentée comme faisant partie de son enseignement. Il est demandé de l'étudier et de la mettre en œuvre expérimentalement. Les résultats seront évalués par le Pape lors des visites ad limina. Cette procédure menace de nous rapprocher de la pratique anglicane. Sera-t-il possible de revenir en arrière après des années d'expérimentation ? Comment préserver l'unité de l'Église catholique ? »

    En conclusion, le cardinal s'est adressé directement aux cardinaux ayant le droit de vote lors du prochain conclave : « Les électeurs du futur pape doivent être conscients qu'il aura la responsabilité de permettre la poursuite du processus synodal ou d'y mettre fin résolument. C'est une question de vie ou de mort pour l'Église fondée par Jésus. » Le cardinal Zen, évêque émérite de Hong Kong, a ainsi exprimé une préoccupation profonde partagée par de nombreux membres du Collège des cardinaux : que la synodalité – si elle s’écarte de la tradition et de la fidélité au dépôt de la foi – pourrait devenir un outil de division plutôt que de communion. Ses paroles, pleines d’amour pour l’Église et de sens des responsabilités, resteront certainement une contribution déterminante au débat avant le prochain conclave.

  • Prochain pape : 10 enjeux cruciaux selon Edward Pentin

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    D'Edward Pentin sur son blog :

    10 questions cruciales pour le prochain pape

    4 mai 2025

    Le pape François, qui s'est fait un nom en prônant le « désordre », a appliqué cette maxime à son pontificat, le rendant très perturbateur, diviseur et tumultueux.

    Ce désordre a suscité un malaise compréhensible, de la consternation et, parfois, du dégoût, d'autant plus qu'une telle approche délibérée de la gouvernance n'a jamais été conforme à la foi catholique, au bien commun, à la Révélation divine et à la loi naturelle.

    Cependant, le revers de la médaille est que, comme on remue une marmite, cela a fait remonter à la surface beaucoup de choses qui étaient restées cachées dans l'obscurité.

    Ce faisant, il est possible que le prochain pape dispose des informations nécessaires pour rectifier, s'il le souhaite, les problèmes que le pontificat de François a mis en lumière.

    Quels pourraient donc être les domaines critiques que le prochain pape devrait aborder ? Voici une liste de dix priorités possibles :

    Retour à une papauté source de saine doctrine et d'unité

    Bien que le pape François ait beaucoup fait pour tenter d'amener l'Église aux périphéries, aux pauvres et aux marginalisés afin de la rendre accessible à ceux qui ne lui auraient peut-être pas accordé un second regard, ce faisant, il a souvent mis de côté les frontières doctrinales et les limites canoniques du pouvoir papal. Il a également été fréquemment critiqué pour s'être écarté de la tradition apostolique, en faisant des déclarations qui semblaient au moins aller à l'encontre de l'enseignement établi de l'Église, en particulier de son enseignement moral, et en promouvant l'indifférentisme, c'est-à-dire l'idée que toutes les religions sont des voies valables pour accéder à Dieu. Conjointement avec la poussée vers la synodalité, dans laquelle les fidèles non catéchisés avaient leur mot à dire dans une large démocratisation de l'Église, cela a conduit à une confusion doctrinale au Vatican et ailleurs, l'Église d'Allemagne en étant un excellent exemple. L'intégrité de la foi a été sapée par l'incapacité à corriger les erreurs et les hérésies, une tendance qui a commencé avant le pontificat de François. Une priorité urgente pour le prochain pape sera donc de restaurer la clarté doctrinale en matière de foi et de morale, la bonne gouvernance et le respect du droit canonique. Dans le même ordre d'idées, le prochain pape devra cesser de persécuter et d'éliminer les institutions, les mouvements, les évêques, le clergé et les laïcs qui portent manifestement de bons et amples fruits en termes de révérence, de vie spirituelle, de fidélité à la doctrine catholique et de vocations.  Il devrait permettre à ces personnes ou entités de se développer et de prospérer plutôt que d'être annulées - contrairement à ce qui s'est souvent passé sous le pape François, où ceux qui ont abusé de la doctrine, de l'enseignement moral et de la liturgie sont restés impunis et ont été autorisés à prospérer.

    Clarification de Vatican II, réforme des Jésuites

    En lien étroit avec la première question critique, il est nécessaire que le prochain pape lève les ambiguïtés concernant le Concile Vatican II, ou du moins qu'il s'attaque à cette préoccupation qui s'est accrue ces dernières années. Le Concile a longtemps été interprété d'une manière qui, de l'avis de beaucoup, diffère de celle voulue par les pères du Concile, ce qui est devenu particulièrement évident sous le pontificat de François. L'ambiguïté a souvent été imputée à un manque de clarté dans l'interprétation des enseignements du Concile, eux-mêmes souvent critiqués pour leur manque de clarté. Ce retour à la clarté de l'enseignement pourrait également impliquer une certaine réforme de l'Ordre des Jésuites. Dans son Demos Memorandum, le cardinal George Pell a appelé à une telle réforme compte tenu de l'hétérodoxie qui prévaut dans la Compagnie de Jésus et du déclin catastrophique des vocations dans l'Ordre. « Le charisme et la contribution des Jésuites ont été et sont si importants pour l'Église qu'ils ne devraient pas être autorisés à passer dans l'histoire sans être perturbés », indique le mémorandum.

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  • Un « conclave éclair » serait le piège du mauvais compromis

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    De Luisella Scrosati sur la NBQ :

    Le « conclave éclair » est le piège du mauvais compromis

    Le nouveau pape dans deux jours ? La précipitation sous prétexte d’unité peut être un piège pour les soi-disant conservateurs, incités à se rabattre sur une élection rapide au prix d’un autre pontificat qui divise et détruit l’Église. Mais il existe des alternatives.

    06_05_2025
    Photo LaPresse actualité 12 03 2013

    Le temps peut être un bon conseiller : il faut espérer que les cardinaux électeurs garderont cela à l’esprit. Surtout les soi-disant conservateurs. Car ces derniers temps, on assiste à une sorte de course à la proclamation sur tous les toits que le conclave sera court, presque comme si un pape élu en quarante-huit heures serait le signe d’une Église unie et forte. Bergoglio a été élu après seulement cinq tours de scrutin et ce fut une tragédie pour l’Église.

    Le « conclave éclair » peut être un véritable piège : mieux vaut rester des mois sans pape, plutôt que de se retrouver pendant des décennies avec un pape qui divise et détruit l’Eglise. Il est bien évident que d'un conclave qui requiert les deux tiers des votants, surgit souvent un pape de compromis et dans la situation actuelle de l'Église, sauf dispositions différentes de ceux qui sont au pouvoir, on ne peut pas s'attendre à un saint Pie V. Et pourtant, la plus grande tentation est précisément celle d'accepter un mauvais compromis, en considérant a priori comme insoutenable un blocage à long terme du conclave. La simple perspective d'un éventuel « conclave d'usure » provoque des hallucinations chez certains prélats, qui verraient Parolin comme le moindre mal, surtout maintenant que l'ancien secrétaire d'État va quémander la vingtaine de voix qui lui manque, offrant l'impensable.

    Disons-le clairement : Parolin n’est pas un bon compromis ; Parolin est la trahison de l’Église. Et ce n’est pas un hasard s’il est aujourd’hui le cardinal le plus soutenu par les « grands journaux ». Les faits montrent que Parolin a vendu l’Église au gouvernement chinois : le reste n’est que bavardage. Et la trahison de l’Église ne peut être acceptée même si « en échange » on accorde l’ancienne messe ou la révocation de Fiducia supplicans. Et puis, tant de promesses, mais combien de garanties ? Bergoglio n’avait-il pas promis qu’il ne donnerait plus d’interviews une fois devenu pape ?

    Ce n’est un secret pour personne que de nombreuses alternatives à Parolin sont dramatiques. Tout d’abord les « hommes » de Sant’Egidio. Zuppi, qui fait la navette entre Bologne et Rome pour montrer son zèle pastoral, et chaque fois qu'il remet le nez dans la ville de Bologne, il ne manque jamais une occasion de dire que le Pape doit appartenir à tout le monde, doit être accueillant envers tout le monde. Ce qui, traduit pour ceux qui ne connaissent pas encore Zuppi, signifie que les homosexuels peuvent aussi recevoir une bénédiction de mariage publiquement à l'église, quelque chose qui à Budrio, dans le diocèse gouverné par Son Éminence, s'est produit avant même que Fiducia Supplicans n'apporte la bonne nouvelle, avec l'approbation de Son Éminence. L'Église ouverte à tous, pour l'archevêque de Bologne, signifie aussi la bonté de la « famille queer », promue par l'écrivaine italienne (aujourd'hui décédée) Michela Murgia : un mélange d'enfants de personne, de couples homosexuels, d'époux, de pères et de mères interchangeables; une abomination mise en œuvre par l'écrivaine explicitement pour déconstruire la famille naturelle, comme Dieu l'a voulu, mais que le cardinal appréciait, affirmant que « l'essentiel est de s'aimer ».

    Ensuite, nous avons l'autre cardinal courtisé par la Communauté de Sant'Egidio : José Tolentino Calaça de Mendonça. Un personnage qui nous a même fait regretter Ravasi. Le cardinal-poète peut se vanter d'une grande et enviable érudition littéraire, mais n'a pratiquement aucune expérience pastorale (à l'exception de trois ans dans une paroisse de Madère), ni d'expérience diplomatique, ni même une solide formation théologique. En pratique, il sera pris en otage par d'autres. Son cardinalat fut l'un des nombreux coups de foudre de François : Tolentino est venu prêcher les exercices à la Curie romaine en 2018 et l'année suivante, il a reçu le chapeau rouge. Personne ne sait pourquoi : il suffisait que François l'apprécie. Mendonça a été particulièrement attentif à ne pas prendre position publiquement sur les sujets brûlants du pontificat de Bergoglio, faisant du larvatus prodeo sa devise personnelle. C'est pourquoi il est populaire à Sant'Egidio. Comme Zuppi, Mendonça parraine également des personnages très problématiques avec des préfaces à ses livres, mais prend soin de ne pas trop s'exposer. Et si Zuppi aime les ponts du père James Martin, le Portugais ressent un sentiment particulier pour sœur Teresa Forcades, la religieuse bénédictine de Montserrat, qui veut révolutionner l'Église en matière de divorce, d'avortement, de genre et de sacerdoce féminin. La religieuse «Pasionaria» devant, abattant les murs, et lui, le poète, derrière, voyant comment cela se termine. Virilement.

    Un autre nom qui semble se profiler est celui du cardinal François-Xavier Bustillo , évêque d'Ajaccio. Très problématique est son lien avec le frère Daniel-Marie Thévenet, un frère conventuel lié au Renouveau charismatique, qui aurait « renouvelé » les couvents de l'Ordre à travers les Alpes dans ce sens, à l'invitation de Bustillo lui-même, qui de 2006 à 2018 était supérieur de l'Ordre en France et en Belgique. Bustillo fut aussi, avec Thévenet, l'un des trois frères fondateurs du couvent de Narbonne. Contrairement aux indications de la Congrégation pour la doctrine de la foi, Thévenet remplit les célébrations eucharistiques d'exorcismes publics, de prétendues prophéties, de parlers « en langues », d'annonces vagues de guérisons, d'applaudissements et de chants de stade pendant l'élévation, et de tout ce qui est nécessaire pour alimenter le pur sensationnalisme, aux dépens de la crédulité des gens simples. C'est l'homme que Bustillo a chargé de « réformer » les couvents de l'Ordre. Pour ensuite être scandalisé par la vague de réactions négatives envers Fiducia Supplicans.

    Une deuxième rangée qui, en cas d'impasse, pourrait émerger parmi les papabili est le cardinal Stephen Brislin. Déplorant que les homosexuels ne se sentent pas chez eux dans l'Eglise, l'archevêque de Johannesburg (Afrique du Sud) s'est également distingué par d'autres ouvertures : comme l'accueil, dans son diocèse, du mouvement We Are All Church SA , qui soutient le sacerdoce féminin et l'abolition du célibat sacerdotal obligatoire. Son approbation des bénédictions autorisées par Fiducia Supplicans est bien connue, en contraste clair avec l'épiscopat du continent.

    La liste des malheurs pourrait être allongée à l’infini ; parce qu'au Conclave il y a des gens avec pas mal de squelettes dans le placard. Et d'autres dont nous avons appris à « apprécier » les qualités ces dernières années : comme le couple Hollerich-Grech, les directeurs des Synodes d'ouverture à toutes les bêtises; ou comme le cardinal Marx, qui a donné un élan fulgurant à la Voie synodale, la lançant à travers les vastes prairies du schisme. Ensuite, nous avons Tucho Fernández, qui n'a plus besoin d'être présenté, Claudio Gugerotti, surnommé « le bouquetin » pour ses ascensions curiales (et probablement aussi pour les coups de corne qu'il infligeait à ses concurrents).

    Mais ce qui est important pour nous, c'est que le danger de ces « alternatives » ne terrifie pas les cardinaux au point de les pousser à se tourner vers Parolin. Parce que des alternatives vraiment valables existent et doivent être soutenues, même au prix d’une impasse. Comme celle du cardinal cinghalais Malcolm Ranjith Patabendige Don, archevêque de Colombo (Sri Lanka), un homme avec une expérience pastorale extraordinaire, à la fois comme prêtre et comme évêque, activement proche (et pas seulement en paroles) de la pauvreté matérielle et spirituelle, mais aussi avec une bonne expérience dans les domaines de la diplomatie et de la Curie romaine. Il possède une incroyable polyvalence linguistique (il en parle dix couramment), la capacité de dialoguer avec les autorités politiques, mais aussi un grand sens de la justice qui ne le fait pas taire quand il le faut. Ranjith a un grand sens de l’Église et de la liturgie et sa fierté est son extraordinaire capacité à catéchiser les enfants. Un homme qui vit vraiment dans les banlieues, les connaît et les aime, mais en même temps une personnalité qui sait bien se déplacer également à la tête de l'Église.

    Et puis le cardinal Pierbattista Pizzaballa, qui au cours de ces années de graves tensions en Terre Sainte a montré une stature spirituelle et diplomatique remarquable et solide. La diplomatie de Pizzaballa est authentique : ses interventions, en véritable pasteur, ont toujours recherché la défense et le soutien de la communauté chrétienne dans une situation d'extrême difficulté. Loin de toute controverse, le patriarche latin de Jérusalem est néanmoins connu comme un homme de foi profonde, non seulement pour sa piété eucharistique et mariale authentique, mais aussi pour sa capacité à lire les situations à la lumière de la foi plutôt que de la politique.

    Deux noms, mais pas les seuls. Des noms qui ouvrent la voie à un compromis réaliste, qui n’a cependant pas pour contrepartie la liquidation de l’Église. Un tel compromis n’est pas seulement possible : il est nécessaire.

  • Le devoir de Pierre : l'autorité papale et la restauration de l'ordre ecclésial

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    De

    Le devoir de Pierre : l'autorité papale et la restauration de l'ordre ecclésial

    Le pape est le père de l'Église, mais son autorité est dévoyée si elle ne sert pas la vie, la vérité et l'ordre divin. La restauration ne viendra pas de la nouveauté papale, mais de la fidélité papale au Christ, à l'Écriture et à la Tradition.

    À une époque d'individualisme radical et de rébellion idéologique contre toute forme d'autorité, la tradition catholique offre un correctif nécessaire et urgent. Enracinée dans l'Écriture Sainte, développée par les Pères de l'Église, affinée par saint Thomas d'Aquin et clarifiée par le Magistère, la conception chrétienne de l'autorité n'est ni autoritaire ni permissive. Elle est un reflet structuré de l'amour divin. L'autorité est accordée par Dieu aux dirigeants, non pour dominer, mais pour promouvoir le bien commun et guider les âmes vers leur fin surnaturelle. Et le pape, en tant que Vicaire du Christ, est le père de l'Église universelle.

    Alors que nous nous unissons dans la prière pour un nouveau pape, demandons également à Dieu une restauration de la foi et de l’ordre divin au sein de l’Église, qui ne peut se produire que par une compréhension renouvelée et un exercice charitable de l’autorité papale.

    Rébellion et désordre : les leçons de la chute

    La désobéissance d'Adam et Ève fut la première rébellion contre l'autorité divine. Leur chute – « Vous serez comme Dieu » (Gn 3, 5) – fut un rejet de la gouvernance paternelle de Dieu. Le Catéchisme enseigne : « L'homme, tenté par le diable… que la confiance en son Créateur meure dans son cœur » (CEC 397). Par leur rébellion autonome, Adam et Ève ne sont pas devenus « des expressions plus créatives et plus libres d'eux-mêmes », mais ont perdu leur liberté et leur communion avec Dieu, devenant esclaves du péché, de la concupiscence et du désespoir.

    Toute rébellion ultérieure, qu'elle soit doctrinale, liturgique ou morale, fait écho à cette première rupture, car l'autorité est instituée par Dieu pour préserver la vérité, l'amour et l'ordre. De même que la paternité est nécessaire à la protection et à la direction de la famille, la fonction papale est nécessaire à la préservation de l'ordre, de l'unité et de la vérité dans l'Église. Le désordre dans l'Église commence souvent par un désordre dans notre conception de l'autorité (par exemple, Martin Luther) ou par un abus d'autorité de la part de celui qui en est investi (par exemple, Henri VIII). Il est important de replacer cette discussion dans le contexte de la Révolte protestante, car le rejet de l'autorité au sein (et en dehors) de l'Église remonte à cette époque.

    Les racines de l'autorité ecclésiale

    La papauté est fondée sur la primauté de Pierre parmi les Apôtres. Les paroles du Christ – « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église… Je te donnerai les clés du royaume des cieux » (Mt 16, 18-19) – établissent le principe fondamental de l'ordre ecclésial. L'autorité dans l'Église n'est pas inventée par l'homme, mais instituée par le Christ.

    Saint Paul confirme cette structure ecclésiale lorsqu'il parle de l'Église édifiée « sur le fondement des apôtres et des prophètes, le Christ Jésus lui-même étant la pierre angulaire » (Ep 2, 20). Le gouvernement de l'Église n'est pas une bureaucratie humaine, mais une réalité sacramentelle, divinement ordonnée.

    Les Pères de l'Église ont toujours reconnu le rôle unique de Pierre. Saint Irénée, écrivant au IIe siècle, soulignait la nécessité de l'unité avec l'Église romaine en raison de son autorité prééminente : « Il est en effet nécessaire que toute Église s'accorde avec [Rome], en raison de son autorité prééminente » ( Adversus Haereses , III.3.2). Saint Cyprien enseignait que le Siège de Pierre est le principe et le fondement de l'unité. Saint Augustin enseignait que Pierre détenait une primauté parmi les apôtres et que cette primauté perdure chez ses successeurs.

    L’office pétrinien fut donc compris dès le début comme une institution divine, destinée à sauvegarder l’unité et l’orthodoxie.

    Saint Thomas d'Aquin, à son tour, a articulé la nature d'une gouvernance juste : « La loi est une règle et une mesure des actes… ordonnés au bien commun » ( ST I-II, Q.90, a.1,2). L'autorité doit servir la vérité et le bien. Même l'autorité papale, bien qu'instituée par Dieu, n'est pas arbitraire. Elle doit être rationnelle, juste et orientée vers la sanctification des âmes. Thomas d'Aquin insiste sur le fait que l'obéissance à l'autorité humaine n'est due que lorsqu'elle n'entre pas en conflit avec la loi divine ( ST II-II, Q.104, a.5).

    Le pape, bien que possédant la plénitude du pouvoir ecclésial, est lié par la révélation confiée aux Apôtres et préservée par la Tradition.

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  • Dubia, Chine, corruption... : 7 priorités pour le nouveau pape

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    De Luisella Scrosati sur la NBQ :

    Dubia, Chine, Corruption : 7 priorités pour le nouveau pape

    Il y a des interventions urgentes pour réparer les scandales contre la foi. Parmi celles-ci figurent la révocation de Fiducia supplicansune réponse claire aux Dubia, la restauration de l'ordre hiérarchique de l'Église à partir des Synodes, la révision de l'accord avec la Chine.

    05.05.2025

    En vue du prochain Conclave, nous publions une série d'articles approfondis inspirés du  document signé par Dèmos II   (un cardinal anonyme) qui fixe les priorités du prochain Conclave pour réparer la confusion et la crise créées par le pontificat de François.

    ***

    Le pontificat de François étant désormais terminé, les processus qu'il a initiés par des actions, des décisions et des gestes qui ont effectivement ouvert de nouvelles fenêtres d'Overton ou conduit à la réalisation partielle de celles déjà ouvertes sont loin d'avoir échoué. Cet article conclusif vise à rappeler rapidement les « interventions urgentes de reconstruction et d'entretien » qui doivent être entreprises au plus vite, pour réparer les scandales contre la foi et contre la crédibilité de l'Eglise, alimentés dans ce dernier pontificat.

    1. Il faut tout d’abord une clarification de la part du Dicastère pour la Doctrine de la Foi – une fois purifié de personnes qui ne sont décidément pas à la hauteur et dont la formation théologique est plus que douteuse – sur la dérive de la communion pour les divorcés remariés, qui rétablisse la discipline correcte : il n’est pas possible que des personnes qui continuent à vivre more uxorio puissent recevoir l’absolution sacramentelle et accéder à la Sainte Communion.

    Une voie pourrait être de donner enfin une réponse aux célèbres Dubia du 19 septembre 2016, qui se présente comme une interprétation authentique de l'exhortation post-synodale Amoris lætitia, et un correctif à la lettre du 5 septembre 2016 du pape François à Mgr. Sergio Alfredo Fenoy. Une autre intervention devra être effectuée sur la correction du nouveau projet de n. 2267 du Catéchisme de l’Église catholique sur la peine capitale, qui apparaît résolument en contradiction avec l’enseignement traditionnel sur le sujet.

    2. Il est urgent de révoquer la déclaration Fiducia supplicans, ainsi que le communiqué de presse du 4 janvier 2024, signés par le cardinal Victor Manuel Fernández et Mgr. Armando Matteo. Le document, en raison de l'absurdité et de l'inacceptabilité de ses prétentions, et la clarification ultérieure, voire l'aggravation de la Déclaration, ont provoqué une profonde division au sein de l'Église, les conférences épiscopales, et même un continent entier, ayant refusé de les rendre applicables dans leurs domaines de compétence. En aucun cas, les couples caractérisés par des relations contraires à la loi de Dieu ne peuvent recevoir une bénédiction du Seigneur, sous quelque forme que ce soit.

    3. Il faudrait publier un document qui rassemble le meilleur des travaux des différentes commissions réunies au fil des ans pour étudier la question du diaconat féminin et que soit réaffirmée clairement et définitivement l’impossibilité de l’ordination diaconale et presbytérale des femmes.

    4. L’ordre hiérarchique de l’Église devrait être rétabli en accordant le droit de vote aux synodes généraux uniquement aux évêques (et à tous les autres membres, à condition qu’ils appartiennent au moins à l’ordre presbytéral). La même chose se produit dans les synodes locaux. Il faut rétablir dans toute sa plénitude l’autorité de l’ordinaire, ainsi que le sens de l’épiscopat. Le nouveau pontife devra se pencher sur les critères de sélection des nouveaux évêques et sur leur application effective ; L’Église, surtout au cours de cette dernière décennie, a vu des nominations épiscopales de personnes complètement indignes de l’ordre qu’elles ont reçu et de la mission qui leur a été confiée, sans la moindre compétence canonique, avec une connaissance approximative de la doctrine, désireuses de nouveauté plutôt que de solidité, et souvent avec un profil moral qui s’est avéré plutôt discutable, voire manifestement inacceptable.

    Il semble également plus qu'opportun d'intervenir pour interdire l'accès éventuel des laïcs, hommes et femmes, aux postes de responsabilité dans l'Église qui doivent être destinés, par nature, à ceux qui ont reçu les ordres sacrés de l'épiscopat ou du presbyterium, ou qui sont une expression du Collège des cardinaux, comme dans le cas de la présidence des dicastères de la Curie romaine.

    5. L'accord entre la Chine et le Saint-Siège, récemment renouvelé pour quatre ans (jusqu'en 2028), souhaité par le cardinal Pietro Parolin (et pour lequel la médiation de l'ancien cardinal Theodore Edgar McCarrick a été décisive), devra être révisé, dont les conditions n'ont pas été rendues publiques. Un compromis qui cautionne la situation actuelle n'est pas acceptable, avec le gouvernement chinois ayant le pouvoir de changer le Catéchisme de l'Église catholique, d'interdire l'initiation chrétienne des enfants et des jeunes, d'imposer l'affichage d'images de Xi Jinping dans les églises, de choisir les évêques, avec le Saint-Siège humilié en « devant approuver » des évêques déjà arbitrairement choisis par le régime, et même d'ériger des diocèses.

    6. L’Église doit reprendre son élan missionnaire, consciente d’avoir le droit et le devoir d’apporter partout la vérité de l’Évangile et la grâce des sacrements. Le thème de l’inculturation apparaît comme particulièrement digne d’attention, un thème pastoralement important, mais au nom duquel une célébration païenne à connotation idéologique claire a même été mise en place au Vatican, en l’honneur de la « divinité » païenne inca, la célèbre Pachamama. L’inculturation ne peut être conçue et réalisée comme une concession généreuse aux idoles des religions païennes ; c'est la capacité de l'Évangile à vivifier une culture, à la purifier de ce qui est incompatible avec la vérité sur Dieu et sur l'homme, et à la conduire à la plénitude de son potentiel, à travers l'œuvre lente et progressive de la grâce. L’inculturation est et doit être l’évangélisation des cultures, et non la métamorphose de l’Évangile et de la liturgie de l’Église qui prend les caractéristiques du paganisme, après un « vernis » superficiel du christianisme. À cet égard, une grande attention doit être accordée à la phase finale de la mise en œuvre du « rite amazonien ».

    7. L’Église a un énorme problème avec des pasteurs qui sont corrompus jusqu’à la moelle. L’affaire Rupnik, avec toutes les dissimulations qui, pendant des décennies, ont fait taire les plaintes et la douleur des victimes, reste au premier plan ; sans parler d'autres prélats, toujours en poste de grande responsabilité, avec de lourds squelettes dans le placard. Même ce qui émerge ces heures-ci, à propos de prétendues lettres du pape François, signées seulement de l'initiale de son nom, qui ne sont révélées qu'après sa mort, prouve à quel point est dense le réseau de corruption tissé par de nombreux prélats, y compris des cardinaux considérés comme des « papabili ».

    Au-delà de toutes les considérations exposées dans ces articles , le grand défi du nouveau pontife est le même que celui des précédents, au cours des deux derniers siècles : répondre à la sécularisation croissante qui pénètre le monde et a envahi l’Église. Il n’existe qu’un seul remède à ce processus qui semble de plus en plus agressif et imparable ; un remède qui peut paraître modeste comparé aux grands discours que nous entendons ces jours-ci sur l’agenda du nouveau pontificat, plein de synodalité, d’inclusivité, de soin de la « maison commune », d’ouverture à tout, tout, tout . Le remède est de permettre à Dieu d’agir dans son Église, de se manifester dans son Église. Ce chemin exige que chacun de nous se remette à sa place d’hommes misérables et pécheurs, qui, chaque fois qu’ils pensent devoir changer l’Église, moderniser l’Église, mettre à jour l’Église, finissent par obscurcir la présence de Dieu.

    Tôt ou tard, nous devrons nous rendre compte que la foi fleurit ou refleurit là où l’on laisse plus de place à Dieu et où les hommes acceptent de ne pas en faire trop. Pour s'en rendre compte, il suffirait de visiter les sanctuaires, surtout mariaux, d'entrer en contact avec les monastères et les maisons religieuses qui n'ont pas abandonné leur habit et leur règle (peut-être après un restylage forcé voulu par le Dicastère pour la Vie Consacrée, sous la direction canonique du Cardinal Ghirlanda), d'aller dans les paroisses où la liturgie est encore célébrée avec beaucoup de décorum, le catéchisme n'est pas édulcoré et les processions et pèlerinages ne sont pas interdits comme des reliques obscurantistes. Ce sont des réalités où il y a des conversions, où des familles s’épanouissent, où de nouvelles vocations naissent, où il y a des racines suffisamment profondes et solides pour résister à l’aridité de notre temps.

  • « Une réforme qui sape les éléments essentiels de l’Église fondée par Jésus, une, sainte, catholique et apostolique, n’est pas une vraie réforme. » (cardinal Zen)

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    De "Tribune chrétienne" :

    « Une réforme est toujours nécessaire parce que nous sommes pécheurs » : l’alerte du cardinal Zen sur l’avenir de l’Église

    « Je suis également venu participer aux Congrégations générales car l’Église est à un moment crucial de confusion et de division. »

    À 93 ans, le cardinal Joseph Zen, ancien évêque de Hong Kong, a une nouvelle fois fait entendre une voix lucide et critique lors de la Congrégation générale des cardinaux, tenue à Rome le 30 avril dernier. Devant ses confrères réunis en vue du futur conclave, il a livré une intervention marquée par une profonde inquiétude quant à l’orientation prise par l’Église sous le pontificat du pape François, et plus encore, par le processus du Synode sur la synodalité.

    Malgré son âge avancé, ses problèmes de santé et une arrestation en 2022 pour soupçon de violation de la loi sur la sécurité nationale chinoise, le cardinal a estimé de son devoir de venir à Rome : « Grâce soient rendues au Seigneur », a-t-il déclaré en remerciant pour les dix jours de séjour qui lui ont été accordés.Dans un discours à la fois respectueux et direct, le cardinal Zen a d’abord rappelé ses bons souvenirs avec le pape François. Il a salué « son grand zèle pastoral » et son style de proximité, évoquant aussi des échanges chaleureux et teintés d’humour. Mais après ces souvenirs personnels, le ton change : « Je suis également venu participer aux Congrégations générales car l’Église est à un moment crucial de confusion et de division. »

    Selon lui, « une réforme est toujours nécessaire parce que nous sommes pécheurs », mais encore faut-il qu’elle ne détruise pas les fondements mêmes de l’Église : « Une réforme qui sape les éléments essentiels de l’Église fondée par Jésus, une, sainte, catholique et apostolique, n’est pas une vraie réforme. »

    Le cardinal Zen s’en prend ensuite à la dérive postconciliaire qu’il attribue à une mauvaise interprétation du Concile Vatican II, évoquant « le soi-disant ‘esprit du Concile’ » et citant Paul VI : « la fumée de Satan est entrée par les fissures de l’Église. » Il déplore une « tentative mal orientée de s’adapter à l’esprit du monde plutôt que de s’y opposer avec fermeté ».

    Il fustige notamment le Synode sur la synodalité, dont les dernières étapes, selon lui, dépassent largement le cadre fixé par la Constitution Episcopalis Communio. Il s’interroge ironiquement : « N’y avait-il pas suffisamment d’évêques pour présider un Synode des évêques ? » en référence au choix de confier la présidence à des prêtres et une religieuse. Il décrit les 61 facilitateurs nommés pour organiser les discussions comme « des enseignants de maternelle » et accuse certains membres influents du Synode d’être « identifiés comme réformateurs de la morale sexuelle ».

    Pour le cardinal Zen, les objectifs du Synode se sont déplacés : au lieu de « sauvegarder et promouvoir la foi, les mœurs et la discipline ecclésiastique », comme le demande le canon 342 du Code de droit canonique, il ne s’agirait plus que d’« évangéliser le monde d’aujourd’hui » — au risque, selon lui, d’oublier que « l’on ne peut être missionnaire sans rester l’Église authentique ».

    Enfin, il souligne que les procédures synodales elles-mêmes ont été altérées, réduisant les débats à des discussions de groupes linguistiques avec des votes sur des synthèses non publiées, remises ensuite au pape pour rédaction libre. Avec une fermeté paisible, le cardinal Zen a lancé un appel à ses frères cardinaux en vue du prochain conclave : « Une grave responsabilité repose désormais sur leurs épaules – pour nous donner un pape qui, avec l’aide de l’Esprit Saint, puisse nous ramener à l’harmonie et à la paix. »

    Le Pillar publie le texte de l'

    « Intervention à la Congrégation générale », Cardinal Joseph Zen (traduction "automatique")

    Notre doyen, dans sa lettre d'invitation, nous a rappelé que nous, cardinaux âgés, qui ne sommes pas électeurs, ne sommes pas obligés d'assister à ces sessions. Je suis un homme de 93 ans, en convalescence après une longue maladie bénigne qui m'a coûté dix kilos. J'ai été arrêté il y a trois ans pour suspicion de violation de la loi sur la sécurité nationale, mais j'ai rapidement été libéré sous caution. J'estimais qu'il était de mon devoir de venir. À l'époque, on m'avait délivré un passeport pour assister aux funérailles du pape Benoît XVI – seulement deux jours à Rome ; cette fois, on m'a accordé dix jours. Grâce au Seigneur.

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  • Le processus synodal est une menace très sérieuse pour l'Église

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    De Stefano Fontana sur la NBQ :

    Le processus synodal est une menace très sérieuse pour l'Église

    La synodalité est un processus qui modifie (protestantise) la structure de l’Église catholique, du rôle des évêques au Catéchisme, du rapport au monde au relativisme doctrinal. C’est le danger le plus grave car il s’agit d’une pratique et non d’une doctrine. Le vote au conclave devrait en tenir compte.
    05_05_2025

    Les enjeux sont très importants dans ce conclave. La preuve indirecte en est, entre autres, la pression compacte des médias du régime en faveur d'une « continuité » indiscutable avec François. L’enjeu est de taille car ce pontificat s’est orienté tout droit vers des changements radicaux et significatifs en matière de tradition doctrinale, disciplinaire et pastorale. Ces révolutions ne peuvent pas être cachées sous des attitudes qui ont trouvé grâce auprès du peuple, ni sous un phrasé existentiel et sentimental qui a parfois réchauffé les cœurs, ni à travers les expressions gestuelles de la soi-disant « simplicité » de François, « l’un de nous ».

    Ce pontificat a changé l’image de l’Église et de nombreux croyants sentent qu’en poursuivant sur cette voie, nous aurons une « nouvelle Église », qui se développe déjà aujourd’hui. Les deux « partis » sont encore une fois les mêmes que d’habitude. Mais ceux qui étaient dans l’opposition avec Jean-Paul II et Benoît XVI sont désormais au gouvernement. Les garanties d’étanchéité ont fortement diminué, les risques de voir la fuite s’agrandir et le navire dériver ont augmenté. La protestantisation de l’Église catholique, ou du moins l’anglicanisation, sont visibles à l’horizon et, en partie, sont déjà présentes parmi nous.

    Un deuxième aspect préoccupe les cœurs et les esprits et conduit beaucoup – je crois plus que par le passé – à prier pour les cardinaux électeurs. Les processus engagés et les nouveaux chemins déjà empruntés ne s’arrêteront pas, ils continueront par inertie, quel que soit le résultat du vote. Leur incubation doctrinale dure depuis des décennies et, au cours du récent pontificat, elles ont trouvé une promotion substantielle. Même si l’on corrige les nombreuses démarches inconsidérées – comme le demandent quelques cardinaux et évêques – et surtout si ces corrections ne sont dues qu’à des pactes électoraux entre groupes de cardinaux au conclave, la « nouvelle Église » continuera encore longtemps son chemin.

    La raison en est que durant le pontificat de François, même si les positions documentées par écrit et hautement contestables n'ont pas manqué (pensez à Amoris Laetitia), les changements se sont produits de manière comportementale, avec des paroles ambiguës et des gestes provocateurs. Ce sont surtout ces dernières qui ont causé la confusion, et non seulement les Exhortations apostoliques ou les Déclarations de la doctrine de la foi. La nouveauté était une façon d’être et de se positionner. Cette manière d’être et de se présenter va perdurer, et pas seulement en Allemagne, où elle est plus évidente qu’ailleurs.

    Les cardinaux ont reçu de nombreux conseils ces derniers jours. La Bussola a également porté à la connaissance de tous les fidèles, mais surtout d'eux, une analyse des graves problèmes ouverts par le pontificat de François et qui devront être résolus. On ne sait pas si cela se produira ou non, ni quand : l’Église a de longs délais d’anticipation.

    La composition du conclave ne semble cependant pas très propice à une écoute et une étude approfondie. Les cardinaux sont très nombreux, disons qu'ils sont trop nombreux pour qu'il y ait une véritable compréhension des besoins de l'Église. Étant donné les critères étranges de nomination des cardinaux utilisés ces dernières années, beaucoup d’entre eux n’ont pas eu l’occasion de se mettre à l’écoute des problèmes de l’Église universelle ainsi que de ceux de leur propre région, grande ou petite. De plus, le récent pontificat, très pastoral et plutôt négligé sur le plan doctrinal, a promu au cardinalat de nombreux évêques de la « rue », intéressés par de nouvelles attitudes inclusives plutôt que de prêter attention aux hérésies.

    Humainement parlant, il y a un grand danger, nous sommes à un point stratégique, continuer sur un chemin pourrait rendre impossible le retour en arrière, nous vivons des situations irréversibles. Négocier une extension de la possibilité de célébrer dans le Vetus Ordo ou une révision/clarification de Fiducia supplicans ne suffit pas. C’est pourquoi il est utile de clarifier quel est le sujet fondamentalement important sur lequel tous les cardinaux devraient se concentrer. Quel est le problème central qui, s’il reste tel quel, représentera un dommage certain et général ? À notre avis, c’est la synodalité.

    Le processus synodal est le plus dangereux car il s’agit d’une pratique et non d’une doctrine, même s’il cache une doctrine. La pratique synodale peut changer la physionomie de l’Église en peu de temps. Elle peut détruire sa structure hiérarchique, elle peut faire en sorte que les laïcs guident les évêques ; elle peut donner une cohérence théologique à l’assembléisme ; elle peut confondre le « peuple de Dieu » avec un groupe de pression sociologique ; elle peut décomposer l’unité universelle en diverses composantes régionales ; elle peut s'assurer qu'ici on est béni et là on ne l'est pas, qu'ici un comportement est permis et là inadmissible ; que la liturgie devient la proie des cultures locales ; que les conférences épiscopales légifèrent différemment dans le domaine doctrinal ; que les besoins du moment prévalent sur les besoins éternels ; que la démocratie libérale entre dans l’Église ; que l’auto-convocation par la base devienne la règle ; qu’il y a une pulvérisation des « communautés de base » ; qu'il n'existe plus de Catéchisme mais seulement des catéchismes ; que l’écoute précède les exigences de la vérité ; que tout est en fin de compte interprétation ; que la papauté n’est pas l’autorité finale en matière de doctrine ; que les questions et les doutes sont fondamentaux parce qu’ils favorisent la discussion synodale, tandis que les réponses sont comme des pierres jetées aux autres ; que le jugement doit toujours être fait dans son contexte et jamais en termes absolus ; que l’important est de décider ensemble et de manière partagée et non pas que ce qui est décidé soit vrai et bon ; que tout et tous sont admissibles dans l'Église, mais pas ceux qui soutiennent que tout ne peut pas être admis.

    C'est le plus grand danger. La synodalité est comme un infiltré qui, sous couverture, joue le jeu de l’ennemi.   

  • Comment l'Allemagne et la Chine tentent d'influencer le conclave

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    De Jonathan Liedl sur le NCR :

    Influences extérieures : comment l'Allemagne et la Chine tentent d'influencer le conclave

    ANALYSE : Les dernières initiatives de la Voie synodale et du Parti communiste chinois visent clairement à influencer ce qui se passe à l’intérieur de la chapelle Sixtine, mais pourraient-elles se retourner contre eux ?

    Tiré d'un mot italien signifiant « salle close », un conclave est littéralement isolé du monde extérieur. Mais cela ne signifie pas que les événements qui se déroulent au-delà de la chapelle Sixtine ne préoccupent pas les cardinaux électeurs alors qu'ils entament leur période de séquestration.

    Deux questions seront probablement à l'esprit des 133 électeurs pontificaux lorsque le conclave commencera le 7 mai : la bénédiction des couples homosexuels allemands et l'accord Vatican-Chine. 

    Ce n'est pas un hasard. C'est plutôt le résultat de deux événements récents survenus hors de Rome, qui devraient sans aucun doute influencer les discussions en cours au Vatican, ainsi que les votes qui auront lieu dans moins d'une semaine.

    Tout d'abord, le 23 avril, deux jours seulement après le décès du pape François, la Conférence épiscopale allemande a publié un guide pour les « cérémonies de bénédiction » des couples en « situation irrégulière », y compris les unions homosexuelles. Obtenir des bénédictions officielles pour les couples homosexuels est depuis longtemps un objectif de la campagne allemande très critiquée « Voie synodale », et cette dernière initiative va à l'encontre de la Fiducia Supplicans , les directives du Vatican de 2023 sur le sujet, qui n'autorisent que les bénédictions « spontanées » des personnes vivant une relation homosexuelle, et non la « légitimation du statut [du couple] ».

    Puis, malgré l'absence de pape pour ratifier les nominations épiscopales, les autorités chinoises ont « élu » deux nouveaux évêques le 28 avril, dont un dans un diocèse déjà dirigé par un évêque reconnu par le Vatican. Cette décision est la dernière d'une série de résultats douteux depuis la signature par le Vatican, en 2018, d'un accord visant à engager un processus conjoint avec le gouvernement chinois sur les nominations épiscopales. Cet accord, dont le Vatican a reconnu les violations répétées, a néanmoins été renouvelé en 2024.

    À ce stade du processus de sélection du prochain pape, il est difficile d’imaginer que l’un ou l’autre de ces événements se soit produit sans que les responsables aient eu l’intention d’influencer le conclave. 

    L' interrègne – qui signifie « entre les règnes » en latin – est une période où une grande partie de la vie institutionnelle de l'Église est paralysée. Les chefs des dicastères du Vatican cessent leurs fonctions, les processus de canonisation sont suspendus et la nomination de nouveaux diplomates pontificaux est temporairement interrompue. Tout mouvement durant cette période n'est pas accidentel : il revêt une importance accrue et est destiné à avoir un impact.

    En fait, la période entre la mort du pape et le début de la séquestration est souvent marquée par des efforts intenses pour influencer les électeurs pontificaux — que ce soit par des campagnes médiatiques ou des provocations comme celles venant d’Allemagne et de Chine.

    Et ce n’est pas sans raison : il existe de bonnes preuves que les événements qui se déroulent dans les jours précédant un conclave peuvent influencer qui en sortira vêtu de blanc. 

    Par exemple, en 2013, il était largement admis que les perspectives papales du cardinal Angelo Scola avaient été compromises après que la police italienne eut perquisitionné les bureaux de son archidiocèse dans le cadre d'une enquête pour corruption impliquant l'un des anciens associés du cardinal milanais - quelques heures seulement avant le début du conclave le 12 mars. Et en 1914, le conclave papal a commencé trois jours seulement après le déclenchement de la Première Guerre mondiale, ce qui a peut-être influencé les cardinaux à choisir le diplomate expérimenté, le cardinal Giacomo della Chiesa, qui est devenu le pape Benoît XV.

    En fait, la possibilité que les cardinaux électeurs soient trop influencés par les événements et les campagnes de pression précédant le conclave a conduit certains à suggérer qu’ils devraient être séquestrés immédiatement après la mort d’un pape.

    En Allemagne, le message adressé aux cardinaux électeurs semble clair : la voie synodale ne ralentit pas, et ils feraient bien d'élire un pontife prêt à « rencontrer les Allemands là où ils se trouvent » — ce qui dépasse de plus en plus le cadre de l'orthodoxie catholique.

    Concernant la Chine, cette démarche pourrait viser à consolider son emprise sur l'accord avec le Vatican, rendant tout revirement trop risqué pour les catholiques chinois. Parallèlement, un analyste considère la tentative de la Chine de susciter le mécontentement des cardinaux à propos de l'accord comme une manœuvre stratégique visant à saper les perspectives papales de l'homme le plus associé à cet accord, le secrétaire d'État du pape François, le cardinal Pietro Parolin, afin de promouvoir le cardinal philippin Luis Antonio Tagle.

    Si cela est vrai, la Chine n'est pas la seule à tenter de saper la réputation du cardinal Parolin juste avant le conclave. Le prélat italien a fait l'objet de plusieurs critiques négatives dans les médias cette semaine, notamment de la part de deux médias catholiques progressistes américains.

    Quant aux actions menées par l’Allemagne et la Chine, elles peuvent toutes deux être considérées comme des tentatives de coincer les cardinaux électeurs et l’homme qu’ils choisiront comme prochain pontife.

    Bien sûr, ils pourraient avoir l'effet inverse. Ce genre de rodomontade ecclésiastique pourrait inciter les cardinaux électeurs à privilégier un pape plus disposé que François à affronter l'intransigeance allemande et les intimidations chinoises.

    François valorisait le dialogue avec les militants de la Voie synodale et les apparatchiks du Parti communiste chinois, convaincu que des avancées ne peuvent se produire que si l'on poursuit le dialogue. Mais à la suite de ces derniers développements, les cardinaux peuvent désormais plus facilement affirmer que cette approche n'a pas porté les fruits escomptés. Une nouvelle ligne de conduite, peut-être moins encline à accepter les ruptures d'accords ou le franchissement de lignes rouges, pourrait être privilégiée par les électeurs, ce qui, ironiquement, conduirait à l'exact opposé de ce que les dirigeants de l'Église allemande et les responsables chinois auraient pu espérer.

    Bien sûr, c’est peut-être une telle confrontation que la Chine – si ce n’est les évêques allemands – recherche en fin de compte.

    Mais si les motivations et leur impact réel restent flous, les remaniements du siège vacant en Allemagne et en Chine sont sans aucun doute destinés à influencer le conclave. Et à mesure que les 133 électeurs s'éloignent de plus en plus, il faut s'attendre à ce que les efforts visant à influencer les points de vue qu'ils apportent avec eux à la Chapelle Sixtine s'intensifient.